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Décidément, l?esprit du mois de mai est rebelle. Il ne célèbre pas le menteur réactionnaire : Il rejette le borgne fasciste. Il ne marque pas la soumission du peuple : Il manifeste sa liberté, ses opinions et ses luttes. Il ne divise pas les citoyens, les salariés, les travailleurs : Il les réunit contre la politique injuste d?un gouvernement légal mais illégitime.
Ce gouvernement a trois visages : l?Ordre répressif, l?Économie capitaliste et la « Justice » inique des Sarkozy, Mer et Perben. Ces visages sont tournés vers une même idole, qui n?est pas seulement celle du pitoyable « gringo » Raffarin. Cette idole, c?est le capitalisme libéral. Autrement dit, l?horizon prétendument indépassable de la pensée politique et de l?Histoire. Ou encore, la colonne vertébrale des inégalités sociales. Tout simplement : le rempart de la minorité qui possède contre la majorité qui n?a rien.
Pour se soutenir dans les consciences, pour accroître sa propagande et se diffuser dans la société, le capitalisme s?est donné un pseudo-fondement, une doctrine économique et politique censée justifier son existence et sa nécessité : c?est le libéralisme. Critiquer le système capitaliste, c?est critiquer ce qui le fonde. Critiquer ce qui le fonde, c?est saper ses bases. Saper ses bases, c’est mettre à nu sa logique, exposer ses contradictions, désigner ses failles, afin que plus personne ne puisse, en toute conscience, ignorer que la société capitaliste ne repose que sur du vent.
Il faudra choisir, alors, d?entrer en résistance ou de collaborer.
{{1. Critique définitive du libéralisme
}}
Le libéralisme est, de toutes les doctrines auxquelles il s?oppose, celle qui est historiquement la plus vieille, théoriquement la plus indigente, politiquement la plus incohérente, pratiquement la plus inefficace et globalement la plus dangereuse. Ces cinq points démontrés, vouloir soutenir encore le capitalisme, rêver de l?humaniser, espérer le réformer, se résigner à l?aménager ou s?y croire indifférent ne seront plus des options possibles, mais des désirs insensés.
« Le libéralisme est l?avenir » chantent les sirènes de l?idéologie régnante. Pourtant Adam Smith, père fondateur du libéralisme, s?est éteint il y plus de deux siècles. Certes, on ne mesure pas la valeur d?une théorie à son âge. Mais on a le droit de remarquer que son cadavre est en état de décomposition avancée, si on le compare aux autres doctrines politiques possibles, toutes apparues après lui et contre lui : Anarchisme, Communisme, Autogestion, Socialisme, pour ne citer que les cibles les plus évidentes. On peut en déduire qu?il est loin d?incarner une quelconque avant-garde intellectuelle. Estimer qu?il ne possède pas l?évidence de la modernité. Comprendre qu?il n?a rien d?aussi novateur qu?il voudrait le faire croire. Sauf, bien sûr, pour des primates égarés dans le présent ?
Mais passons. Le libéralisme est une doctrine théoriquement indigente. Nulle théorie n?est plus facile à résumer qu?elle. Nulle recette de basse cuisine intellectuelle n?est plus facile à concocter. Une cuillérée d?anthropologie réductrice (l?homme est un animal naturellement égoïste), une louche d?économie sauvage (la richesse d?une nation augmente quand les activités économiques sont régies uniquement par la loi de l?offre et de la demande), une pincée de politique aveugle (le moins d’État possible, sauf pour assurer l?ordre et la sécurité), un soupçon de magie (livrées à elles-mêmes, les activités économiques égoïstes et particulières se régulent toutes seules grâce à la main invisible du marché, qui les rend par miracle profitables à l?ensemble de la société). Mélangez le tout, et vous obtenez les trois axiomes fondamentaux du libéralisme, tel qu?en lui-même l?éternité de la bêtise le conserve:
: chaque individu, en recherchant uniquement son propre intérêt égoïste dans l?activité économique, contribue malgré lui à la richesse collective et donc au bien-être de tous.
: le rôle de l’État doit être minimal et se borner à assurer la vitalité du système économique, notamment en assurant la protection des personnes, de la propriété privée et le respect des contrats (police et justice) ainsi que de la richesse nationale (armée). Pour le reste, l’État doit se désengager de la société et abandonner aux intérêts privés toute activité susceptible de générer un profit économique.
: la société économique possède la faculté de s?autoréguler par elle-même, indépendamment de toute intervention extérieure et justement parce qu?elle n?est soumise à aucune activité extérieure. La main invisible du marché, tenant compte de la loi de l?offre et de la demande, accorde la production à la consommation, stimulant la création et la répartition des richesses bénéfique à la Nation tout entière.
Cette théorie n?est pas simple, elle est simpliste. Elle n?est pas élémentaire, elle est rudimentaire. Elle n?est pas fondée sur des bases solides, mais sur des principes arbitraires. Elle est donc théoriquement indigente. Ce qui serait sans importance s?il ne s?agissait que de brasser des mots. Ce qui devient inacceptable quand il s?agit d?organiser une société. Ce qui est catastrophique quand on comprend que cette théorie est la source polluée dont se déduisent toutes les politiques des gouvernements libéraux.
Pour se limiter à la politique actuelle du gouvernement, on en déduira avec une facilité déconcertante, sur le plan de l?Ordre, la politique ultra-sécuritaire du gouvernement, l?augmentation du nombre des policiers, des prisons, la répression du syndicalisme et l?augmentation faramineuse du budget de l?armée.
