Témoignage anonyme de ce Week End complètement fou à Ste So. J’avais besoin de faire long, à la fois pour évacuer, mais aussi pour montrer que la mobilisation, ça n’était pas que le samedi, qu’elle a aussi eut de grandes réussites. La deuxième partie de Samedi comporte un récit de violences policières choquant, il y a un TW.

Jeudi 23 Mars

Jeudi midi : Départ pour Melle.

Je suis partis Jeudi vers 14h d’une ville de l’Ouest, le pic-nique préparé dans le sac.
Le hasard fait que sur le chemin du point de stop, je passe par le centre-ville, d’où je sens la lacrymogène de la manif, qui remonte lentement la rivière sur plus de 400m.
Je souris, partout la France crame, le peuple est debout face à ses oppresseurs. La Police Nationale fait du zèle, loin de la manifestation, elle passe à toute berzingue, fourgon ouvert, prête à embarquer du manifestant. Un peu la flip vu ce que j’ai dans mon sac lorsqu’elle passe devant moi. Une minute plus tôt j’écrivais un ACAB pour la forme sur un panneau au marqueur. Timing heureux =).
Les slogans n’étaient pas encore effacés, j’ai regretté le téléphone pour de chouettes photos.
Rapidement prit en Stop, le WE s’annonçait bien.

Jeudi soir : Arrivée à Melle =)

Sur une petite aire en chemin, des gens proches de l’organisation du Festival de l’Eau et de Bassine Non Merci me prennent en stop. Iels vont non loin de Melle, je leur demande si iels sont au courant du WE qui arrive, s’ensuit de chouettes conversations =). Après de nombreuses bornes, iels m’invitent même à l’apéro avec un autre camarade de lutte du coin.
Iels me racontent un peu leur histoire avec les bassines, la préparation du festival, Octobre dernier, le harcèlement policier – hélicoptères, contrôles permanents, les VP (violences policières), etc…
Très gentils, iels m’emmènent jusqu’au camping de Melle en me faisant éviter de nombreux barrages policiers. Finalement, nous passons devant l’un-deux : mais les flics sont sous l’eau du flux de camions aménagés et voitures shlags qu’ils préfèrent fouiller au délit de faciès (apparamment la voiture de gauchos, ça se reconnait).
On fait mine de continuer notre chemin après le camping, et finalement je suis lâché : j’évite à pied le barrage.

Je suis surpris par le nombre de personnes déjà présentes sur place à Melle. Près de 200 personnes autour des barnums de la place des Halls de Melle, et au moins autant à vadrouiller dans la ville, entre les campings et la place. La cantine est folle : coeur sur l’intercantine des luttes : vous prouvez que l’auto-gestion, le prix libre, à grande échelle, ça marche. Votre folie heureuse est contagieuse. Je préfère garder le dwitch pour plus tard au cas où, et y mange leur cuisine vegét +++. J’ai bien fais vu la journée du lendemain :). J’assiste à l’AG bénévol et découvre concrètement l’orga de furieux derrière le festival. Truc de fou.
Plein de gens ont des tentes ou des places de rab, et sont solidaires : vous gérez :3. Je me couche rapidement.

Vendredi 24 Mars

Vendredi Matin : Déjouer la flicaille

Je me réveille au début du remu ménage, après une annonce au mégaphone, les gens commencent à partir doucement pour Vanzay, le lieu du campement de base pour Ste So. Et après un très frugal ti-dej (une tartine shlag sur le camping proposée par des gens), c’est le départ. L’hélico et les contrôles policiers sont partout.

