Planification de la terreur et populations civiles non-combattantes [ 1 ] « Choosing Targets In Cities ! » Part. 1

by Christian Pose

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Sans jamais oublier le drame qui a secoué Madrid et l’Europe le 11 mars dernier et qui a frappé une fois de plus les couches sociales les plus défavorisées du pays : ouvriers, employés de bureau, chômeurs, intérimaires, parents et enfants, retraités aux modestes pensions, historiens de la vie sociale et chercheurs en information économique et politique mettront en garde l’opinion internationale contre les rapports des spécialistes espagnols, israéliens et américains, du traitement des informations (du renseignement)…contre les manipulations et les dissimulations.
Beaucoup d’opposants civilistes et de militants altermondialistes (juristes, historiens, philosophes, sociologues, journalistes, écrivains indépendants…) se battent depuis la “fin” de la guerre froide ou depuis le début de la guerre mondiale contre la globalisation pour maintenir à flot le navire de l’histoire moderne sur un océan d’informations non polluées, citons (parmi la multitude) Pappé, Shlaim, Warschawsky, Thapar, Vijay Prashad, Tigva Honig-Parnass, Chossudovsky, Houtart, Amin, Negri, Derrida, Geuens, Pilger, Nimmo, O’Neill, Jeserich…
Notre critique concernera spécifiquement les entités terroristes internationales, le renseignement, les infiltrations et les opérations clandestines armées (le plus souvent illégales) au service d’élus ambiguës, incapables (et comment pourrait-il en être autrement) de désarmorcer une “crise internationale” voulue “terroriste” aussi stratégique (économique) et criminelle (militaire) que le sera la guerre contre le communisme; “élus” qui apparaitront non seulement comme les complices de cette crise mais aussi, dans le sillage du capitalisme et du libéralisme, comme les commanditaires.

Think-Thanks et dominos
“…and the dominos will start falling !”.

Le reporter indépendant anglais Brendan O’ Neill écrira dans “Madrid ‘blueprint’ : a dodgy document ” quelques mots effrayants attribués à un titre de Intelwire (site spécialiste du terrorisme) : “Madrid attacks worked exactly as planned” (16.03.04).
Brendan O’Neill construira sa critique sur les révélations de CNN : “Bombs to split Spain from allie” du 16 mars selon
lesquelles l’attentat de Madrid (11mars,192 morts) aurait été très rationnellement planifié dans un Web book de 42 pages sous le titre “Jihadi Iraq, Hopes and Dangers” puis publié sur un Web-site de ” Al-Qaeda”, et sur celles de deux chercheurs du FFI-Forsvarets forskningsinstitutt (Norwegian Defence Research Establishment-Oslo) , Brynjar Lia et Thomas Hegghammer.

Le FFI, et cette remarque paraît pertinente si l’on se place du côté des intérêts de la population civile mondiale non-combattante, aurait pris connaissance de ce document quelques mois avant le 11 mars 2004, le document arabe aurait été publié le 10 décembre 2003 sur Global Islamic Media (Web) et plus ou moins conçu dans ses grandes lignes par le Media Committee for the Victory of the Iraqi People (Mujahidin Services Centre) en septembre 2003.
Dans ce doccument (concernant l’occupation militaire irakienne) il aurait été stratégiquement défini que la période des élections législatives espagnoles représentait un contexte de destabilisation idéal pour forcer le gouvernement espagnol à retirer ses troupes d’Irak, que le gouvernement d’Asnar ne pourrait supporter, politiquement, plus de deux attaques, trois au plus sans rappeler son corps d’armée (Asnar n’exprimant pas la volonté populaire sur la question de l’occupation militaire en Irak) …, que “si ces attaques ne suffisaient pas, la victoire du parti socialiste représenterait une garantie pour l’Irak, que si les troupes espagnoles demeuraient malgré tout en Irak, le seul fait que le retrait figure comme une priorité dans le programme électoral socialiste serait une garantie suffisante…”.

