Manifeste pour une révolution liquide
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_SENTIR LE FEU_
« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. »
Jacques Chirac, IVe Sommet de la Terre
À quoi tient une prise de conscience?? Les raisons qui nous poussent à lutter contre la forme générale de nos sociétés occidentales — c’est-à-dire le capitalisme néo-libéral et son système thermo-industriel, ainsi que les républiques représentatives qui l’accompagne — ont-elles besoin d’être réaffirmées?? Chaque jour apporte devant le pallier son lot de signaux qui poussent (ou devraient pousser) à la révolte. Des rapports scientifiques de plus en plus accablants sonnent chaque matin à la radio. On entend ainsi facilement au café que « Près de 60% des vertébrés ont disparu en 45 ans, d’ici 2020, cette perte pourrait atteindre 67%1 ». Tel les croques-morts de notre civilisation, nous suivons sur des écrans tactiles notre propre chute et la documentons en direct. « 90% de la biomasse des grands poissons ont disparus depuis le début de l’ère industrielle2 » annonce la radio entre deux pubs. Le Vivant s’effondre sous le coup des machines à produire de l’infini dans un monde fini et le jour de dépassement avance chaque année. Ce jour, « date de l’année à partir de laquelle nous avons pêché plus de poissons, abattu plus d’arbres et cultivé plus de terres que ce que la nature ne peut nous procurer au cours d’une année » à été atteint, en 2019, le 29 juillet. A partir du mois d’août, nous vivons à crédit sur le dos d’une planète qui s’embrase. Il « marque également le moment où nos émissions de gaz à effet de serre auront été plus importantes que ce que nos océans et nos forêts ne peuvent absorber»3. L’équilibre est rompu. Malgré tout, le patronat et leurs marionnettes continuent de vendre et promouvoir leur paradoxe moderne, s’enrichissant sur une exploitation honteuse des humains et du Vivant, faisant payer au plus grand nombre les caprices d’une minorité.
Nos sociétés atteignent l’inhumanité dans leur désastre social et humanitaire. « En 2018, en France, 566 personnes ont trouvé la mort sur le pavé. » selon le collectif Morts de la rue. En quatre semaines de l’été 2019, pendant que d’autres se badigeonnent de crème solaire « plus de 600 migrants, dont des bébés et de jeunes enfants, se sont noyés en Méditerranée » annoncent Médecins sans frontières. Ce que les gouvernements appellent « crise migratoire », semble pourtant peu face aux prochains sursauts géopolitiques à venir. En effet, L’Internally Displacement Monitoring Centre a décompté quelque « 83,5 millions de réfugiés climatiques entre 2011 et 2014 alors que l’ONU prévoit qu’ils seront 250 millions d’ici 2050. ».
La liste des catastrophes est déjà longue et ne cesse de s’agrandir.
Alors, avons nous encore et toujours besoin d’argumenter??
« Ce n’est pas signe de bonne santé mentale que d’être adapté à une société malade. »
Jiddu Krishnamurti
Dans ce sombre tableau, d’autres voient le confort moderne comme la raison de perpétuer ce modèle. « Nous n’avons jamais vécu aussi bien » est une phrase qui colle sous la semelle. Cette pensée est l’exemple même des logiques simplistes, individualistes et court-termistes qui sont reines dans nos sociétés. Ce confort est pourtant l’enfant d’un apartheid économique et écologique mondial.
D’un apartheid économique, car ce sont toujours les plus riches qui le consomment, ce confort, et les plus pauvres qui le produisent. Ce confort s’appelle donc de l’exploitation.
D’un apartheid climatique, car de la même manière, ce sont les pays les plus riches qui pourront le mieux se doter de moyens afin de s’adapter aux prochains bouleversements météorologiques et les pays les plus pauvres qui les subirions le plus violemment, et verrons peut-être, le jour où il chercherons l’exil, les frontières des pays qu’ils fournissaient se fermer devant eux. Par ailleurs, ces mêmes populations sont pour les moins responsables de ces catastrophes. Peux-on ainsi nommer « confort » un mode d’exploitation qui en même temps d’enrichir les plus riches entraîne l’impossibilité de vivre dignement pour une large partie de la population ainsi que pour les générations à venir?? Selon l’OUN, « le changement climatique menace de défaire les progrès des 50 dernières années (…) en matière de réduction de la pauvreté ».
Finalement, en plus d’être néfaste, ce système se révèle inefficace en terme de productivité, quand on sait qu’il faut « en moyenne dix à douze calories d’énergie fossile pour apporter une calorie alimentaire dans notre assiette.4 » et que « notre alimentation représente un tiers des émissions de gaz à effet de serre de la France.5 » Inefficace à nous nourrir sans détruire la vie et l’agriculture elle-même, ce qui peut tout de même sembler inadmissible, quand on sait que « depuis les années 1960, un tiers des terres arables de la planète a disparu du fait de l’érosion, accentuée par l’essor de l’agriculture industrielle et de l’artificialisation des sols6. L’ équivalent de la superficie de l’Italie est ainsi perdue chaque année7. » et sans nous détruire nous même, avec toute cette chimie.
Comment, dès lors, nommer « confort » ou « progrès » une organisation sociétale basée sur l’exploitation, et qui, en produisant sa marchandise et sa nourriture-poison empêchera les prochaines générations de satisfaire dignement leurs besoins vitaux, ainsi qu’à l’ensemble du Vivant de perdurer??
Nous ne pouvons qu’appeler cela bêtise, scandale ou génocide.
Aurons nous un jour, comme certains peuples l’ont eut, la sagesse de prendre des décisions politiques en envisageant leurs impacts sur les sept prochaines générations??