Une voiture est chaude pour me prendre, avec un de ses occupants nous partons à pieds éviter le barrage du camping, et la voiture, après fouille, nous récupère, ainsi commencent les détours pour éviter les autres contrôles. Ses occupants ont tous une CI en cas de contrôle, mais c’est le pétard de la veille la raison de leur motivation à éviter les fouilles / contrôle, et non la stratégie d’évitement du fichage policier :/. Après quelques chemins de champs à peine tracés dans la boue, dans laquelle la voiture patine, on finit par arriver non loin du campement de base, plus qu’un barrage entre nous et lui, une seule route. On prend la pause, on cherche une solution. Je décide de partir à pied, après avoir raté de les convaincre de garer là leur voiture (le lieu était des plus indiqués ; ne gênant personne, sans être sur terrain privé). Avec une autre personne, nous passons à travers champs, au nez et à la barbe de la gendarmerie. J’apprend plus tard dans la journée que d’autres personnes ont fait la même chose que nous, se sont fait courser par les gendarmes (en quad ?) mais qu’un élan collectif venu du camps les a fait abandonner. Le style.
Du camping de Melle au campement de base, nous aurons mit plusieurs heures pour éviter tous les barrages. Les flics cherchaient surtout les « armes » (pour les sabotages, ils se sont vantés d’avoir trouvés des haches lol), pieds de biches, mortiers et feux d’artifices, banderoles… à 25 000 personnes ayant prévues des lunettes de piscines et des masques, ils ne peuvent plus tous les saisir.

Une fois arrivée, je découvre Barnums, toilettes, voitures de convois, de nombreuses tentes, difficile de croire que tout ce camps n’a quelques heures, qu’il a été monté dans le plus grand secret, à la barbe de la police… Je me masque rapidement, comme beaucoup de gens. Les plaques d’immatriculations sont scotchés ou pleines de boue. L’ambiance générale est clairement celle des ZaDs que j’ai pu brièvement faire. Je trouve une fois encore une tente à la shlag, que cette fois j’ai pour moi =) (je préfère pour le repos). Le camps se transforme malheureusement vite en gadoue. L’infokiosque est génial ! :3 je m’y régale. ça à l’air d’être la dèche pour le midi, alors je mange tranquilement le dwitch en stock.

Vendredi aprèm : La déter arrive

J’aide vite-fait où je peux, mais il n’y a pas grand chose à faire de plus ; les bénévols sont surtout utiles à Melle où alors il aurait fallu faire partie de l’orga en amont pour être dans les team logistiques. On sert ici globalement qu’à faire nombre, mais un mégaphone nous rappel que ça reste utile pour tenir le camps. C’est les convois du jour qui s’occuperont d’aller au rendez-vous de 15h de Lusignan. Apparamment les barrage ont retardés les tracteurs, mais les convois les ont fait passer !
Une première AG nous présente le camps et la situation. Au mégaphone : « la préfète en PLS« . S’ensuit un comité pour la réalisation d’un 4ème cortège partant d’un autre lieu, histoire de d’étaler le dispositif policier.
J’assiste à l’une des réunions de création de groupe affinitaire : étant venu seul, c’est vraiment très précieux.
La réunion a consisté, après une brêve présentation à un jeu très malin ; se placer dans une grille 2D sur les axes des prises de risques acceptées physiques et juridiques. On peut alors se mettre avec les personnes autours de soi pour faire plus ample connaissance et se mettre d’accord sur les risques physiques, rôles dans la manif, stratégies, et risques juridiques. Le fait qu’il soit répété que l’atelier n’ai aucun engagement est particulièrement précieux ; il a notamment permit à une personne de parler après, de dire qu’iel n’avait pas les mêmes envies/besoins que d’autres du groupe.