Sur le plan de l’Économie, la destruction du droit du travail, l?assouplissement des règles du licenciement, la diminution des impôts profitant stratégiquement aux seules classes aisées, la casse des retraites, la privatisation des services publics, la soumission docile aux admonestations du patronat, et d?une manière générale l?abolition de tout camp retranché au rendement, au profit et aux intérêts égoïstes.
Sur le plan de la « Justice », la protection absolue de la propriété privée et par voie de conséquence des richesses et des profits de la classe dominante, l?affaiblissement de l?indépendance des juges, et d?une manière générale la coquille vide des droits formels (droits d?expression, de circulation, d?opinion, d?association, etc.), dont nul ne conteste la valeur, mais qui ne coûtent rien à l’État et préservent intacte la domination des puissants sur les faibles, contre la substance concrète des droits réels (droit à l?existence, à l?éducation, au logement, au chômage, à la retraite, etc.), qui supposent l?engagement de l’État et une redistribution des richesses protégeant les faibles et nuisant aux puissants.
Ordre, Économie, « Justice » : voilà ce que brandit la main droite de l’État, pendant qu?elle jette de la main gauche l’Égalité réelle des conditions socio-économiques, la Fraternité solidaire du partage redistributif des richesses et la Liberté politique des citoyens, capables de décider par eux-mêmes de leur avenir et de la véritable nature du Bien commun.
En résumé : une théorie indigente pour une politique aveugle. Des principes arbitraires pour des décisions partiales. Des recettes dépassées pour une société moderne. Des réflexes idéologiques pour toute logique. Le libéralisme ne pense pas, il bégaye ?
Passons encore. Le libéralisme est une doctrine politiquement incohérente. Par essence, le libéralisme tend à démolir tout gouvernement des affaires publiques, c’est-à-dire tout pouvoir de l’État, c’est-à-dire toute maîtrise de l’activité économique par le pouvoir politique en vue du bien commun, c’est-à-dire la politique elle-même. La « gouvernance » prônée par le discours dominant exprime exactement l’inverse d’un quelconque gouvernement, d’un quelconque contrôle de l’activité économique par le pouvoir politique : elle signifie la démission du politique face à l’organisation capitaliste de l’économie, la réduction du politique au simple accompagnement de l’activité économique. La « gouvernance », qui est toujours « bonne », tend à substituer partout le contrat particulier à la loi commune, la dérégulation des marchés à leur planification, l?économie politique à la politique économique, l’intérêt privé au bien public, la recherche du rendement à celle du meilleur, la soumission à la décision. La « gouvernance » est l’autre nom d’une politique exclusivement libérale, c’est-à-dire d’un libéralisme libéré de la politique, c’est-à-dire de la mort du politique. Donc, il n’y a pas de politique libérale, pas plus qu’il n’y a de cercle carré. Ce Qu?il Fallait Démontrer.
Continuons. Le libéralisme croit faire partout la preuve de son efficacité et de sa supériorité sur toute autre forme d’organisation de la société, alors qu’il est, dans la pratique, et selon ses propres valeurs, inefficace : c?est-à-dire qu?il ne fait pas ce qu?il promet. L’expérience et l’histoire elles-mêmes regorgent de pays ayant appliqué strictement les principes du libéralisme : Argentine, Brésil, Hongkong, Corée du Sud, Taiwan, Indonésie, Philippines, Thaïlande… Ces nations se sont effondrées économiquement. Aucune main invisible n’est venue autoréguler l’activité économique. Les richesses nationales n?ont pas augmenté, elles ont été pillées. Et les intérêts égoïstes, loin de profiter à l’ensemble de la société, n?ont servi qu?une minorité.
Même la Nation supposée incarner le triomphe du libéralisme, les États-Unis, fait quotidiennement la preuve de l’inconsistance pratique du système capitaliste. Les grandes entreprises font faillite, malgré des licenciements aussi massifs qu?arbitraires, dictés par la seule maximisation des profits. Les marchés s?effondrent régulièrement. Les petits et moyens actionnaires sont périodiquement ruinés. Les ménages sont endettés à hauteur de 40 % de leurs revenus annuels. Presque la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. La dépréciation des salaires conduit une fraction croissante de la population à assumer deux voire trois « jobs » différents simplement pour survivre. Les vieillards doivent travailler pour subsister, faute d?une retraite suffisante, voire de retraite tout court. Presque trois millions d?américains, en majorité immigrés, sont enfermés dans des prisons, où ils servent de main-d??uvre bon-marché, flexible et soumise aux seuls intérêts du patronat. La violence urbaine atteint des sommets inimaginables. Le déficit extérieur de la nation tout entière s?élève au chiffre inimaginable de 400 milliards de dollars, que les guerres à répétition et les baisses tactiques du dollar suffisent à peine à masquer . L’électricité tombe en panne. Les trains déraillent. Les compagnies aériennes s?effondrent. Le taux de mortalité infantile augmente. La santé se dégrade. L’éducation s’affaiblit. Indéniablement, c?est un triomphe ?
Les conditions supposées être consubstantielles à une économie capitaliste n’ont jamais vu le jour : au lieu de la transparence de l’information et des règles du marché pour tous les acteurs économiques, l’opacité concertée profitant aux minorités possédantes. Au lieu d’une vitalité économique censée être favorisée par la baisse des impôts, le développement paralysant du chômage ou du travail précaire, et la confiscation improductive des richesses par une poignée de rentiers. Au lieu d’une amélioration globale du niveau et de la qualité de vie, une précarisation croissante de la majorité de la population. Au lieu de la sécurité, le développement de la criminalité, du terrorisme et de la peur.
