Je ne reviens pas sur les évènements, l’action, son principe et son
contenu,
mais simplement sur ce que j’ai vécu, vu et subi entre l’interpellation,
lorsque nous avons quitté le toit de l’annexe du ministère de l’éducation
et
ma libération du commissariat jeudi à 14 heures. On trouvera là beaucoup
de
détails peut-être insignifiants, mais pouvant avoir une valeur
significative
pour les avocats qui liront ce texte.
La sortie de l’immeuble
Lorsque nous avons décidé de quitter collectivement le toit de l’annexe,
nous savions que nous serions tous placés en garde-à-vue pour «
Participation à un rassemblement », selon les termes du responsable de la
Police. Ce dernier s’était également engagé à ce que plusieurs lycéens
aient
« droit à un traitement spécial » pour avoir lancé des cailloux et du
gravier sur les forces de l’ordre de la Gendarmerie mobile (GM).
Nous avons donc quitté le toit vers 17h30 (à vérifier). Mis en file
indienne, nous avancions vers un couloir de GM. La personne devant moi,
X*,
a été priée de remettre sa capuche par un gendarme, afin de voir à quoi il
ressemblait avec, comme lorsqu’il s’était masqué plus tôt. Un autre m’a
demandé d’enlever ma casquette. Puis, alors que j’avançais vers
l’escalier, un GM m’a vu et a dit : « Casquette bleue ! » (Couleur de ma casquette).
On
m’a alors prié de tourner à droite. Je suis entré dans une petite pièce,
un
bureau de l’immeuble, avec un bureau, quelques chaises. Un GM m’a poussé à
l’intérieur et X est arrivé immédiatement, déjà malmené par les GM qui le
tenaient. Ceux-ci l’ont mis à terre et lui ont crié de se déshabiller. Un
GM, apparemment plus gradé, leur a dit de faire attention, car nous
serions
filmés en bas.
Puis, les GM, une dizaine dans la pièce, ont fermé la porte et ont répété
à
X, toujours par terre de se déshabiller. Ils l’entouraient et lui criaient
dessus : « Tu fais moins le malin maintenant que t’es là ! », « Tu nous
lances plus des trucs sur la tête ! », « T’as voulu nous tuer, ben tu vas
morfler ! », etc. Quant à moi, on m’a demandé de me retourner, non par
pudeur, mais pour vider mes poches sur le bureau. Je n’ai qu’entendu la
suite. Les GM ont dit à X de se relever, puis de se déshabiller. Pendant
ce
temps, le GM auprès de moi triait les affaires que je sortais, confisquant
une liste de numéros de téléphone (en fait pas des contacts militants,
mais
ceux des agences de presse et le communiqué envoyé quand nous étions sur
le
toit), dégommant au passage les flacons de collyre pour les yeux.
J’entendais les GM derrière crier à X : « Enlève ton caleçon aussi ! »

Alors
que X leur demandait pourquoi, ils se sont énervés de plus belle, lui
signifiant qu’il n’avait pas à poser de questions. Le GM qui me palpait
alors m’a dit à l’oreille : « Vous avez de la chance que mes collègues
soient occupés. » J’ignore à l’heure actuelle s’ils ont frappé X. Toujours
est-il qu’après cette humiliation, ils lui ont dit de se rhabiller, ont
fouillé son sac, puis l’ont fait rejoindre les autres lycéens dans le
couloir.

