Introduction

Cette brochure s’adresse avant tout aux personnes fréquentant les milieux féministes anars, radicaux et/ou queer, francophones et/ou bilingues montréalais.

Nous ne prétendons pas connaître les réalités des milieux féministes de d’autres régions ou d’ailleurs dans la francophonie, même si nous espérons pouvoir créer des liens avec ceux-ci par la diffusion de cette brochure.

Nous sommes blancHEs et colonNEs, et ça a certainement une influence majeure sur la façon dont nous voyons et vivons les réalités discutées dans les textes qui suivent.

Nous ne planifions pas pour le moment de traduction vers l’anglais, parce que nous croyons que la majorité des enjeux abordés sont (étrangement) spécifiques aux milieux francophones, en tout cas ceux qu’on connait à montréal.

Notez que nous ne sommes pas des universitaires, donc si certains concepts vous semblent un peu flous, c’est probablement parce qu’on les a appris/compris sur le tas.

Bonne lecture.

Le comité des ex-anarchistes aigriEs, mai 2016.

 

Sur les exclusions en milieux féministes


Première partie: autour des agressions sexuelles


Mise en contexte

Ces dernières années, dans les milieux francophones anarcho/radicaux/queer féministes montréalais, les exclusions de personnes ayant été dénoncées pour agressions sexuelles sont devenues de plus en plus courantes. Beaucoup de féministes ont mis (et mettent toujours) énormément d’énergie à se battre pour que les exclusions d’agresseurEs sexuelLEs soient attendues, normalisées, non-contestées dans nos milieux. Ce mouvement est principalement divisé en deux approches, qui s’affrontent et se confrontent continuellement.

1ère approche: Exclure les agresseurEs sexuelLEs de tous les espaces et événements se voulant féministes. Cela part du principe qu’une personne survivante de violence sexuelle va être forcée de s’auto-exclure d’un espace si elle court le risque d’y croiser la ou les personnes l’ayant agressée sexuellement, ce qui pourrait raviver le traumatisme et les émotions lié à(aux) l’agression(s). En d’autres termes, si les agresseurEs ne sont pas activement excluEs d’un espace, les personnes survivantes en seront passivement exclues. Sont considéréEs comme agresseurEs toutes les personnes ayant été publiquement dénoncéEs pour agression sexuelle, en tenant plus ou moins pour acquis que ces personnes se reconnaîtront ou seront reconnues par les autres personnes présentes. Généralement, les organisateurs-organisatrices d’un espace dont les agresseurEs sont excluEs encouragent du même coup les personnes désirant dénoncer unE agresseurE qui ne serait pas déjà « connuE » à les contacter pour demander des exclusions spécifiques. Les critiques de cette approche s’articulent principalement autour de deux thèmes: l’exclusion systématique de touTEs les agresseurEs favorise leur diabolisation et elle n’est pas représentante des besoins de toutes les personnes survivantes.
Exemples récents: la manif du COBP du 15 mars 2016, le tract « Agresseur-e-s dehors » distribué par Les Sorcières lors du Salon du livre anarchiste 2015, la Marche des lesbiennes 2015.

Deuxième approche: Inviter les personnes survivantes de violences sexuelles (ou des personnes les représentant) à entrer directement en contact avec les organisateurs-organisatrices de chaque événement/espace auxquels elles souhaiteraient participer pour faire des demandes en fonction de leurs besoins. Les demandes peuvent aller d’un partage de l’espace à l’exclusion active de leurs agresseurEs. Cette approche donne aux personnes survivantes la responsabilité individuelle de déterminer et d’affirmer elles-mêmes leurs besoins (plutôt que de les prendre en charge collectivement). Cette responsabilité est considérée comme un fardeau par les personnes prônant la première approche, et comme une tentative de respect de l’auto-détermination des individus par les personnes défendant la deuxième.
Exemples récents: le Salon du livre anarchiste 2015, La Radical Queer Semaine 2015

Notre point de vue

En tant que personnes survivantes, nous avons vécu l’auto-exclusion résultant de la peur de croiser nos agresseurEs et nous comprenons le désespoir, la douleur et l’exaspération qui y sont liés. Il y a quelques années, nous en avions plein le cul de voir les gens se déresponsabiliser en nous excluant passivement. Mais aucune des solutions qui ont été mises en place ne nous rassurent ou nous conviennent. En fait, nous tirons de nos expériences la conclusion suivante: nous nous opposons aux exclusions, à toutes les exclusions, telles qu’elles sont actuellement proposées dans les milieux féministes montréalais.

