Alors les collabos, ça roule ?
Quelques mots à propos d’une dissociation

On se dissocie. Bien sûr. On se dissocie de vos fêtes, vos kermesses ne nous mettent pas en liesse. Elles participent activement au processus de pacification en cours, à la massification du mouvement où l’on consomme au bar «pour la lutte» afin de se donner bonne conscience. Où on use de bâtons qui se plantent volontiers dans les sols mais ne finiront jamais dans les gueules de la flicaille. On nous baratine avec une rhétorique pseudo-offensive mais nous ne sommes pas dupes. La seule offensive que vous menez c’est contre nos manières de lutter. Nous refusons d’être assimilé-e-s.

Nous entendons beaucoup de critiques sur l’ACIPA et autres associations citoyennistes, notamment exploiteuses d’animaux. Mais ces groupes émergent précisément parce que nous taisons nos critiques et émoussons nos actes. Une fois de plus, sauvegarder l’unité. Nous voulons mettre des actes sur les mots. Nous ne voulons pas rester spectatrices ni même acteurs, filmées, montés au nom d’une mise en scène de lutte, stratégique, médiatique.
Nous avons un goût amer dans la bouche, voir tous ces journalistes comme des mouches à merde tournicoter autour de cette mascarade. On se fout de savoir ce qui est dit de nous. Nous voulons la liberté, pas un reportage sur la liberté. Pour nous, les journalistes ne sont que des flics sans uniforme, venant asseoir la démocratie et légitimer le pouvoir.
Docu au 20h si t’es sage et que tu respectes l’ordre d’un côté ; feu et images d’émeutes pour faire flipper le citoyen si tu débordes de l’autre. Nous sommes contre toutes les images. On ne veut pas d’une vie à travers un écran, ou une lentille de caméscope, on veut une vie pleine et intense.

Pour toutes ces raisons, cet aprèm, entre chaleur et appréhension, on a fendu la foule de ce bal pas si masqué, pour attaquer des voitures FR3, bien que gardées et entourées d’un comité de citoyens vigilants. Nous avons fait sauter des pares-brises, tapé et gazé des journaleux et les personnes qui les ont défendu.
On a fait ça pour le plaisir, pour repousser nos limites et affronter nos peurs, pour se dissocier de vous et de votre sale manie de tout pourrir, et pour affirmer des positions claires contre cette indifférence générale.

Une poignée contre tout. Nous sommes irritant-e-s, nous reviendrons.

Ne dites pas que nous sommes peu, dites simplement que nous sommes déterminé-e-s.

Quelques folles/fous à lier, blindé-e-s enfouraillés.

PS : dans l’adrénaline de l’affrontement, des mots comme «fils de pute», «putain» ont pu être entendus. La personne s’excuse auprès des travailleureuses du sexe et leurs alliées. Dans cette situation de stress, du langage appartenant à ce monde de domination a été émis. Encore beaucoup de réflexes à déconstruire…

PPS : quand faut y aller, faut y aller !

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On a lu le Zadnews. Et on a été surpris-es et saoûlé-e-s. Parce qu’on avait écrit un communiqué manuscrit pour expliquer nos motivations et nos sentiments quant à l’attaque des journalistes de FR3 qu’on a réalisé samedi 8 octobre. Ces ordures étaient présentes à l’événement inoffensif organisé par les organisations citoyennes qui s’opposent à la construction d’un aéroport, tout en étant complaisantes à l’égard du monde qui le produit. Nous avons voulu faire savoir qu’il n’y avait pas de consensus ici sur leur présence sur la Zad.

Parce que le communiqué était manuscrit, anonymisé à l’aide d’une écriture «neutralisée», et qu’on aurait bien aimé voir dans le journal une photocopie pure et simple, on n’a pas compris pourquoi il avait été entièrement retranscrit à l’ordinateur, sans même un mot qui puisse en informer la lectrice. Parce que la retranscription a perdu des mots, en a ajouté, en a modifié plusieurs, a été entièrement écrite en lettres capitales (qui signifie, dans l’usage, que l’on crie…), que certaines féminisations ont disparu, la lecture était rendue difficile et l’esprit initial de nos propos entamé. Il sera donc publié sur internet dans sa version initiale.