Dans cet échec Humain, le système, n’ayant d’autre choix que de continuer selon les codes inhérents à son ADN, à savoir la course au profit et à la production, semble se mener à sa propre extinction. Poursuivant toujours car verrouillé, il joue chaque coup plus dangereusement que le précédent. La crise monétaire et écologique oblige les élites à prendre encore plus de risques, à aller encore plus loin dans le mensonge, le cynisme et la destruction des fondements du système. La crise fait son travail : elle sape, elle ronge, elle fragilise – la taupe creuse. Dans cette brèche, nous pouvons percevoir une lueur : celle de la chute de l’Ancien monde, et peut-être, la construction du nouveau. Comme disait Antonio Gramsci, « Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres », nous avons donc un devoir historique à surveiller cet accouchement pour ne pas laisser sortir des flancs fétides de nos mondes modernes une nouvelle créature fasciste. Un travail important est à donc à mener sur les champs de la connaissance, de l’information, de l’éducation populaire et des luttes sociales. Pour mener à bien ce combat, nous ne pourrons nous suffire de critiquer l’adversaire, ce qui reviendrait à un pauvre jeu de postures mais nous devrons produire des idées nouvelles tout en affirmant l’idéal révolutionnaire, les mettre en oeuvre et créer ainsi une véritable culture de résistance. Nous devrons sortir des analyses individuelles pour entrer dans des logiques structurelles et systémiques.
De la même manière, nous ne pourrons démanteler telle ou telle structure sans songer, annoncer et amorcer en même temps ce par quoi nous la remplacerons.
« Le fascisme n’est pas le contraire de la démocratie mais son évolution par temps de crise. »
Bertolt Brecht
Il en vas donc de notre responsabilité envers le Vivant, envers les enfants, qui sinon un jour nous demanderons « Qu’avez-vous faits pendant si longtemps?? »…
Aussi, il convient de se demander combien coûte notre collaboration et quels seraient les bénéfices de notre refus, de notre résistance. Les réponses couleront…
Enfin, car il est aussi question de philosophie, n’est-il pas nécessaire de chaque jour tenter de se défaire de toute forme d’enfermement, d’aliénation, d’exploitation?? De toujours chercher à tendre vers la justesse et ainsi faire de chaque acte, chaque pensée, chaque moment de vie une insurrection en soi??
Cette visée implique donc une lutte quotidienne — et merveilleuse — pour ne pas se laisser emprisonner ou séduire par les idées communes, le bon sens, les modèles, les dictats, qu’ils soient durs ou doux. Cultiver une révolte journalière pour ne pas se soumettre à l’autoritarisme ambiant, aux dominations et aux oppressions quelles qu’elles soient. Contredire les vérités. Etre critiques plutôt que dupes?! Remuer, remettre en question. Un peu de doute?!
L’Etre cherchant la liberté et l’authenticité ne peut donc être qu’anti-conformiste et révolutionnaire. Quelle joie insolente que de vivre ainsi?!
Alors, avons nous aujourd’hui d’autres perspectives possibles que celle de la lutte??
Ne vous en faites pas,
Bien que grave, elle sera belle et joyeuse
Car n’y-a-il pas une folie heureuse, ici
A reprendre en main nos vies??
Beaucoup à déjà été perdu.
Du sens de nos sociétés à la joie dans les rues,
Des forêts centenaires à la pureté de l’air,
De la croyance en l’avenir,
Au bonheur d’exister au présent,
Beaucoup à déjà été perdu,
Alors nous avons tout à gagner
Toutes les raisons d’essayer
Et plus aucune pour que les choses restent ainsi.
Camarades,
N’avons nous pas assez parlé de Révolution??
Faisons-là?!
∼ ∼ ∼
« Que tout continue ainsi, voilà la véritable catastrophe. »
Walter Benjamin
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Notes :
1/ WWF – 27/10/2016
2/ Ransom Myers et Boris Worm?; revue Nature – 2013 3/ ONU
4/ Patrick Whitfield, The Earth Care Manuel Permanent Publications, 2004
5/ Dominique Guillet / « Planète Terre, planète désert?? » 2007
6/ ONU, La France agricole, 2010 7/ Jean-Marc Jancovici
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_TROUVER L’EAU_
Car le modèle dominant est nocif, il est raisonnable, moral, et nécessaire d’assumer une certaine conflictualité avec celui-ci.
A ces fins, l’effondrement en cours de nos sociétés et écosystèmes est à percevoir comme une occasion, une brèche par laquelle s’engouffrer et ruisseler pour irriguer l’aride, pour amener un renouveau.
_Nous sommes les coups d’ailes dans les contre-vents_
_Nous sommes l’éternité dans les contre-temps_
N’étant rien d’autres que vivants parmi le Vivant, nous devons tirer des leçons de cette vie qui nous croise et qui nous constitue.
Ainsi, nous serons comme l’Eau car le désert avance et pour que le torrent surgisse, nous muterons sans cesse en fonction du terrain, des situations et des objectifs, nous transformant du Solide au Gazeux en passant par le Liquide.
Car étant responsables des ravages, nous oeuvrerons à démanteler le capitalisme, l’Etat bourgeois, le patriarcat, ainsi que toute forme qui oppresse et exploite le Vivant.
Nous serrons innarêtables, efficaces et libres.
Nous serrons liquides.
Qui arrive à garder l’eau dans ses mains??
∼
ETAT SOLIDE / APPARAITRE_
Il n’est pas trop tard pour sortir de chez soi mais il est encore trop tôt pour y rentrer.
Pour celles et ceux qui ont encore peur, la frayeur est justifiée mais doit être dépassée. La peur est la fille-épouvantail d’un système qui assoie sa gouvernance par la terreur. La peur du manque d’argent ou d’emploi. Puis la peur du travail. La peur de l’autre. La peur d’affirmer son identité ou de ne pas la trouver. La peur de l’échec. Ces angoisses ont des causes structurelles, inhérentes à la construction socio-économique dans laquelle nous vivons : celle d’un système capitaliste et patriarcal, bâti sur la concurrence, le profit personnel et l’opposition des classes. La peur est une conséquence des dérives pathogènes de cette organisation ainsi qu’un outil de taille. Sentiment puissant et facilement injectable, elle permet au pouvoir en place deux choses bien pratiques : garder la population sous contrôle, et, de surcroit, lui proposer de quoi la rassurer. Le terroriste se mue ainsi en protecteur, vendant la sécurité après avoir semé terreur, et par là, ressert ses chaines.
Ainsi, le système, au lieu de créer des êtres émancipés fabrique des manques et des besoins, tout se positionnant comme étant la réponse à ces derniers. Il crée offre et demande, puis propose sa marchandise, ses produits-parrures. Et si jamais la colère monte, il arme sa police, gonfle ses médias et crée, enfin, la peur de la révolte.
