Décortiquation des programmes le pen sarko royal
Catégorie : Global
Thèmes : AntifascismeArchives
[Décortiquation mao du programme des trois candidats, même si d’une certaine manière rien que les citations « sociales et nationales » de Le Pen, Sarko ou Royal sont déjà explicites! Ambiance années 30 garantie…]
Aujourd’hui le capitalisme est en crise et il y a plusieurs options possibles.
Il y a le statu quo proposé par Sarkozy, c’est-à-dire l’alliance de la bourgeoisie traditionnelle et la petite-bourgeoisie contre ceux que Sarkozy n’a pas peur d’appeler publiquement des « prédateurs », ou comme il le résume « Je veux que le capitalisme familial soit encouragé parce qu’il s’inscrit davantage dans la durée que le seul capitalisme boursier. Je veux que la logique industrielle compte autant que la logique financière. »
A l’opposé de cette stratégie de Sarkozy qui passe par la réorganisation brutale des structures de l’Union Européenne, Le Pen représente justement les intérêts de la bourgeoisie impérialiste, financière, qui entend bien faire en sorte que les classes moyennes se raccrochent à elles dans une stratégie expansionniste et agressive reposant sur les seules forces nationales.
Au milieu de cela, il y a Royal avec une position entre les deux, « Car, chez nous, on le sait, le social et le national marchent ensemble et c’est l’Etat qui est garant de leur alliance. »
Réorganiser l’Etat, le moderniser, voilà qui pourra satisfaire toutes les forces en présence, sous la bannière nationale (« Quand on demande aux Français ce qui, pour eux, symbolise le mieux la France, ce qui vient en premier ce ne sont ni les frontières ni la langue, c’est le drapeau tricolore et la sécurité sociale. »).
Sarkozy c’est la bourgeoisie traditionnelle qui compte se maintenir grâce à l’Europe, Le Pen c’est la bourgeoisie impérialiste qui sait que l’heure de s’approprier l’Etat approche, parallèlement au progrès de la crise économique et politique. Royal c’est la proposition d’un 50/50 grâce à la réorganisation de l’Etat.
Le présent document analyse précisément ces trois stratégies de modernisation de l’Etat impérialiste, associées étroitement dans leur nature aux contradictions des classes dominantes.
La question qui se pose est : qui arrivera à prendre le pas sur l’autre, la bourgeoisie industrielle ou la bourgeoisie financière? Et quel camp vont choisir les couches en crise de la petite-bourgeoisie?
1.Le projet social et national de Ségolène Royal
« Chez nous, on le sait, le social et le national marchent ensemble et c’est l’Etat qui est garant de leur alliance. » (Ségolène Royal)
A la différence des trotskystes pour qui le Parti Socialiste est une « organisation ouvrière » ainsi que des anarchistes pour qui la social-démocratie consiste uniquement en du réformisme, pour les maoïstes les socialistes jouent un grand rôle en aidant l’Etat à se réorganiser, se restructurer, bref se refaire une santé.
L’expérience de 1981 est ainsi explicite, puisque les socialistes une fois au pouvoir ont mené toute une série de restructurations, nationalisations, réorganisations de l’Etat, dans les domaines de l’industrie comme de la culture, le tout pour assurer la pérennité de l’Etat impérialiste mais également son renforcement.
Il est ainsi impossible de comprendre les privatisations aujourd’hui sans voir le rôle joué par les nationalisations faites par Mitterrand, qui ont renforcé de nombreux secteurs grâce à l’acquisition par l’Etat de cinq groupes industriels (Compagnie Générale d’Électricité, Péchiney-Ugine Kulhmann, Rhône-Poulenc, Saint-Gobain et Thomson-Brandt), de deux compagnies financières (Suez et Paribas) et de 36 banques.
A cela s’ajoute les nouveaux dispositifs d’aide financière aux entreprises (CODEVI), les opérations de restructuration dans les secteurs souffrant de surcapacités (création du CIRI en 1982), les plans sectoriels en faveur de certains secteurs en difficultés (Plan machine-outil, Plan textile…) et également en 1982 la loi portant sur la réforme de la planification, qui met en place un nouveau dispositif institutionnel, combinant une Commission Nationale de Planification de 80 membres », un « plan élaboré en deux phases, des programmes prioritaires d’exécution (PPE) héritiers des programmes d’action prioritaires, des contrats de Plan signés entre l’État et les Régions, et entre l’État et les entreprises publiques, c’est-à-dire une POLITIQUE DE MODERNISATION DE L’ETAT PAR LA DECENTRALISATION.
De fait, les trotskystes, en considérant qu’il fallait pousser les socialistes à aller plus à gauche, ont objectivement servi la social-démocratie dans sa restructuration de l’Etat impérialiste : celle-ci n’aurait en effet pas pu avoir lieu sans le consensus des masses populaires.