Nous rejetons la binarité qui nous est imposée entre agression et consentement. Nous sommes d’accord qu’il y a agression à partir du moment où une personne se sent agressée (et donc qu’il n’y a pas d’agression si personne ne se sent agresséE.) Par contre, nous pensons qu’il y a une dérive à partir du moment où les comportements sont hiérarchisés en fonction de l’expérience et du vocabulaire choisi par les personnes qui les subissent. Nous nous questionnons sur le manque de discussions existantes à propos de l’immense éventail de vécus se situant entre agression et consentement, car nous ressentons actuellement que la seule façon d’être validéEs dans nos expériences sexuelles négatives est de les étiqueter comme agressions, pour qu’elles ne soient pas étiquetées par défaut comme étant 100% consensuelles et enthousiastes. Pour être plus précisEs, nous ressentons actuellement que les milieux féministes font pression sur les personnes survivantes afin que nous séparions nos expériences entre ces deux cases contraignantes, quand on aimerait juste pouvoir processer en paix les choses qui nous sont arrivées, à notre rythme et avec les nuances et le langage qui nous convient. Qui plus est, la responsabilité qu’on nous impose est double, car nous savons que notre vécu sera utilisé pour déterminer si le ou la potentielLE agresseurE sera ostraciséE ou pas. Nous rejetons donc la binarité imposée entre les agresseurEs dénoncéEs et toutes les autres personnes (nous comprisES) qui, à un moment où un autre, n’ont pas respecté le consentement de leurs partenaires. Nous aimerions que chaque personne puisse réfléchir à ses propres comportements et se remettre en question sans que ça vienne par défaut avec la peur de devenir evil. On aimerait pouvoir discuter sans se cacher de comment on apprend à reproduire les violences qu’on subit, et de l’absence d’espace pour apprendre le consentement sans faire mal aux autres et à nous-même. On veut des espaces radicaux, où on peut discuter des mécanismes super complexes de la violence. Fuck la logique carcérale et la glorification du bullying, on veut des espaces organisés autour de d’autres logiques que celle de l’exclusion.

L’ostracisme des agresseurEs comme seule réponse [aux agressions sexuelles] a été critiqué auparavant, mais nous voulons souligner qu’une telle approche sert à protéger la culture du viol en évitant une confrontation directe avec celle-ci. Les gens protègent la culture du viol en l’externalisant comme s’il s’agissait d’une entité extérieure à elleux. En projetant tout sur unE seulE agresseurE (ou sur touTEs les agresseurEs), les gens font dévier toute analyse des relations sociales produisant les agressions sexuelles, en particulier le rôle qu’illes y jouent. En mettant à l’écart quelques pommes pourries, illes distraient du fait que tout le panier est pourri.
-Traduction libre d’un extrait de la brochure Betrayal, A Critical Analysis of Rape Culture in Anarchist Subcultures

 

Deuxième partie: les exclusions passives

Pour les besoins de ce texte, nous divisons le phénomène de l’exclusion sociale en deux: l’exclusion passive et l’exclusion active. Tel qu’expliqué dans la première partie, le phénomène d’auto-exclusion des personnes survivantes en est un d’exclusion passive: quand une personne survivante de violence sexuelle ne se sent pas en sécurité dans un espace, elle n’a tout simplement pas d’autre choix que de s’auto-exclure. L’exclusion d’agresseurEs sexuelLEs est une forme d’exclusion active visant à combattre l’auto-exclusion des survivantEs de violence sexuelle. C’est aussi une façon pour les communautés de se responsabiliser face au phénomène de l’auto-exclusion: celui-ci n’existe pas par hasard, et nous sommes touTEs responsables des espaces que l’on crée et auxquels on participe collectivement.