Peu après, au camps de base, un cortège se forme pour aller chercher les tracteurs, encore bloqués par la police à 2km du camps de base. L’AG du soir m’apprendra qu’entre quelques lacrymos vues de loin, l’envahissement des voix ferrés mettra en déroute le dispositif policier et permettra aux tracteurs de rejoindre la soirée.
Durant l’absence du cortège, les gens arrivent en masse de toute la France : le camps se remplis à vue d’oeil, on accueil les gens au mieux. Le camping devient si grand que certains perdent carrément leur tentes dans le labyrinthe. On pourrait carrément faire un autre cortège. Pendant ce temps, je participe à une petite réunion informelle des bénévols de RFS Riot Fight Sexisme, le protocole pour gérer les VSS sur le Week-End. Bon jus de pomme et chouette ambiance.
L’arrivée des tracteurs génère un enthousiasme très chouette dans le camps, avec le retour du cortège et l’arrivé de nombreuses personnes supplémentaires des convois, des paysans… On sent qu’on est très nombreux.
Vers 19h, fait faim, avec des gens on mange les restes du midi. Un espèce de rizoto végé. C’était bon, chaud, ça fait du bien. Le GA (Groupe Affinitaire) se donne rendez-vous le lendemain, et on vaque de nos côtés.
Vers 20h30 au barnum blanc, une seconde AG se forme, (presque) entièrement masquée, mais avec les grandes caméras-micro de l’AFP, l’ambiance était unique. La déter, la colère immense. A ce moment, le chiffre fou de 5 000 personnes au camps circule.
On apprend alors nos victoires : la tenue du camps qui n’était pas gagnée d’avance ; l’arrivée des tracteurs, ainsi que les arrêtés préfectoraux, autorisant le rassemblement à 300m près. Des chants ponctuent régulièrement les interventions.
On part sous les cris de « Au Dodo » ; la journée de demain s’annonce absolument énorme.

Samedi 25 Mars

Samedi : Le départ en Cortège

Le matin on se réveille avec le soleil et les bruits du camps. Déjà l’hélico survole la zone. La tente voisine ne me réveille pas comme elle avait promis. Je plis la tente quand même, et rejoint le GA. La boue est partout partout. On dit bien qu’un peuple de boue de rond-point… De très nombreuses tentes supplémentaires se sont montés en pleine nuit. Il y a du monde partout, les nombreuses toilettes sèches ne suffisent pas à désengorger l’immense queue.
A l’AG matinale, on piétine dans les flaque de boue partout sur le champs, parfois jusqu’aux cheville. Jusqu’aux derniers moments, il y a des briefs juridiques et des créations de GA ; l’organisation tient à ne laisser personne seul, que ce soit face aux violences policières ou à la repression judiciaire. Sur autant de milliers de personnes, c’est du jamais vu.
On part au petit déj de l’intercantine. Très minimal / frugal : un gateau à l’orange ; des myrtilles et de la raclette crue. On prend le vrappe de l’intercantine pour le midi.
Au rendez-vous de cortège, mon GA fait faux bon ; je m’inquiète pour eux et d’être seul. Je tergivèrse à avancer dans le cortège, de peur de les avoir loupés. Mais de toute façons il y a trop de monde, sans point de Rdv et sans tel, les trouver serait une chimère.
Finalement, à l’instant où je me décidais à avancer seul, une des personnes arrive; sur les nerfs car son matos est dans le sac d’une autre et cette dernière est introuvable.

On rejoint la fin de la foule qui avance. On bifurque à gauche, après discussion pour rejoindre le cortège Loutre Jaune, la longue marche commence. On a pas d’encombre, la sono est cool, et les virages de campagnes, plats jusqu’à très loins, nous montrent une longueur de cortège infinie. On passe à travers champs parfois pour rejoindre d’autres petite routes de campagne. On trouve des lunettes en rab pour lea copain.e.s sans matos. Petite pause eau, pour coordiner le timing les autres cortèges, et pour recevoir l’information comme quoi la police ne sera présente qu’à la bassine. On apprend également qu’on est entre 5 et 10 000 par cortèges, et que de nombreuses personnes continuent de nous rejoindre en route. Devant notre passage une famille d’une des maisons de campagne nous regarde d’un aire ahurie ; j’imagine très bien la scène étrange de voir passer, un samedi matin, des milliers de personnes masquées devant chez soi, au milieu de rien. Depuis le réveil, je me rend compte que les hélicoptères de la gendarmeries n’ont pas cessés de nous survoler.