La LCR soutenait clairement l’Union de la gauche, disant au sujet du président Giscard que « Le chasser c’est la précondition de tout changement »; Lutte Ouvrière a appelé à voter Mitterrand en mai 1981 et ensuite pour les socialistes aux législatives en juin: l’Organisation Communiste Internationaliste elle appelait à voter PS, dénonçait la candidature de Marchais, « arme ultime de Giscard », et considérait que la situation serait révolutionnaire en raison de la contradiction entre les « partis ouvriers » au pouvoir et le caractère bourgeois de l’Etat.
Les trotskystes ont ainsi une responsabilité claire dans l’arrivée des socialistes au pouvoir, dans le triomphe de la social- démocratie.
Cela explique la faillite que va vivre le trotskysme : la social-démocratie de Ségolène Royale n’a plus besoin des trotskystes, à l’opposé de ce qui s’est passé dans les années 1980 (intégration dans le parti socialiste et les syndicats étudiants de pans entiers du trotskysme, en tant que cadres).
Car quelle est la nature du projet de Ségolène Royal? Il se situe dans la continuité du programme de François Mitterrand, qui a fixé les principes généraux de l’action social-démocrate.
Le premier aspect, c’est la mobilisation des couches populaires autour du Parti Socialiste comme parti de gouvernement.
Royal dit : « Est-ce cela la condition promise aux millions d’ouvriers, d’employés, de salariés mais aussi d’artisans, de commerçants, de petits agriculteurs qui forment l’immense majorité du peuple français ? » (Lettre du 29 septembre 2006)
La social-démocratie joue un rôle essentiel pour mobiliser la petite-bourgeoisie et ainsi tenter d’agglutiner les forces prolétariennes autour de cette classe «moyenne.»
Royal joue ici parfaitement son rôle.
Le second aspect mis en avant par Mitterrand, c’est la modernisation de l’Etat par une meilleure répartition des responsabilités au niveau local, c’est-à-dire un meilleur « encadrement. »
Royal est très claire à ce sujet : « La véritable réforme de l’Etat c’est la régionalisation, car cela renforce effectivement le pouvoir de l’Etat et cela rend plus efficace l’action publique » (congrès de l’Association des régions de France).
Ce souci de l’efficacité de l’Etat ne suffit naturellement pas à faire un programme: voilà pourquoi le Parti Socialiste a été tenu à l’écart du pouvoir, puisque s’il s’agit d’avoir un parti gouvernemental classique, la bourgeoisie a déjà l’UMP.
Si Mitterrand a réussi à éliminer Giscard, c’était en raison du caractère important du mouvement de masse; telle n’est pas la réalité en 2007.
Au contraire, si les masses populaires étaient protagonistes de la révolte des années 1970, les années 2000 sont celles de la petite-bourgeoisie subissant la crise capitaliste de plein fouet.
C’est l’exacte signification politique de la montée du Front National, qui est le programme stratégique d’alliance de la bourgeoisie impérialiste, agressive et impérialiste, avec la petite-bourgeoisie.
Si la social-démocratie veut pouvoir exister, elle doit ôter l’herbe sous le pied de son concurrent fasciste.
Voilà pourquoi les socialistes ont choisi Royal, provenant d’une famille militaire et ayant fait l’ENA, elle qui a synthétisé le programme du retour à « l’ordre juste. »
Et voilà pourquoi le Front National mène une politique de plus en plus raisonnable (affiche avec une femme « beur », ouverture sur Dieudonné, etc.)
Si pour les socialistes il s’agit de prouver à la bourgeoisie impérialiste que l’ordre sera maintenu de manière meilleure avec eux, le Front National doit pour sa part donner des gages à la bourgeoisie traditionnelle qui se méfie des conséquences possibles pour ses affaires avec ce parti.
En ce sens, les citations suivantes pourraient très bien être de Le Pen comme de Royal:
« Car, chez nous, on le sait, le social et le national marchent ensemble et c’est l’Etat qui est garant de leur alliance. » « Quand on demande aux Français ce qui, pour eux, symbolise le mieux la France, ce qui vient en premier ce ne sont ni les frontières ni la langue, c’est le drapeau tricolore et la sécurité sociale. »
Elles sont de Royal dans sa lettre du 29 septembre 2006, mais la nouvelle orientation « sociale » de Le Pen, par l’intermédiaire de l’intellectuel Alain Soral, fait que c’est également en quelque sorte la ligne du Front National.
