Cgt – et bernard thibault devint chef
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17 octobre 2005
CGT – Et Bernard Thibault devint chef
1- Préliminaires : l’après 1968
Après
1968, en France, chaque année les étudiants se mettaient en grève.
Une grève dure, avec piquets de grèves durs et émeutes,
une grève qui durait au minimum un mois. Ces grèves étaient
auto-organisées en coordination :
http://mai68.org/textes/coordination.htm
Ou
si le lien est rompu :http://kalachnikov.org/textes/coordination.htm
Il
y eut ce genre de grèves étudiantes jusqu’au milieu des années
1970. C’est ainsi que dans notre pays, une expérience non négligeable
fut acquise sur les coordinations.
Mais,
cela s’arrêta après 1976 pour plusieurs raisons. Bien sûr,
l’État mis des petites vacances pile à la période où
les étudiants avaient pris l’habitude de se mettre en grève. Mais
aussi, fut mis en scène l’important spectacle de "la bof-génération" :
L’on
fit croire aux générations ainées que si elles étaient
contestataires, par contre les nouvelles générations ne l’étaient
pas, qu’on pouvait leur marcher sur les deux pieds, même très fort,
et que leur seule réaction était de dire : « Bof ! ».
La bof-génération…
Malheureusement,
l’immense majorité des personnes de ma génération tombèrent
dans le piège, et, croyant que les jeunes étaient des crétins,
des beaufs, ils ne transmirent pas l’énorme acquis de toutes leurs luttes
passées de mai 68 à 1976 en passant par LIP et le Larzac
en 1973 etc.
Le
goût de la contestation se perdit, de même que l’art de mettre en
grève un amphi, d’organiser une manif radicale, de construire une barricade
efficace, de fabriquer diverses armes dont le fameux cocktail Molotov etc.
En
gros, de 1976 à 1986, il n’y eut plus de grève étudiante.
C’était la mort totale.
2- La renaissance : 1986
Le
gouvernement de Chirac eut l’idée aussi sote que grenue de faire un projet
pour l’éducation : le projet "Devaquet", du nom du con
qui accepta de signer ce qui était une telle salopperie que les étudiants
se souvinrent de ce qu’était une grève et même une coordination.
Je me souviens du slogan le plus célèbre de cette époque :
« J’ai !
j’ai ! j’ai le projet Devaquet qui me rentre dan’l’cul qui m’empêche
d’étudier ! »
Les
étudiants et les lycéens se mirent en grève et s’auto-organisèrent
très naturellempent en coordination. Bien entendu, celle-ci n’était
pas parfaite, mais elle s’améliorait un peu chaque jour. Une étape
fondamentale fut franchie quand Isabelle Thomas, sous-marin du Parti Socialiste,
se fit virer parce qu’elle passait plus pour la chef récupératrice
que pour la représentante des grévistes. Je me souviens
même du prétexte qui fut pris pour la virer :
Une
photo pleine-page dans un magasine du style Paris-Match où elle était,
je crois, vaguement assise sur un piano, sa robe relevée sur les genoux…
La photo avait fait scandale, la grève ce n’était plus les lycéens
et les étudiants, la grève, c’était elle. Et c’était
inadmissible. Elle n’y survécu pas : Elle fut remplacée
immédiatement par une personne bien plus radicale et tellement plus correcte
qu’on ne se souvient même plus de son nom. Preuve que le successeur (il
y en eut d’ailleurs plusieurs) n’avait pas cherché à personnaliser
le mouvement, à le récupérer à son profit. Néanmoins,
plus tard, pour la remercier pour ses bons et loyaux services, le PS fit nommer
Isabelle Thomas députée je ne sais plus où. Isabelle Thomas
avait tout fait pour que le mouvement de novembre-décembre 1986
reste le plus sage possible.
Isabelle
Thomas une fois disparue, le mouvement put se radicaliser, les jeunes de banlieue
venaient nous aider à établir le rapport de force en faisant émeutes
sur émeutes, pillages de grands magasins sur pillages de grands magasins
à chacune de nos manifs. Jusqu’au moment crucial où Pasqua commis
l’erreur de lâcher ses chiens : les PVM :
Les
PVM étaient les Policiers Voltigeurs Motorisés. Trois éléments
les composaient : Une moto, un conducteur de moto et un massacreur assis
à l’arrière avec un long baton pour taper sur tout ce qui bouge.