On trouve ça vraiment bien que les gens des milieux féministes se responsabilisent collectivement face aux exclusions passives, mais on a remarqué que le concept est souvent présenté comme s’il s’appliquait uniquement à la violence sexuelle. Le problème, c’est que les formes d’exclusion passives perpétrées dans nos milieux constituent un sujet extrêmement vaste et qui touche énormément de personnes, pas seulement les personnes survivantes de violences sexuelles. Nous croyons que de pas tenir compte des autres formes d’exclusion quand on parle de qui on « met dehors » d’un espace/événement témoigne d’un point de vue extrêmement privilégié et d’une vision binaire et simpliste de la violence (sexuelle et autre).

Nous souhaitons souligner que les personnes traditionnellement exclues des milieux anars, féministes et queers sont souvent les mêmes. Nous pensons ici en particulier aux personnes noires, autochtones et racisées, aux femmes trans et aux personnes trans féminines, aux personnes sourdes, aux travailleurs et travailleuses du sexe, aux personnes sur le spectre de l’autisme et aux personnes en situation de handicap (en particulier les personnes à mobilité réduite, les personnes aveugles ou avec une basse vision et les personnes avec un diagnostic psy suscitant peu d’empathie comme « psychotique » ou « schizophrène », par exemple) ainsi que, bien entendu, aux personnes qui cumulent plusieurs de ces réalités. Les mécanismes qui créent ces exclusions passives sont complexes, mais pas impénétrables ou le fruit d’un hasard, comme l’indifférence générale pourrait le laisser croire. Ils méritent une remise en question collective et aussi – surtout – une réelle responsabilisation. Nous pensons que cette responsabilisation doit passer par un décloisonnement des divers aspects des réalités vécues par une même personne. Autrement dit, quand on parle de violence (sexuelle ou autre), nous pensons qu’il faut aussi parler des autres oppressions systémiques et des autres rapports de pouvoir existant entre les personnes concernées. Et que ce décloisonnement doit s’appliquer à touTEs.

Même si ça serait facile et pratique, ce n’est pas possible de trier les gens entre la case les oppresseurEs et la case les oppriméEs. En réalité, on est touTEs au beau milieu d’un criss de gros bordel informe, impossibles à caser. Sans compter que c’est rudement plus facile d’identifier la violence qu’on vit que celle qu’on fait subir. En plus, ce n’est pas possible de pouvoir déterminer, pour une autre personne, quelles sont les oppressions et les situations d’exclusion auxquelles elle fait face. (Fuck le police-age des identités.) Nous nous demandons pourquoi il est devenu légitime d’exclure activement des personnes ayant perpétré de la violence sexuelle, mais pas d’autres types de violence. La violence sexuelle est-elle plus violente que les autres violences? À qui profite cette hiérarchisation des violences? Il est aussi important de mentionner que très souvent, pour ne pas dire tout le temps, les personnes qu’on retrouve dans les milieux queer et féministes vivent à différents niveaux de la violence et de l’exclusion passive dans le monde « mainstream ». Qu’arrive-t-il quand il n’y a pas d’autres milieux qui ne soient pas violents, voire mortels, pour accueillir les personnes très marginaliséEs qu’on exclut? Qui protège-t-on réellement? Pourquoi?

