Les vœux de l’ujfp pour 2019
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Catégorie : Global
Thèmes : AntifascismeGuerreImmigration/sans-papierEs/frontieresMédiasRacismeRépression
En effet l’heure est grave. Une vague de nationalisme ethnique et fascisant balaye le globe en (fausse) réponse aux ravages sociaux du néolibéralisme.
Dans de plus en plus de pays à travers le monde (dont trois des cinq pays les plus peuplés de la planète), des chefs d’état ultranationalistes, xénophobes, agitateurs et démagogues sont arrivés au pouvoir par la voie des urnes : États-Unis, Brésil, Inde, Philippines, Hongrie, Pologne, République Tchèque, Serbie, sans oublier Israël — et que dire de la Turquie et de la Russie ? [1]
L’extrême droite partage le pouvoir en Italie, en Autriche, en Bulgarie, en Finlande, en Slovaquie. Elle est entrée au parlement allemand pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale.
En Israël, on assiste à une fascisation effrayante du discours politique et une alliance avec ces mêmes forces régressives à travers le monde — y compris avec les héritiers des forces antisémites qui ont collaboré avec les Nazis pendant le judéocide et leurs disciples.
La complicité de la diplomatie française avec cette politique faite de racisme et de crimes de guerre est une honte absolue ; notamment en 2018, le gouvernement français n’a pas daigné prononcer un mot sur l’emprisonnement sans motifs du citoyen français Salah Hamouri et est resté de marbre devant les tueries de l’armée israélienne à la frontière de Gaza.
Même si la colonisation israélienne de la Palestine progresse sans relâche depuis plus d’un demi-siècle, sous des gouvernements de droite comme de gauche, jamais encore il n’y a eu une telle libération de la parole raciste et de l’idéologie de la suprématie juive sur la région (qui a aboutinotamment à la loi sur l’État-nation du peuple juif). Le massacre de civils palestiniens lors des marches du retour ne semble même plus requérir, de la part du gouvernement israélien, de justification, comme il y en avait eu encore pendant les bombardements de Gaza en 2014.
En France, si l’extrême droite — arrivée au second tour des présidentielles pour la seconde fois — n’est pas arrivée au pouvoir, rien ne nous en nous protège dans l’avenir proche. Les soulèvements populaires auxquels nous assistons — et, pour certains, participons — n’ont pas de couleur politique affichée, et la frustration prévisible de la population face au gouvernement actuel est malheureusement un terreau fertile pour la poussée de mouvements autoritaires, qui prônent le refus de l’autre et son exclusion.
Ceci alors que le discours raciste en France est de plus en plus légitimé. Un sociologue britannique parle de la « montée d’un racisme respectable en France » dans un livre intitulé République de l’Islamophobie. Les migrants, noirs avant tout, se trouvent confrontés à des traitements inhumainsde la part des institutions étatiques et/ou avec la bénédiction de celles-ci. La France n’a en effet jamais fait le travail de fond nécessaire à une confrontation critique avec son passé esclavagiste et colonial.
Pour notre solidarité avec les palestiniens, l’UJFP a été attaquée par un organisme de lobbying affilié au gouvernement israélien (et spécialisé dans la diffamation des organisations humanitaires israéliennes et de solidarité avec la Palestine) [2] ainsi que par des agents de think-tanks néoconservateurs américains, relayés par la presse d’extrême droite française. Leurs agissements ont réussi à convaincre l’entreprise PayPal de fermer notre compte en ligne et ont motivé des agences gouvernementales françaises à mettre en question la subvention que nous avons reçue pour nos clips vidéo — dans lesquels nous relatons notre combat antiraciste et universaliste — et de faire interdire à Dominique Natanson, membre de l’UJFP qui apparaît dans les clips, une intervention d’éducation à l’antiracisme dans un lycée.
Ces attaques prouvent l’importance et l’utilité de notre combat. Dans le contexte actuel de fascisation du monde, de montée du racisme et du traitement inhumain des migrants en France et en Europe, de l’accentuation de la répression et de l’exclusion en Israël-Palestine, notre combat pour un antiracisme universel et l’égalité des droits de tous les êtres humains ici et là-bas est d’une importance capitale. L’un de nos outils de combat est la campagne BDS, dont le boycott de l’Eurovision prévue — voire la prévention de sa tenue — en Israël, pour lutter contre l’apartheid déplorable qui s’y amplifie.