La différence est la suivante : le Front National veut réduire l’Etat à sa portion congrue afin d’ouvrir la voie aux monopoles tenus par la bourgeoisie impérialiste, alors que le Parti Socialiste prétend maintenir le statu quo en réformant en profondeur pour « remettre un ordre juste dans ce pays » (Royal en avril 2006, 20h de TF1).
Royal propose ainsi une intervention différente de l’Etat, alors que Le Pen considère que l’Etat doit uniquement se concentrer à servir les monopoles et que les privatisations et le libéralisme doivent primer.
Royal explique très bien cette option qu’elle met en avant : « C’est pourquoi la démocratie participative est une façon de répondre à la crise démocratique. » (lettre du 29 septembre 2006) « Nous croyons à la France, à ses talents, à son potentiel, à sa jeunesse, à son goût d’entreprendre et à la solidité toujours actuelle de la nation, de l’Etat et de la République. La France, je la vois créative, innovante mais bridée de trop de lourdeurs bureaucratiques et fragilisée par un Etat qui se désengage. » (lettre du 29 septembre 2006)
Cette « démocratie participative » dont parle Royal n’est ni plus ni moins que la mise en avant du CORPORATISME, et en ce sens il est tout à fait conforme à la social-démocratie, non seulement celle de Léon Blum, mais également des «néo-socialistes.»
Les néo-socialistes des années 1930, ou encore les « planistes », ont abouti à deux courants essentiels.
Le premier courant a tenté de profiter de la victoire nazie pour tenter d’applique sa ligne: c’est le courant fasciste du « Rassemblement National Populaire » de Marcel Déat.
L’autre courant, qui a choisi la bourgeoisie gaulliste, a vu ses idées triompher après 1945 : ce sont les plans, les politiques des régions, l’aménagement du territoire, les politiques de Mendès- France, le gaullisme de gauche, les clubs socialistes des années 1960 (comme le Club Jean Moulin), etc.
Le programme socialiste de Mitterrand se situe dans la droite ligne de la social-démocratie française, celui de Royal également.
Il s’agit d’un programme de modernisation de l’Etat sur la base du statu quo – alors que le fascisme consiste en une refonte totale de l’Etat, au profit d’une autre partie des classes dominantes.
Le nazisme allemand a été l’idéologie d’alliance de la bourgeoisie impérialiste et de la petite-bourgeoisie pour la refonte de l’Etat, afin d’empêcher la révolution et de permettre la politique expansionniste. La bourgeoisie industrielle a suivi le mouvement.
En France, le fascisme n’a pas réussi à se développer dans les années 1930 en raison du Front Populaire, qui a neutralisé la tentation fasciste d’une partie de la bourgeoisie, mais également parce que la situation ne l’exigeait pas.
« L’Allemagne [des années 1930] a connu de grandes offensives prolétariennes, de nombreuses insurrections, et les diverses fractions de la bourgeoisie se sont déterminées par rapport à cela: « Les révolutions manquées perfectionnent toujours la machine de l’Etat bourgeois » (Karl Marx); les mécanismes de domination de la bourgeoisie se concentrent alors autour de sa fraction dominante.
La France à la même époque n’est sans doute pas le lieu privilégié de la paix sociale mais en aucun cas on ne peut y découvrir de véritable offensive prolétarienne visant à la prise du pouvoir.
C’est dans ces conditions que les formes anciennes de rapports de classe peuvent se perpétuer en France, tandis qu’en Allemagne la concentration économique et financière devenue la règle sera le support du fascisme national-socialiste.
Cela ne veut évidemment pas dire qu’au niveau de l’infrastructure économique ne se dessine pas en France un mouvement vers l’hégémonie du capital financier, mais on en est, à l’aube de 1940, qu’au premier stade de son développement, et sa traduction politique est encore balbutiante.
Du fait de la guerre et de la victoire temporaire de l’impérialisme nazi, cette fraction nouvelle de la bourgeoisie industrielle et financière qui, ailleurs, a soutenu le fascisme, va paradoxalement chez nous s’exprimer politiquement à travers la résistance gaulliste. » (« Gaullisme et révisionnisme », écrit par Alain Geismar, depuis passé dans les rangs sociaux-démocrates).
Voilà ce qui explique ce qui semble inexplicable aux historiens, à savoir qu’une partie significative de l’extrême-droite, notamment monarchiste, va participer à la résistance : pour cette fraction de la bourgeoisie expansionniste, la domination nazie est un obstacle politique et économique.
L’effondrement des forces politiques progressistes va permettre à la petite-bourgeoisie, qui voulait simplement l’ordre, le statu quo, de suivre celui qui l’incarnait : Pétain.
Autant il fallait en Allemagne, en raison de la crise capitaliste, que la petite-bourgeoisie se retrouve dans la politique de réorganisation nazie de l’Etat, servant la bourgeoisie impérialiste, dans le bouleversement des structures politiques avec la naissance du troisième Reich, autant en France elle se retrouve, pour des raisons historiques, dans la bourgeoisie industrielle traditionnelle, celle que représente Pétain.