Brendan O’Neill, Lia et Hegghammer, au delà de l’approche politique qui ne définit aucune cible tactique en Espagne, soutiennent que rien ne permet d’affirmer qu’il s’agit là d’un document rédigé par Ben Laden ou même par al Qaida.
“Ce document n’est pas un manuel d’action directe dira Hegghammer, il s’agit pour tout dire d’une contribution a un débat idéologique. S’il existe un lien entre le document et Madrid, il n’est probablement pas organisationnel…ou même tactique”. La distorsion opérée par l’effet médiatique, notamment par CNN, aura conduit à bien des interprétations, suggérera O’Neill.
A un autre plan, l’esprit méthodique et rationnel de ce document (à tout le moins sa traduction et bien entendu les commentaires qui l’accompagnent) nous fait penser, aussi paradoxal que cela soit, à celui des idéologues politiques du PNAC – Project For The New American Century ainsi qu’à celui des chercheurs-rapporteurs d’organisations subversives comme le CFR, le Manhattan Institute ou encore comme l’American Enterprise Institute. Le but du think tank consistant, en effet, à convaincre les gouvernements, le business, les médias et l’opinion (à l’instar, pourquoi pas, d’un mouvement missionnaire ou d’un courant religieux populiste), sur le choix méthodique d’une stratégie globale et particulière, politique, commerciale, religieuse ou militaire, pour la conquête d’un pays ou la maîtrise de nouveaux marchés; un esprit (pour l’époque contemporaine américaine) qui aura pris corps, du reste, dans l’idéologie politique des accords de Bretton Woods (1944) et qui aura réellement la force d’une théorie psychologique. Cette intense activité de propagande sera sublimée, par exemple, dans le “Clash des civilisations” , sinistre et célèbre ouvrage de Samuel P. Huntington.
Les objectifs stratégiques (commerciaux et militaires) des partis politiques libéraux américains, européens ou japonais, émergent en effet, presque toujours, de savantes idéologies issues pour la plupart de la recherche privée et de la subversion. Cette dernière aura pour mission d’exercer (par le langage et les idées) une pression psychologique constante sur les médias, les universités et les gouvernements, du nord comme du sud; une recherche extrêmement coûteuse essentiellement financée, du reste, par des sociétés internationales spécialisées dans les fruits et légumes, les épices, les huiles, les minerais, le transport, le pétrole, le surcre, l’abattage des animaux, les produits cosmétiques, l’outillage, les médias et la télécommuciation, les banques et les sociétés financières, les cabinets d’avocats internationaux, les sociétés d’assurances et les fonds de pensions, les pompes funèbres… voir Think Tanks-Attack On Democracy, ou se procurer Tous Pouvoirs Confondus de G.Geuens, EPO, 2003).

Pour Kurt Nimmo, dans Reading al-Qaeda into Madrid : “le document (Jihadi Iraq, Hopes and Dangers) mentionne seulement des attaques portées contre les troupes espagnoles stationnées en Irak et non des meurtres (à perpétrer) contre des innocents à Madrid”. Cette interprétation a ceci d’intéressant qu’elle renforce l’approche “exo-islamoterroriste déflationniste” (rien ne prouve que les attentats soient commandités par des islamistes ou que les textes soient composés par al-Qaeda) de Brendan O’Neill, Brynjar Lia et Thomas Hegghammer. Ce qui sera retenu par les traducteurs gouvernementaux (comme une piste alqaedienne) réside en une approche typologique des faiblesses politiques de l’Espagne, de la Grande Bretagne et de la Pologne (soit six page sur 42 consacrées à l’Irak), sans, toutefois, noter un seul objectif tactique ou militaire.
Pour Adam Dolnik de l’International Center for Political Violence and Terrorism Research de Singapour (autre approche exo-islamoterroriste déflationniste) al Qaida est plus mythique que substantiel.
“Dolnik dira à O’Neill, al Qaida est une résistance sans chef véritable… (Toutefois) si vous souscrivez à l’idéologie (politique et religieuse) et décidez d’entrer en action sur la seule base de la conviction acquise vous pouvez vous appeler al Qaida. Quand nous parlons de documents d’al Qaida nous devons prendre en compte deux espaces dimensionnels. Il y a l’espace dimensionnel des documents signés par les responsables historiques, Zawahiri en est un, et qui concerne les “documents officiels du groupe al Qaida” et ceux de l’autre espace dimensionnel concernant des documents rédigés par des auteurs inconnus inspirés par le courant idéologique historique qu’ils soient membres assermentés du groupe ou non. Si nous ne pouvons affirmer dans le cas présent que nous avons affaire à un document historique du groupe al-Qaida nous pouvons dire (à tout le moins) qu’il procède d’une pensée dynamique stratégique relevant bien de l’idéologie d’al-Qaida”.