En se structurant ainsi, un tel gouvernement ne peut se rendre qu’illégitime et par cette mèche, allumer l’insurrection qui devient un droit et un devoir.
De la même manière, à celles et ceux qui disent que la révolution est impossible car l’Humain est intrinsèquement mauvais ou avide, nous répondons aussi que non, qu’on ne naît pas femme ou homme mais qu’on le devient, et que lorsqu’on grandit dans des structures d’oppression et de compétition, nous finissons forcément par en absorber le goût et la forme, ce qui n’est qu’une raison supplémentaire pour chercher à abattre chacune de ces architectures-prison.
Finalement, la peur n’est-elle pas qu’un fantôme, qu’un subterfuge à déconstruire afin d’être Verbe et non plus sujets?? Nous ne sommes pas seul.e.s. Il y a une joie profonde et une sérénité logique à l’idée de nous organiser collectivement pour nous émanciper plutôt que de sombrer dans les mailles du filet et les courbures de ses angoisses…
Alors allons?! Il y en a pour tout le monde, et tout le monde est là.
Il nous faut le nombre, la multitude des profils, des techniques, des idées, des actions. Il nous faut prendre soin de ce qui nous rapproche et tirer profit de ce qui nous distingue. Mais il nous faut surtout nous rencontrer. Au delà de l’individualisme et de la flânerie poétique, les actions naissent des unions, des échanges, des liens. Du faire-ensemble. A l’heure où les réseaux dits « sociaux » et les médias de masse ne créent que de la solitude?; à l’heure où le seul endroit où l’on nous invite à prendre part à la politique s’appelle un isoloir, plus que jamais, il faut sortir?! Sur le palier de sa porte, puis dans la rue, sur les ronds-points, sur les marchés… Car la connaissance du monde est préalable à l’envie de le transformer, il est nécessaire de se créer des espaces d’échanges collectifs, des assemblées pour échanger des savoirs, pour sortir des ghettos de la pensée, pour troquer des idées et amorcer des actions tout en partageant un horizon commun.
Improviser partout des ZAD : Zone A Discuter, Zone à Délirer peut-être. Zone A Démultiplier bien-sûr. Allons à la rencontre, et organisons-nous ?!
-> Aller vers les Bases Avant_
Attaquer • Destituer • Subvertir
Car le capitalisme attaquera sans relâche et sucera jusqu’à la dernière goute de ce qu’il pourra transformer en profit-dollar, qu’il détruira chaque alternative qui viendra enrayer son productivisme acharné, qu’il traquera jusqu’à ses derniers opposants pour les remettre dans le rang, il est nécessaire de ne pas faire que défendre, ce qui reviendrait à toujours perdre du terrain, mais aussi d’attaquer. Car cette organisation socio-économique prend bien la forme d’une guerre contre le vivant, c’est dans un effort de guerre que nous devons avancer et nous organiser.
Alors nous ferrons la Guérilla.
*« Ceux qui aiment la paix doivent apprendre à s’organiser aussi efficacement que ceux qui aiment la guerre. » * Martin Luther King Jr.
Le capitalisme ne se structure que par la violence des rapports de force qu’il crée en lui-même (d’une classe sociale contre une autre, d’un genre contre un autre, d’une vie contre une autre…), ainsi nos méthodes doivent se concevoir avec la même approche : celle du rapport de force que nous glissons entre nous-exploité.e.s et lui-exploitant, afin de nous en libérer. Le rapport de force est tout ce qui reste car la discussion est depuis longtemps rompue. La bourgeoisie, avec son grand patronat, son Etat, sa police et ses médias n’abandonnera sûrement jamais ses privilèges toxiques, même face à des inégalités sociales croissantes et l’extinction des écosystèmes. Leurs profits étants justement basés l’exploitation et l’inégalité, peut-être donneront-ils d’une main pour reprendre de l’autre, mais ils n’y mettront pas fin, ce qui reviendrait à se destituer. Ils ne se sont jamais sacrifiés, et ne le feront jamais. Selon le Billionaires Index de Bloomberg, « en 2018, les 13 personnes les plus riches de France ont ajouté 27,6 milliards de dollars à leur fortune (environ 23,4 milliards d’euros), soit 12% de plus qu’en 2017. »
Alors?? Alors la bourgeoisie est à inquiéter jusqu’à ce qu’elle abandonne ses faveurs, et le cas échéant, à détruire en tant que structure. A nous de nous ré-approprier et collectiviser les outils de production, d’organisation et de décision politique.
« Comme l’état est né du besoin de refréner des oppositions de classes, mais comme il est né, en même temps, au milieu du conflit de ces classes, il est, dans la règle, l’État de la classe la plus puissante, de celle qui domine au point de vue économique et qui, grâce à lui, devient aussi classe politiquement dominante et acquiert ainsi de nouveaux moyens pour mater et exploiter la classe opprimée. »
Engels
Dans leur développement, les actions sont donc à concevoir sous l’angle de l’efficacité, c’est-à-dire du degré de modification qu’elles amènent ou non. A ces fins il n’y a aucune règle stricte, seule une observation minutieuse de chaque terrain de lutte déclenchera le bon geste : celui qui fera pencher le combat vers sa victoire. Afin de s’adapter à différentes situations et enjeux, les actions peuvent et doivent être le fruit de multiples techniques. Aucune ne se suffira à elle-même et toutes doivent jouer et s’apporter, se compléter : le tout est plus que le somme des parties, mais la synergie qui s’y déploie.
Afin d’étirer le spectre stratégique de résistance, il est nécessaire de sortir du dogmatisme de la non-violence. Si chaque méthode à ses limites, aucune ne doit devenir le cadre empêchant l’autre de se réaliser, sauf si cette dernière nuit au processus révolutionnaire dans son ensemble. La non-violence atteint les siennes quand elle se retrouve inefficace et bornée. Si elle ne mène qu’à des statu-quo, alors il est nécessaire d’avouer ses faiblesses et muter. Le pire serait qu’elle devienne une norme aux mouvements, qu’elle se porte caution de la bien-séance des révoltes. Quel oppresseur ne sait pas heureux d’une telle auto-régulation du conflit?? A ce point de rupture, le pacifisme collabore en protégeant le pouvoir en place. Par ailleurs, n’est-il pas simple de se réclamer de la non-violence quand on n’en subit aucune?? La non-violence stricte ne porte-elle pas en elle la violence même des rapports de classe, où des privilégiés prônent la paix sans avoir jamais éprouvé le quotidien de ceux qu’endurent la guerre?? Ne se coupe-elle pas, en les essuyant d’un revers, de toutes les autres pratiques insurrectionnelles qui ont pourtant parfois fait leurs preuves?? Elle risque ainsi de se priver d’autres partisans pourtant bien concernés pour mener les luttes à bien. Elle peut néanmoins être stratégiquement pertinente sur d’autres aspects.