Il y a aussi dans le Zadnews un mot sur le fait que des «personnes qui montaient le stand de prévention et réduction des risques des potes de Techno+» ont été «attaqués» et «gazés» par nous-même, «avant» que nous ne nous en prenions aux journaleux. Peut-être que ce mot en a trompé certain-e-s, car il est tout simplement et sciemment mensonger. Le fait qu’il ait été placé juste avant notre communiqué mal retranscrit ne peut être vu que comme une volonté de discréditer l’action et ses motivations.
Nous avions prévu de nous en prendre aux journalistes de FR3, et conformément à nos pronostics, une foule de plusieurs dizaines de personnes ont tenté de s’interposer entre nous et eux, et de nous maîtriser. Malheureusement pour eux, nous étions préparé-e-s, équipé-e-s et déterminé-e-s et cela nous a permis de repartir sans encombres. Arrivé-e-s à l’orée de la forêt, il a été crié aux dernières personnes qui tentaient de nous poursuivre avec des bâtons les mots relatés, à savoir que nous n’étions pas dans un espace de fête, mais de lutte. Ils n’ont pas osé nous suivre dans les bois.

Toutes ces personnes, tranquillement assises par terre à proximité des journalistes avant notre irruption, se sont levées d’un bond pour empêcher notre action, au moment précis où le premier pare-brise de France 3 tombait. Les gens qui ont pris des coups et du gaz ont toutes à ce moment pris position pour les journalistes, contre nous. Il nous paraît donc logique qu’il n’ait pas été fait de distinction entre eux et les salopards qu’ils ont sans succès tenté de protéger, voire de «venger». Nous ne savions absolument pas où pouvait bien se trouver le stand de Techno+, et nous nous en foutions, puisque notre objectif était de nous attaquer à des journalistes, à leur matériel et à ceux qui les protègeraient.

On nous reproche ensuite, dans un style laconique et nonchalant, d’être des «flics de la Zad», et de «n’être que le triste reflet de l’autorité que [nous] croy[ons] combattre», et ça, parce que nous nous sommes équipé-e-s de gazeuses et d’armes contondantes. La belle affaire !

Nous savions que les participant-e-s à cette mascarade étaient dans leur grande majorité hostiles à ce genre d’action contre les journalistes, parce que c’est pas le moment, qu’il faut maintenir l’unité, qu’ils disent des trucs sympas sur la lutte, bla bla bla. Nous savions aussi que ces participant-e-s étaient des milliers, voire des dizaines de milliers. Nous étions bien moins nombreuses (entre 3 et 5 si on en croit nos détracteurs littéraires). Mais nous n’avons pas voulu voir cette dissymétrie apparente comme un obstacle infranchissable à la réalisation de nos envies de conflictualité avec ce monde de merde. C’est pourquoi nous nous sommes équipé-e-s d’outils nécessaires à l’affrontement éventuel avec une foule hostile et déterminée à nous empêcher d’agir. En l’occurence des gazeuses manuelles et des barres, ainsi que l’effet de surprise sur lequel nous pouvions compter. C’est cette préparation, associée à une certaine détermination, qui nous a permis d’attaquer là, alors que les conditions contextuelles semblaient délicates.
Nous ne fétichisons pas les armes, mais nous ne les diabolisons pas non plus. Nous les utilisons lorsqu’elle semblent nécessaires à la réalisation de nos actions, et c’est tout ce qui nous importe à leur sujet. Pour finir, nous trouvons cocasse de se faire accuser d’être des flics lorsque nous tentons de propager le désordre à quelques-un-e-s, alors que ceux qui nous accusent ont vainement tenté à des centaines de rétablir l’ordre.

Bref, tout cela pour dire que vos critiques si prévisibles nous font plutôt sourire. Ça nous plaît surtout que les journalistes se sentent en danger, même lorsqu’ils pensent être protégés par une foule de citoyen-ne-s inoffensifs et de pacifistes violents. Si la majeure partie des journalistes présents étaient bien souvent arrivés en voiture banalisée, ceux de France 3 se sont sentis protégés, et ont posé leur camion de retransmission sérigraphié en plein milieu de la foule de Woodstock-en-Zad, rassurés, du haut de leur arrogance. Gageons qu’ils s’en sont retournés aigris et rageurs de se rendre compte que, malgré tous leurs efforts, la Zad n’est pas encore l’espace totalement pacifié qu’ils croyaient trouver.