Communiqué F.T.P. XXI :

Le conseil constitutionnel vient de montrer son manque total d’indépendance, à l’égard au moins de l’idéologie libérale, et ses dispositions forcément partisanes à l’égard de la pensée de la classe dominante dont il fait partie.

Pire : il avalise l’introduction directe et massive du droit du plus fort dans le travail, qui est au centre des structures de notre société.

Il entérine une loi qui pervertit l’idée même du Droit, en produisant à l’intérieur du non-droit patronal, de l’arbitraire au service de l’ « emploi », bref, l’instrumentalisation ouverte et néanmoins légale d’individus qui ne bénéficieront plus EFFECTIVEMENT des garanties prévues par le code du travail -compromis social sans lequel les impératifs productivistes rendent la vie des travailleurs insupportable.

Un employeur pourra congédier un employé en C.P.E. sans avoir à proférer autre chose qu’un vague motif, moins encore à le faire valoir comme une bonne (et saine) raison.
Les Prud’hommes ne pourront pas statuer sur des cas pour lesquels ils ne disposeront d’aucun élément objectif afin d’étayer leurs arbitrages. Ces derniers deviendront, au mieux, pénibles, longs et la plupart du temps stériles. Tout le monde ne pourra pas obtenir cet arbitrage dans des délais raisonnables, bien qu’étant confronté aux rigueurs d’une vie matérielle précaire.
Au quotidien, un employé se trouvant par définition moins garanti contre le besoin que son employeur, c’est donc l’employeur qui disposera d’un moyen de pression quasi-imparable contre la volonté de l’employé, pour lui imposer des conditions même théoriquement inacceptables.

Pourtant, même la prétendue nécessité économique n’est pas censée faire loi dans une république d’hommes et de femmes dont la première caractéristique d’un projet humain serait qu’il cherchent à s’affranchir TOUS ENSEMBLE du règne contraignant de la Nature, dans le but de parvenir au règne des seules finalités humaines, volontaires et réfléchies.
Le C.P.E. est une atteinte aux Droits Humains consistant à soumettre des hommes et des femmes à une nécessité et à une concurrence qu’on sait de plus en plus impitoyable. Il combat le chômage avec autant de science et d’habileté qu’une saignée pour soigner l’anémique.

L’idée qu’il faut « construire ses droits à l’emploi (stable) » est particulièrement intolérable et reflète de manière saisissante le mépris, presque antique, des concepteurs et des avaliseurs de cette loi, de D. De Villepin en premier, pour toutes les personnes dont la société pourra désormais ne retenir que la dimension productive et leur donner accès à l’existence sous cette première condition. Au conraire, une personne huamaine devrait avoir la pleine reconnaissance de tous ses droits de co-sociétaire, quelle que soit sa position devant la propriété de moyens de production de l’existence.

C’est une forme de travail obligatoire qui, au général, compte tenu de l’existence du P.A.R.E., est infligée de manière à peine déguisée à ceux que la condition sociale d’origine défavorise, par rapport aux familles alliées entre elles pour privilégier leurs progénitures et leur ménager des emplois stables.

« Perdre sa vie à la gagner ». Le mot de Marx concernant la condition ouvrière du XIXe S. va pouvoir plus que jamais décrire celle des jeunes travailleurs de demain, dans une société où le standard minimal de vie matérielle suppose quasiment de tout avoir avant de pouvoir s’en donner les moyens. L’existence à laquelle la classe dominante voue le plus gros de la population est une provocation inconsciente( ?) mais arrogante à la violence civile dans les décennies à venir – elle est elle-même violence civile, et on ne pourra, sans contradiction, condamner ce qu’on aura produit.

La soumission des masses à la perpétuation du travail et à son accélération en vertu d’un principe de rendement qui s’est pris pour sa propre fin, est une (cupide) folie dont l’humanité, de proche en proche, ne se remettra pas, à moins qu’elle y résiste de toutes ses forces.

Nous appelons ici à la grève générale, au soutien des actions estudiantines et lycéennes devant ce gouvernement indigne et méprisant, exemplaire de cette (cupide) folie propre aux rationalités autistes, fermées sur un intérêt de classe et des dogmes ethno-socio-centristes par essence intolérables.

Nous appelons avec d’autres, à la généralisation comme à la diversification de mouvements anti-C.P.E., et aussi anti-C.N.E. quoique, désormais au-delà; à la résistance active contre la forme de totalitarisme libéral qui s’installe. Nous appelons à l’action résistante, toujours articulée avec la réflexion sur de nouvelles conditions institutionnelles et matérielles de redistribution des ressources et des droits à ceux qui en ont été dépossédés au nom d’un droit de propriété frelaté, car étendu au-delà du besoin et des buts liés à la légitime prospérité.

Dans l’immédiat, nous appelons à lutter par tous les moyens appropriés, précisément contre l’appropriation au profit de quelques puissants, du Droit, qui a lieu dans ce pays comme dans d’autres. Vous jugerez s’il est nécessaire de s’en prendre aux points névralgiques de l’Etat et des Multinationales, ou si des luttes légales et non-violentes peuvent encore être menées, notamment sans les dangers relatifs aux régimes de types dictatoriaux et totalitaires. Cela supposerait aussi de pouvoir encore compter sur des institutions démocratiques pour réinstaurer au moins un compromis social avec le patronat, qui préserverait la comédie de paix et de vie humaine et aurait encore le mérite d’éviter jusqu’ici bien des effusions de sang, comme cela a été le cas jusqu’ici -les gens n’étaient pas prêtes pour la liberté : le sont-elles désormais ?

De notre côté, nous avons déjà formulé pour nous-mêmes, des réponses à ces questions.

A tous ceux qui luttent pour arracher l’humain à la barbarie, souvent larvée, de la lutte pour l’existence, à ces nouvelles générations qui se lèvent pour faire face, selon nous, à la responsabilité universelle, nous adressons aussi nos salutations confraternelles et émues.

F.T.P. XXI , Le 30.03.2006.