Nous croyons que cette hiérarchisation est un reflet des privilèges des personnes qui sont actuellement en situation de pouvoir dans les milieux féministes montréalais. Beaucoup de gens voient le féminisme comme une façon de reprendre du pouvoir que le patriarcat leur a volé, et c’est très bien comme ça. Le problème c’est que, comme le patriarcat vole beaucoup et à beaucoup de gens, il y a forcément des dynamiques qui s’installent entre ces gens, et ces dynamiques ne sont pas exemptes de rapport de pouvoir, parce que chaque personne opprimée par le patriarcat se situe aussi à une intersection (1) spécifique, où le patriarcat ET les autres oppressions (et privilèges) qu’elle vit s’entremêlent et s’influencent. Et, comme par hasard, les personnes qui se retrouvent en situation de pouvoir dans les milieux féministes francophones à Montréal partagent habituellement plusieurs des caractéristiques suivantes: être de race blanche, être cis, être AFAB (2), être éduquéE et maîtriser le vocabulaire militant, ne pas être handicapéE, être issuE de la classe moyenne, être neurotypique…

Être en situation de pouvoir dans les milieux féministes, ce n’est pas mal en soi. Mais ça vient avec un lot de responsabilités, parce que ça veut dire avoir de l’influence, de la visibilité et du social cred, même si ce n’est qu’à l’intérieur d’un milieu précis. Ça veut dire être respectéE, être écoutéE/luE, disposer d’un vocabulaire pour nommer ce qu’on vit et avoir la possibilité d’user de tout ça pour changer les espaces/événements qu’on fréquente et/ou organise.

…Et ça vient aussi parfois (malheureusement un peu trop souvent) avec la conviction que notre expérience personnelle de la violence genrée (ou de la violence en général) représente et a priorité sur les autres réalités. On aimerait inviter celleux qui ont cette impression à la remettre en question.

 

(1)Le terme intersectionalité a été utilisé pour la première fois par Kimberlé Crenshaw en 1989, dans un essai intitulé Demarginalizing the Intersection of Race and Sex: A Black Feminist Critique of Antidiscrimination Doctrine, Feminist Theory and Antiracist Politics. De nombreuses femmes noires avaient auparavant (depuis au moins l’esclavage aux États-Unis) écrit sur ce concept. Source: Black Feminism and Intersectionality, publié par Sharon Smith dans l’International Socialist Review.
(2)AFAB est un acronyme signifiant Assigned Female At Birth, donc regroupant toutes les personnes ayant été assignées femmes à la naissance, quelle que soit leur identité de genre.

 

Zones de flou

Dans le texte précédent, nous expliquons que le contexte actuel des milieux féministes qu’on connait nous fait ressentir une immense pression à séparer nos expériences sexuelles entre les cases agression et consentement, alors que notre vécu est en réalité beaucoup plus complexe. Dans cette même mouvance, nous avons remarqué que beaucoup de personnes utilisent les mots abuser et agresser comme s’ils étaient des synonymes dans tous les contextes. Cela nous apparaît comme un raccourci potentiellement dangereux, en particulier quand on interchange abuseurSE et agresseurE, ou quand on discute de relations mutuellement abusives en parlant en fait de relations mutuellement violentes… Voici donc une tentative d’établir des distinctions à l’intérieur de certaines zones de flou et de proposer un peu plus de nuances dans les discours ambiants.

Nous voyons l’agression sexuelle comme un ou des gestes ponctuels de violence et de domination. Bien sûr, les agressions sexuelles se produisent fréquemment dans un contexte où la personne qui agresse est en situation de pouvoir systémique sur la personne agressée. Mais ça demeure, à la base, un ou des gestes ponctuels.
Nous voyons l’abus comme un pattern de violences perpetrées par une personne, une collectivité ou une institution, dans le but de contrôler les pensées, les croyances, les actions, le corps, les droits et/ou l’existence en général d’une personne ou d’un groupe de personnes.Nous concevons donc l’agression sexuelle comme étant une forme de violence pouvant se produire à l’intérieur d’une dynamique d’abus, _mais pas nécessairement. _

Dans le contexte d’une relation affectivosexuelle abusive, l’abus peut se manifester par plusieurs comportements (incluant les agressions sexuelles), mais ceux-ci sont toujours organisés en schéma permettant à une des personnes d’obtenir le pouvoir et le contrôle de la relation dans son ensemble. Le pattern de violence permet à l’abuseurSE de systématiquement dominer, avoir raison, être la priorité et l’Autorité.

