De l’intérêt des manifs sauvages…
Catégorie : Global
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Historiquement, les manifestations sont un moment de confrontation avec le pouvoir, une démonstration pratique d’un mécontentement, d’une colère, l’expression de revendications ou de mouvements plus révolutionnaires…
Avec la pacification des sociétés occidentales, leur « embourgeoisement » pourrait-on dire, le « citoyennisme » a pris une place grandissante dans la plupart des mouvements de contestation ou de subversion.
Pourtant, en quoi ce « savoir-vivre » des manifestations serait-il plus légitime que l’expression « violente » de notre colère, de notre ras-le-bol ? Ce « savoir-vivre » est avant tout voulu par le pouvoir lui-même, car on le sait bien, le pouvoir vacille quand il se sent menacé, le pouvoir vacille quand il se sent agressé. Autrement, vous pouvez signer toutes les pétitions que vous voulez, ça ne changera pas grand chose…
A mon avis, il est important de se réapproprier l’utilisation de nos corps, de se réapproprier l’usage des rues, aussi. L’Etat s’octroît le monopole de la violence. Il est plus armé que nous, il a des tas d’employés qui bossent à temps plein pour sa bonne conservation, mais nous sommes nombreux et nombreuses à manifester. Si nous étions plus nombreux et nombreuses à être déterminé-e-s, nul doute que le projet de CPE serait retiré en toute hâte (d’ailleurs, si le rapport de force nous était globalement plus favorable, ce projet n’aurait même jamais été proposé). L’enjeu, à mon avis, est de réussir à rester soudé-e-s, que de plus en plus d’entre nous s’activent lors des manifs, et que les réflexes de « contrôle » des un-e-s et des autres disparaissent. Les moyens d’action contre l’Etat sont le choix de chacun-e, et ceux-ci doivent être respectés. Il est intolérable que des services d’ordre empêchent des manifestant-e-s d’agir. Il est intolérable que des flics le fassent également, mais comme tu dis, « ils font leur boulot comme tout le monde ». Mais ça reste le plus môche boulot du monde, pas vrai ?
Aussi, il faut signaler, autre retour sur l’histoire des luttes sociales, que les projets rétrogrades finalement annulés par l’Etat et les quelques acquis sociaux gagnés lors des luttes sociales sont en général le fruit d’oppositions violentes entre manifestant-e-s et Etat. Le fameux Front Populaire a dû céder en 1936 à de durs mouvements de grève pour la journée des 40 heures (si je ne me trompe pas). En 1968, rien n’aurait changé sans les émeutes et les occupations d’usine. En 1986, c’est dans un climat de violences sociales que le projet Devaquet a été retiré. En 1994, le CIP (avant-goût de CPE, déjà) a été annulé suite à de nombreux débordements en manifestation. En 1995, le plan Juppé a été retiré parce que la France entière était « paralysée » (« salauds de grévistes qui prennent la France en otage ! »), facs bloquées et occupées aussi à l’époque, et quelques débordements aussi lors de manifs, etc.
Pour te répondre également, quand on s’en prend aux flics, faut pas se leurrer, même si les CRS eux-mêmes n’ont aucun pouvoir décisionnel, lorsqu’on s’attaque à eux on s’attaque directement à l’Etat à ses représentants (donc au gouvernement). Ce sont les « forces de l’ordre » ou non ? Il n’y aucun respect à avoir pour les « Compagnies Républicaines de Sécurité ».
Pour finir, je suis d’accord avec ta conclusion: « nous n’arriverons à quelque chose que tou-te-s ensemble. Il faut qu’on soit uni-e-s, pour être crédibles devant les médias et le gouvernement ». Mais encore une fois, il ne faut pas se leurrer, ceux qui cherchent absolument à décrédibiliser le mouvement, et surtout, à le diviser, ce sont ceux qui sont au pouvoir ! Les ministres et autres personnes bien installées à des postes de pouvoir (c’est valable aussi pour la plupart des journalistes et des chefs des syndicats réformistes).
Il nous faut donc insister pour que nous soyons de plus en plus nombreux et nombreuses à montrer une opposition franche au pouvoir étatique en place et en général (car ne soyons pas dupes, le Parti Socialiste n’est pas mieux !). Le pouvoir parlementaire et la démocratie représentative centralisent bien trop de « responsabilités » pour que nous puissions leur accorder une quelconque confiance. Le système tel qu’il existe ne peut que pousser les gouvernant-e-s à se mettre au service du capitalisme (la propriété, l’argent, l’exploitation salariale, tous ces éléments qui nous empêchent d’imaginer que l’on pourrait vivre autrement). Commençons par vivre directement l’autogestion, organisons-nous hors des grosses structures institutionnelles.
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