« crier au loup » – a propos de l’expulsion de tolbiac
Publié le , Mis à jour le
Catégorie : Global
Thèmes : Luttes étudiantes/lycéennesMouvement
Dans ce contexte, toutes les contestations sont réprimées. Mouvements étudiants, manifestations unitaires, occupants de la ZAD, syndicalistes, lycéens … Chaque mobilisation se heurte à des déploiements policiers démesurés. Depuis le 9 avril, nous avons recensé plus de 300 personnes blessées à Nantes et Notre-Dame-des-Landes. Ce ne sont pas des chiffres lancés au hasard, ni des rumeurs ou des exagérations. Ce décompte est sourcé, documenté, confirmé par des témoignages sérieux et concordants, et parfois des images. Parmi ces blessés, plusieurs ont été gravement atteints au visage, notamment par des grenades et des balles en caoutchouc. Certains en garderont des séquelles lourdes.
Vendredi 20 avril, l’université de Tolbiac, mobilisée, comme des dizaines d’autres en France, était expulsée par la police au petit matin par des CRS. Très vite, une rumeur court, enfle, se propage depuis Paris : une personne aurait été gravement blessée, et serait dans le coma. Un article du site Reporterre confirme l’information. Le journal Politis également. Les réseaux militants la reprennent aussi. Trois témoins directs de la scène donnent, apparemment, des versions concordantes. Une militante proche de la France Insoumise témoigne face caméra, pour corroborer également ce qui semble être un cas grave de violence policière. Plusieurs jours après, il semble que cette affaire ait été inventée de toutes pièces.
Nous avons préféré faire confiance à ces militants parisiens présents sur place plutôt qu’à la Préfecture de Paris. Cette fois ci, c’était une erreur. Si nous avons relayé cette information, c’est parce que nous avons assisté de nos propres yeux, plusieurs fois, aux comportements brutaux de la police. Nous avons vu la BAC jeter des grenades de désencerclement à hauteur de tête. Des policiers viser en tir tendu. Des CRS matraquer au sol. Des visages ensanglantés. C’est aussi parce qu’à Nantes, nous sommes des dizaines à avoir été marqués dans nos chairs par la répression. Soyons clairs : celles et ceux qui ont menti ont fait du mal. Beaucoup de mal.
Ces personnes discréditent par avance ceux qui dénoncent des violences policières bien réelles. Elles discréditent les blessé-e-s d’hier, d’aujourd’hui et de demain.
Ces personnes portent un tort terrible aux nombreux collectifs qui tentent de se faire entendre contre vents et marées, depuis des années, sur la question de la répression, et qui sont déjà largement disqualifiés par les médias.
Ces personnes portent un tort à celles et ceux qui, blessés, hésiteront encore plus à témoigner, à se faire connaître, et à se défendre, de peur d’être traités de menteurs.
Nous sommes en colère. En colère parce que les violences d’État sont déjà quotidiennes, et qu’il n’y a certainement pas besoin d’affabulations sur le sujet.
Nous avons besoin de rigueur, de sérieux, et de solidarité concrète.
source : facedebook
Un autre texte sur le même sujet, un peu trop donneur de leçons sur la fin, mais pas inintéressant:
https://mouvanarev.wordpress.com/2018/04/26/breve-avec-des-amis-pareils-pas-besoin-dennemis-a-propos-du-blesse-de-tolbiac/
– Avec des « amis » pareils, pas besoin d’ennemis – A propos du « blessé de Tolbiac »
M.A.R / 26 avril 2018
Nous ressentons de la colère. Beaucoup de colère. Froide. Quel est le
plus lamentable ? L’incapacité de la dénommée Leila,
étudiante-de-Tolbiac-ayant-participé-à-l’occupation et proche de la
France Insoumise (FI), de reconnaître son mensonge (car c’en est un) ?
La défense à tout prix de l’inconséquence politique de la militante par
ses « supporters », sans autre objectif, semble-t-il, que de lui sauver
la face à titre individuel ? Le refus généralisé dans le milieu militant
(1) d’admettre la bêtise et la dangerosité d’une telle absence de
responsabilité politique chez ces différents acteurs ? Pendant ce temps,
on ne se préoccupe même plus de l’existence réelle ou fantasmée d’un
blessé grave… Il est temps de mettre fin à la lamentable « Affaire du
blessé de Tolbiac » !