Voilà, en gros, la distinction qu’on voulait faire. On trouve ça dangereux d’interchanger sans précaution les mots agression et abus parce qu’on trouve que ça permet d’antagoniser encore davantage les agresseurEs (3) et de contribuer à réduire la question de la violence sexuelle à un problème de domination des hommes sur les femmes. Sorry, c’est pas si simple. Qui plus est, véhiculer l’idée que la violence (sexuelle ou autre) perpétrée par des queers et/ou par des femmes n’existe pas, est extrêmement rare ou est fondamentalement différente, ça contribue à enfoncer encore davantage les personnes qui vivent ces violences et qui méritent reconnaissance, soutien et solidarité.

Attention par contre, on n’encourage pas simplement les gens à faire la distinction entre agression et abus. Là encore, on demande plus de place pour des nuances de gris. Tout comme il nous est impossible de séparer nos expériences sexuelles entre agressions ou relations sexuelles consentantes, nous ne pouvons pas séparer toutes nos expériences relationnelles entre abusives et non-abusives. Encore une fois, on refuse de choisir entre tout ou rien, entre noir ou blanc, de peur d’être invalidéEs dans notre vécu. Après tout, nos expériences de relations violentes sont fortement valides même si on ne met pas toujours le mot abus dessus. Et même s’il nous est arrivé d’en vouloir à mort à certaines personnes de nous avoir fait du mal, on souhaite quand même avoir la place pour reconnaître que les dynamiques de pouvoir qu’on a vécues étaient souvent complexes et difficiles à démêler. Et cette place-là, on la trouve quand on choisit plutôt de parler de relations pénibles, déséquilibrées, malsaines, voire toxiques.

Nous réclamons aussi de la place pour parler du fait qu’on a vraiment du mal à bâtir des sexualités et des relations saines, et même à définir ce que ça serait pour nous, parce qu’on n’en a pas connues beaucoup. C’est drôle parce qu’en cherchant dans un dictionnaire l’antonyme du mot ‘abusif’, on a trouvé le mot ‘propre’, et s’il y a un mot qu’on n’utiliserait jamais pour décrire nos visions de relations sexueloaffectives saines, c’est bien celui-là! Parce que les besoins relatifs au consentement sont différents pour tout le monde, qu’ils peuvent s’exprimer et se vivre de plusieurs façons, et que tout ça change et se transforme avec le temps aussi… On veut que nos relations soient pleines d’essais, d’erreurs, d’excuses, d’écoute, d’empathie, de travail, de remises en question et de changements d’idées. Et ça, c’est tout sauf propre.

 

(3) En fait, on préférerait au mot agresseurE un équivalent français de ‘person who caused harm’ ou, au moins, de ‘perpetrator’. Pour le moment, comme c’est le mot que tout le monde utilise, on a choisi de l’utiliser aussi dans cette brochure, mais on n’est pas bien avec ça. Plus de détails sur le pourquoi du comment dans un texte futur, on l’espère.

***Voici un lexique des types d’abus, au cas où ça pourrait être utile à quelqu’unE dans ses réflexions sur la question.

Abus individuel Abus d’une personne envers une ou plusieurs autres, pouvant se situer au niveau émotionel/psychologique, physique, sexuel, économique, culturel/identitaire, etc.

Abus institutionnel Abus perpetré au nom d’une institution, qu’elle soit carcérale, judiciaire, scolaire, de santé, etc.

Abus collectif/sociétaire Abus collectif d’un groupe de personne envers un individu, perpetré au nom de normes préjudiciaires et discriminatoires établies par le groupe abusif. Exemples: l’intimidation/bullying, l’exclusion passive d’une minorité opprimée, la culture du viol, etc.***

 


Entre le soutien et la justice

Mettons une chose au clair. C’est tout à fait valide qu’une personne survivante de violence sexuelle souhaite que son agresseurE soit puniE, souffre, soit isoléE et détruitE. C’est non seulement valide, mais on trouve même que c’est assez normal, dans le cadre d’un processus de guérison, d’éprouver un désir de vengeance envers une personne qui nous a fait violence.