Ma fouille terminée, alors que j’étais seul dans la pièce et que la porte
était refermée, les cinq GM restant m’ont entouré. Ils m’ont dit qu’ils
m’avaient reconnu grâce à ma casquette, qu’ils confisquaient mon keffieh,
avec lequel je m’étais masqué sur le toit, qu’ils avaient des films me
montrant leur jeter des objets depuis une fenêtre, ce qui est faux car je
ne l’ai pas fait. Je le leur ai dit et ai ajouté que j’étais prêt à en
répondre
devant le film et devant la Justice. Un GM m’a alors signifié de ne pas
faire le malin. Il m’a dit qu’eux aussi avaient été étudiants, qu’ils
avaient tous bac + 2, mais que jamais ils n’avaient rien fait d’aussi
grave,
que cinq de ses collègues étaient à l’hôpital (ce qui est faux), qu’ils ne
faisaient qu’obéir aux ordres, qu’ils n’étaient pas là pour se faire tuer,
etc. Puis un GM m’a dit : « Tu préviens tes camarades que s’ils en
blessent
un chez nous, nous on en blesse dix chez vous et la prochaine fois, il y
aura pas de caméra. » Puis il m’a permis de reprendre mes affaires et m’a
dit de remettre ma casquette. Un de leur collègue est entré dans le
bureau,
m’a vu, m’a enlevé ma casquette d’un revers de main, a demandé à ses
collègues en riant si j’avais bien été fouillé. Pendant que je me baissais
pour récupérer ma casquette au sol, il m’a dit : « Garde la bien, on te
repère bien avec », je lui ai répété que je n’avais rien à me reprocher et
suis sorti.
Dans le couloir, les gens qui avaient vu sortir X m’ont vu arriver et
m’ont
immédiatement demandé ce qu’il s’était passé. J’ai répondu en serrant les
dents : « Ce sont vraiment des fascistes. »

La garde-à-vue (gàv)

L’ensemble des garde-à-vue a commencé à 18 heures, heure approximative des
interpellations officielles, c’est-à-dire en dehors de l’immeuble, par la
Police Judiciaire (PJ).
En sortant de l’immeuble, chacun escorté par un GM de notre sexe, nous
tenant par l’épaule, nous étions fouillés et notre identité était relevée.
Nous avons également du poser devant la caméra et l’appareil photo de la
police. Je retrouvais des camarades en bas. Un car plein est parti, nous
attendions donc le suivant. En y montant, nouveau relevé d’identité.

Le car part alors que nous sommes 29 dedans. Premier arrêt quelques
minutes plus tard devant le commissariat du 13ème arrondissement. Les manifestants
arrivent, au cri de « Libérez nos camarades ! » Après une attente
d’environ
vingt minutes (à vérifier), les policiers font sortir dix d’entre nous.
Ils
entrent dans le commissariat. Puis, comme nous nous agitons et essayons de
communiquer avec les manifestants, le car démarre, avance un tout petit
peu
puis freine brusquement, faisant basculer ceux qui étaient debout. Après
une
vingtaine de minutes encore (peut-être plus ?), ils en font sortir dix
autres. Apparemment, ils auraient été mis dans un autre car et conduits
dans
un autre commissariat. Nous ne sommes plus que neuf. Le car attend encore,
puis part dans une direction inconnue. Nous essayons de suivre les rues
que
nous empruntons avec un plan de Paris, afin de prévenir les camarades de
l’endroit où l’on nous mène. Il s’agit du commissariat du 14ème
arrondissement.

Nous sortons du car par groupes de deux, je suis le premier. A l’entrée du
commissariat, une haie d’honneur est formée par les gardiens de la paix.
Nous déposons nos identités, puis allons nous asseoir, un par un, dans le
couloir où il est procédé à une fouille. Nous sommes donc encore ensemble,
tous les neuf. On nous fait emmener par deux dans la pièce d’à côté, pour
une vérification plus précise d’identité. Puis nous nous rasseyons chacun
notre tour. Les policiers sont relativement gentils et polis. Ils
demandent
même des renseignements sur la réforme Fillon, sur l’action, etc. Est-ce
une
manipulation pour nous faire dire certaines choses, nous mettre en
confiance
? Ils accèdent aux demandes d’aller aux toilettes. Ils confisquent en
revanche tous les sacs, livres et demandent d’éteindre les portables, ce
qui
est alors déjà fait. L’attente est assez longue, puisque ce n’est qu’à
neuf
heures et demi que je suis conduit dans un bureau pour me voir signifier
ma
garde à vue et mes droits.
Je suis donc placé en garde-à-vue de 24 heures, renouvelable une fois,
pour « Dégradation de biens publics en réunion » et « Violences sur des Agents
de
la force publique (AFP) en réunion. » Je demande à voir un avocat, Maître
Antoine Comte, ou un commis d’office en cas d’injoignabilité. Je signe mon
relevé (identité, signification de la gàv, signification de mes droits)
après relecture, en deux exemplaires. Puis l’officier de police qui
m’interroge me demande de signer également une déposition, cette fois sur
un livre s’apparentant à un registre, reprenant les mêmes informations
manuscrites, sur un support imprimé, mais avec une page entière non
remplie.