Reprenons les choses :
– évacuation policière de Tolbiac ;
– rumeur d’un blessé grave « entre la vie et la mort » mettant
directement en cause la BAC, relayée par Reporterre se basant notamment
– nous le saurons plus tard – sur le témoignage de Leila, celle-ci ayant
également été interviewée par Le Media (FI). Dans cette vidéo, elle
raconte de façon très détaillée et sans approximation ce qui relève d’un
témoignage oculaire direct : « tête explosée », « flaque de sang », «
CRS qui nous repoussent » (pour empêcher d’accéder au blessé), « camions
de pompiers »… (récit assorti de termes propres au diagnostic médical :
« hémorragie interne », « coma profond ») ;
– tous les réseaux se mettent en branle ; tension politique qui monte :
les premières manifs s’organisent – car, il est logique qu’on fasse
spontanément plus confiance en la parole militante que policière ;
– après plusieurs jours pendant lesquels différentes autorités nient
toute éventualité d’une personne dans le coma, se posent de sérieuses
questions sur les implications d’un tel mensonge d’Etat s’il était
avéré. Chacun enquête et s’interroge : l’article de Marseille Infos
Autonomes (2) et celui autocritique de Paris Luttes Info (3) remettent
rigoureusement les points sur les i et exposent toutes les hypothèses et
finalités d’une telle situation ;
– au final : Leila reconnaît n’avoir rien vu, donc avoir menti (soyons
clair), se réfugiant derrière deux « vrais » témoins fantômes – ceux-là
qui ont également été interrogés par Reporterre mais ne se sont plus
manifestés depuis. Au lieu de s’excuser de s’être un peu emballée, elle
se débat dans l’argumentaire vaseux du « oui mais non » ;
– comme si cela ne suffisait pas, de nombreux groupes et réseaux
soutiennent la position indéfendable de Leila.
Parce que la mort d’homme sous le coup de la répression policière dans
un mouvement social est évidemment quelque chose de particulièrement
grave, cristallisant logiquement toutes les tensions politiques, parler
de mensonge d’Etat peut sembler à propos, d’autant que la situation
décrite est vraisemblable : que ce soit dans les zad ou dans les
quartiers, dans les facs ou devant les lycées, la police tue et mutile.
Dès lors, à qui s’adresse Leila lorsqu’elle invente son histoire ? Au
mouvement social ? A son propre individualisme dénué de toute
responsabilité et malmené par la répression ? Au spectacle médiatique ?
Aux mélenchonistes et à leur « radicalité » en carton ? Dans tous les
cas, où sont la rigueur et la responsabilité ? Il s’agit de poser les
bonnes questions : quel est l’enjeu de tout cela, les conséquences ?
Comment en arrive-t-on à de telles situations au mieux grotesques, au
pire effarantes ? Car cette situation est politiquement désastreuse, et
on pouvait s’en passer.
L’inconséquence politique de Leila rejaillit sur tout le mouvement, à
commencer par les auto-médias (Paris Lutte Infos et autres indymedias) ;
mais aussi et surtout, il s’agit là d’une véritable insulte à toutes
celles et tous ceux qui prennent vraiment cher du fait de la police.
Sans se placer dans le cadre de la recherche de la légitimité, une telle
idiotie revient à donner le bâton à ceux qui font déjà leur possible
pour camoufler la réalité de la brutalité policière et décrédibiliser
les mouvements sociaux ainsi que leurs outils de lutte (manifestations,
occupations, blocages, etc.) en leur permettant de tirer le constat que
les « fake news » ne sont plus seulement réservés aux fafs, mais
désormais également à la « gauche [dite] radicale ».
Pour résumer : dans ces moments-là, tout discours individuel porte de
fait une responsabilité collective. Nier cette évidence ne peut que
précipiter le désastre.
Il semble que cette polémique soit le point d’apothéose autant que le
reflet de la pauvreté politique du « mouvement étudiant » du printemps
2018. Entre l’autoritarisme identitaire des particularistes qui dominent
les débats, les dépolitisant et les décontextualisant au maximum parce
que pris au piège de la valorisation capitaliste ciblant les «
catégories sociales » ; et la suffisance des jeunes néo-appellistes qui
se perdent dans le-blocage-pour-le-blocage sans aucune perspective ;
entre l’hyper-formalisme ineffectif «
anti-sexiste/anti-raciste/anti-spéciste/anti-validiste/… » ; et
l’esthétique black bloc censée à elle-seule garantir la radicalité du
conflit ; nous voilà au pied du mur, coincés par l’absence même de toute
intelligence stratégique de lutte au profit, encore et toujours, de la
forme vide de contenu. Le « radicalisme » se fait alors marchandise et
la spectacularisation de la militance qui en découle va de pair avec
l’hyperbolisation de toute conflictualité (on casse une vitre, c’est
l’émeute ; on casse dix vitres c’est l’insurrection) et la désagrégation
finale de ce qui pouvait persister de politique. Ces tendances hélas
majoritaires ne peuvent dès lors être ce qu’elles prétendent : des
alternatives sérieuses et réelles aux pratiques sclérosantes des
léninistes arqueboutés sur leur(s) idéologie(s) ruineuse(s).
