Le bras de fer engagé entre le Medef et le monde du travail sous la
bienveillance du gouvernement libéral de Monsieur Raffarin se
prolonge cet été en conflit ouvert avec les professionnels du
spectacle qui ne sont pas prêts à accepter l¹accord qui leur est
imposé.

Cet accord masque mal une décision froide et logique d¹élimination
des plus faibles et des moins rentables et qui, comble du cynisme, se
voudrait le fruit d¹une concertation démocratique.

Les choix qu¹entraînent la vision du monde du Medef et des
capitalistes s¹éclaircissent au fur et à mesure des réformes
proposées par le gouvernement Raffarin.

Dans tous les domaines ne comportant pas des enjeux marchands
s¹exerce, aujourd¹hui,une pression persistante qui cherche à détruire
l¹idée d¹une société solidaire. Une société créatrice de valeurs dont
le produit ne peut se compter en chiffre d¹affaires et que des années
de luttes ont permis d¹inscrire dans les priorités de la nation.

La culture au même titre que l¹éducation, la santé et l¹hospitalité
sont ces priorités qu¹il nous faut défendre à tout prix. Elles ne
peuvent pas dépendre des idéologies et des gouvernements qui se
succèdent à la tête de l¹Etat.

Si les comptes spécifiques des intermittents du spectacle présente un
déficit, pourquoi ne pas légiférer afin de mettre fin aux abus
systématiques, dans l¹industrie du spectacle, de l¹audiovisuel et du
divertissement, secteurs qui emploient des intermittents afin
d¹augmenter les bénéfices déjà exorbitants distribués aux
actionnaires ? Pourquoi ne pas soumettre ces bénéfices à un
prélèvement social égal à celui qui est prélevé sur les salaires ?
Pourquoi ne pas envisager que toutes les entreprises commerciales qui
vivent de la culture et des artistes versent l¹ensemble de leurs
cotisations sociales sur un même compte ? Enfin, pourquoi choisir
d¹envoyer au RMI des milliers d¹hommes et de femmes qui vouent leurs
vies à l¹art et à la culture avec autant de mépris alors même que
c¹est de ce terreau fertile que surgissent les artistes et les ¦uvres
?

L¹accord du 26 juin est contesté par les intermittents car ils savent
bien que cette réforme sert une politique qui n¹a d¹autre résultat
que d¹augmenter la place de plus en plus imposante d¹une « culture »
de profit abrutissante et manipulatrice. Une politique qui répond aux
lois du marché de masse mondial en éliminant tous ceux qui, d¹une
façon ou d¹une autre, dans leur champ d¹action, résistent à cette
dégradation de la pensée.

Le conflit actuel montre à l¹évidence l¹importance des retombées
économiques, pour les villes et les régions, en terme d¹activités
directement induites par l¹activité artistique. La création produit
en effet de la richesse économique mais, sa raison d¹être échappe par
nature à des buts commerciaux. Elle doit être défendu parce qu¹elle
contribue à la construction de la pensée des individus, à faire
travailler notre imaginaire et dans ce sens, elle peut nous amener à
réinventer le monde.

Il existe différents types d¹hommes, il y a parmi eux les hommes du
Medef et les poètes. Les hommes du Medef sont des hommes qui
ressemblent à des hommes du Medef. Ils aiment le profit. On ne peut
pas attendre d¹eux qu¹ils s¹intéressent aux poètes. Ce ne sont pas
les mêmes hommes que les poètes. Pour les hommes du Medef, un poète
est un rêveur paresseux qui ne rapporte pas d¹argent. Le Medef a
besoin d¹hommes travailleurs qui, d¹une part, ne leur coûtent pas
d¹argent et qui, d¹autre part, leur en font gagner beaucoup. Il y a
dans le monde entier plusieurs Medefs, et ces Medefs se parlent entre
eux en renforçant leur emprise. Car les Médéfiens aiment le pouvoir.
Ils sont des hommes de pouvoir. Ils sont proches des hommes qui sont
au pouvoir. Les hommes qui sont au pouvoir finissent souvent par
ressembler aux hommes du Medef car l¹exercice du pouvoir fait goûter
aux avantages du pouvoir qui ressemblent aux avantages des hommes du
Medef. C¹est pourquoi un gouvernement constitué d¹hommes politiques
qui ressemblent aux hommes du Medef s¹accordent forcément avec les
choix de leurs amis du Medef. Tant pis pour les poètes, c¹est bien
fait pour eux !

Centre Chorégraphique National de Rillieux-la-pape/Compagnie Maguy
Marin Le 4 juillet 2003