Je trouve cela étrange et le dit à l’officier qui me dit qu’il s’agit de
la
même chose que ce que j’ai signé sur les feuilles imprimées. Je persiste à
hésiter. Il me dit alors que je suis obligé de signer. Je signe donc ce
document sur lequel est laissé un grand espace en blanc, alors que je sais
que c’est la première des choses à éviter et que rien ne m’oblige à
signer.

Mais je n’en suis pas sûr pour ce qui est de cette simple signification de
mes droits et de ma gàv.
On procède ensuite à ma perquisition. Selon la procédure, tout est pris,
et
consigné même mes lunettes). On ne me donne en revanche pas d’inventaire à
signer. On me conduit en cellule. Comme nous étions sept filles et deux
garçons embarqués dans le 14ème, je me retrouve en cellule avec un
camarade,
Tom, et deux autres « gavés ». Trois arriveront dans la nuit, au plus fort
nous serons donc sept dans la cellule (6 m2 au maximum à mon avis). Dans
la
cellule d’à côté, où sont les camarades filles, cinq puisqu’il y en avait
deux mineures, mais qui seront conduites avec elles plus tard (ce qui est
illégal), celles-ci demandent à pouvoir manger. Le policier leur répond
d’attendre, puis, plus tard, leur dit qu’il faudra attendre sept heures du
matin. Heureusement, arrive peu après le pain de mie et le fromage que des
camarades nous ont acheté et fait passer. Nous nous restaurons donc un
peu.
Un policier passe et nous demande quels sont nos lycées, on ne sait pas
pourquoi.
J’essaye de m’endormir, sur le banc de béton de la cellule, puis par
terre,
j’entend vaguement les allées et venues dehors et dans la cellule d’à
côté.

Vers trois heures, je suis convoqué pour voir mon avocat, commis d’office,
car maître Comte est injoignable. L’entretien dure quelques minutes.
L’avocat me rassure quant au papier que j’ai signé, me dit que la
perquisition sans inventaire signé n’est pas un vice de procédure,
m’expose ce que je risque, aux vues de la situation générale : relâché sans suite,
relâché avec une convocation plus tard (et dans ce cas la possibilité de
préparer collectivement la défense), comparution immédiate, avec le risque
d’être retenu jusqu’au procès en cas de refus. Au niveau des peines, cela
peut aller de la relaxe jusqu’aux TIG, il serait étonnant que la prison ou
une forte amende soient retenues pour des lycéens et des étudiants. Il me
conseille de ne reconnaître aucun fait, et de ne pas reconnaître en avoir
été témoin.

Je retourne en cellule et essaye de dormir jusqu’à cinq heures, heure à
laquelle je suis convoqué pour mon interrogatoire. On me présente la liste
de ma perquisition. On refuse de me rendre mes lunettes pour que je puisse
la lire. Je le fais tant bien que mal, vérifie qu’il n’y a pas de blanc,
puis la signe. Je suis interrogé sur les faits. Je dis que je n’ai rien à
déclarer. Je réponds donc aux questions une par une : où nous nous sommes
rassemblés, où nous nous sommes rendus, comment nous sommes entrés dans
l’annexe du ministère, etc. L’inspectrice qui m’interroge me dit que de
toutes manières, la police sait déjà tout grâce aux RG et à l’enquête et
veut simplement voir ce que je dis ou non. Je continue à dire que je n’ai
rien à déclarer. Elle me demande comment j’ai été au courrant du
rendez-vous. Je lui dis que c’est par le bouche-à-oreille. Elle me demande
si j’ai reçu un SMS me l’indiquant. Je réponds que oui. Elle me demande
qui
me l’a envoyé. Je dis que je n’en suis pas sûr, qu’il fallait de toutes
manières le transmettre. Elle me demande s’il ne s’agit pas de Pauline,
présente dans le commissariat. Je réponds que c’est possible. Elle me pose
alors des questions sur elle, comment je la connais, alors que nous ne
sommes pas dans le même lycée, son rôle dans les manifestations, dans
celle-ci en particulier, etc. Je réponds évasivement, insistant sur le
fait
qu’il n’y a pas de leader, de chef, que toutes les décisions sont prises
collectivement, etc. Comme elle tape simultanément mes réponses en les
rédigeant à sa manière, elle essaye de détourner le sens de mes propos.
Elle me reprend à un moment : « Nous disions donc : ”celle-ci décide.” » Je
demande qui est « celle-ci », elle me répond qu’il s’agit de Pauline. Je
lui
répète alors que Pauline ne décide de rien. Finalement, elle tire ma
déposition. Je la relis, avec peine, en corrige plusieurs phrases (pas
l’orthographe, également catastrophique !), puis finis par la signer. Je
suis ensuite pris en photo, avec l’ardoise portant mon nom, des
caractéristiques (taille, poids.) de face et de profil, puis on prend mes
empruntes digitales.