Voilà ce qui explique également la soit-disant position des Français durant la seconde guerre mondiale telle que l’expliquent les « historiens »: « pétainiste en 40, gaulliste en 45. »
Il s’agit seulement du basculement de la petite-bourgeoisie d’une alliance à une autre, à un nouveau programme nationaliste, c’est-à- dire gaulliste.
Le projet « social et national » de Royal est exactement similaire.
Il s’agit d’un projet de réorganisation de l’Etat, conformément aux exigences de la lutte des classes. Il s’agit d’une entreprise contre-révolutionnaire, visant à placer la petite-bourgeoisie au plus près de la bourgeoisie industrielle, afin de maintenir le statu quo.
Et il est faux de penser que ce statu quo serait positif en raison du fait qu’il s’oppose au projet de la bourgeoisie impérialiste de s’allier avec la petite-bourgeoisie sous la bannière de Le Pen. Un tel point de vue était déjà apparu dans les rangs du Parti Socialiste lors de la question du référendum sur la constitution européenne: voter oui empêcherait le fascisme.
La réalité est que pour empêcher le fascisme, il faut que la classe ouvrière unisse dans un front les masses populaires ainsi que la partie pauvre de la petite-bourgeoisie.
Seul le communisme peut affronter le fascisme – oui affronter et non pas «éviter»! Voilà pourquoi la social-démocratie sert le fascisme : elle s’oppose de toutes ses forces à la révolution et au communisme et pour cette raison ne peut empêcher la marche historique du fascisme dans le cadre de la crise du capitalisme. Au contraire, elle lui ouvre la voie.
Voilà pourquoi Staline a parfaitement raison d’affirmer que : « La social-démocratie et le fascisme ne sont pas des antipodes, mais des jumeaux. »
Voilà pourquoi la véritable stratégie antifasciste aujourd’hui en France est de lever le drapeau rouge de la classe ouvrière.
Il n’est pas correct de critiquer le « réformisme » de Ségolène Royal, de tenter de le « déborder » – faire cela c’est nier la progression du fascisme, c’est courir derrière la petite-bourgeoisie au lieu de lever le drapeau rouge et de rassembler les masses populaires.
2.Le projet de Sarkozy
« Je n’accepterai jamais que l’on dise : les usines c’est fini, l’industrie c’est fini, le plein emploi c’est fini, les Ardennes c’est fini, la France c’est fini. Je ne le dirai jamais car je ne le croirai jamais. »
Le « Discours pour la France » qui souffre fait à Charleville-Mézières le 18 décembre 2006 synthétise toutes les positions de Sarkozy.
Le choix du lieu n’est pas que social, il est aussi franchement national, et cela il l’a formulé dès le début du discours : « dans ce département des Ardennes où s’est joué tant de fois le sort de la nation et où, dans l’ombre des grands arbres, d’anciennes légendes entretiennent le mystère des vieilles forêts qui ont vu passer les légions de César et les armées de Charles Quint. »
Sarkozy affirme donc qu’il y a crise et qu’il faut réagir à cette crise; il prône l’unité autour de la nation, c’est-à-dire qu’il reconnaît l’existence de différentes couches sociales, affirmant qu’elles ont toutes un intérêt commun : « Je ne suis pas venu vous dire : tout ce que vous avez fait pendant des siècles ne vaut plus rien ! Toute cette culture, tout ce savoir-faire, toute cette tradition industrielle c’est terminé !
Je pense exactement le contraire. C’est une richesse extraordinaire que le savoir-faire et la culture d’un vieux pays qui ne veut pas mourir. »
Cette carte nationale consiste naturellement à remettre de l’ordre : « Je suis venu ici parce qu’ici c’est la France, la vraie France celle que j’aime, telle que je la connais, telle que je la ressens. La France qui croit au mérite et à l’effort, la France dure à la peine, la France dont on ne parle jamais parce qu’elle ne se plaint pas, parce qu’elle ne brûle pas des voitures – cela ne se fait pas ici de casser ce que l’on a payé si cher – parce qu’elle ne bloque pas les trains. »
Il va de soi qu’en affirmant cela Sarkozy se coupe des plus pauvres et de ceux qui se révoltent, mais là est justement la clef de sa stratégie pour diviser les masses.
