Ce monde qui doucereusement par-ci, ou violemment par-là s’écroule sous nos yeux humides ou secs aurait pu être magnifique et exister dans une paix relative et pérenne (à l’échelles de nos vie humaines) si nous n’étions sans cesse dans le reniement de notre individualité originelle – autant qu’originale…! Hélas, cette peur du « moi profond » généralisée (et acquise car inculquée dans notre enfance par nos éducateurisses – le plus souvent les responsables directes de notre venue au monde) nous comprime dans une norme de soumission à une société figée, cruelle, réactionnaire et suicidaire.

Ici, dans notre monde qui très bientôt sera devenu invivable, l’amour est conditionné à la norme de la compétition. Le droit à la reconnaissance, à la dignité la plus élémentaire est remplacé par un droit au mérite, au devoir de « réussite » et de paraître…!

Combien sommes nous à rester terré.es derrière nos angoisses sans même les reconnaître? Combien sommes nous à vivre dans la peur de l’autre plutôt que dans la tentative de sa compréhension? Combien sommes nous à oublier nos rêves et nos besoins d’amour dans l’espoir de survivre en adultes faussement dignes, mais fières? Combien sommes nous à nous effacer face à nous même parce que le conformisme est si fort et implaquable? Et comment, ainsi mutilé.es, pouvons nous avoir la capacité de changer les choses sans en arriver à reproduire un nouvel enfer?

Nos violences révolutionnaires doivent elles se nourrir de la douleur sous-jassante, aveuglante et omniprésente de notre identité perdue sous le poids de la norme et sous l’autoritarisme de la binarité et de la verticalité? Si oui, notre colère, aussi légitime soit-elle, peut alors si vite se voir remplacer par la facilité aveuglante de la haine et devenir incontrôlable, corruptrice et autoritariste, paranoïaque aux cibles floues à jamais menaçantes, car internes…!

La reproduction dans nos luttes des schémas autoritaires est très difficilement contournable. Nos jugements, qu’ils soient à l’emporte pièce ou plus « subtils », où (par exemple) tout ce qui nous dérange devient « ennemi », sont des plus révélateurs. Notre besoin au sein même des groupes – militants ou autres – d’être « écouté » même si on afirme des approximations, voire des absurdités, l’est tout aussi. Il me semble donc très important (primordial) de faire un travail d’introspection permanent (une vie!) et non jugeant afin d’apprendre à mieux se connaître et que chacun.e puisse prendre soin de son propre psychisme. Pour pouvoir avancer dans la création d’un monde meilleurs, il nous faut avancer dans la recherche de soi-même (je ne parle pas là de nombrilisme ésotérique, mais de la recherche rationnelle et de l’acceptation reconnue de nos identités profondes). Si nous voulons un jour être assez fortes pour construire et non-pas être des nihilistes juste bonnes à détruire, il nous faut (quoiqu’il en coûte) apprendre à être aussi honnêtes avec nous même que nous voudrions que l’autre le soit… Et nous devons pour celà ne pas cesser d’apprendre pour ne pas nous assoir sur nos acquis et nos certitudes si pratiques, mais en réalité si trompeuses.

Si tout est à réinventer pour un monde un tant soit peu vivable, commençons donc par nous réinventer nous-même et allons chercher qui nous sommes: l’idividue qu’iels ont assassiné et soumis à la norme lors de nos premières années… Peut-être qu’alors nous apprendrons à reconnaître l’autre, notre jumelle intime, celle pour qui on se bat…