Sur le plan international, au lieu d’une « mondialisation heureuse » maîtrisée par des institutions censées être internationales (Banque Mondiale, Fonds Monétaire International, etc.), des pays du Sud oubliés de la croissance et du progrès, touchés par la famine et la misère, tenus en esclavage par un surendettement programmé. Au lieu d’une pacification de la planète, les ravages et les destructions des guerres les plus meurtrières pour les civils jamais connues. Au lieu d’une préservation écologique de la planète, le développement durable de la pollution et de la gestion à l’aveugle des ressources énergétiques. Au lieu d’une liberté de circulation, la contrôle xénophobe de l’immigration, et la fermeture de frontières où ne circulent librement que les capitaux financiers.
Sur tous les plans, au lieu du progrès de la démocratie, l’avènement d’oligarchies qui ne disent pas leur nom. Au lieu d’un rempart contre le fascisme, un boulevard pour sa propagation. Au lieu d’une liberté de la presse, le monopole de quelques groupes privés sur l’information de masse, et la propagande inouïe du système régnant par lui-même. Au lieu du progrès, la barbarie. Au lieu de la liberté, l’esclavage. Au lieu de la réussite du capitalisme dans l’expérience, la plus parfaite démonstration par les faits eux-mêmes de son incapacité à réaliser ses objectifs.
A la différence d’autres systèmes possibles, qui n’ont jamais pu réunir les conditions objectives de leur application concrète dans l’expérience (ainsi le communisme suppose selon Marx une société industriellement développée pour être mis en ?uvre, ce qu’il n’a encore jamais rencontré, ni en U.R.S.S ni dans aucun des autres pays censés l’avoir mis en pratique ; l?anarcho-syndicalisme libertaire, qui avait réussi à établir une autogestion réelle de villes et de villages espagnols fut brisé par la dictature franquiste avant de porter tous ses fruits), le capitalisme a pu se développer dans des conditions économiques et politiques théoriquement idéales, de son point de vue, pour mettre en pratique ses propres principes. Il se réfute donc lui-même puisqu’il ne réussit pas, malgré l’application de ses principes, à produire les effets qu’il prédisait.
En effet, d’un point de vue scientifique, la valeur d’une théorie s’éprouve par un protocole d’expérimentation, en faisant varier les conditions initiales, et en mesurant la différence entre les résultats réellement obtenus et les résultats idéalement escomptés. Or, la théorie libérale est parfaitement connue. Le protocole d’expérimentation (désengagement de l’État, dérégulation des marchés, privatisation des services publics, etc.) a été parfaitement suivi. Les pays dans lesquels ce protocole a été expérimenté sont suffisamment nombreux pour avoir permis sur une période de temps significative la variation des conditions (historiques, géographiques, politiques, économiques) initiales. Les résultats réellement obtenus sont systématiquement les mêmes ( dégradation de l’intérêt général, inefficacité économique, affaiblissement de la décision démocratique, etc.). Or, ces résultats sont en contradiction totale avec les principes mêmes de la théorie libérale. Or, les valeurs suprêmes du libéralisme sont l’efficacité et la scientificité. Donc cette théorie est, selon ses propres principes, inefficace dans la pratique. Donc elle n’est pas scientifique. Donc elle n’a aucune valeur. Donc elle est autocontradictoire et se détruit d’elle-même sitôt qu’on la suppose et qu’on tente de la réaliser. Donc elle n’est que du vent. C.Q.F.D.
Résumons. Le libéralisme n’est qu’un épouvantail théorique servant à justifier une réalité sociale, économique et politique insupportable pour la grande majorité des citoyens du monde entier. Historiquement, c’est la plus vieille des théories. Mais concédons que la valeur de cette théorie n’a rien à voir avec son âge. Il n’en reste pas moins que, du point de vue politique, elle est incohérente, puisqu’elle tend à éliminer toute activité politique réelle. Et supposons même qu’elle est politiquement viable, elle n’en cessera pas moins d’être théoriquement indigente car elle est fondée sur des principes grossiers, arbitraires et aisément contestables. Admettons enfin qu’elle est théoriquement valable, il n’en reste pas moins que, du point de vue pratique, elle ne réussit même pas, selon ses propres principes, à atteindre les résultats qu’elle s’est fixés. Or, c’est précisément ce dernier critère qui est censé justifier, selon elle, la valeur des précédents : la clé de voûte n’étant pas solide, le reste s’effondre donc de lui-même.
Le libéralisme est donc historiquement dépassé, politiquement incohérent, théoriquement inconsistant, pratiquement inefficace. Or, il est censé s’imposer à chaque pays, à chaque activité, à chaque personne. Il est censé dicter les conditions de notre vie, de notre éducation, de notre pensée, de notre santé, de notre travail, de notre retraite, de notre mort. Donc, il est globalement dangereux pour chacun d’entre nous. C.Q.F.D.
Le capitalisme règne pourtant, en dépit de ses contradictions. Ce que la Raison ne peut justifier, c’est la Force qui l’impose : le capitalisme nous soumet ainsi à la plus terrible des Occupations. Discerner par quels moyens il réalise cette Occupation, c’est identifier les fondements réels de son pouvoir, c’est savoir à quoi s’attaquer. C’est préparer son renversement.
{{ Nous sommes sous Occupation
}}On peut définir une situation d?Occupation, en référence à l’Histoire récente, par la conjonction de quatre principaux critères : la confiscation du pouvoir politique aux mains d’une puissance étrangère, le caractère illégitime de la puissance en place, la propagande de masse de cette puissance, son caractère totalitaire.