Il le dit d’ailleurs explicitement! Ceux qui l’intéressent, ce sont les petits entrepreneurs, les classes moyennes composées de cadres etc. ainsi que les ouvriers traumatisés par les délocalisations; de fait il le dit tel quel :
« La France qui souffre c’est aussi celle des travailleurs pauvres, de tous ceux qui estiment ne pas avoir la récompense de leur travail, de leurs efforts, de leurs mérites. Celle qui sait qu’avec le SMIC on n’arrive plus à se loger, celle des temps partiels subis, celle des mères isolées qui ne peuvent pas travailler à temps plein parce qu’elles n’ont pas les moyens de faire garder leurs enfants.
C’est la France des salariés de l’industrie qui vivent dans la hantise des délocalisations, des cadres qui redoutent à 50 ans de faire les frais de la prochaine réorganisation et de ne plus avoir de place dans l’économie et la société. C’est aussi celle des artisans, des agriculteurs, des pêcheurs écrasés de charges et de contraintes et qui n’arrivent plus à faire face. C’est la France des classes populaires qui a peur de l’exclusion et celle des classes moyennes qui a peur du déclassement. »
En ce qui concerne la classe ouvrière c’est très clair : Sarkozy vise la partie du prolétariat qui a subi durant des années le discours de la CGT et du « PCF » consistant en le « patriotisme économique. »
Cette stratégie de Sarkozy repose sur une logique précise : celle de la continuité. Celui-ci se pose dans la continuité de Jacques Chirac, il dit : « il nous faut aller plus fort et plus loin. »
C’est-à-dire qu’il dit clairement qu’il s’oppose à la bourgeoisie impérialiste, qu’il est pour freiner ses prétentions, et cela au nom du maintien de l’ordre social, et en alliance connue et reconnue avec la petite-bourgeoisie : « Ce renoncement donne le pouvoir aux prédateurs au détriment des entrepreneurs. Il fait passer la spéculation avant la production.
Or je veux être celui qui soutient les entrepreneurs et encourage la production, car il nous faut créer de la richesse si nous voulons faire reculer la pauvreté, la précarité, l’exclusion. »
Sarkozy parle de « prédateurs », de « spéculation », exactement comme pourrait le faire le « PCF »; de fait sa ligne en faveur de la bourgeoisie industrielle est très claire : « Je veux que le capitalisme familial soit encouragé parce qu’il s’inscrit davantage dans la durée que le seul capitalisme boursier. Je veux que la logique industrielle compte autant que la logique financière. »
Pour cette option, Sarkozy n’a pas le choix: il doit s’appuyer sur les autres bourgeoisies industrielles européennes, afin de renforcer les positions de la bourgeoisie industrielle en France, ou comme il dit « Accepter la fin de l’industrie comme une fatalité est une erreur stratégique. » (C’est lui qui souligne)
Naturellement personne ne veut abolir l’industrie, mais par là il vise directement la bourgeoisie financière qui entend bien mettre de côté les intérêts de la bourgeoisie industrielle.
D’où également sa proposition de modernisation des structures de la communauté européenne, de la formation d’un « Ministre des Affaires étrangères de l’Union européenne » (discours à la Fondation des Amis de l’Europe et la Fondation Robert Schuman à Bruxelles le 8 septembre 2006).
Tout cela vise à aider à la stabilité du système, à permettre qu’il continue de tourner comme avant.
Sarkozy profite à ce titre de la légitimité du système, voilà pourquoi il espère gagner les classes moyennes, en leur disant : avec moi pas de risques, alliez-vous à moi et « Ici nous mettrons la France au coeur de l’Europe. Ici nous arrêterons ce mouvement fou qui vide les territoires pour remplir les banlieues. »
Ce qui signifie : nous stopperons la prolétarisation. Et c’est exactement ce que veulent les classes moyennes – reste à savoir si elles lui feront confiance en définitive.
3.Le Pen ou l’option agressive
Le projet de Le Pen a pris un caractère « nouveau », cela a été maintes fois souligné, notamment par ceux qui ont affirmé que le fameux «Discours à Valmy» aurait été écrit par l’intellectuel Alain Soral, qui se présente comme « marxiste » et met en avant la logique culturelle fasciste «ni droite ni gauche.»
Le Pen attaque dans ce fameux discours ceux qui « ont trahi la Nation, son peuple et la République à Maastricht et ailleurs… » et ont « livré la France aux pouvoirs étrangers de l’immigration sauvage et de la mondialisation. »
Il va de soi ici que la critique de l’immigration vise la bourgeoisie industrielle, qui a fait venir de la main d’oeuvre au lieu de chercher à maintenir une politique coloniale et néo-coloniale agressive; quand il critique la mondialisation il ne vise pas le capital financier mais au contraire la faiblesse du capital financier français dans le cadre de la concurrence international.