Il est temps de changer de cap.
Notes:
(1) Nous relayons l’article salutaire de Nantes Révoltées intitulé «
Crier au loup » qui fait à notre connaissance partie des rares
exceptions :
https://www.facebook.com/Nantes.Revoltee/photos/pb.294803323889181.-2207520000.1524743474./1670945972941569/?type=3&theater
(2) https://mars-infos.org/disparu-de-tolbiac-l-etat-3049
(3) https://paris-luttes.info/aucun-blesse-une-personne-dans-le-10058
D’un coté pas de chef, pas de décideur, la démocratie horizontale, l’auto gestion, l’auto détermination, et de l’autre les abus que ça génèrent.
C’est la que l’on voit les limites !
En l’occurrence ce sont les petit-e-s chef-fe-s du mouvement de Tolbiac, apparentées à l’UNEF et la France Insoumise, qui ont lancé cette affaire et l’ont propagée grâce à leurs réseaux.
Ha mais oui, mais c’est bien sur, c’est forcément de la faute des autres.
Et ne pas réfléchir en propageant une fake news sans vérifier, c’est la faute à qui ? Aux autres aussi ?
Parce que les chefs, les décideurs, bla bla bla, sont, eux, un frein à la propagation des fake news ? C’est vrai qu’il est de notoriété publique que quand un groupement politique se forme, il n’est pas dans ses habitudes d’user du mensonge pour s’établir et se maintenir. Encore un fantasme d’anarchiste ça.
Je vais demander au comité d’hygiène mentale qu’on te retire le droit d’utiliser un clavier, tu n’as visiblement rien d’intéressant à en faire.
En plus faut vraiment être con pour penser qu’il n’y a pas de chefs dans des assemblées étudiantes.
La rumeur de Tolbiac ? Le succès des rumeurs vient toujours de leur profonde adéquation avec un sentiment collectif.
Nous avons peur. Depuis longtemps maintenant.
J’ai peur, tout le temps, en manifestation. Peur depuis ces traces de sang, par dizaines, sur le sol du parcours d’une manifestation pendant le mouvement contre la loi Travail. Peur depuis cette scène , trois mômes de seize ans, si frêles, au sol, menottés, à qui des policiers donnaient négligemment des coups de pieds tout en leur promettant le pire pour les jours à venir. Leur visage décomposé, leur pâleur, et leur terreur. Et la mienne.
J’ai peur depuis ce moment où nous étions collés à un mur de CRS, écrasés par la foule qui refluait devant les grenades lacrymogènes, haletant et étouffant dans le brouillard. Ce brouillard d’où émergeaient les cris d’une dame âgée qui suppliait un jeune CRS de la laisser passer. Et la peur inscrite sur le visage décomposé du jeune CRS, sa pâleur et sa terreur de ce qu’il était en train de faire, du moment où peut-être la dame âgée allait tomber à ses pieds pour ne plus se relever.
J’ai peur tout le temps en rentrant de manifestation. Du » Bien fait » asséné sur les réseaux sociaux, de ces appels à taper plus fort sur les « casseurs », les » radicaux », les « petits bourges qui se refont leur mai 68″. J’ai peur de cette indifférence glaciale à la mort de Clément Méric et de Rémi Fraisse, peur de Serge Ayoub le soir sur ITélé, le jour de l’assassinat d’un camarade antifasciste, peur du » Qu’est ce qu’il foutait là », craché sur le corps encore chaud de Rémi Fraisse, par tant et tant de gens qui furent de gauche.
J’ai peur de vous bien plus que de la police, de vos mots qui leur ordonnent les coups.
J’ai peur de vos commentaires cyniques sur nos prétendus calculs, » ils veulent leur Malik Oussekine pour se victimiser ».
Mais braves gens, j’ai peur parce que je sais que vous ne seriez pas dans la rue si Malik Oussekine tombait aujourd’hui. Mais ici sur les réseaux sociaux à trouver des raisons .
La rumeur de Tolbiac ? Elle est cette peur dont vous êtes responsables, elle est la peur de l’Ordre qui nous condamne, de vos coups de pantoufles hypocrites qui frappent plus fort que les bottes, au coeur et à l’âme.
Irrationnelle, en partie, oui. Mais moins que votre haine du mouvement social qui se pare de défense de la démocratie.
source : https://www.facebook.com/nad.iam.7/posts/1664528666963946