On finit par apercevoir la bassine, elle est très loin, aux murs hauts et biens visibles, ainsi que la police qui l’entoure de ses camions. S’ensuit une longue marche à travers champs, nous arrivons finalement devant, sur un petit promontoire nous donnant la vue sur les lieux. La tête du cortège jaune s’élance déjà vers la forteresse policière, sans attendre. Le but est de rentrer massivement à l’intérieur, et de la saboter. Toutes les méthodes sont bonnes, de la plus tranquile/pacifique au jet de molotov sur les camions. Certains devant sont probablement, après toutes les violences subies ces derniers temps, venus casser du flic, comment en leur en vouloir ? La rage est profonde mais celà nous laisse pas le temps d’organiser un large front, ni de s’organiser, et encore moins d’entourer la bassine. L’Assaut est lancé trop vite et il faut soutenir, tous le monde y vas.

Samedi : La Boucherie (TW : Violences Policières inouïes)

Très vite les lacrymogènes saturent l’air, et polarisent le front à l’endroit où le vent nous est favorable, en bout de bassine. C’est également la faiblesse du dispositif policier s’il y en a une, car le côté est plus court.

Nous sommes 4 dans le groupe affinitaire, avec différentes envies ; je me mets avec lea copain.e.s qui a plutôt envie d’aller vers l’avant soutenir les camarades. Les deux autres reculent, vu que l’une est sans lunettes.
Nous avançons. Tout de suite nous sommes prit sous le feu des lacrymos. Si au début mon FFP2 et mes lunettes tiennent le coup, la visibilité est quasi-nulle avec la buée. Et dès que je tente d’enterrer un premier palet de lacrymo dans la terre ; ils ne suffisent plus. Je suis obligé de reculer mes rincer au sérum phy les yeux, et choper un peu de malox dans le masque. Heureusement mon binome a vu le mouv et on se suit.
Très vite les lacrymos cèdent la place aux grenades explosives/désencerclantes et aux grenades assourdissantes. Je reste généralement en dehors des lacrymo qui se font très clairsemés, car je veux garder de la visibilité.
Il y a quelques avancées policières, menaçant de charges, mais ils se mouillent très peu. Au final ils ne font que maintenir la pression.
Avec des dizaines d’autres, nous ramassons des cailloux pour le front, c’est le moins et le plus je puisse faire, dans le respect de mes limites, pour les camarades qui risquent leur vie devant face à la police qui tire au LBD et aux grenades explosives. Juste défendre nos vies.
Mais je m’aperçois que c’est en réalité très dangereux pour nous aussi : les grenades pleuvent également sur nous. Tirés à plus de 200m de nous depuis les lignes policières, elles font de larges et lentes cloches faciles à repérer. En l’air elles ne ressemblent pas à autre chose que des mini-missiles ou bombes. Il faut sans cesse regarder le ciel pour prévoir où elles vont tomber. Leur explosion n’est pas liée à l’impacte, certaines explosent en l’air, parfois à hauteur de visage, d’autres de longues secondes après s’êtres enfoncées dans le sol. On voit que les flics visent derrière les banderoles de tête, parfois loin derrière. Je me suis dis plus tard qu’ils voulaient créer un no-mans-land entre le cortège et le front et nous désolidariser les uns des autres. Peine perdue, on allait certainement pas laisser tout seul les gens devant.