Car l’intérêt n’est pas seulement que Le Pen affirme que « De Gergovie à la Résistance en passant par la monarchie capétienne et l’épopée napoléonienne, je prends tout ! Oui tout ! Car toutes ces actions héroïques, novatrices, audacieuses, participent du génie de notre pays. Un génie virevoltant où le changement radical fut plusieurs fois la voie du salut, la condition de la pérennité. »
Ce discours du changement, du nationalisme, n’est aujourd’hui plus original; ce qu’il faut voir est que son option nationaliste relève du « cavalier seul. »
Le Pen explique ainsi la problématique: « Nouvelle menace, nouveau défi, nouvel espoir… pour que continue l’histoire d’une France forgée à la grandeur des Vercingétorix, des St Louis, des De Gaulle… ou bien qu’elle disparaisse, dépecée, annihilée, engloutie dans le magma euro-atlantiste, vouée à l’Organisation Mondiale du Commerce et soumise à l’euthanasie de l’OTAN. »
C’est-à-dire que Le Pen représente le fraction agressive de la bourgeoisie impérialiste; celle-ci a décidé d’élargir son champ d’action en direction de la petite-bourgeoisie, car selon elle les conditions sont mûres politiquement (Le Pen au second tour aux dernières présidentielles, victoire du non au référendum sur la constitution européenne) et économiquement.
La tendance à l’hégémonie des monopoles est inévitable au stade impérialiste du capitalisme. Pour cela, il est nécessaire pour la bourgeoisie impérialiste de lancer un mouvement pour réorganiser l’appareil d’Etat et la culture nationale selon ses besoins expansionnistes.
C’est pourquoi Le Pen s’adresse : « A ceux qui fuient à l’étranger ; A ceux qui fuient par le » panem et circences » que sont la télé et les jeux ; A ceux qui fuient dans les anti-dépresseurs dont nous sommes les plus grands consommateurs au monde – ce qui en dit long sur la souffrance des femmes et des hommes de ce pays… A tous ceux enfin qui se sont résignés à l’une ou l’autre forme de la dépression – nerveuse ou économique, je dis que l’exemple et le souvenir de Valmy nous donnent la leçon et nous montrent la voie.»
C’est-à-dire : pour résorber la crise, passons à l’offensive, menons une politique nationale agressive, transformons en profondeur l’Etat et la culture nationale.
La logique de ce proposition stratégique est authentiquement fasciste; les fascisme italien et allemand n’ont pas eu d’autres contenus.
Le discours sur la « Défense » au meeting de Toulon en septembre 2006 pose clairement cette ligne expansionniste : « En réalité, il s’agissait de désir de construire une défense européenne et non plus française, et d’accepter l’inféodation de cette armée fédérale à l’OTAN, car nos gouvernants ont cessé de penser la France comme un Etat indépendant et souverain, ayant des intérêts nationaux à préserver avec des moyens propres. (…)
Nous n’avons plus d’industrie aérienne militaire, pratiquement plus de chantiers de construction et de réparation navale, plus d’industrie d’armement. (…) Il nous faut reconstruire un outil militaire indépendant, adapté à la menace, à nos besoins et à nos intérêts, à la défense prioritaire de la France et des Français, où qu’ils se trouvent dans le monde.
Cette politique nationale et autonome n’exclut aucune coopération, aucune alliance, à partir du moment où elle est conforme et utile à nos intérêts. Il s’agit du rang de la France, de sa liberté de manoeuvre stratégique et militaire, donc politique. Il s’agit, je le répète, de sa capacité à assurer elle-même sa propre survie. »
La marche à la guerre impérialiste : voilà la solution de l’extrême- droite à la crise du capitalisme, une solution fondée sur l’alliance des classes devant aller de l’avant; la petite- bourgeoisie pour maintenir son existence et ne pas se prolétariser, la bourgeoisie impérialiste pour se réaliser pleinement et ce au dépens de la bourgeoisie traditionnelle / industrielle.
Voilà pourquoi toute la stratégie de Le Pen est de gagner des points dans les couches en voie de prolétarisation, et si possible même dans le prolétariat lui-même :
« Mépris des petits patrons, qualifiés de paternalistes, de passéistes, parce qu’ils refusent d’être sacrifiés, eux et leurs salariés, sur l’hôtel de la mondialisation, des stocks options, des copains du MEDEF et des fonds de pensions.
Mépris des petits commerçants, toujours identifiés aux profiteurs du marché noir et affublés du sobriquet d’épiciers, et qui, dans les faits, subissent la concurrence déloyale de ces grandes surfaces qui défigurent l’abord des villes, transformant peu à peu le centre de nos petites bourgades en désert.
Mépris des paysans, accusés par les bobos des villes de dénaturer la nature, alors que ce sont eux qui, de leur mains, par un travail millénaire, ont façonné nos campagnes, et qui, pour tout remerciement, sont promis demain, comme les marins-pêcheurs, à la liquidation pure et simple, puisque la PAC et les technocrates de Bruxelles ont programmé leur mort en 2012.