Allant plus loin dans son argumentaire, Kurt Nimmo dira que l’organisation al-Qaïda n’aura jamais utilisé un tel nom, mais que l’on n’entendra jamais la Fox, à propos des détournements d’avions le 9/11, admettre la véracité d’une telle hypothèse de travail. Tout aussi explicite Dolnik dira à O’Neill (novembre 2003), que “Ben Laden n’a jamais utilisé le terme d’al Qaida avant le 11 septembre”.
Hegghammer relèvera toutefois deux arguments, à propos des attentats de Madrid, qui auraient pu jouer en la faveur de “l’hypothèse (gouvernementale) al-Qaida”.
“Le premier argument, dit Hegghammer, concerne le Mujihadeen Services Centre. Une telle référence fait écho au “Services Bureau”, l’organisation à partir de laquelle s’est constitué al Qaida à la fin des années 80. Le second argument concerne le fait que le document contient une dédicace à Yusuf al- Ayiri, un idéologue majeur d’al Qaida et un proche de Ben Laden qui sera tué par les forces saoudiennes de sécurité en mai 2003″.
Pour Brendan O’Neill, comme pour Kurt Nimmo, et finalement il en ira de même pour les chercheurs norvégiens Brynjar Lia et Thomas Hegghammer, tout ceci n’est pas d’une grande clarté au point qu’il est juste de se demander si al-Qaida n’est pas un super-prétexte obsessionnel pour appréhender/expliquer le moindre problème touchant au terrorisme ou pour cacher certaines stratégies politiques ou commerciales par trop subversives.

Le parti socialiste espagnol a-t-il gagné ?
“…the best and the worst, the black and the white!”

En terme de jeu d’échec le cavalier Asnar est stratégiquement sacrifié à la reine libérale américaine : “su madre”, car il ne fait désormais aucun doute que la piste terroriste conduit autant à Washington qu’à Jérusalem. Le critique argentin Manuel Freytas écrira de façon très convaincante : “from 9-11 to 3-11 how the madrid attack is connected to al Qaeda, Bush and the Pentagon israely lobby” (IAR-Noticias.com, 14.03.04)
Autre lecture autorisée, la reine libérale socialiste européenne défend son nouveau cavalier espagnol Zapatero mais la dévorante reine américaine a gagné, à l’abri de la tragédie populaire madrilène, la Tour de l’ex-bloc socialiste européen. Il s’agit bien ici de sept Etats, ou pions, de plus sur l’échiquier de l’Otan ( Bulgarie, Roumanie, Slovaquie, Slovanie, Estonie, Lettonie, Lituanie) et d’un plan global de construction de bases militaires US (stratégie politique et militaire, selon Chossudovsky, du vieux lobby américain convoitant la Russie au sein même de la Maison Blanche).
Les accords militaires seront signés deux semaines après le 11 mars, en fait dès le 29 mars. Des accords prévus depuis fort longtemps. “(…) une alliance (qui) fait mieux que résister, (qui) s’élargit et prospère, au service d’un continent européen enfin réunifié et d’un lien transatlantique consolidé” dira son secrétaire général Jaap de Hoop Scheffer et auxquels manquaient, probablement, un ébranlement (pour destabiliser les ultimes oppositions civiles). La politique secrète des Etats et des groupes capitalistes relevant bien, au regard de l’histoire des faits, d’une progression dramaturgique et criminelle (autre forme de jihad).
L’orde du jour de la toute première réunion officielle de l’Otan à 26 fera état : “d’opérations engagées aux Balkans, en Afghanistan, de renforcements de la lutte antiterroriste et d’un éventuel engagement plus important en Irak…”

