Les nombreux et forts mouvements de révolte qui secouent le monde arabe ces derniers temps suscitent ici d’amples réactions de soutien car nous désirons plus que tout l’émancipation de ces peuples. Il y a une certaine tendance à se réjouir d’une transition de ces pays vers la « démocratie ». Mais quelle démocratie ? Celle qui est souvent sous-entendue est une démocratie représentative comme celles de nos états européens modernes. Or, nos fameuses démocraties érigées par certains en modèle ne sont à souhaiter à aucun peuple pour une réelle émancipation ! Elles tiennent plus de l’oligarchie capitaliste que de la véritable démocratie (directe) et ne sont qu’une horreur. Nous en voulons pour preuve les réactions que nos gouvernements ont eues face aux répressions inhumaines que subissent les peuples arabes. En effet, la « patrie des droits de l’homme » plutôt que de fournir soutien et aide humanitaire à ces peuples, comme on aurait pu l’espérer, a préféré faire preuve d’un violent nationalisme en ne se souciant que de la solidité de ses frontières et en se préparant à repousser une supposée « terrible vague d’immigration ». « Au secours, à l’invasion ! » a-t-elle crié alors que des migrants persécutés, venant de pays actuellement dangereux ont besoin d’un refuge et de protection.

En effet, la France, ou plutôt son gouvernement, annonce un afflux massif de migrants venus du Maghreb et déploie pour y faire face un super dispositif policier pour rafler, enfermer, expulser. Pourtant, l’afflux de migrants, bien réel, est loin d’être massif, puisque les centres de rétention (CRA) où l’on enferme les clandestins arrêtés, bien que se remplissant, n’affichent pas complet. En revanche, les rafles vont bon train : 301 Tunisiens ont été arrêtés en Provence-Alpes-côte-d’Azur, la plupart d’entre eux ayant déjà été reconduits à la frontière, dans un pays actuellement dangereux où, de plus, ils ne peuvent plus subvenir à leurs besoins (compte tenu de l’activité économique en partie stoppée) ; 20 migrants (9 tunisiens, 5 libyens, 4 égyptiens, un roumain et un afghan) ont été raflés à la gare de Lyon et sont actuellement enfermés au centre de rétention de Vincennes. Leur expulsion est validée et prévue, car, comme pour le charter des Afghans il y a 3 ans, sans laissez-passer de l’ambassade, Sarkozy signe lui-même les papiers pour l’expulsion ! Tant pis si cela conduit ces personnes dans un pays dangereux où la torture voir la mort les attendent peut-être ! Un rassemblement de soutien aux personnes enfermées au CRA de Vincennes avait lieu le 5 mars, pour protester contre tout cela mais également pour soutenir la lutte des prisonniers du CRA qui enchaînent protestations, résistances aux expulsions et grèves de la faim depuis le 24 février, en réponse aux violences qu’ils subissent de la part des policiers (plusieurs d’entre eux ont été hospitalisés) et à leur enfermement. Dans le CRA de Marseille aussi la révolte gronde, et fort, car le CRA a tout simplement brûlé le 9 mars intoxiquant 33 sans-papiers dont 3 grièvement. Les prisonniers vont être transférés vers un autre CRA, certains seront peut être libérés grâce à cette action.

Mais la France n’est pas vraiment pire que ses voisins européens : actuellement, des mouvements de protestation dans les centres de rétention, semblables à celui du CRA de Vincennes, ont lieu dans les prisons pour étrangers d’Italie et de Belgique où grèves de la faim, incendies et évasions vont bon train. En Grèce, où l’obtention de papiers dépend exclusivement du contrat de travail, il a fallu que 300 travailleurs sans papiers fassent une grève de la faim allant, pour un bon nombre d’entre eux, jusqu’à l’hospitalisation pour pouvoir obtenir une partie seulement de leur revendications. Ce mouvement est tout de même une belle victoire qui redonne espoir et ouvre la voie.

En marge de sa politique xénophobe, l’union européenne à pourtant voté en 2001 une loi prévoyant un dispositif dit de « protection temporaire » pour les ressortissants d’États qui, victimes d’une catastrophe naturelle, de troubles politiques dans leur pays ou de conflits armés, auraient besoin en urgence de trouver un abri en Europe. Nous sommes aujourd’hui en 2011 et malgré une situation qui correspond tout à fait à cette loi, celle-ci semble tout à fait ignorée et demeure inappliquée. Pire, l’union européenne envoie des patrouilles sur ses frontières maritimes, via Frontex, pour empêcher les réfugiés de traverser la Méditerranée ! Et plutôt que de nous parler de cette directive européenne, les médias préfèrent nous en parler d’une autre, celle qui doit être mise en place en France par la fameuse loi Besson et qui marque encore un pas en avant dans la xénophobie d’État, prévoyant notamment une importante restriction du séjour pour « accès aux soins » des étrangers gravement malades. Encore une fois, c’est la vie de centaines de personnes qui est en jeu, mais, à en croire le journal la Provence, cette loi est une nécessité absolue puisque, sans elle, un horrible vide judiciaire a permis récemment à deux immigrés Tunisiens de sortir du centre de rétention pour vivre en liberté parmi les bons français bien blancs et ce jusqu’à leur prochaine arrestation… c’est dire comme c’est grave !