Le capitalisme libéral est la nouvelle force d’Occupation qui a déjà envahi, qui envahit ou menace d’envahir toutes les nations du monde.
Le capitalisme libéral est une puissance étrangère qui confisque le pouvoir politique des citoyens. Les soi-disant démocraties libérales, en protégeant constitutionnellement la propriété privée, excluent des centres de décision réels ceux qui n’ont rien ou presque, et privilégient ceux qui possèdent les capitaux financiers et les moyens de production. En d’autres termes : tout est à eux, rien n’est à nous. Le c?ur de toute véritable politique (en dehors du respect des libertés démocratiques fondamentales), c’est-à-dire l’établissement de droits socio-économiques réels, c’est-à-dire le contrôle et la distribution des richesses par ceux qui les produisent, donc par la grande majorité des citoyens, est précisément ce qui est exclu par principe du système politique. Donc toute politique impliquant une socialisation des richesses ou même seulement une redistribution durable et équitable de celles-ci, est impossible et anticonstitutionnelle. Donc la seule politique possible est le libéralisme (à visage découvert sous la droite, avec un peu de maquillage sous ce qui reste de la gauche), c’est-à-dire la mort de toute politique. Donc la seule politique possible est étrangère au bien commun des citoyens, qui exige une répartition équitable des richesses qu’ils sont les seuls à créer. Sous les dehors de la démocratie, règne le pouvoir sans partage d’une minorité oligarchique, qui est seule à posséder les grands moyens de production et les richesses : la classe capitaliste. La démocratie libérale ne démocratise que l?inégalité, et ne libère qu?une poignée de privilégiés.
Au niveau international, une poignée de pays riches dicte sa loi au reste de la planète. Les simulacres d’institutions cyniquement qualifiées de supranationales (
signifiant à juste titre au-dessus des nations, c’est-à-dire en dehors de leur sphère de décision) censées assurer le contrôle démocratique de la mondialisation par l’ensemble des pays du globe ne sont que les bases-arrières du capitalisme, où les règles se décident confidentiellement, et toujours dans le respect absolu de la sacro-sainte propriété privée des richesses. Endettés jusqu’au cou par le jeu cynique des règles financières, les pays du Sud s’appauvrissent et se meurent d’une Occupation plus sournoise encore que celle du colonialisme, puisqu’elle leur laisse croire qu?ils sont libres.
Partout, la marge de man?uvre politique laissée aux soi-disant représentations nationales frise le ridicule. La majorité des décisions votées par les assemblées et les parlements doivent s’insérer dans le cadre étroit du libre-échange sous peine d’être ramenées à l’ordre par les instances dirigeantes du capitalisme. Pour confisquer le droit des peuples à décider d?eux-mêmes, le libéralisme déporte, dès que cela devient nécessaire, les centres de décision de la commune à la région, de la région à l’État, de l’État aux groupements économiques d’États (Union Européenne, Zone Américaine de Libre-Échange, etc.), des groupements économiques d’États aux institutions supranationales (Banque Mondiale, Fonds Monétaire International, etc.). La plupart des décisions politiques, à quelque échelon que ce soit, ne sont que la traduction à peine voilée de règles énoncées aux échelons supérieurs (privatisation des services publics, capitalisation des retraites, dérégulation des secteurs économiques, etc.) au mépris de toute consultation démocratique réelle, en tenant compte seulement des intérêts financiers et égoïstes de la classe minoritaire dominante. Tout ce que le libéralisme peut faire passer directement du sommet supranational vers les bases nationales est considéré comme un acquis définitif. Tout ce qui ne peut emprunter directement cette voie descendante, emprunte la voie ascendante de la décision locale (d’où l’importance aujourd?hui contre-réformatrice de la décentralisation…), en attendant d’être étendu aux dernières poches de résistance. C’était le sens de l’Accord Multilatéral sur les Investissements, aujourd’hui ressuscité sous le nom d’Accord Général sur le Commerce et les Services : convertir de manière irréversible tout ce qui peut l’être en source de profit, jusqu’à l’épuisement complet des ressources nationales, au mépris de l’intérêt général des citoyens. Pour résumer : Tout ce qui pourrait être contesté localement est imposé globalement, tout ce qui ne peut pas encore être imposé globalement est étendu localement, tout retour en arrière est impossible. Une puissance étrangère confisque donc le pouvoir de décision démocratique dans toutes les nations du monde : c’est la logique capitaliste. C.Q.F.D.
Cette puissance est d’ailleurs totalement illégitime. De quel droit les citoyens du monde se laisseraient-ils ôter le pouvoir de décider librement et démocratiquement de leur sort ? Bush, Berlusconi, Haïder, Chirac et Raffarin, pour ne citer que ceux-là, incarnent-ils le moins du monde les aspirations de la majorité de leurs concitoyens ? Des élections gagnées à coups de perforeuses électorales truquées, de médias nationaux monopolisés, d’idées fascistes et de pitoyables discours ultrasécuritaires sont-elles légitimes ?
Chirac, le délinquant de la République, l’homme du « bruit et de l’odeur » qui empestent son personnage comme son discours, l?incarnation de la bassesse politicienne par excellence, le défenseur opportuniste de la paix pour les groupes capitalistes français implantés en Irak représente-t-il légitimement le peuple français ? Et son Union pour la Minorité des Possédants traduit-elle vraiment l?intérêt général ?