Je crois qu’ils ont été officiellement dissous depuis cette histoire.
Mais si, lors d’une manif, vous avez affaire à ce genre d’arme du pouvoir,
pour la vaincre, c’est : un peu d’huile répandue sur le sol. Et
hop par terre la moto ! Et hop ! vous vous ruez dessus pour neutraliser
les deux flics avant qu’ils n’aient repris leurs esprits !
Le
4 décembre 1986, il y eut au moins un million de manifestants
dans Paris. Il y eut aussi un massacre. Les gens pour décrire ce qui
s’était passé parlèrent du Chili !
Dans
la nuit du 5 au 6 décembre à 1 heure du matin, les PVM assassinent
Malik Oussekine à coup de matraque. Pour consoler les parents, le très
humain Pasqua dit aux parents que "quand on a un fils sous dialyse, on
ne le laisse pas se balader la nuit à une heure du matin".
Le
lendemain, un petit comité lança un appel à la grève
générale (à l’époque il n’était nul besoin
de préciser "de toutes les catégories de travailleurs" !)
Le
8 décembre 1986, cet appel à la grève générale
est repris par la coordination étudiante-lycéenne. les salariés
commencent à se mettre en grève dans toutes les entreprises et
dans tous les services publics. les manifestation deviennent de plus en plus
violente et le slogan principal est alors :
« Pasqua
salaud ! Le peuple aura ta peau ! »
Et,
croyez-moi qu’il n’était pas crié gentiment ! les événements
font peur au pouvoir qui voit poindre un nouveau mai 68. Néanmoins,
Chirac ne veut toujours pas céder sur le projet Devaquet ! Mitterrand
convoque alors Chirac et, dès le lendemain, Chirac lui obéit et
retire sans condition le projet Devaquet. Je m’en souviens encore, j’étais
devant la télé avec des ami-e-s. Tout le monde jouissait sur place !
Et moi encore plus, je disais à propos de Chirac qui venait de retirer
le projet Devaquet : « Trop tard ! Trop tard ! »
Un
ami qui jusque-là ne croyait pas trop à mes histoires d’attentats
terroristes organisés par l’État lui-même me dit alors :
« Tu vois, si t’as raison, sur les attentats terroristes dont tu
crois qu’ils sont organisés par le pouvoir lui-même, alors dans
trois mois il va y en avoir un ! » Il était plus jeune
que moi et avait moins l’expérience des mouvements de contestation et
ne voyait pas que, maintenant, les choses allaient aller très vite, et
qu’après une telle victoire, les lycéens, les étudiants
et les salariés allaient être encouragés au point de vouloir
"tout et tout de suite !". Il ne voyait pas que les choses allaient
se dérouler à une vitesse aussi extrême que possible.
Je
lui répondis : « Non ! c’est pas dans trois mois
que le pouvoir va organiser un attentat, c’est demain ! »
Je
m’étais trompé d’un jour : j’avais oublié qu’un attentat
ça se prépare et qu’il faut un peu de temps. L’attentat prévu
eut lieu deux jours après, le 15 décembre 1986. J’ai
trouvé sur internet un lien qui dénonce cet attentat :
http://members.tripod.com/hlv-vlr/reserve/terrorisme/crime.htm
Voici
un extrait :
« Ce
fut "l’attentat" contre Peyrefitte. Seul un concours de circonstances
"inexplicable" a permis à Peyrefitte d’avoir la vie sauve.
Rappelons que Peyrefitte est un ancien ministre de "l’information".
Pasqua n’a pas manqué d’assimiler notre dernier mouvement de contestation
au terrorisme: "ceux qui ont pris le risque depuis quelques semaines de
créer dans le pays un climat de haine devraient prendre conscience de
leurs responsabilités. Rien ne fera reculer l’état. Nous redoublerons
nos forces et rassemblerons davantage de moyens pour faire reculer le terrorisme."
