Nous sommes tous des mauvais(e)s chômeur-euses.

C’est « la Crise ». On nous dit que les banques font faillite, les cours de la Bourse dégringolent, les investisseurs n’investissent plus, le moral des ménages est au plus bas. Les dirigeants économiques, feignant d’oublier les bénéfices record, se plaignent de la récession et s’excusent d’être contraint de virer les « petites gens ». Les dirigeants politiques tentent un grossier volte face, appelant à « moraliser » le capitalisme tout en redistribuant des milliards aux banques qu’ils accusent être des voyous de la finance.
Le capitalisme, tant vanté il y a quelques mois encore, serait soudainement devenu malade. Chaque jour, nous constatons que l’être humain est au service d’une croissance dont on ne saisit pas l’intérêt : on nous dit qu’il faut de la croissance pour créer des emplois… et qu’il faut des emplois pour avoir de la croissance ! Devant cette manière d’évacuer constamment le pourquoi, voila ce qu’il faut bien s’avouer : l’être humain est devenu un « agent économique », variable d’ajustement sur le marché du travail. Il se pourrait bien que ce soit le capitalisme qui soit la maladie même…
Bien que la crise d’aujourd’hui fragilise le système capitaliste, celui-ci peut s’en accommoder : elle étend le champ de la précarité et permet ainsi d’avoir une main d’œuvre plus soumise aux employeurs. Tous les beaux discours sur « l’insertion sociale » et « l’aide aux plus démunis » de la classe politique ne font pas avaler l’amère pilule de la dure loi du marché qu’ils ont eux même mis en place. La duplicité de cette politique capitaliste se concentre dans la figure du chômeur-euse : elle est en même temps celle dont le système capitaliste a besoin et celle qu’il vomit. Le chômeur-euse est l’archétype de l’agent économique qui doit s’adapter aux variations de l’économie de marché : prendre un boulot pourri et mal payé, s’il-elle a la « chance » d’en trouver un…
L e dernier décret instaurant le « projet personnalisé d’accès à l’emploi » conduit à l’élaboration d’un concept fabuleux : « l’offre raisonnable d’emploi ». Deux refus entraînent, selon le décret d’application du 15 novembre, la suspension des indemnités. Entendez par là que le chômeur-euse, quel scandale, est soupçonné d’être un mauvais agent économique : il-elle refuse parfois d’aller faire un travail de merde pour une somme modique! D’où la nécessité d’établir des offres raisonnables, sous peine de radiation. Instaurer la suspicion sur la figure du mauvais-e chômeur-euse a un avantage : elle permet de masquer la réalité de ceux qui galèrent, particulièrement celles et ceux considéré-e-s comme n’ayant pas ou peu de « compétences ».
L’agent ANPE est placé dans une position bien délicate : il doit choisir entre être un bon fonctionnaire d’une administration de type orwellienne, agent déshumanisé traitant des numéros de dossier, ou protester, comme il-elles ont pu le faire contre la fusion ANPE/UNEDIC, qui favorise la culture du résultat. Celles et ceux qui résistent ont bien saisi la définition de ce que le gouvernement attend d’un « travailleur social » : celle du contrôleur chargé de vérifier la servilité du chômeur à l’économie, si besoin de radier les récalcitrants.
Parce que nous sommes dans cette condition d’isolement, nous sommes susceptibles d’être les plus vulnérables aux diktats de l’économie. Parce que les agents ANPE se trouvent également être des pions dans une machine qui les dépassent, nous sentons la nécessité de nous rencontrer pour échanger, s’organiser et agir !!!

Mercredi 26 novembre, 18 heures, local des chômeur-euses et précaires en lutte, 22 rue debellevue bus 3 ou 10 arrêt Jeanne d’Arc. Rennes