Chirac et ses sbires ne représentent en réalité que les intérêts des possédants, d?une poignée de privilégiés économiques qui sont les seuls à tirer profit du capitalisme libéral sur le dos des citoyens, des travailleurs, des chômeurs, des précaires et des exclus de toute sorte que ce système crée en permanence. La destruction programmée du système des retraites est-elle légitime ? La répression du syndicalisme est-elle légitime ? La précarisation des travailleurs, par la diminution accélérée de leur niveau de vie, par la flexibilisation de leur emploi, par la réduction drastique de leurs allocations chômage est-elle légitime ? Le démantèlement de la sécurité sociale est-il légitime ? La privatisation rampante des hôpitaux est-elle légitime ? La décentralisation régressive de l?éducation nationale est-elle légitime ? L?autonomie forcée des facultés universitaires est-elle légitime ? L?anéantissement de la culture par la précarisation accrue des intermittents du spectacle est-elle légitime ? L?expulsion des sans-papiers est-elle légitime ? La privatisation des services publics est-elle légitime ? Le choix d?une société répressive est-il légitime ? La régression sociale généralisée est-elle légitime ?
Un gouvernement est légal s?il recueille la majorité relative des voix exprimées au suffrage universel. Il n?en devient pas légitime pour autant, pas plus que n?étaient légitimes Hitler ou Pétain. Dans un système capitaliste, tout gouvernement collabore nécessairement avec la classe minoritaire des possédants. Or un gouvernement qui n??uvre pas pour l?intérêt commun n?a rien de légitime. Chirac et ses sbires oeuvrent pour l?intérêt particulier de quelques-uns uns : leur gouvernement est donc illégitime. C.Q.F.D.
Illégitimes, les puissances capitalistes ont cependant besoin d?un vernis de légitimité. Ce vernis de légitimité, c?est leur propagande. Cette propagande s?étale partout où il est possible de toucher la conscience des citoyens. Elle vise principalement à graver dans nos esprits les équivalences suivantes : la démocratie est la société de consommation, la société de consommation est l’État de bien-être, l’État de bien-être est le capitalisme.
Cette propagande s’étale sur les affichages publicitaires. Elle est ainsi omniprésente, dans nos rues, sur les façades de nos maisons, sur nos transports en commun, dans nos journaux, sur les vêtements que nous portons, à la télévision, au cinéma, sur internet, comme autant d?hymnes assourdissants au consumérisme, à la concurrence du marché et à l?asservissement des femmes.
Elle est dans les logos des objets les plus familiers qui composent notre univers quotidien, du soda aux paires de baskets, de la voiture à l?ordinateur, du pot de yoghourt jusqu’à l’eau que nous buvons, comme autant de rappels insidieux et insistants des entreprises capitalistes nationales ou multinationales auxquels ils doivent leur naissance, et du système qui les rend possibles.
Elle est dans les émissions télévisées à grand spectacle qui propagent sans relâche les thèmes capitalistes de la richesse, de la gloire, de la concurrence et de la sélection, de l?individualisme, de l?élimination des faibles et des improductifs, de la flexibilité et de la soumission aux règles les plus arbitraires, de l?égoïsme, de la compétitivité et de la rentabilité, de l?effort au travail, de la soumission des femmes aux désirs les plus machistes et les plus rétrogrades.
Elle dans les superproductions cinématographiques, qui chantent immanquablement la gloire de l?individualisme, de la compétition, du militarisme, de l?usage de la force, de la « démocratie » et du « monde libre », de la « guerre juste » et perpétuelle contre une violence dont le capitalisme est pourtant la cause.
Elle est dans les journaux de masse, aujourd?hui quasiment tous passés sous la coupe des grands groupes capitalistes, sinon quasiment tous dépendants de leurs financements publicitaires, et qui, pour ces deux raisons, étouffent toute contestation frontale du système capitaliste propageant au contraire son idéologie à tous vents et sous toutes les formes possibles. Editoriaux conservateurs, articles socialicides, manchettes sécuritaires, propagandes gouvernementales, éloges à la gloire des marchés, désinformations, contrevérités : les armes du libéralisme n?ont rien à envier à celle d?une dictature. Il est vrai que la société capitaliste semble parfois verser dans l?autocritique. Mais ce qu?elle critique alors, c?est toujours tel ou tel « dysfonctionnement » du système (la mauvaise gestion d?une entreprise, la crise du dollar, la mauvaise santé des marchés) jamais le système lui-même, ce qui n?est qu?une autre façon remarquable de confirmer la valeur et l?effiacacité du système en son entier. Il est même vrai que la société capitaliste se paye parfois le luxe de distiller la parole de ceux qui la critiquent. Mais elle n?en livre alors qu?une image toujours minoritaire, toujours excentrique, toujours irréaliste.
Le système capitaliste s?autocélèbre chaque jour, chaque seconde, comme un système démocratique et libre dont il n?est que la parodie grotesque, la négation pure et simple. Son venin estsi puissant qu?il transforme jusqu?au langage lui-même, pour mieux empoisonner notre pensée.