Mépris des ouvriers, rebelles aux restructurations et aux délocalisations qui les jettent par millions à la rue, et à qui nos énarques, enrichis dans le même temps par les stocks-options, reprochent encore leur manque de sens du sacrifice, leur manque de modernité, qui signifie pour eux chômage et misère…
Mépris des fonctionnaires, forcément absentéistes, qu’on veut rendre responsables de la destruction des services publics, alors que le plus souvent, fidèles à leur mission, ils en sont les premières victimes… La grande masse des fonctionnaires, nous ne la confondonspas, au Front national, avec les oligarchies syndicales qui se sont glissées en elle comme dans un fromage !
Mépris des femmes, mères et travailleuses, seules condamnées dans notre pays à la double peine, soit disant libérées de la quiétude du foyer pour devenir les petits soldats du salariat pressuré et de la consommation idiote. Avec comme hochet, la parité et la lecture abrutissante des magazines people, quand ces femmes ont un si urgent besoin de places de crèche, de salaire parental et autre aménagement du temps de travail…
Mépris des vieux, rebaptisés « seniors » quand ils ont un pouvoir d’achat, et sinon abandonnés à la solitude par cette société qui a détruit la famille et ses liens affectifs, et qui ne parle plus, en guise de solution, que de légaliser l’euthanasie…
Mépris des jeunes, à qui on croit pouvoir masquer la société de chômage, d’insécurité et de dettes qui les attend, par la Star Academy et un bac au rabais…
Mépris des immigrés aussi, parqués dans les culs de sac de l’immigration que sont les cités, traités tantôt comme des victimes, tantôt comme des criminels, selon les besoins de politiques qui les voient toujours comme des primitifs et qui les manipulent à coup de sobriquets grotesques : beurs, potes, encadrés par des « assoces » aux noms tout aussi suspects que « ni pute ni soumise »… »
Cette stratégie tous azimuts montre bien que la bourgeoisie impérialiste ne s’avance plus à pas de velours, elle commence à vouloir synthétiser toutes les positions « nationales » pour former son projet contre-révolutionnaire.
La bourgeoisie impérialiste est prête à gérer tout le pays. Et même s’il est peut-être trop tôt aujourd’hui, elle sait que l’avancée de la crise capitaliste lui profite et que c’est une excellente avancée pour préparer demain, que dès aujourd’hui elle prépare les cadres pour sa « révolution » de demain.
4. Quelle stratégie?
De tout cela il ressort clairement que la stratégie révolutionnaire d’aujourd’hui, c’est la stratégie antifasciste. La classe ouvrière et les masses populaires sont sur la défensive.
A l’opposé, la petite-bourgeoisie ne cesse de s’exciter, la bourgeoisie industrielle essaie de maintenir ses positions et la bourgeoisie impérialiste, elle, tente une percée.
Il est évident à terme que la bourgeoisie impérialiste, financière, l’emportera sur la bourgeoisie industrielle; c’est une loi historique que l’on comprend parfaitement si on étudie les processus ayant abouti aux deux guerres mondiales impérialistes.
C’est de là qu’il faut partir si l’on veut lutter de manière réelle et non pas se fonder sur une période transitoire.
Ne pas voir que le fascisme est à l’offensive aujourd’hui, que le fascisme travaille en profondeur toute la société, serait en rester politiquement au niveau des «révolutionnaires» qui n’ont rien compris du marxisme et ne connaissent rien à l’économie politique.
Tout le travail du PCMLM jusqu’à présent a permis précisément de comprendre cela; en ce sens est résolue la question de savoir s’il a été correct ou non de prendre l’initiative de former un noyau dur pour analyser le monde à la lumière du marxisme-léninisme-maoïsme.
La juste théorie doit donc maintenant se transformer en politique correcte, et cette politique c’est l’antifascisme orienté par les exigences révolutionnaires de la classe ouvrière.
L’antifascisme de l’époque nouvelle n’a ainsi entendu rien à voir avec le pseudo «antifascisme» petit-bourgeois de l’ancienne période, qui se contentait de «dénoncer», pensant naïvement que cela «isolerait» l’extrême-droite.
L’idéologie marxiste-léniniste-maoïste enseigne justement qu’il n’y a pas de crise capitaliste sans fascistes et condamne l’illusion d’une société capitaliste «pacifiée», «démocratique», etc.
Ce pseudo « antifascisme » petit-bourgeois a d’ailleurs beaucoup servi les fascistes qui ont eu beau jeu d’apparaître comme les vrais rebelles opposés à toutes les valeurs du système, attaqués de toutes parts.