Lorsqu’elles explosent, les grenades font toutes un bruit assourdissant. Il y a probablement des différences de son entre les assourdissantes, les lacrymos, les GM2L et les désencerclantes, mais je ne les connais pas et au vu du dosage d’explosifs, il était primordiale de juste toutes les éviter. Les mouvs habituels « ne pas courir » ne sont d’ailleurs plus tenables, mais la densité moins forte de la foule le permettait.
Je n’essaye plus de m’occuper des lacrymos, la peur qu’elles m’explosent dessus devient trop forte.
Autour de moi, dans mon champs de vision moyen, il y a toujours une GM2L (j’ai lu que c’était ça sur internet) ou désencerclante en vue. Quand je ne les fuis pas dos à elles, je les vois exploser au sol. Elles éparpillent la terre dans un nuage marron sur plusieurs mètres, avec une aura rouge jaune à l’épicentre. Sur les reste, on peut lire GF 56.
On ramasse compulsivement les cailloux pour en faire des tas. Vu l’armure des policier, ce n’est pas ça qui les blessera, cela pourrait en revanche les faire reculer, et peut-être nous permettre d’avancer dans la bassine, ou au moins juste nous défendre face à cette barbarie.
Je vois de nombreux blessés, ça crit médic très régulièrement. J’ai vu des visages en sang. Des gens porter des corps. Des gens boiter à reculons.
Vu que les grenades sont tirés partout sans distinctions, et qu’elles peuvent exploser en l’air, c’est juste une chance inouïe d’éviter toute blessure.
Je vois même, sans doute possible, une grenade explosive tirée en tir tendu passer à l’horizontal, à une dizaine de mètres de moi. Si tant est que les autres tirs ne l’étaient pas déjà : un geste criminel destiné à tuer.
Quand les tas de cailloux sont prêts, on se regarde avec notre binome, on attend l’explosion des explosives sur le chemin, et après un décompte de 3, on court vers le front les déposer. Et on recourt vers l’arrière, finalement pas tant moins dangereux.
Je n’ai jamais autant de fois entendu médic de ma vie.
Heureusement grâce à une info d’AG, les gens montrent du doigt vers les blessés, et les médics ne sont pas trop perdus. Ils sont « juste » débordés pour répondre à tous les appels.
Devant, 2 Camions et trois fourgonettes de la gendarmerie ont pu être incendiés et faire reculer le dispositif policier. Des grilles de la bassines sont tombées.
La Brav-M, en quad tente alors une sortie. Ils montrent les biscotos, nous oblige à faire deux fronts, l’un face à la bassine et l’autre face à eux. Quelques gens les canardes de cailloux, et ils répondent par des LBD et des grenades désencerclante. Mais globalement, ce sont juste des pignoufs venus faire les kékés, qui ne prennent pas le moindre risque, et tentent de nous mutiler sans vergogne. A de nombreux moment, il y a deux hélicoptères de la gendarmerie au-dessus de nous, il y en avait donc probablement d’autres mobilisés pour tourner.
Peu après le retour de la brav-m dans la forteresse, l’assaut de celle-ci reprend de plus belle quelques minutes, avant qu’un mouvement collectif initie un retrait stratégique pour une pause et debrief. Les tirs policiers cessent enfin pour un temps.