On ne gouverne plus, on essaie d?adapter « la gouvernance » au comportement des marchés, qui sont les seuls à gouverner. On ne demande plus l?avis du peuple, mais celui de la « société civile » et des « partenaires sociaux », dont font bien sûr partie les syndicats de patrons et d?entreprises. On ne négocie plus, ce qui suppose rapport de forces et lutte d?une classe contre une autre, mais on « dialogue », c?est-à-dire que l?on se soumet sans contrepartie aux exigences de la classe capitaliste, qui peut écouter mais n?entend jamais. On ne cultive plus les valeurs de la «citoyenneté », qui suppose culture, critique et action politiques, mais celles du « civisme », qui signifie simplement soumission aux lois et prise en charge bénévole des missions sociales de l?État, évidemment nécessaires au bon fonctionnement de la société. On ne parle plus de confiscation du pouvoir aux citoyens, mais de « démocratie ». On ne distingue plus les types de violence, la différence entre l?autodéfense légitime, et les agressions individuelles ou groupusculaires gratuitement sanguinaires, mais on confond désormais toutes ces nuances dans un seul concept, celui « Du Terrorisme », qui signifie désormais toute attaque envers le système, le plus atroce des terrorismes, celui des États capitalistes eux-mêmes, étant rayé du vocabulaire. On ne parle plus de guerre, mais « d?opérations de sécurité ». On ne parle plus de victimes civiles innocentes, mais de « dommages collatéraux ». On ne dit pas union mondiale des pays capitalistes, mais, plus sobrement : « Le monde libre », tout ce qui n?y participe pas relevant désormais des « États- voyous », de « l?axe du mal » et autres expressions chères au benêt texan. On ne fait pas de la « répression » envers les oubliés du « progrès » capitaliste, on assure la « sécurité » des petites gens. On ne licencie plus sauvagement et arbitrairement pour augmenter les profits, on procède à un « plan social », qui, puisqu?il est social, est, bien sûr, « inévitable ». On n?établit pas l?égalité sociale et économique entre les citoyens, mais on impose une « équité » par le bas qui renforce les inégalités entre classes sociales antagonistes. Les réformes sociales ont laissé la place à « La Réforme », c?est-à-dire aux contre-réformes libérales. On ne privatise pas, on « ouvre le capital ». On ne parle pas, pour les entreprises, de contributions sociales, mais de « charges sociales », qu?il faudra par conséquent toujours « alléger », etc.
Dès lors, une fois le vocabulaire capitaliste constitué, sa grammaire et sa logique s?imposent d?elles-mêmes à la pensée, comme la plus terrifiante des propagandes imaginables. On ne peut plus critiquer les phrases (et les pensées) suivantes : « Un plan social inévitable a été décidé suite à un dialogue avec les partenaires sociaux. », « La bonne gouvernance suppose la poursuite de la réforme, en accord avec la société civile. », « Les opérations de sécurité contre les États-voyous sont nécessaires pour protéger la démocratie et le monde libre », « L?incivisme doit être combattu en renforçant les mesures de sécurité », etc. Comprendre simplement le sens de ces mots continuellement bombardés dans nos esprits par les médias, c?est déjà accepter la grammaire des phrases qu?ils composent, donc la logique qui commande leur formulation, donc leur contenu, aussi sûrement qu?il ne viendrait à l?idée de personne de contester que « l?eau mouille » ou qu?il « il faut mettre de l?eau à chauffer pour préparer un café ». Critiquer ces affirmations suppose d?abord la mise au jour du vocabulaire, de la grammaire et de la logique capitaliste (qui restent à inventorier), puis une double traduction, de la phraséologie capitaliste (« La Réforme ») au vocabulaire politique (« les contre-réformes »), du vocabulaire politique au langage courant (« la destruction des acquis sociaux »), que le flux ininterrompu des pseudo-informations qui nous abreuvent rendent très largement impossibles. Et même lorsque ces traductions sont effectuées, il devient impossible de les diffuser à grande échelle, puisque le système dominant ne les diffuse que dans son propre langage, qui les rend parfaitement incompréhensibles et absurdes : En ce sens, il rend les libertés d’expression, de pensée et d’opinion parfaitement illusoires.
Ainsi le capitalisme répète chaque seconde, à chacun, son sinistre « Je suis partout », « Je Suis Celui qui Est », « Je suis la seule chose qui peut exister » ? Il envahit notre vie quotidienne. Il monopolise l?information. Il recrée le langage. Il pervertit notre pensée. Il verrouille à l?intérieur même de nos consciences toute critique et toute contestation. Il déforme notre perception même de la société. Il crée par cet endoctrinement le type d’homme passif et apolitique dont il a besoin pour exister, le plus parfait des esclaves : celui qui se croit libre. Il est donc La Propagande la plus massive, la plus dictatoriale, la plus efficace qui existe : celle dont on ne se rend même pas compte. C.Q.F.D.
Résumons. Le capitalisme confisque le pouvoir démocratique réel des citoyens, il les gouverne illégitimement selon des valeurs opposées à l?intérêt général, il envahit et détruit la moindre parcelle d?espace public par une expansion continue de son espace vital, il nie la Politique elle-même comme recherche concertée et décision collective du bien commun. Il verrouille l?information et assaille les consciences d?une Propagande massive, ininterrompue et dictatoriale. Ce qu?il ne peut faire accepter par sa Propagande, il l?impose par le déploiement de la Force, policière ou militaire, la plus développée et la plus violente ayant jamais existé. Il enferme dans certains pays des millions de personnes dans d?insalubres camps de travaux forcés dénommés « prisons » ou ailleurs «usines». Il extermine par la violence, d?une manière industrielle, systématique, massive et inhumaine, des civils innocents, brûlant hier au napalm trois millions de vietnamiens, laissant mourir jusqu?à aujourd?hui de faim des centaines de milliers d?irakiens ? Il réprime les pays opposés à sa logique et à son ordre. Il soutient les coups d?État et les dictatures réprimant dans le sang la Liberté, la Démocratie, le Progrès Social et l?Émancipation des Peuples. Il cherche à imposer le contrôle total des consciences et des nations. Il est donc Le nouveau visage du Totalitarisme. C.Q.F.D.
Reprenons. Le Capitalisme est une puissance étrangère aux citoyens, qui confisque leur liberté de décision démocratique. C?est une puissance illégitime qui règne par la Propagande et par la Force. C?est un pouvoir Totalitaire. Donc, nous sommes tous sous Occupation. C.Q.F.D.