Pour cette raison, il faut souligner les points suivants concernant la lutte antifasciste qui doit être entreprise.
Il n’y aura pas de lutte antifasciste sans lutte contre le mythe du «totalitarisme».
Cette idéologie nie que « là où il y a oppression, il y a résistance », elle nie la lutte de classes, elle sert uniquement à aider les libéraux dans leur refus de la lutte authentique et elle s’oppose à l’idéologie communiste qui explique que les masses veulent la révolution.
Cette lutte contre cette idéologie passe par l’éducation politique et historique des luttes, grâce à des exemples qui devront être parlants, comme par exemple le fait que la lutte communiste ne s’est jamais arrêté dans l’Allemagne nazie : on peut autant se servir d’exemples parlants, comme le fait qu’une année après la prise du pouvoir de Hitler, rien que du 30 juin au 2 juillet 1934, 83 nazis ont été exécuté par les révolutionnaires, ou encore que lors des votes dans les conseils d’usines l’écrasante majorité des ouvriers ne participaient pas ou même oser «non» (les votes furent par conséquent supprimés après 1934).
Contre l’idéologie du totalitarisme et ses conséquences (élitisme, idéologies «expliquant» la « stupidité » des masses, comme la psychanalyse, etc.) il faut affirmer : les masses font l’histoire!
La lutte contre le légalisme dans le cadre de la lutte antifasciste est une condition obligée – pour vaincre le fascisme il faut vaincre les fascistes!
Les trotskystes s’opposent toujours à la violence antifasciste sous prétexte qu’elle ne serait pas «de masse»; c’est pour cela qu’ils ont refusé et se sont opposés à la Résistance armée au nazisme (et obtenu le titre gracieux de «hitléro-trotskystes»). Cette position est naturellement celle également des couches petites-bourgeoises.
Critiquer cette position erronée n’est pas suffisant : il faut montrer l’intérêt politique et matériel de la violence antifasciste avec des exemples clairs, parlants et sans appel, afin que le courant lamine les légalistes.
C’est de plus une position que les minorités (arabe, juive, homosexuelle, etc.) exigent le plus fermement. Contre le légalisme qui nie la lutte de classe, il faut affirmer : le pouvoir est au bout du fusil!
La question de l’unité est essentielle.
Ici c’est l’exemple de la guerre antifasciste d’Espagne qui est le plus parlant, parce qu’elle a été le fruit de l’unité antifasciste; cela aidera pour démasquer ceux qui, sous des prétextes divers, veulent briser la réalisation d’un large front. Cela sera nécessaire non seulement contre les tendances gauchistes mais aussi contre l’aile droite : le Parti Socialiste d’Allemagne avait ainsi interdit formellement à ses militants le 28 juin 1932 tout travail antifasciste commun avec les communistes.
Contre ceux qui veulent diviser le peuple, il faut mettre en avant le mot d’ordre: critique, autocritique, unité!
Il faut étudier et démasquer la nature de l’idéologie fasciste! Il faut impérativement que cesse l’habitude de voir en les fascistes de « simples réactionnaires » facilement discrédités. Il est impératif que les antifascistes connaissent l’idéologie fasciste et ses principes (vitalisme et culte du corps, corporatisme, nationalisme et militarisme, antisémitisme, ethno-différentialisme et expansionnisme, idéalisme et lecture psychologique de l’histoire, fantasme machiste du baroudeur qualifié d' »aventure individuelle », darwinisme social, folklore païen et national-catholicisme, etc.).
L’idéologie fasciste est l’expression d’une combinaison d’intérêts économiques : ceux de la bourgeoisie impérialiste et ceux de la petite-bourgeoisie en crise; cela signifie montrer toute la signification de la lecture marxiste-léniniste-maoïste de la société.
Contre ceux qui ne veulent pas lutter contre le fascisme de manière systématique et qui nient le rapport du fascisme avec la crise capitaliste, il faut dire: l’histoire est l’histoire de la lutte des classes!
Voilà quelle est la direction politique de la lutte antifasciste aujourd’hui : montrer que ce sont les masses qui font l’histoire et non pas les « élites »; révéler la nature de l’idéologie fasciste et ses fonctions sociales : servir l’expansionnisme, la guerre impérialiste; montrer le caractère erroné d’une lutte antifasciste «légale» c’est-à-dire révéler la nature de classe de chaque Etat; briser les initiatives s’opposant à l’unité populaire en mettant au centre de toute politique la classe ouvrière, classe la plus révolutionnaire de notre époque.
Telle est la seule orientation révolutionnaire authentique, telle est l’orientation marxiste-léniniste-maoïste.
Pour le PCMLM, janvier 2007.
Source : http://www.lescommunistes.net/~infos/
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