La violence quand à elle est à placer au bon endroit, à canaliser et n’est pas non plus à adopter de manière systémique, si un autre levier est plus efficace.
L’idéal est que ces deux méthodes s’apportent et se supportent. Que, par exemple, des actions de sabotage soient relayées et soutenues par de grands mouvements populaires, que des activistes faisant usage de la force lors d’une occupation de place soient ravitaillés par des cantines de rues elles-mêmes soutenues par des voisins… Allions-nous?!
Mais que ces alliages soient numériquement grands importe parfois moins que le fait qu’ils soient finement noués et déterminés. Le nombre ne fait pas forcément la force ni l’acuité. Un groupe de dix personnes frappant juste est sans doutes plus efficace que milles personnes confuses… Soyons précis, et cherchons alors à devenir une multitude de personnes qui frapperont juste?! Pour l’organisation d’une action, n’oublions peut-être pas d’en évaluer les risques juridiques, ce qui permet d’en définir le plan, les moyens, la participation et la défense (avec au possible une équipe juridique.)
Il y a toutes les latitudes possibles pour que chacun et chacune trouve sa place et son degré d’implication dans le mouvement.
L’essentiel est de participer à l’élan, à la pression,
A cette force dynamique,
A cette force… dynamite?!
-> Vers les Groupes Locaux de Résistance_
Partir de notre milieu de vie. De ce que nous connaissons, de ce que nous chérissons, de ce qui, finalement à force d’habiter, nous constitue : ce quartier où nous avons des souvenirs, ce champ où nous avons couru enfant, cette forêt qui cache des trésors, ce ruisseau qui abrite des secrets… Agir où nous sommes en puissance et où nous en sentons les effets, ce qui donne toujours du coeur à l’ouvrage?! Alors, car aucune zone ne peut être épargnée des attaques du capitalisme, chaque zone est à défendre et ce qui lui portera atteinte est à attaquer. Le monde est une Zone A Défendre.
Pour ce faire, créons les Groupes Locaux de Résistance.
Commencer par recruter proche de soi, dans les amis, les voisins, là où nous avons prise puis élargir. Se constituer en groupes pour mener des veilles et actions sur les sujets sensibles, propres au territoire proche, palpable. Le pouvoir a déserté ses lieux d’exercice traditionnels pour aujourd’hui se définir par des structures économiques, il s’incarne alors d’avantage dans des chiffres, des flux de marchandises et leurs infrastructures que dans quelques lieux jadis politiques. L’empire techno-capitaliste est un système aussi fragile qu’il est connecté. Il n’est tissé que de points locaux faillibles, attaquables, ainsi, paralyser un de ces point, aussi précis qu’il soit, peut revenir à verrouiller l’ensemble du réseau, et ouvrir le rapport de force. Il y a dès lors plus d’efficacité à bloquer un axe routier qu’à manifester devant un parlement, plus de lucidité à défendre une zone et la libérer que de signer des pétitions et faire des marches, plus de bon sens de créer de nouvelles structures de travail et d’entre-aide que d’attendre les allocations. S’emparer de la politique devient alors une action physique, un sport de combat. Les idées doivent descendre s’incarner dans la matière. Créer les groupes locaux de résistance permettrait ainsi de mener les actions servant cet horizon : la destitution du capitalisme, la suppression des rapports d’exploitation et la protection du Vivant.
Ces groupes locaux pourraient comporter des sous-groupes affinitaires dans lesquels chacun et chacune trouverai son niveau d’implication et de risques acceptés. Encore une fois, il y a de la place pour tout le monde.
Les actions seraient ensuite à définir selon les cibles et objectifs établis par les groupes/sous-groupes : faire plier des entreprises néfastes, ouvrir des ZAD, saboter quelque outil du capitalisme, faire une veille sur une structure carcérale tel qu’un Centre de Rétention Administratif, paralyser l’accès des employés à tel siège social, diffuser des tracts et journaux afin de fertiliser le terreau résistant, bloquer et occuper des sites de vente, de production ou des axes de transport, mener des opérations d’affichage sauvage ou de tag, ouvrir des habitats d’urgence et des cantines de rue, s’autonomiser en nourriture, organiser des manifestations, créer des lieux d’échange et de débat, des zones de gratuité, soutenir d’autres luttes… Le travail ne manque pas ?!
Ces groupes locaux peuvent et doivent ensuite se coordonner à plus grande échelle : se synchroniser, amplifier le tissu de résistance et passer du quartier à la ville, de la ville au département, du département à la région et ainsi de suite, via des assemblées d’assemblées, afin de mener de plus vastes opérations et ainsi participer au démantèlement généralisé des structures d’oppression et d’exploitation.
Le Local fait le global, et si l’économie est devenue mondiale, les insurrections le seront aussi?! Préparons-les.
Nous ne connaissons pas la zone, nous sommes la zone.
L’efficacité d’une action dépends de la connaissance que nous avons du territoire sur lequel elle se déroule. Alors il compte de le connaitre, de le traverser, de l’étudier pour y être en puissance. Connaitre chaque ruelle et leurs parts d’ombres. Leurs cachettes. Leurs pièges. Leurs échappatoires. Nourrir la proximité. Dans le petit périmètre de notre milieu de vie, dans ce coin, ce quartier, ce village, cette forêt, nous pouvons et devons trouver des alliés, des supports de tous types. Combien d’amis, de passants que l’on croise tous les jours dans la rue sont peut-être révolutionnaires sans le savoir?? Combien désirent entrer en résistance?? Combien n’ont pas idée qu’ils devraient le faire?? Combien voudraient rompre leurs chaines sans oser l’avouer, sans s’en sentir capable ou légitime, sans sentir de soutien?; sans, finalement, savoir toute leur puissance insurrectionnelle?? Ne pas être conscient de sa force, s’est avoir appris à la mépriser. A se méconnaitre. A cultiver sa passivité et ses dépendances. A chacun, chacune, ses pleins pouvoirs?! Le potentiel mouvement de libération face à un système oppressif est découpé et partagé entre chacun des membres de ce même système. Alors il faut prendre soin des appuis proches. Nourrir les intimités locales. Informer les voisins. Faire parler les rues. Gagner en proximité et appeler à être rejoint pour amplifier la résistance : la force collective ne se crée qu’au contact.