La boucherie aura duré à peine 45 minutes.
Un épisode de tension au final assez court par rapport aux heures entières d’émeutes GJ, mais d’une violence policière absolument incomparable dans son intensité et sa perpétualité.
Pendant la pause on essaye de retrouver les autres du GA, sans succès, trop de monde. Des brouilleurs nous empêche de les appeler. Nous sommes très inquèt.e.s pour elleux.
Pendant une bonne heure on se pose, on mange les vraps. Certains dansent à côté de la sono.
Il y a ensuite un mouvement pour repartir à l’assaut. Immédiatement, les grenades explosives repleuvent sur nous.
Une info primordiale finit alors par se diffuser, au bouche à oreille et au mégaphone ; les médics n’ont plus de matériel pour gérer les blessures, et notamment de compresses ; on va au devant de mort(s) certain(s) si nous continuons, le mouvement se stop immédiatement et sonne la retraite définitive.
Malgré notre éloignement, les grenades explosives continuent d’être tirées, parfois à plus de 500m, grace au char de la gendarmerie, sur des foules très pacifiques et en retraits.

Samedi : Retour et Sidération

Par un heureux hasard tous le GA se retrouve, saint et sauf, et la longe marche retour commence. Sur le chemin, on voit au loin un excavage réalisé par des gens qui brulent ensuite des canalisations. La Bassine est sabotée. Après une mini-pause eau, on marche vers le camps de base.
Il y a quelques chants, quelques fanfares, mais elles sonnent bizarrement à l’oreille.
On est crevé, ça discute un peu dans le cortège, mais c’est calme globalement, les gens sont pressés de rentrer.
Pensant aller plus vite, on fait un petit détour par le chemin jaune initiale, qui au final nous rallonge un peu. On repasse dans la boue. Les feux d’artifices sont tirés depuis le camps, probablement pour fêter la fin.
Arrivés, on se pose aux tentes, je récupère quelques affaires. Je m’allonge et j’écoute un peu. Les gens s’enlassent, se font des calins, ils sont soulagé de se retrouver entier. ça discute un peu.
Les feux d’artifices continuent toujours, mais il n’y a aucune ambiance, je comprend qu’ils les utilisent tous pour ne pas les transporter en cas de contrôles routiers.
Les « boum » qu’ils font sonnent beaucoup trop comme les grenades explosives qui saturaient le champs de bataille, me laissant le sentiment que j’y étais toujours.
En discutant un peu, on prend peu à peu conscience de l’horreur du moment qu’on vient de vivre.
Ils sont prêts à tuer pour défendre un trou d’eau au milieu de nulle-part.
Les chiffres des médics (et non ceux de l’organisation) ont commencer à tourner : + de 200 blessés dont 40 graves, parmis elles : plus d’une 30 d’hospitalisations, des mutilés, 2 au pronostiques fonctionnels engagés, et un entre la vie et la mort. Un chiffre qui ne compte pas toute la bobologie autogérée par les manifestants eux-mêmes. En face, il n’y a eut que 3 blessés un peu sérieux, c’était donc un massacre.
Je finis par rassurer par téléphone un proche.
Je plie bagage et cherche une voiture pour le convoi pour Melle. Une fois trouvé, on attends les directives de l’Infoline pour le convoit. Elles n’arrivent pas ; on voit les gens commencer à partir en nombre ; à la fois excedés de la lenteur de l’organisation, de la pluie, et pressés de fuir le lieu de tant de violences policières. On discute sur les capots de voitures, on se raconte comment on a vécu les évènements. Des paysans engagés nous donnent un peu de leur vécu, mais aussi des chips. Je me rends compte que manger compulsivement m’aide à gérer un peu le stress, toujours très fort, comme s’occuper les mains avec une clémentine. Petit pic d’émotion sous la pluie qui revient.
On voit au loin un immense feu au camps de base, probablement pour bruler les vêtements, dont certains, ont l’a apprit plus tard étaient touchés par des jets policiers de peintures inodores et invisibles, révélable avec une lampe bleue.

On finit par partir, un peu avant le convoit. Heureusement il n’y a aucun barrages et nous arrivons à Melle sans encombre autre que l’Hélico.

Samedi Soir : Festival de l’eau.

Comme l’avant-veille, je trouve une tente pour le dodo. Je me change (un peu moins de boue et des vêtements propres ça fait du bien !), puis je vais au festival. L’ambiance sur la place me fait du bien, beaucoup de bien. De voir que autre chose que la violence existe, y compris dans les luttes. Des foulent entières crient en musique avec les artistes sur scène, en dance « Et tout le monde déteste la police », mais ce n’est pas du sentiment de rage qui s’en dégage, c’est des cris de lutte joyeux. De solidarité.
Je mange, il était temps. Coeur encore sur l’intercantine des luttes. Et sur tous les bénévols.
Je me fais d’ailleurs embarquer pour 1h30 de vaisselle, ça me permet d’écouter un peu les concerts, d’aider, et de décompresser en même temps en occupant mes mains à quelque chose d’utile.
Bon l’auto-wash était un peu shlag par contre, il manquait des personnes pour changer les bac plus souvent, et en réservant l’eau chaude pour les lavages au lieu du décalage classique, les bacs de derniers rinçages restaient assez sales.
Mais je crois ya pire dans la vie x).
Depuis la team vaisselle on assiste à la prise de parole de l’organisation. On entend les victoires comme le chiffre record de mobilisation : + de 30 000 personnes ! Mais aussi les chiffres des blessés confirmés; et des nouvelles de ceux dans un état grave. Une minute de silence est observée pour la personne dans le coma. On apprend également d’autres actions chouettes : une serre a été monté par la Confédération Paysanne, 300m de haies également plantés, mais aussi que le fait que des chaînes humaines pacifiques ont tentés, sur un autre front de la bassine, de passer le barrage policier ; avec pour seule réponse des lacrymos.
La musique reprend, j’ai deux bières gratuites dans le pif, qui aident un peu à profiter de l’ambiance =). Je m’arrête là. L’alcool est clairement déconseillé après les évènements de ce type.
Je finis par sortir de la vaisselle chercher les copain.e.s