Je suis alors reconduit en cellule. Tom, qui a refusé de voir un avocat,
disant que cela ne servait à rien, me dit qu’il a craqué et a avoué être
un
leader du mouvement et avoir participé aux dégradation. Nous nous
rendormons. Tom m’informe à mon réveil que Pauline a été emmenée menottée et n’est pas revenue. De fait, ni lui, ni moi ne la voyons revenir, mais nous
dormons (ou essayons de dormir) beaucoup, puisqu’il n’y a que ça à faire
en
cellule. Vers sept heures, on nous propose un petit-déjeuner. Je décline.
On
nous propose de déjeuner vers midi et demi. J’accepte une barquette de
pâtes. Je tourne en rond dans la cellule. On a déjà libéré plusieurs
détenus

(non militants). Nous sommes encore trois dans la cellule. Puis, vers
quatorze heures, on vient chercher trois d’entre nous, deux filles et moi.
En sortant, je jette un regard vers la cellule des filles et constate que
Pauline a été ramenée, ainsi que les deux filles mineures.

On me rend mes effets personnels, je signe le dernier document, sur lequel
figurent les informations factuelles : mon heure d’interpellation, son
motif, mon heure d’arrivée, l’annonce de mes droits, mon recours à un
avocat, pas ma déclaration lors de mon interrogatoire, que j’aurais aimé
relire. On me dit que rien n’est retenu contre moi, mais que je pourrais
être convoqué de nouveau dans le cadre de l’affaire, etc. Je sors, suivi
des deux autres camarades.
Nous avons en commun d’être majeurs, de n’avoir rien avoué, d’avoir dit ne
rien avoir vu. Nous sommes les trois seuls à avoir vu l’avocat.

Pour information, cinq autres camarades ont été relâchés entre 20h et 21h,
c’est-à-dire après prolongation de la gàv, mais sans suite. Les deux
autres camarades, Pauline et Mayssa, ont été relâchées après 48 heures et un
passage au Palais de Justice. Pauline a été interrogée plus de cinq fois
dans la nuit. Nous avons tous eu à répondre à des questions la concernant.
Mayssa a avoué être leader du mouvement et avoir participé aux dégradations.

Elles sont toutes deux mises en examen pour les faits reprochés en gàv mais pas placées sous contrôle judiciaire. A l’heure actuelle, il n’y a plus personne en détention, mais quinze sont
mises en examen.

Fait le vendredi 22 avril à 21h30.

J.B.

——
Récit d’une garde à vue

Suite à l’occupation d’une annexe du ministère de l’éducation mercredi,
à l’appel du comité de coordination parisienne (je tiens cette
infomation de la police), nous avons tous été embarqué par la police, il
y a eu plus de cent soixante gardes à vue !

J’étais dans le commissariat du septième où nous avons été traités de
manière exceptionnelle : nous avons passé toute la garde à vue ensemble
(mineurs, majeurs, filles, garçons) dans une salle du sous-sol du
commissariat sous la surveillance d’environ quatre agents de police qui
se relayaient.