Nous sommes toutes et tous un maillon de la collaboration, ou de la résistance.
A choisir.
Agir implique de ne pas être pris, donc la discrétion de mouvement, d’organisation et de communication interne.
Agir implique d’être vus, ou que les conséquences de l’action le soient.
Faire basculer le poids, la densité, du côté de la lutte. Transformer l’état des choses, passer du stérile au fertile, de l’inerte au mouvement, de la domination à l’insurrection.
Nous sommes le sérum.
-> « Manifester l’occulte / occulter l’apparent »_
L’information est une bataille. L’armée ennemie se gave d’électricité pour ses publicités virtuelles surdimensionnées, elle dispose d’écrans de propagande dans chaque foyer et même dans les mains de la population. Nous ne combattons pas à armes égales. Se battre contre un système sans avoir le peuple avec soi revient sans doutes à s’immoler par le feu tout en voulant l’éteindre. Concurrencés par des sociétés privés prédatrices, il nous faut donc nourrir la révolte et la culture de résistance par tous les moyens, il faut documenter nos actions et idées et les faire entendre et valoir?! Il nous faut nous outiller intellectuellement et collectivement. Injecter le vaccin à coups de tracts propagés dans les rues, distribués de main en main ou via des infokiosques ouverts sur les marchés, les festivals, les manifs. Informer à coups de textes jetés dans les boites aux lettres, de journaux locaux, de messages écrits sur des billets de banques (qui n’en perdent pas leur valeur) ou tagués au sol, d’affichage sauvage, de projections de documentaires, et d’assemblées où l’on peut se réunir, discuter et débattre. Aussi, reprendre les outils et les canaux virtuels de l’adversaire, les tourner à notre avantage : hacker les médias et leurs supports, inonder les réseaux-sociaux de contenus d’information sous toutes les formes : vidéo, photo, musique, fichier texte. Etc…
Muer jusqu’à être partout, nous qui ne sommes personne.
Agir en politique, s’est se mouvoir plutôt que d’être manoeuvré. Le pouvoir n’a de pouvoir que si on lui en donne, alors rompons les liens qui nous aliènent pour en définir de nouveaux : ceux d’une résistance qui se tient ensemble, debout?!
Hybrider les pratiques et se rendre polymorphes, innarêtables et rejoignables.
« Il ne faut pas compter sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre. »
Albert Einstein
-> Catharsis du brise-glace_
En prétendant créer, le capitalisme détruit.
En le détruisant, nous ouvrons une marge pour créer.
Concernant le sabotage, la règle est simple : un minimum de risques, un minimum de temps, un maximum de dégâts.
Il demande préparation, rigueur et organisation afin d’être un acte de finesse, furtif.
Nous saboterons car c’est tout ce qu’il nous reste pour stopper le drame quand les machines sont sourdes et le pouvoir aveugle.
Nous saboterons, car chaque alerte lancée ne fait que le bruit de son écho contre les parois des abysses modernes.
Nous saboterons car c’est la seule manoeuvre que nous laisse le système actuel, plus déshumanisé que jamais, où le pouvoir réside moins dans des assemblées humaines que dans des infrastructures, des chiffres et des machines, et puisqu’on ne parle pas à une machine, nous la casserons.
Nous saboterons vos logiques,
Nous saboterons vos plans,
Nous saboterons vos outils,
Et nous continuerons jusqu’à l’arrêt du capitalisme et de son Etat complice.
Le capitalisme ne peut-être ni réformé, ni civilisé, il n’est qu’à détruire. Voici notre bulletin de vote.
Ni gauche, ni droite : Nitroglycérine.
« Le pouvoir est maudit, c’est pour cela je suis anarchiste. »
Louise Michel
L’insurgé qui s’en prend aux ustensiles de l’Ogre Etat-Capital pour les mettre hors d’état de nuire ne fait-il pas dans son acte preuve de raison?? Casser une banque, n’est-ce pas affirmer ouvertement leur stérilité ainsi qu’un désire fort de rompre avec elles?? Affronter la police et les mettre en échec, n’est-ce pas les reléguer au rang de milice d’Etat — rendus légitimes par leur employeur frauduleux?? C’est redéfinir les rôles, faire basculer la peur et la puissance. L’acte de détruire les outils-symboles de d’un oppresseur n’est-il pas signe d’une bonne santé du peuple face à une gouvernance nuisible?? Dans une pulsion de vie, l’opprimé dépose sa colère, la métamorphose en bris de verre, la transforme en un feu qui brûle. C’est donc déjà agir, se manifester, se transformer. Ne pas rester docile. Oser avancer. Assumer le conflit. Signaler la rupture. Communiquer un refus. C’est une masse qui se libère en régurgitant la violence absorbée au fil du temps…
Est-ce légitime?? Est-ce seulement à la hauteur du drame??
Quand à la manifestation sauvage, n’est-elle pas une prise de liberté par excellence?? Il serait biaisé de dire que ce ne sont pas des moments émancipateurs et constructifs. C’est reprendre, à coups de « Ahou?! », la rue qui est à nous. L’arracher aux mains des publicitaires, de l’argent et des pouvoirs publics. C’est redéfinir notre rapport à la ville, l’habiter pour une fois concrètement, elle qui n’est plus que traversée par des spectres en chemises… C’est créer de nouveaux contacts avec le tissu urbain. On ne peut que saluer la dextérité et le courage des architectes des barricades qui savent déboulonner la mégalopole et son mobilier pour la transformer à leur avantage, qui la libèrent de ses fonctions de base. Qui la piratent. Qui forgent de nouveaux outils et symboles en faisant fondre les anciens en fusion.