Malgré la violence policière inouïe et les envie de vengeance évidentes, j’ai trouvé les gens très très soft, iels ont respectés jusqu’au boût la ville de Melle qui les accueillait en ne touchant aucun commerce ou batiment publique. Tout juste quelques stikers sur les panneaux. Et tout ce que j’ai vu dans la ville en « dégradation » (ou embellissement c’est selon ;) ), c’est un tag sur un vieux compteur électrique dont tous le monde se fout : un « Soutiens aux Mutilés » très approprié et bienvenue. S’il y a eu autre chose, ce n’est pas représentatif par rapport aux dizaines de milliers de gens qui sont venus.

L’ambiance du festival est folle, je pense c’est une date clée dans l’histoire récente de France autogestionnaire : de la bouffe à prix libre libre pour des dizaines de milliers de personnes, un festival en auto-organisation, gérant des grands flux de bénévols en évitant au maximum de les ferrer dans des engagements d’horaires ou de présence. Les gens aidant sur demande ou même très spontanément, en masse. Un festival et une ville portant fièrement les couleurs libertaires ; écologistes, anarchistes et antifascistes. Avec des chansons de la niche militante, habituellement écoutées individuellement, qu’on découvre soudain sur une grande sono ou directement de la bouche de leur artistes.
Vers 1h, c’est le au-revoir aux très chouettes copain.e.s rencontrés sur l’évènement, et le dodo.
J’ai un peu de mal à m’endormir tellement la journée fût dense. D’autres gens arrivent et squattent la tente avec moi. Il fait froid mais je m’endore quand même assez vite.

Dimanche 26 Mars

Dimanche : départ.

C’est l’hélicoptère, encore, qui me réveille le matin. Sur le chemin du tit-dej, je cherche des gens pour le retour, je trouve assez facilement un rdv pour plus tard dans la journée. Après un peu de queue, je mange tranquilement un petit déjeuner, en discutant autour de moi, les gens sont admiratifs du festival, de l’organisation au top, mais aussi choqués des violences policières de la veille.
En écrivant, je me rend compte que j’ai totalement oublié mon assiette sur la table, vraiment désolé pour ceux qui ont eut à s’en occuper à ma place !
Après un verre de jus de pomme gracieusement offert par une dame, on file à la voiture, au travers des camping boueux. On commence alors un jeu du chat et de la souris très long avec les toujours très nombreux contrôles policiers. On prend notre temps pour préparer les itinéraires (coeur sur ceux qui ont signalés les contrôle sur l’infotraflic et Waze) ; on fait plein de visites de campagne sur des petites routes… Finalement on mettra plus plus d’une heure de plus pour retourner que le temps de trajet normal. Mais c’est la victoire : pas un seul contrôle policier pour moi de tout le WE !

Ce Week-end me laissera beaucoup de souvenirs, mais je voulais les écrire, pour tous ces petits détails que je ne veux pas oublier ou transformer. Et pour ne pas en laisser certains devenirs traumatiques.

Le mot de la fin

Si vous étiez présents samedi, je vous conseille vivement la doc de soin psy pour les violences policières, que vous soyez blessés, proches de blessés, témoins proches ou lointains, ne restez pas seuls avec ces souvenirs. Ce n’est pas parce-que certain.e.s d’entre nous sommes chanceux.ses par rapport à d’autres que ce que nous avons vécu n’est pas grave et devrait être minimisé. Soyons toustes solidaires.

Soutiens inconditionnel aux blessés, mutilés, et enfermés de nos mouvements.
Ran Fan.