3. Résister ou Collaborer
Choisir de ne pas choisir, c?est déjà choisir : c?est choisir le Capitalisme. Car ce Totalitarisme n?a besoin que de la passivité des masses, qu?il entretient par sa Propagande, pour se soutenir dans la société. La Force fait le reste.
Le Capitalisme n’a pas besoin qu’on le soutienne pour se perpétuer. Il a simplement besoin qu’on ne fasse rien contre lui pour exister malgré nous. Car il n?existe que par nous. Il ne produit de la Richesse que par notre travail. Il n?a de Force que celle que nous ne lui ôtons pas. Il n?impose le respect que parce que nous refusons de le mépriser. Il n?a de Propagande que celle que nous refusons de critiquer. Il n?a de Pouvoir Politique que celui que nous n?exerçons pas. Il n?a de Lois que celles auxquelles nous ne désobéissons pas. Il n?existe que parce que nous refusons qu?il ne soit pas.
Le Capitalisme ne tire, en effet, sa puissance que de la grande masse des hommes et des femmes qui, jour après jour, acceptent son existence, la déplorent sans agir, s’y résignent en pensant qu’il peut évoluer, ou se croient indifférents à la situation. Ce Totalitarisme vit de l’abandon de la politique à ses sbires. De la méconnaissance de la logique économique. De la croyance en un État de bien-être destiné à s’améliorer sans cesse. Et cet abandon, cette méconnaissance, cette croyance sont les principaux piliers du Capitalisme. Ce sont les Voiles d’Ignorance qui l’empêchent de se révéler à nos yeux pour ce qu’il est vraiment : le pire des systèmes politiques et économiques.
Certes, il est difficile de rejeter un système. La cible paraît lointaine. Les raisons d?agir semblent abstraites. La tâche semble impossible. Mais en apparence seulement. Car le système capitaliste est partout sous nos yeux. En détruisant l’éducation de nos enfants, en brisant les acquis sociaux fondamentaux de la sécurité sociale, du droit à la retraite, du droit à l’eau, au service postal, à l’électricité, à l’air pur, au transport, à la santé, à la culture, à l?existence elle-même : le Capitalisme touche chacun d?entre nous. En exploitant notre travail, en brisant toute solidarité collective, en nous enfermant dans une société de consommation individualiste et égoïste, en faisant de nous des êtres passifs, préoccupés par la satisfaction immédiate de besoins créés de toutes pièces : le Capitalisme touche chacun d?entre nous. En servant une théorie arriérée, en échouant à réaliser le bien commun, en liquidant notre liberté démocratique, en incarnant l’Injustice par excellence, en imposant la Dictature, la Propagande et la Force, en propageant la misère, la violence et la mort, en détruisant les racines de toute humanité, en ressuscitant le Totalitarisme : le Capitalisme touche chacun d?entre nous. En réalité, la cible est toute proche. Les raisons d?agir évidentes. La tâche aussi aisée qu?elle peut être divisée en autant de luttes qu?il le faudra pour résoudre la difficulté. Et combattre le système en son entier.
Sous Occupation, la neutralité n’est pas une option, nous sommes forcés de choisir notre camp, nous sommes obligés de décider entre le soutien au système en place ou son renversement. Sous Occupation, la moindre de nos actions acquiert un sens, rien de ce que nous faisons ou de ce que nous ne faisons pas n?est étranger au cours des choses, puisque le Capitalisme est partout. Sous Occupation, l’indécision n’existe pas : la liberté d’indifférence n’est que l’autre nom de la liberté de Collaborer. Ne rien faire contre cette Occupation, c’est déjà faire quelque chose : c’est agir, par son inaction même, pour la conservation de la force d’Occupation en place ; c’est contribuer activement, par sa passivité même, à sa tutelle sur nos consciences et sur nos vie. C?est laisser faire, laisser passer, laisser aller, laisser exister le Capitalisme : c?est Collaborer. L’attente, l’indifférence, la passivité, la complaisance, la tolérance, la temporisation, la soumission, la démission en face de la force d’Occupation ne sont plus neutres : ce sont autant d’engagements en faveur du Capitalisme totalitaire. Dictés par l’ignorance, ce seraient des erreurs. Accomplis désormais en toute connaissance de causes, ce sont des fautes. Voulus malgré tout, ce sont des crimes contre l’humanité. Nous sommes donc condamnés à être libres : nous devons choisir d’entrer en Résistance ou de Collaborer.
Résister, c?est combattre en soi-même le conditionnement idéologique permanent de la société de consommation.
Résister, c’est diffuser à la plus large échelle la critique du Capitalisme.
Résister, c’est refuser le discours des médias dominants, et faire entendre la voix des sans-voix. C’est reconstruire une presse et une information pluralistes et libres, à l’audience publique et massive.
Résister, c’est exercer dans la rue le pouvoir démocratique que le gouvernement monopolise sans les citoyens, au mépris des citoyens, contre les citoyens. C’est défendre les moindres espaces publics encore protégés du Capitalisme, pour les étendre à ceux qu’il Occupe. C’est reconstruire l’espace public, du plus petit au plus grand échelon, en vue de le reconquérir intégralement.
Résister, c’est organiser collectivement la riposte à la force d’Occupation qui nous ronge, sur notre lieu de travail, sur notre lieu de vie, sur notre lieu d’études. C’est restaurer la discussion libre, la prise en charge collective de notre existence et de nos intérêts, l?autogestion de la vie commune. C?est mettre en acte une démocratie populaire, directe et participative.