C’est finalement apprendre en faisant, trouver des amitiés, des appuis pour faire front ensembles. C’est tisser des liens étroits avec une horde d’inconnus, se tenir unis pour avancer vers un horizon lointain, contre un ennemi commun. C’est l’entre-aide et la camaraderie au stade insurrectionnel. C’est, face aux dérives autoritaires, l’auto-défense populaire. Ainsi, n’est-ce pas un acte social et fédérateur, donc constructif?? Reste toujours à savoir ce que l’on construira une fois la cible détruite. Avoir une ligne de fuite, un horizon-commun et être sûr que celui-ci soit bon et partagé est dès lors essentiel. Ceci demandera des réflexions collectives et plus largement une véritable culture de résistance, une assise populaire pour mettre debout, jour après jour, le monde que l’on souhaite et non un pale travesti de celui que nous cherchons à destituer. Finalement, car cela revient à parler de violence, celle-ci est à envisager comme se déployant au sein d’un système oppressif.
« Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés. La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première.
La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres.
Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. »
Helder Camara.
De la non-violence à l’action directe, le spectre est large et la seule question importante reste celle de l’efficacité même des actions : gèlent-elles la situation ou amènent-elles à la révolution??
L’heure n’est plus à la revendication, à la demande mains tendues, nous avons compris qu’ils ne lâcheront rien. Nous non plus?!
Non, l’heure est venue de tout exiger sans rien demander, de se ré-approprier ce qui doit être nôtre : le choix de nos conditions d’existence et de la manière dont nous voulons la mener?; de la création d’un présent désirable et d’un avenir possible?; de la répartition de ce qui doit être commun et de la suppression de ce qui nous opprime?; de la création des Communes et des Zones Libres.
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_ETAT LIQuiDe / Dispar.. .
Se dissoudre :
Car nous ne sommes personne, car nous n’existons pas, nous pouvons être tout le monde.
Car nous ne sommes personne, car nous n’existons pas, ils ne nous attraperont pas.
-> Nous ne sommes pas en mouvement, nous sommes le mouvement_
Il s’agit ici de se liquéfier.
De pénétrer les interstices pour s’infiltrer comme l’eau dans le bitume craquelé des citadelles. Savoir se diviser en petites gouttes face à l’obstacle puis redevenir le torrent. Submerger, devenir le raz-de-marée là où ils attendent la sécheresse. Etre mobile et furtif.
Puces RFID, géo-localisation, fiches S, marqueurs toxiques sur les manifestants, caméras à reconnaissance faciale, drones et radars, raft de nos données personnelles, capteurs et senseurs : Nous vivons dans une société de contrôle et de trace. Une société de traque. Petit secret : nous sommes les proies et le produit?!
Les technologies sensées nous libérer nous ont finalement asservies. Nous travaillons pour elles et les obtenir plus qu’elles ne travaillent pour nous et nous émanciper. Aujourd’hui, à l’heure du Big-Data, peu d’actions dans le monde réel ne sont pas virtualisées, traitées, stockées et revendues. A chaque clic numérique et maintenant à chaque pas dans le réel nous laissons des traces virtuelles utilisables et commercialisables. Nos vies s’algorithmisent. Nous devenons sujets d’étude pour que les IA des grandes compagnies traitent nos informations personnelles afin d’adapter leurs offres de biens et services. Nos comportements (et leurs interprétations) deviennent une valeur marchande : nous devenons en même temps les vendeurs, les magasiniers et les clients de nos propres existences. La facture sera amère quand il faudra passer à la caisse… Et à la caisse, la caissière, pauvre caissière, n’est-elle pas elle aussi traquée, son travail analysé en temps réel et livré ainsi par une IA complice aux nouveaux modes de management?? Humain diminué par machines augmentées. Nos vies tendent ainsi à être chiffrées et pilotées par la donnée. Ainsi, le techno-libéralisme diminue sans cesse l’espace vacant entre l’humain et les multinationales. L’incitation à la consommation devient omniprésente et ultra-personnalisée. Capitalisme sur mesure. Notre intimité devient un produit de marketing. Comment accepter cela?? Encore une fois, ne parlez pas de confort?!
Enrayons la machine.
Veillons aussi, par sagesse, à ne pas nous définir, pour ne pas risquer l’étiquetage ou la trace.
Ne pas personnifier une action ou une lutte nous qui aujourd’hui sommes constamment invités à faire de notre identité un spectacle ou un produit.
Ne pas créer de prise que l’adverse saisirait. La liberté se vit à visage masqué parait-il…
« L’art de surgir, la force de disparaitre. La force de surgir, l’art de disparaitre. »
-> Cultiver les angles morts_
Ne plus se soustraire à la traçabilité s’est prendre sa liberté de mouvement et d’existence. Anonymiser nos mouvements, c’est échapper au système Panoptique de surveillance générale, réel ou supposée, qui modifie jusqu’à nos comportements quotidiens. C’est évident, prendre les angles morts nécessite un temps plus long que de suivre les chemins balisés mais nous prendrons le temps qu’il faudra et qui est le nôtrepour naviguer sur les voies de traverse.
La révolte n’est pas source de confort mais offre le bonheur immédiat de choisir son monde.
« Veillez à signaler tout comportement suspect » incitent les haut-parleurs des gares de train et autres HUB. Refuser d’être traqué, observé, analysé, c’est refuser de modifier sa dégaine, son comportement, sa manière d’être. Le système de contrôle le plus puissant, le mieux installé, le plus dur à démanteler, est celui fixé dans nos crânes. Dans nos petites boites crâniennes carcérales. Le sentiment d’observation constant ne peux qu’altérer le comportement des individus se sachant — ou se croyant — observés. Le tour de force est ici. CCTV est dans nos têtes. La surveillance la plus efficace est celle que le système nous incite à faire en nous poussant à des dynamiques d’auto-observation,
d’auto-régulation et d’auto-censure. Alors oeuvrerons à disparaitre. A domestiquer les zones d’ombres pour en faire des allées de passage. A devenir furtifs. Se soustraire au réseau, c’est se mouvoir dans ses interstices. Apprendre à les connaitre. A les apprécier. C’est donc longtemps l’observer, l’analyser pour trouver la faille par laquelle s’évaporer. Encore une fois, c’est une danse avec le système. C’est une discipline hautement plus active que la tranquillité offerte aux usagers-premium du réseau connecté. D’ailleurs, ils sont simples à repérer : ils dorment ou se délassent sur des écrans puis bippent aux bornes, aux postes de contrôle de la ville intelligente. Smart-city et humains-machines…
Refuser de jouer selon ces règles c’est également refuser de nourrir l’Ogre, de financer le système et de lui donner des billes.