Nous étions dans une salle relativement grande, et nous avons pu y
prendre nos aises assez rapidement, nous tenions même tous allongés.
Nous pouvions discuter librement, ce qui a permis de remonter le moral à
ceux qui flanchaient un peu par moment. Les conditions étaient tout de
même relativement spartiates, nous n’avions pas de couvertures, et
étions privés de la plupart de nos libertés. A part l’équipe de nuit qui
était exagérément autoritaire, nos gardiens étaient plutôt ouverts à la
discussion, ils s’embêtaient au moins autant que nous. Les allers et
venues se succédaient : fouilles, notification de garde à vue, visite de
médecins, entretien avec avocat, auditions, prise d’empreintes et de
portrait…

Au milieu de la nuit, on nous a tous fait lever, en rang, pour être
soumis à un examen : ils venaient de recevoir un rapport des
renseignements généraux qui comportaient des photos. Au moins une paire
d’entre nous avaient été reconnus et les policiers sont repartis. C’est
à ce moment que la tension est montée d’un cran : “est-ce que c’était
moi ?”, “que va-t-il arriver aux personnes reconnues ?”, “que
reproche-t-on aux personnes prise en photos ?”… Malgré leur volonté de
nous cacher les épreuves, certains d’entre nous ont pu à la volée
identifier plusieurs personnes sur les photos : des gens reconnus comme
étant bien présents et impliqués dans le mouvement, dans la
coordination, dans les manifestations. Il y avait aussi une exception :
il n y avait pas que des lycéens sur ces photos. Même à plusieurs
mètres, je me suis clairement reconnu sur une d’elle, ce qui m’a été
confirmé par d’autres personnes. Sur le cliché, je suis au milieu de la
terrasse en train de me balader avec une cigarette à la bouche. La garde
à vue s’est poursuivie sur le même rytme, avec une paire de personnes
peut-être un peu plus anxieuses que les autres, mais avec toujours de la
bonne humeur.

Le deuxième jour, le jeudi, on nous a confirmé que nous n’allions plus
tarder à sortir, ce qui à été effectif dans la suite des évènements. Au
bout d’un moment, les personnes majeures ont été invité a quitter les
lieux, à peu près dans l’ordre alphabétique, et les personnes mineurs,
au rythme où leurs parents venaient les chercher.

Puis le rythme s’est ralenti, normal, il y avait de moins en moins de
monde. au bout d’un moment, nous n’étions plus qu’une poignée de mineurs
et moi-même. L’autre jeune personne qui à été gardée en prolongation de
garde à vue ne redescendait plus, la procédure pour les mineurs est plus
exigente, mais elle m’a dit avoir aussi été longuement auditionnée. On
est enfin venu me chercher, mais pour me notifier la prolongation de
garde à vue, et m’auditionner, et me coller finalement dans la cellule
de garde à vue, videosurveillée, à coté de la cellule des femmes, où a
été emmenée l’autre jeune personne. Même si nous pouvions encore
communiquer, la garde à vue est devenue plus dure, sans lien et avec
encore plus de fatigue. La porte qui séparait les cellules du hall
d’entrée était restée ouverte, ce qui m’a permis de voir une paire
d’agents en civil entrer pour prévenir qu’un attroupement se mettait en
place devant le commissariat, je me suis douté qu’il y avait un peu de
soutien, mais n’avait pas les moyens de le vérifier. Y m’avait apporté
de la nourriture, c’est à ce moment là que j’ai compris que l’on savait
où j’étais, on ma dis que X était passé, j’ai alors su que Sud était
aussi au courant. Avoir ainsi des bribes d’informations provenant de
l’extérieur était un grand soulagement. Des élèves de mon lycée étaient
présent au rassemblement de soutien au pied de l’annexe du ministère,
ils m’ont vu et je me demandais si l’information avait circulé jusqu’au
lycée. Cela m’a été confirmé depuis par de nombreux messages de soutien,
et diverses propositions pour le réaliser.