Nous vous souhaitons le meilleur pour cette nouvelle année 2019. La nuit précédant toujours l’aurore (malheureusement la situation actuelle ressemble davantage au crépuscule qu’à l’aube), l’UJFP participera à la lutte pour le vivre ensemble, l’égalité des droits, la justice et l’émancipation de tou.te.s, pour que cette période obscure puisse déboucher sur une nouvelle avancée de l’humanisme et de la justice. À cet égard notre combat n’en est que plus essentiel !
Quel intérêt ?
Nos amis de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) s’indignent à très juste titre de la réception par les plus hautes personnalités françaises d’Andriy Parubly, président du Parlement ukrainien et dirigeant du parti « Svoboda ». Ce parti, qui glorifie la collaboration avec l’Allemagne nazie, est l’héritier de ceux qui ont servi de guides et d’exécutants dans l’extermination des Juifs ukrainiens.
La présence de partis antisémites au pouvoir en Europe centrale et orientale augmente de manière inquiétante depuis quelques années.
Dans les pays Baltes, on célèbre régulièrement la résistance nationale face à l’invasion soviétique de 1940, après le pacte germano-soviétique. Mais on a choisi d’oublier que, dans cette résistance, il y a eu d’authentiques criminels de guerre qui ont servi d’auxiliaires aux Einsatzgruppens. C’est ainsi que 2 000 vétérans lettons de la Waffen SS ont défilé à Riga le 16 mars 2014.
En Pologne, la radio antisémite Mariya a fortement contribué à l’accession au pouvoir du parti « Droit et Justice » des frères Kaczynski. La Pologne vient de voter une loi négationniste qui punit quiconque rappelle une vérité historique avérée, à savoir que certains Polonais ont collaboré à l’extermination des Juifs.
Tous ces partis ont en commun de soutenir sans réserve Israël dans sa guerre contre le peuple palestinien. Au Parlement européen, ils ont voté sans restriction la définition sioniste de l’antisémitisme, celle qui considère que critiquer Israël est antisémite [1].
Y a-t-il une contradiction ? Non. Les Juifs ont été longtemps des « parias » en Europe (pour reprendre les termes d’Hannah Arendt) considérés comme des Asiatiques inassimilables. En Israël, ils deviennent des colons européens en Asie.
Le sionisme, dès son apparition, a tout fait pour qu’un maximum de Juifs quittent l’Europe. Du ministre pogromiste Plehve en Russie (1903) à Lord Balfour (1917), les antisémites ont apprécié et soutenu cette entreprise.
Un des cas les plus emblématiques aujourd’hui est celui de la Hongrie de Viktor Orban. Celui-ci a entrepris la réhabilitation du régime du Maréchal Horthy, régime pronazi qui a activement collaboré à l’extermination des Juifs hongrois. Le gouvernement hongrois a entrepris une campagne antisémite contre Georges Soros, juif états-unien d’origine hongroise. En visite à Budapest le 18 juillet 2017, Nétanyahou a félicité Orban en qualifiant Soros « d’ennemi d’Israël ».
En Europe occidentale, tous les dirigeants d’extrême droite ont fait la visite en Israël à l’invitation de Lieberman : l’Autrichien Strache, le Néerlandais Wilders, le Flamand Dewinter. Marine Le Pen n’a pas encore fait le voyage, mais son compagnon, le député Louis Aliot, a visité en décembre 2011 les colonies de Shilo et Eli qu’il décrit comme des villages de Judée-Samarie.
Le journaliste israélien Gideon Lévy a écrit le 20 novembre 2016 dans le journal Ha’aretz, juste avant l’investiture de Trump : « Tout à coup, il n’est plus si horrible d’être antisémite. Soudain, il est devenu excusable de haïr les musulmans et les Arabes à condition « d’aimer Israël ». Les droites juive et israélienne ont décrété une large amnistie aux amants antisémites d’Israël. Et ce sont ces derniers qui vont bientôt exercer le pouvoir à Washington. »
Il pensait à Steve Bannon qui a été le premier conseiller de Trump. Le discours de Gideon Lévy s’applique à l’ensemble des Chrétiens sionistes. Pour ces évangélistes (et le vice-président Mike Pence en fait partie), les Juifs doivent retourner en terre sainte pour favoriser le retour du Christ, chasser le mal, Armageddon, c’est-à-dire les Arabes, les musulmans, puis se convertir à la « vraie foi » sous peine de disparition. Ces antisémites ont donné des milliards de dollars pour financer la colonisation.