C’est l’affaiblir, et participer ainsi au processus insurrectionnel.
-> La fraude, l’athlétisme de l’esquive_
S’hacketiver. Pirater la ville jusque dans notre manière de nous y déplacer. Jouer avec elle et ne rien lui laisser. D’abord, entrer dans le réseau. Trouver une brèche, puis s’engouffrer furtivement. Alors, corps et esprit sont tout-deux constamment tendus pour se frayer un chemin entre les brigades de contrôleurs et les barricades à franchir pour arriver à destination. Chaque station passée est un point gagné sur l’adversaire. Le traverser à ses frais et l’épier de près. Connaitre les galeries, les raccourcis, les passages oubliés pour organiser la sortie. L’extraction. Chaque trajet rondement fraudé est une revanche. Parfois… se faire attraper et alors oublier son nom. Disparaitre jusque dans son identité, Devenir liquide. Ils ne nous auront pas?!
Parfois, à l’inverse s’il le faut, se tasser dans la foule, assimiler leurs codes.
Payer leurs tarifs pour éviter leur police…
-> Devenir le mouvement pour le re-définir_
Revoir aussi notre façon d’être, de nous mouvoir et de nous émouvoir. De nous déplacer. D’appréhender les espaces et notre rapport au temps. Changer d’échelle. Redevenir terrestres. Ralentir. Ruisseler. Se sentir glisser. Ressentir à nouveau l’herbe sous nos pas. La fatigue dans nos jambes. Les détails… Nos modes de déplacement ne sont plus aujourd’hui à dimension humaine. Nous transplantons, téléportons et laissons forcément une part de nous arrachée derrière. Le mouvement n’est pas vécu. Il faut prendre le temps de redécouvrir notre dimension humaine. Alors, envisager d’autres modes de déplacements pourtant bien connus. La marche, le vélo, le bateau, le cheval permettent de nous mener où nous le voulons, si nous avons le temps d’y aller à un rythme qui, encore une fois, est le notre. Le temps. Le prendre et ré-apprendre. Les mollets irrigués de sang, le pédalier bien huilé, la voile tendue par les alizés et les coups de sabots échappent aux énergies fossiles et donc à la prédation des industries à combattre. Mais bien entendu, s’il nous faut la vitesse pour passer d’un terrain de lutte à un autre, pour nous échapper, alors prenons la.
La stratégie d’évaporation est à développer aux autres services que nous propose le « monde moderne » : refuser leurs puces, comme on ne veut pas des tiques.
Payer cash permet ainsi d’éviter la traçabilité de nos achats et aux petits commerçants d’éviter des frais de transaction bancaire importants. Ne plus numériser nos vies sur des plateformes avides de données personnelles. Ne plus acheter leurs produits. Vider l’argent des banques. Privilégier d’autres formes d’échanges et d’autres formes de monnaie.
Elle peuvent devenir locales ou peut-être cryptos…
Migrer, s’évaporer sur des réseaux parallèles : des systèmes décentralisés, cryptés, égalitaires et pair-à-pair…
S’échapper des prises de l’ennemi pour mieux le démantibuler.
Se soustraire à tout cela se fera sans tristesse ni privation, car ce que l’on hait ne nous manque pas.
Devenir un courant-fluide, diminuer l’emprise…
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_ETAT GAZEUX / Vivre au milieu_
Sécession et Emancipation
Vers les Zones Libres Auto-Gérées
Harmonie • Autonomie • Résistance
Vivre entre les deux états précédents, entre l’apparition et la disparition.
Suspendus et invisibles, comme une cabane dans un arbre. Comme un nid dissimulé. Comme un caméléon tranquille, qui n’est pas sur son milieu, mais qui devient le milieu.
En Osmose. Il n’est pas entouré par la vie, mais traversé par celle-ci.
_Créer les Bases Arrière_
Bâtir. Nourrir. Vivre autrement.
L’état ou le patronat ne donnent pas, ni salaire ni aides, ils rendent juste une partie de ce qu’ils prennent. Dès lors, demain, du haut de leur pouvoir, ne pourront-ils pas choisir de rendre moins qu’hier?? Car « les temps sont durs et qu’il faut participer à l’effort », que « après tout, nous vous donnons déjà du travail »… Nous devrions presque nous sentir redevables. Ainsi, ils bâtissent leur autorité à cet endroit : le choix de ce qui est à prendre et de ce qui est à rendre. Nous avons remplis leurs coffres, ils peuvent nous vider la gamelle mais ne laissons aucune place à la victimisation ou à l’attente passive. A l’inverse, empuissantons nous?! Les minimas précaires juste bons à endormir la révolte et assurer la domination ne nous intéressent plus, nous voulons tout?! Il n’y a aucun avenir juste et possible avec un pouvoir corrompu, bourgeois et autoritaire, c’est pourquoi, en toute logique, nous devons nous séparer des ces
tutelles-envoûtements, y placer des gardes-fous solides et créer nos propres systèmes d’émancipation collectifs.
Nous devons ériger nos structures pour nous libérer des anciennes et ainsi retrouver notre force collective et individuelle.
Là où l’Etat délaisse, où le Capital perfore : jouer en contrepoint, nidifier des remèdes, bricoler des réponses.
Alors si la force est collective, construisons nous en collectifs autonomes et déterminés. Regroupons-les en Communes libres ou en coopératives, liées ou issues des Groupes Locaux de Résistance.
Tissons les liens réciproques qui font le Commun. Maillons. Multiplions les lieux et les connexions pour broder un réseau, un monde parallèle qui porterait des réponses au démantèlement du Vivant, à la libéralisation économique du globe et à la précarisation du genre Humain. Ils s’acharnent à sauvegarder des intérêts privés, oeuvrons pour l’intérêt commun?!