[Citation de Pasqua dans"le monde" du 16/12/86; dernière page.] »
D’après
le site internet "A BAS LA CENSURE" le tract dont vous avez lu un
extrait ci-dessus fut la première dénonciation de l’attentat Peyrefitte
comme ayant été commis par le pouvoir lui-même :
http://members.tripod.com/hlv-vlr/
Ensuite,
les Journaux "Lutte Ouvrière" d’Arlette et le "Canard
Enchaîné" n’hésitèrent pas à dénoncer
eux-mêmes à mots couverts cet attentat comme ayant été
commis par le pouvoir lui-même. Mais trop tard. Les étudiants et
les lycéens accusés par Pasqua d’être la cause de la mort
d’un ouvrier (et un autre grièvement blessé) reprirent les cours.
Chez les salariés, le mouvement de mise en grève fut stoppé
net.
Mais
à la SNCF, le mouvement ne fut pas arrêté par cette manipulation
du pouvoir. Il faut dire qu’à la SNCF, ils étaient en grève
depuis peu et qu’aucune de leurs revendications spécifiques n’avait été
sarisfaite. La dénonciation de la manipulation du pouvoir arriva à
temps pour eux pour qu’ils puissent continuer leur belle grève qui dura
plusieurs semaines. Ils allèrent jusqu’à saboter les trains pour
éviter que les jaunes ne puissent les conduire. Ils firent aussi circuler
les gens gratuitement dans les trains.
Tout
ça malgré la CGT qui freinait autant qu’elle le pouvait. Mais
la CGT ne put rien contre cette grève :
Pour
la première fois de l’histoire des luttes ouvrières, les salariés
de toute une boite s’étaient auto-organisés en coordination au
niveau national !
Je
me souviens bien de 1986, et de la coordination que les cheminots avaient dû
construire pour pouvoir faire grève malgré la CGT !
Et
à France-Info, j’entendais Krasucky, le pauvre chef de la CGT de l’époque,
qui pratiquait la méthode couet en parlant fort et en se répétant :
« La
seule coordination, c’est la CGT ! »
Hahaha !
Hé
bien NON ! justement, la seule coordination, c’était la coordination !
3-
l’avènement de Bernard Thibault : 1995
En
1995, il y eut un autre puissant mouvement de grève au niveau national.
Il s’agissait de sauver la Sécurité Sociale. le principal slogan
était alors :
« La
Sécu ! On s’est battu pour l’obtenir, on se battra pour la garder ! »
C’était
alors la SNCF qui était à la pointe du combat. Le Premier ministre
Alain Juppé dut démissioner (mais pas immédiatement :
en 1997) !
Mais,
en 1995, Bernard THIBAULT, alors chef de la CGT cheminot, réussit, par
sa démagogie et par diverses manipulations, à empêcher les
cheminots d’auto-organiser leur mouvement dans une coordination.
C’est
pour récompenser Bernard THIBAULT d’avoir su maîtriser le mouvement
des cheminots de 1995 qu’il fut nommé grand chef de toute la CGT !
Grâce
à Bernard Thibault, le mouvement de 1995 n’eut à aucun moment
aucune chance de devenir un nouveau mai 68, et malgré l’ampleur
des manifs, tant en province qu’à Paris, surtout en province d’ailleurs,
le mouvement de 1986 reste bien supérieur à celui de 1995.
Bernard Thibault aurait préféré
que la CGT invite à voter Oui à la Constitution de l’Europe !
Normal : c’est son rôle !
La
CGT on connaît, et
si le P"C"F a été à peu près déstalinisé
(du moins j’espère), ce n’est pas encore le cas de la CGT, comme ont
pu s’en rendre compte à Paris, il y a environ un an, des militants anarchistes
sur qui les gros bras de la CGT étaient tombés à bras raccourcis
à la SEULE vue de leur banderole anarchiste !
La
CGT, on connaît !
Pour bien voir ce qu’est la CGT, allez sur sa page historique :
http://www.cgt.fr/internet/html/rubrique/?id_parent=116&aff_docref=0&aff_ensavoirplus=0
Ainsi
vous pourrez constater que 1986 est une année absente du repère
historique de la CGT, elle est rayée des cadres, effacée comme
un vulgaire Trotski sur les photos de la famille révolutionnaire de Staline !
