Le décret « Bienvenue en France » a été publié le dimanche 21 avril, actant la multiplication par 16 des frais d’inscription pour les étudiant·e·s extra-communautaires en Licence (de 170€ à 2770€) et Master (de 243€ à 3770€) arrivant en France pour commencer ou continuer leurs études universitaires.
Un an après la loi ORE, qui a instauré la sélection et l’arrivée de la plate-forme ParcourSup, ce décret enterre purement et simplement les notions d’égalité et de faible coût des études, principes fondamentaux de l’Université publique en France. Nous ne pouvons l’accepter.

Ainsi nous l’affirmons : si l’Université n’est pas ouverte à tou·te·s dans les mêmes conditions, alors elle ne sera ouverte à personne ! Mêmes études, mêmes droits !

La lutte contre ce décret a déjà entraîné plusieurs victoires nationales et locales, mais qui ne changent rien au fond du problème.
A l’échelle nationale, l’augmentation en Doctorat a été annulée par intérêt stratégique : sans doctorant·e·s étranger·e·s, les labos universitaires ne survivraient pas. Il y a également eu un recul sur l’augmentation pour les étudiant·e·s non-européen·ne·s déjà en France : avec la méthode classique en politique de la « porte au nez », le gouvernement a essayé de tuer la mobilisation dans l’œuf, comptant également sur un manque de solidarité entre étranger·e·s étudiant en France et celleux souhaitant le devenir, comme il a essayé de le faire dès novembre en misant sur une absence de solidarité des étudiant·e·s français·es et européen·ne·s envers leurs camarades extra-communautaires. A nous de continuer à leur donner tort !
Ces reculs demeurent des victoires, prouvant l’importance de la mobilisation. Elles ont notamment été possibles grâce aux interventions de nombreux·ses président·e·s d’Universités, elles-mêmes souvent induites par la mobilisation au sein de leurs établissements.
A Nantes, plus précisément, alors que le président Olivier Laboux n’avait initialement écrit qu’une simple prise de position qui ne l’engageait à rien, les différentes actions menées par les personnes mobilisées – dont une grève de la faim d’une semaine ayant entraîné une intervention scandaleuse de policiers armés et cagoulés à l’intérieur d’un bâtiment universitaire sur ses horaires d’ouverture – l’ont obligé à transformer cela en exonération officielle votée au Conseil d’Administration.
On peut également supposer que la crainte que la mobilisation reparte comme l’année dernière, avec blocus illimité et occupation d’un étage entier, l’ont motivé à prendre position rapidement contre les décisions ministérielles, à l’opposé de ce qu’il s’était passé l’an dernier.

Et malheureusement, alors que le gouvernement n’a pas reculé malgré la désapprobation de la Conférence des Présidents d’Universités, la mobilisation n’a effectivement pas été à la hauteur de l’année dernière. Beaucoup d’étudiant·e·s qui se disaient contre la hausse des frais ont fait part de leur réticence envers la méthode du blocus. Ce mode d’action n’a donc été employé que 3 fois, à des moments stratégiques, pour permettre de donner de la visibilité au mouvement et de libérer des journées de cours pour participer aux appels nationaux à la mobilisation. Le dernier blocus date du 13 février dernier. Depuis, aucune action, y compris des manifestations organisées sur la pause déjeuner pour que personne ne rate de cours, n’a permis de mobiliser plus que quelques dizaines d’étudiant·e·s, malgré le caractère massivement impopulaire du décret.
De plus, alors que la mobilisation des enseignant·e·s de primaire et de secondaire contre le plan Blanquer et son « École de la Confiance » bat son plein, une Assemblée Générale censée rassembler « les profs de la maternelle à la fac » s’est tenue dans le plus grand amphithéâtre du campus, en Droit. Sur les plus de 400 personnes présentes, moins d’une dizaines étaient enseignant·e·s de l’Université, où l’AG se tenait pourtant.
Nous refusons donc de recevoir des injonctions sur les modes d’action à mettre en œuvre par des gens, enseignant·e·s ou étudiant·e·s, qui ne mettent pas en pratique leurs désaccords politiques et ne s’engagent dans aucune action concrète pour lutter contre un décret qu’iels disent ne pas vouloir.
Nous soutenons le recours déposé devant le Conseil d’État par plusieurs associations dont l’Unef et le Syndicat des Avocats de France pour excès de pouvoir. Nous pensons qu’il est nécessaire de multiplier les modes d’action et de se soutenir entre personnes et collectifs ayant des intérêts en commun.
Aussi, dans un contexte où tous les secteurs du service public sont massivement attaqués par le gouvernement, à l’exception de la police et l’armée qui sont le dernier rempart de leur politique ultralibérale et néocoloniale, nous appelons également à participer en nombre aux traditionnelles manifestations du 1er mai et à la journée de grève unitaire organisée le 9 mai dans le secteur public. Nous ajoutons à cela un soutien à l’appel national lancé par les Gilets Jaunes à Nantes pour le samedi 11 mai. Nous en serons.

En 1986, la loi Devaquet qui prévoyait l’augmentation des frais d’inscription a entraîné l’un des plus grands mouvements étudiants de ces dernières décennies en France. Celui-ci s’est tragiquement soldé par le meurtre de Malik Oussékine par un voltigeur de la police de Pasqua.
Cette année, alors que l’on sait très bien, grâce notamment aux « Macron Leaks » de septembre, que cette augmentation n’est qu’une étape vers une augmentation générale des frais d’inscription pour tou·te·s les étudiant·e·s, aucun mode d’action n’aura réussi à soulever beaucoup de monde contre ce décret pourtant très largement impopulaire.
Mais malgré l’épuisement moral et physique de l’année dernière ; malgré la répression policière et politique que nous avons subie ; malgré les violences policières contre les mouvements sociaux actuels, dont le retour effrayant de ces voltigeurs ; malgré les tentatives du gouvernement et de la présidence de tuer et invisibiliser la mobilisation… nous devons lutter.

Reprenons donc les bonnes vieilles méthodes, les seules qui ont fait leurs preuves : la fac sera bloquée tant que le décret ne sera pas retiré, et nous invitons tou·te·s les étudiant·e·s de toutes les Universités à faire de même.

Les victoires locales et exonérations temporaires ne peuvent suffire.
Ce décret doit tomber.

Faire un blocus n’est pas un plaisir, c’est aujourd’hui une nécessité.
Nous n’avons plus d’autre choix.

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