Telle pourrait bien être, sans être conspirationniste, l’explication du drame de Madrid. Une expansion militaire multilatérale savamment orchestrée. Le fait est qu’aujourd’hui le canal militaire de l’Otan est bien tracé de la Mer Baltique à la Mer Noire.
Cette victoire donc, non pas du socialisme espagnol (excroissance corrompue du libéralisme) mais de l’Otan (et qui sent une forte odeur de guerre froide), est également une victoire de l’expansionisme libéral, commercial, religieux et militaire, du patronat américain et israélien (l’on dira à Paris, sans antisémitisme, du Patronat Juif) dans la région.
Une volonté politique qui conduira, par ailleurs, (synchroniquement, sous la poussée du libéralisme et sur un autre terrain concurrentiel), le gouvernement israélien, en appui sur le corps doctoral de l’université, à falsifier délibérément l’histoire des conflits israélo-palestiniens (Ilan Pappé, Avi Shlaim) et à nourrir (effet domino) les oppositions systématiques à l’arabité (en fait au socialisme arabo-palestinien opposé à la mondialisation), à l’islamité (en fait à l’intégrisme du Hamas, créature pourtant d’Israel échappant à Israel et dont l’objet aura été l’anéantissement de l’OLP), en appui sur une vieille politique concentrationnaire ,(dixit “le mur de fer” de Jabotinsky-1920) , une vieille tentation sioniste qui se traduira par l’oubli, par exemple, du massacre des palestiniens de Tantura (1948).
La violence du sionisme que se soit par l’affirmation de sa volonté de domination territoriale sur la Cisjordanie, sur Gaza ou par l’affirmation d’une suprématie incontestée sur le Proche et Moyen-Orient, trouvera, finalement, son plein épanouissement dans la “peur de l’islamo et de l’exo-islamoterrorisme” qui jettera l’industrie militaire et l’Otan au coeur des préoccupations politiques des pays de l’ex-bloc soviétique et au coeur des “besoins en armement” des “grandes puissances démocratiques” comme l’Inde, sous la férule fasciste notamment du BJP et de l’Hindutva, ou encore comme l’Afrique-du-Sud sous la présidence libérale de Thabo Mkebi. Se souviendra-t’on, ici, du reste, des premiers essais nucléaires militaires israéliens conclus avec l’Afrique du Sud ? Des essais militaires conçus (non sans l’aval du clan de John Vorster et la pression des lobbys nucléaires civils et militaires de Valerie Giscard d’Estaing et d’Henry Kissinger) au sud de l’océan Indien en1979 (négociation des accords en 1976, année du massacre de Soweto).
Vijay Prashad, dans Imperialism, Israel and India, nous mettra en garde, dès 2002, contre la militarisation d’Israel et maintenant de l’Inde par la criminalisation de l’arabité, du socialisme arabe, de l’islamité au Proche et Moyen Orient, via, précisément, la diplomatie subversive, commerciale, militaire, via l’Otan et les opérations clandestines britanniques, israéliennes ou américaines.

Qui donc a gagné à Madrid ?
“…the corporate criminals!”

La dissimulation stratégique des vraies causes de l’attentat de Madrid est une réalité. Nous en lisons le fondement, au risque de surprendre, aussi bien dans les méthodes des très lointains et oubliés plans ultra-capitalistes Dawes (1924) et Young (1928) “conçus pour sauver l’Allemagne ruinée” que dans l’esprit et la méthode des accords de Bretton Woods (1944) “conçus pour sauver le monde du nazisme, de la ruine, du communisme”… des plans et des traités internationaux au service de pools bancaires et industriels internationaux couverts par les Etats, hyperactifs, violents, extrêmement subversifs et que l’on retrouvera, comme par enchantement, à la tête du réseau bancaire commercial irakien en 2004.
Je veux parler ici, derrière Mitch Jeserich dans Banking on Empire, de JP Morgan Chase, fusion new-yorkaise (décembre 2000) de Chase Manhattan Corporation (une très vieille, très obscure et très agressive structure du capitalisme, en fait l’une des plus importantes banques de commerce au monde ) d’avec la non moins redoutable banque d’investissement J.P. Morgan & Company.
Sara Flounders écrira sur un même sujet, pour Workers World et le CRG, que la nomination de L. Paul Bremer III à la tête des affaires civiles irakiennes (CIG, mai 2003) sera stratégique. L.Paul Bremer III est à la fois un expert en contre terrorisme, l’ex-managing director de Kissinger Associates (au coeur de toutes les sales affaires du siècle dernier) et un membre influent du Council on Foreign Relations (CFR). Bremer III et son équipe de “corporate criminals”, selon Flounders et Oberg, seront en fait indissociables de l’histoire criminelle du consortium pétrolier de Rockefeller… Le choix d’Iyad Alloui, par le CIG et Bremer III, comme 1er ministre de l’Irak est un maillon dans le processus de transfert de souveraineté prévu pour le 30 juin prochain. Une opération qui ressemblera en tout point à ce que Camille Bauer appelle,dans l’Humanité, une opération Cheval de Troie de la CIA. Un fait d’histoire qui en cache bien d’autres et qui confirmera notre propos.
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