Sur les Zones Libres, réapproprions-nous jusqu’à nos modes de vie. Nos manières d’habiter, de manger, de boire, de travailler, de se reposer, de fêter, de construire, de détruire.
Vivre en étant protecteurs et partisans du Vivant,
Dans tous ces endroits qui disent un autrement,
Dans tous ces endroits qui disent un autre monde…
_Bâtir_
Bâtir en dur nos idées. Assembler une charpente comme on érige une philosophie. Construire des extensions de nous mêmes, des expressions bricolés, belles, et qui savent aussi nous abriter du gros temps, de l’averse, de l’adverse.
S’emparer des espaces, des zones, des terrains, de quelque façon que ce soit : en achetant collectivement, en louant ou en rencontrant d’abord la personne qui prêtera simplement son petit bout de terre, par la réquisition citoyenne (digne nom du Squat?!). Que chaque Zone soit singulière, de par sa localisation, sa population et la manière d’y vivre, mais qu’elle soit aussi, tel un exemple ou un terrain d’expérimentation : multipliable, amplifiable, modifiable et rejoignable.
Quelle est l’architecture d’une révolte?? Elle est auto-construite, imaginative et surprenante, parfois fragile, souvent humble. Si l’habitat est léger, la revendication est lourde. Un peu partout, souvent en pirate, poussent des cabanes en bois, en terre-paille, en bric à brac, des caravanes, des camtars pleins de camarades prêts pour la prochaine cavalcade. Parfois la Police rode, menace et détruit. C’est le signe d’être pris au sérieux.
Habiter ainsi, c’est redéfinir les standards et répliquer à la mégalopole. A ce qu’elle propose. Le béton et son monde. Des camisoles de goudron. Des étouffoirs. Lui opposer l’organique. Se ré-insérer dans le tissu vivant.
C’est aussi accéder plus facilement à un logement, car peu onéreux, et ainsi s’indépendantiser face aux banques et aux propriétaires. Et pourquoi pas, en chemin, remettre en question la propriété privé, faire de l’habitat un partage??
Ne pas défendre la forêt, mais être la forêt qui se défend.
Embrasser, épouser son milieu. Revenir sur Terre et savoir y retourner.
Certains veulent des habitats qui se détruiront naturellement une fois qu’ils ne seront plus d’ici…
Belle leçon d’humilité, merci l’ami Dodo…
D’autres construisent des tours de verre croyant pouvoir rejoindre le ciel. Nous préférons avoir notre demeure près du sol…
Habiter, c’est finalement développer une infinie sensibilité à son milieu de vie. Le laisser raisonner en nous. Respirer l’espace. S’imprégner, l’intégrer, y être en symbiose…
Saisir toutes les nuances vert-tendre des arbres au printemps?; entendre la mélodie des écorces qui rient sous les caresses du vent et les oiseaux que l’on soupçonne seulement de chanter?; sentir l’odeur gourmande de la terre humide après la pluie, ivre d’une eau nourricière?; percevoir le passage furtif d’un animal?; hérisser ses poils au contact d’une variation de température de quelques degrés centigrades… un nuage est passé jeter une ombre.
Etre pleinement au milieu. Ici et maintenant.
La porte est ouverte.
N’hésitez pas à rentrer.
_Nourrir_
La nourriture était un médicament. Celle d’aujourd’hui tend plutôt vers le poison. Traitée et standardisée puis vendue à l’étalage. Est-ce avec cela que nous devons nourrir la Vie, les enfants, les amis??
Même les couverts tombent malades.
Les fourchettes perdront bientôt leurs piquants…
Encore une fois, ici, plus besoin de preuves ni de se justifier. Il nous faut juste répondre. Nous organiser. Trouver comment vivre autrement. Retrouver un chemin, un art de vivre que nous avons perdu en route et que nous pouvons ré-inventer aujourd’hui. Quel tour de force incroyable, que d’avoir réussi à nommer « Progrès » ce qui ne tient que du désastre. Force du Novlangue. Les intérêts sont privés, les pertes communes.
La science rationnelle à tué l’accès au savoir par l’empirisme et l’écoute des sensations. L’industrie pharmaceutique a tué les sorcières, et pas mal de patients… L’industrie agro-alimentaire a tué les paysans, les sols et la vie des champs. L’industrie automobile a tué les ruelles où courraient les enfants…
La destruction du Vivant semble être un bon placement financier… Nous investirons ailleurs.
A l’heure où le monde est hors sol, notre progrès sera de redevenir Terrestres. Ce n’est pas revenir en arrière, mais au contraire, se ré-insérer dans le courant du Vivant. Le mot « connexion » n’a jamais autant voulu dire « déconnexion ». Nous ne sommes rien d’autres que Vivants, et n’avons jamais autant vécu dans l’inerte. Morts. Qui sait encore dire qu’elles sont les essences d’arbres croisées lors d’une balade dans un restant de forêt?? Comment se prendre pour des Dieux quand notre survie dépends des abeilles?? Nous vivons au sein d’un écosystème sensible, fragile et connecté. Comment envisager notre existence sans permettre à la vie dont nous dépendons d’elle-même se perpétuer?? Nous avons été arrachés alors il nous faut revenir.
Revenir au bon sens paysan.
Arrêter de nous confronter au Vivant, mais le comprendre, donc le prendre, dans le sens de « l’embrasser », coopérer avec lui.
Arrêter de domestiquer, nous en avons vu les limites, mais ensauvager et être attentifs.
Il ne s’agit plus seulement d’arrêter la destruction des sols mais aussi de permettre leur régénération. L’avenir alors est sauvage, beau et indiscipliné. Laisser le Vivant reprendre ses droits, ses forces, sa place. Sur certaines zones, prélever avec raison et sur d’autres, avoir le respect de ne pas intervenir, les sanctuariser pour laisser vivre et mourrir en paix. La vie saura prendre soin d’elle-même. N’avons nous pas assez fait??
La nature ne vit pas en ligne, comme une révolte elle n’accepte aucun conformisme, ne suit aucun chemin tracé. Encore une fois, elle est bonne école pour qui sait voir, distinguer, écouter, observer et en tirer des leçons.
Un des enjeu
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