Il y a plus d’un siècle, les antisémites ont aimé le sionisme, prêts à l’aider pour faire partir les Juifs d’Europe. Ils l’aiment toujours.
L’UJFP dénonce vigoureusement ces alliances du gouvernement israélien avec l’extrême-droite européenne, qui ne peuvent que conduire à une explosion de violence tant en Europe qu’au Moyen-Orient.
Bureau national de l’UJFP
Le vernis démocratique du régime sioniste n’en finit plus de craquer. Les droits des Palestinien-ne-s d’Israël sont, une fois de plus, sacrifiés au nom de la défense de la majorité juive et de ses privilèges. En manipulant savamment la psychose qui hystérise tous les États racistes et colonialistes – la perte du contrôle qu’engendrerait une égalité pleine et entière –, les élites politiques sionistes ont enfanté un monstre : le projet de loi « État-nation », porté par la ministre de la justice Ayelet Shaked.
La ministre, qui appelait il n’y pas si longtemps au génocide des Palestinien-ne-s et avec laquelle Manuel Valls posait si fièrement, n’y est pas allée par quatre chemins : « Le caractère juif de l’État d’Israël doit être maintenu, quitte à ce que ce soit au détriment de l’égalité (…) Israël est un État juif, ce n’est pas l’État de toutes ses nations ». Les mots sont lâchés. Les Palestinien-ne-s d’Israël, 20% de la population du pays, doivent embrasser le caractère juif de l’État – et donc leur condition de citoyen de seconde zone – ou partir.
Le processus de dépossession des Palestinien-ne-s n’est pas nouveau. Il est indissociable de la création de l’État d’Israël, en mai 1948, qui déboucha sur l’exil forcé de 750 000 Palestinien-ne-s (la Nakba), l’instauration d’un régime militaire régissant les moindres faits et gestes de celles et ceux qui purent rester sur leur terre jusqu’en 1966. Suivra un système sophistiqué de discriminations pénalisant notamment leur accès au travail, au logement et la gestion de leurs terres, ainsi que le nettoyage ethnique des communautés bédouines du Neguev/Naqab – le tout ponctué de régulières et sanglantes vagues de répression (Kafr Kassen en 1956 et la Journée de la terre en 1976 notamment).
En faisant d’Israël « le foyer national du peuple juif » et non pas l’État de tous ses citoyen-ne-s, le projet de loi va encore plus loin, enterrant tout faux semblant quant à sa nature soi-disant démocratique. Il constitutionnalise, renforce et verrouille les politiques d’apartheid inhérentes au projet sioniste, ouvrant la voie à la possibilité d’un nouveau chapitre de la dépossession : celle des droits politiques des Palestinien-ne-s d’Israël. Car s’ils disposent encore du droit de vote en tant que citoyens de nationalité « arabe », qu’en sera-t-il demain dans un État encore plus « nationalement » juif ?
Nous, à l’UJFP, ne considérerons jamais l’État d’Israël comme le foyer national du peuple juif, précisément parce que notre boussole politique reste, aujourd’hui plus que jamais, celle de l’égalité civique et politique, ici comme là-bas. Ce projet de loi pousse encore plus loin la conviction ancienne que les antisémites partagent avec les sionistes : les Juifs seraient des étrangers dans leur propre pays et devraient tout quitter pour s’installer en Israël/Palestine. Il favorise ainsi l’antisémitisme et les met volontairement en danger. A celles et ceux qui céderont au chant des sirènes nationalistes et à son narcissisme identitaire, nous ne pouvons que rappeler qu’ils sont les tartuffes d’un régime qui, tout en confisquant toujours un peu plus les identités juives en les assimilant au sionisme, noue des relations étroites avec les extrêmes-droites européennes et les mouvements suprématistes blancs aux États-Unis.