Par contre, nous ne sommes pas certainEs que ça soit tout aussi valide de participer à punir, à faire souffrir, à isoler et à détruire unE agresseurE par solidarité avec une personne survivante. Et ce dont on est certainEs, c’est que ce n’est pas de la justice transformatrice. On pense que pour éviter de reproduire en miniature un système punitif carcéral qui va juste déplacer et reproduire les violences, c’est vraiment important que les personnes ayant agressé aient accès à des espaces d’éducation et de réflexion et à du soutien à l’intérieur de leurs communautés. Et comme ce n’est absolument pas aux personnes survivantes de se préoccuper du bien-être de leurs agresseurEs, nous pensons que c’est important que celleux qui en sont capables se mobilisent minimalement pour ne pas créer un environnement où les agresseurEs dénoncéEs et leur entourage deviennent des ennemiEs du peuple.

Parce que si au final, il reste seulement des bros et des mascus autour des personnes ayant été dénoncéEs pour agressions sexuelles, on ne voit pas trop comment ça pourra être possible pour elleux de changer leurs comportements. C’est plate à dire, mais il faut se sentir au minimum entouréE et en sécurité pour être capable de se remettre en question, et avoir accès aux réflexions et matériel pour le faire. Et ça, on est 100% sûrEs que tout le monde en bénéficierait.

En tant que personnes survivantes, on ne peut pas offrir ça aux personnes qui nous ont agresséEs sans nous mettre en danger. C’est pour ça qu’on vous le demande à vous qui le pouvez, dans nos communautés.

 


Suggestions de lecture

Consultez Suggestions de lecture pour des liens vers les fichiers PDF de certains des zines et pour de nombreux autres liens vers des articles et blogs pertinents.

En anglais

LIVRE//The Revolution Starts At Home: Confronting Intimate Violence Within Activist Communities, édité par Ching-In Chen, Jai Dulani & Leah Lakshmi Piepzna-Samarasinha.

LIVRE//Excluded: Making Feminist and Queer Movements More Inclusive, par Julia Serano.

ZINE// Learning Good Consent, édité par Cindy Crabb.

ZINE//The Broken Teapot.

ZINE//A Stand Up Start Up: confronting sexual assault with transformative justice, par Philly Stands Up.

En français

ZINE//Apprendre le consentement en 3 semaines, édité par Cindy Crabb (traduit par le collectif CROUTE).

ZINE//Les espaces safes nous font violence?, par un trans et un pédé.

ZINE//Un bruit de grelot #2 (dossier misogynie), par Solène Hasse et al.

ZINE//Les violences conjugales c’est pas qu’un truc d’hétéro : sur les violences conjugales entre gouines, trans.

 

Conclusion

Nous avons peur des répercutions sur notre vie suite à la publication de cette brochure. Nous avons choisi de nous jeter à l’eau parce que nous n’en pouvons plus. Parce qu’il le faut. Il faut que ces choses soient dites dans l’espace public, autrement qu’ à mots couverts ou en secret. Nous voulons que les personnes (en particulier celleux qui ont vécu de la violence sexuelle) qui se reconnaîtront dans nos écrits sachent qu’illes ne sont pas seulEs.

Vous n’êtes pas seulEs.

Il y a un monde de possibilités pour se responsabiliser, se soutenir mutuellement et pour se créer ensemble et en groupe affinitaires/sécuritaires un sentiment de sécurité suffisant pour pouvoir se remettre en question et se tenir mutuellement responsables de nos actes.

À bientôt,
Le comité des ex-anarchistes aigriEs

 

 

***Nous avons conscience que notre brochure ne propose pas vraiment de solutions concrètes; nous voulions avant tout nous vider le coeur et offrir des pistes de réflexion. Nous avons quand même voulu terminer en vous référant à un exemple concret qui nous a frappé comme étant super bien, car il tient compte de multiples réalités et propose plusieurs belles nuances.

 

 

https://exanarsaigries.tumblr.com/post/145025793201/brochurehtml