Résister ce n’est pas réformer, aménager, tolérer ou espérer changer le Capitalisme. Le parti soi-disant socialiste l?a prouvé ces vingt dernières années, en passant de la réforme sociale-démocrate du capitalisme à sa gestion sociale-réaliste, de cette gestion à son accompagnement social-libéral, de cet accompagnement à l?abdication sociale-traître de Jospin, avouant lui-même que son programme « n?est pas socialiste ». On ne Résiste pas à moitié au Capitalisme, sauf à Collaborer bientôt avec lui. Il n?y a plus rien à attendre d?un Parti désormais Sociétaliste, qui croit encore « changer la vie » sans réformer la société, et qui, pour cette raison, ne transformera jamais ni l?une, ni l?autre. Résister, ce n?est donc pas tenter d?infléchir une énième fois de l?intérieur ce Parti désormais Sociétaliste, qui a déjà choisi son camp. Ce n?est pas graviter dans l?orbite du Parti Sociétaliste en croyant peser de l?extérieur sur ses décisions, comme l?ont cru les Verts et le Parti soi-disant Communiste Français. C’est construire un prisme uni des forces syndicales et politiques d?Opposition au Capitalisme, pour édifier une Société nouvelle.
Les capitalistes voudraient faire croire qu’il n’y de Résistance que négative, que la lutte contre ce système est stérile, qu’elle ne mène qu’à l’impasse d’un refus qui ne propose rien, que ce refus n’est qu?un un réflexe de défense conservateur, et non de renouveau progressiste.
Il n’en est rien. Celles et ceux qui rejettent la société capitaliste ne désirent pas le
. Nous ne nous contentons pas de contester la société capitaliste, nous posons aussi les bases d?une nouvelle société. Nous ne pleurons pas la société telle qu?elle est, nous inventons ce qu?elle devrait être. Nous ne sommes pas conservateurs, nous sommes progressistes, nous sommes mêmes profondément révolutionnaires, si ce que nous voulons ne peut être réalisé dans et par les institutions qui existent, si la Société que nous voulons ne peut naître de celle que nous rejetons. Ce que nous refusons dessine aussi, par la même occasion, ce que nous voulons, s’il est vrai qu’une chose ne se définit pas seulement par ce qu’elle est, mais aussi par ce qu’elle n’est pas.
Résister à la contre-réforme des retraites, aux licenciements massifs, au diktat des profits et des actionnaires, c’est vouloir une autre redistribution des richesses, c?est exiger le contrôle réel, donc le contrôle constitutionnel des richesses par ceux qui les produisent. Résister à la contre-réforme de l’éducation nationale, c’est vouloir une éducation véritablement égale pour tous, capable d’élever chacun à l’intelligence critique, au développement de ses aptitudes intellectuelles et pratiques, à la dignité d’être humain, et non une parodie d?éducation destinée à préformer des travailleurs jetables et peu qualifiés. Résister à la casse du système de santé, c’est vouloir une société dont la priorité est la solidarité sociale, le bien-être pour tous, et non le profit, aveugle et égoïste : c’est choisir le meilleur contre la rentabilité à tout prix. Résister à une société répressive et ultrasécuritaire, c?est vouloir une société qui empêche les licenciements massifs et qui crée les conditions du plein-emploi, qui prévient l?insécurité sociale en attaquant ses causes au lieu de juguler ses effets. Résister au borgne fasciste, c’est proclamer la valeur d’une société libre, démocratique et sans frontières. Résister à la guerre, c’est vouloir un monde pacifié, une mondialisation démocratique, une citoyenneté mondiale démocratique et universelle, un partage mondial des richesses et des biens. Résister au Capitalisme, c?est vouloir une autre Société.
Nous ne sommes donc pas simplement anticapitalistes, car ce mot ne désigne qu?une opposition sans contenu au Capitalisme, sans préciser le choix de société que nous portons. Nous savons ce que nous voulons. Nous voulons le respect des libertés fondamentales. Nous voulons le contrôle des richesses par ceux qui les produisent. Nous voulons l?élévation de tous par la culture et par l?éducation. Nous voulons la protection et la solidarité sociales. Nous voulons le plein-emploi par la diminution et le partage du temps de travail. Nous voulons la liberté et la démocratie réelles, exercées par la majorité pour la majorité. Nous voulons la fraternité et la coopération internationales. Nous voulons une Démocratie Solidaire Universelle.
Nos luttes ne nous divisent donc pas, elles nous unissent. Elles ne se dispersent donc pas, elles convergent. Elles nous unissent contre le Capitalisme totalitaire. Elles convergent vers une autre société et un autre monde, possibles et nécessaires. Nous savons déjà en esquisser les grandes lignes. Nous pourrons démocratiquement décider de ses détails.
Le Capitalisme est désormais seul : l’épouvantail stalinien du faux communisme, derrière lequel il se cachait, a cessé de le protéger. Le Capitalisme n?est plus une option, c?est un leurre. Il n’est même plus la moins mauvaise des solutions. Il n’est plus la solution. Il est Le Problème.
Il ne se soutient encore que de la servitude volontaire du plus grand nombre. Mais les capitalistes ne sont qu?une une poignée, nous sommes des milliards. Ils ne sont rien, nous sommes tout. Ils appartiennent déjà au passé, nous sommes l’avenir. Ils n?ont que de vieilles recettes, nous avons un projet neuf.
La Société que nous voulons se dessine sous nos yeux aussi clairement que celle que nous rejetons. Rejeter l’une, c’est vouloir l’Autre. Renverser l’une, c’est construire l’Autre.
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