Lors de la fin de la garde à vue, une nouvelle épreuve arrivait : la
mise au dépot pour rencontrer le procureur. La pression monte toute
seule quand on se retrouve avec une paire de menottes aux poignets. Dans
le véhicule qui nous amenait au tribunal la jeune fille qui était avec
moi souffrait d’être ballottée, sans trouver de position confortable,
les menottes dans le dos. Puis suit la mise au dépot où l’on recommence
la fouille et la mise en cellule : deux lits superposé, et une touche de
luxe : un chiotte et de l’eau ! Nous étions six, à venir dans ces lieux
pour des motifs divers et variés. Au bout d’un moment, je me demandais
s’il n’était pas trop tard pour pouvoir suivre la procédure, allais-je
passer le week-end ici ? Puis on est enfin venu me chercher, on a sauté
la case procureur et je suis emmené devant le juge. Une lycéenne est
assise à proximité, je l’avais reconnue sur une des photos du rapport
des renseingements généraux. La garde à vue ne s’est pas passée de la
même façon : elle était interrogée toutes les heures, à renfort de
baffes ! Peu de temps après arrive Maître Terrel qui suit mon dossier et
on a pu discuter, elle a pu consulter le dossier : environs trente
centimètres d’épaisseur en format A4… Elle était très rassurante, et
effectivement, j’étais dehors dans l’heure.

Elle à fait la demande pour avoir une copie du dossier et je retourne la
voir lundi. Nous sommes tous “mis en examen des chefs de :
– violences volontaires sans ITT en réunion, avec armes par destination
sur agents de la force publique ;
– dégradations en réunion de bien d’utilité publique.”

Le procureur demandait un placement sous contrôle judiciaire de tous les
majeurs, mais il nous a été signifié la même chose, que l’on soit majeur
ou mineur, c’est à dire le refus de placement sous contrôle judiciaire.
Bref, nous sommes libre de circulation depuis vendredi soir et devons
rester disponibles pour la justice, en attendant le procès qui aura lieu
plus tard.

Voila, c’est finit pour la première étape, on commence déjà à parler de
rassemblement de soutien lors du passage au tribunal. Les dates ne sont
pas encore communiquées, mais il y a déjà Samuel Morville qui passe en
procès le 25 mai après avoir été arrété lors de la manifestation du 31
mars. Un étudiant passe en comparution le 31 mai, suite à une
arrestation musclée (dont j’ai été témoin) lors de la manifestation du
13 avril. Quelques images sont disponibles sur le lien suivant :
http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=35349&id_mot=33

Je vous raconterai aussi l’occupation, mais pas aujourd’hui !

D.

Ci joint un communiqué de la coordination rédigé par S. :

Apres 3 mois de lutte, parce que Fillon ne veut pas nous écouter, parce
que l’immense majorité des lycéens soutiennent notre action : la
Coordination Lycéenne gérée par des assemblées générales et composée d
une base large et hétérogène réunissant tous les lycéens mobilisés, a
envahi une annexe du ministère de l Education nationale mercredi 20.

Cette action coup-de-poing vise directement le ministre et montre a tous
la détermination et l’organisation des lycéens. Nous étions 2500 lors de
la manifestation de jeudi 21 alors que les animateurs du mouvement
étaient pour la plupart encore en garde à vue (GAV).

Si nous ne sommes pas aussi nombreux qu’au part avant lors des grandes
manifestations (200 000) ou au plus fort des occupations (25 % des
établissements occupés) ce n est pas par défaitisme ni par isolement ou
manipulation de l’extrême gauche.

Les animateurs de mouvement sont exclus des établissements, les coups de
matraque pleuvent, et les arrestations massives comme mercredi (178 GAV)
sont monnaie courante. C’est cette volonté du gouvernement qui saccage
notre mouvement.

Nous dénonçons la casse policière et administrative ainsi que la
diabolisation par certains média et le syndicat de proviseurs de ce
mouvement social qui lui tend vers l’unité dans la lutte avec les
professeurs et les personnels de l Education nationale.

Nous nous réunissons samedi à 15H à Jussieu pour décider ensemble des
suites à donner à notre mouvement à savoir les dates du 1, 12 et 16 mai.

La Coordination Lycéenne