Pourtant,
tout en étant bien inférieure à mai 68 et à
certaines des années 70, 1986 est une année contestataire qui
n’a malheureusement jamais été égalée en Fance depuis
cette époque ! Son absence dans l’historiquede la CGT est significatif !
Pour
bien voir l’importance de 1986, rappelons que si le mouvement de 1986 n’avait
pas eu lieu, c’est Chirac qui aurait été élu en 1988. Quand
la télé nous fait croire que si Chirac n’a pas été
élu en 88, c’est à cause d’une petite phrase de Mitterrand, c’est
de la blague !
Mais
pour faire ce mouvement, les cheminots avaient dû commencer par abattre
leur premier ennemi, celui qui cherchait par tous les moyens à les empêcher
de se mettre en grève : la CGT !
Aussi,
ça ne m’étonne pas que la CGT ne veuille pas rappeler cela dans
son historique.
Bien
à vous,
do
http://mai68.org
ou si ça ne marche pas :
http://kalachnikov.org
ou encore en toute dernière extrémité :
Post-Scriptum :
0°)
Les bureaucrates de la CGT ne veulent pas d’un mouvement social fort. Ce qu’ils
veulent, c’est un mouvement totalement contrôlé par eux, de façon
à prouver l’utilité de la CGT à la bourgeoisie. C’est pourquoi
ils ont peur des débordements :
« Comment
ça, vous voulez un mouvement suffisamment fort pour mettre le gouvernement
à genoux, comme en 1986 ou en 1995 ? Pas de ça Lizette !
Nous, la CGT, on est là pour servir le pouvoir, pas le contraire !
« Comment
vous voulez auto-organiser votre mouvement dans une coordination ? Pas
question non plus. Sinon, la CGT ne servirait plus à rien, et surtout,
vous ne seriez plus controlables par nous. »
Voilà
le discours de la CGT une fois traduit en langage clair.
1°)
Pour casser les reins de l’ensemble des salariés, les syndicats, et en
particulier la CGT, aiment bien organiser des journées d’action séparées
par de longues semaines.
2°) Ne comptons pas sur les syndicats ! l’émancipation du prolétariat
sera l’oeuvre du prolétariat lui-même ! Que chacun mette sont lieu
de travail en grève dès maintenant sans s’occuper des appels ou
de l’absence des appels syndicaux !
3°)
Bien sûr que les coordinations ça marche : il y a les exemples
des coordinations étudiantes des années 1970, de 1986 etc. Il
y a la coordination de la SNCF en 1986. Plus récemment,
en 2003, à Toulouse par exemple, une coordination interpro avec AG souveraines
a très bien fonctionné. À noter que la CGT a fait intervenir
nombre de ses cadres dans les AG de 2003 pour dire de reprendre le boulot (y
compris contre l’accord des cégétistes de base !).
4°)
Pendant la réforme des retraites, des cheminots de la gare d’Austerlitz
ont reconduit leur grève, résultat : ils se sont fait mettre
sur la gueule deux soirs de suite par le S.O de la CGT parce que la direction
avait décidé de ne pas faire de grève reconductible :
plusieurs bléssés à la salpétrière !
5°)
La CGT au service du patronnat : En 1995, comme en 1986 ou en 1968 etc.,
la CGT et les autres syndicats refusèrent d’appeler à la grève
générale. C’est
à propos de 1986 que le Canard Enchaîné rappela que les
syndicats sont financés à 88% par l’État. Les
syndicats sont au service de ceux qui les financent.
Rappelons
que, comme le disait Marx, l’État, c’est l’arme de la bourgeoisie contre
le prolétariat. C’est
bien pourquoi, et même quand l’Assemblée Générale
en a décidé autrement, avec les gros bras de son SO aussi terrible
que les CRS (et dans le même camp), il arrive si souvent que la CGT force
manu militari les travailleurs à reprendre le travail.
Seule
une coordination peut nous assurer de ne pas être trahis !
Nous
voulons la coordination et la révolution. Nous voulons TOUT !
Pas
de pardon !
L‘auto-organisation de
toutes les luttes dans une même coordination est le meilleur moyen de
gagner, et c’est la seule façon de ne pas être trahis !
Je suis un partisan de la CGT.