Aux facultés en lutte, aux étudiantes et aux étudiants, aux doctorants, aux précaires de la recherche.

“Nous ne payerons pas votre crise !”, tel est le slogan au son duquel la mobilisation a commencé à l’université “La Sapienza” à Rome. Un slogan simple, direct : la crise économique globale, c’est la crise de la spéculation financière et immobilière, d’un système sans règles ni droits, c’est la crise des managers et des sociétés sans scrupules, c’est en fait la crise du capitalisme en tant que tel ; cette crise ne peut retomber sur les contribuables sans distinction, ni sur les épaules de la formation – de l’école primaire jusqu’à l’université- ou de la santé.

Ce slogan est devenu fameux. Il court désormais de bouche en bouche et de ville en ville. Des étudiants aux précaires, du “monde du travail” à celui de la recherche, personne ne veut payer, personne n’accepte de socialiser les pertes, et ce d’autant moins que la richesse a été durant des années distribuée à des couches toujours plus minces de la population.

La contagion sans précédent survenue ces dernières semaines, la multiplication des mobilisations dans les écoles, les universités, les villes, a suscité la peur. Chacun le sait, un chien effrayé mord. La réaction du premier ministre Berlusconi ne s’est pas faite attendre : “ Nous emploierons la police contre les universités et les écoles occupées”, “ Nous allons arrêter la violence dans le pays”.

Berlusconi veut augmenter l’assistance économique aux banques, faire de l’État et de la dépense publique les garants ultimes des prêts aux entreprises : bref, on doit couper les dépenses dévolues à la formation, baisser les ressources concédées aux étudiants, restreindre les moyens attribués à la santé pendant que l’on offre l’argent au privé, aux entreprises, aux banques. Nous nous demandons alors où se trouve la violence ? Dans une occupation collective, revendicative, ou plutôt chez un gouvernement qui impose la loi 133 et le décret Gelmini, sans même un débat parlementaire ? Est-ce le désaccord qui est violent ou bien celui qui veut l’étouffer par la police ? Ceux qui se mobilisent en défense de l’université et de l’école publique sont-ils violents ou bien la violence est-elle du coté de qui veut les vendre pour favoriser les intérêts économiques d’une infime minorité ? La violence est celle du gouvernement Berlusconi ; de notre coté, dans les facultés et dans les écoles occupées, il y a la joie et l’indignation de ceux qui luttent pour leur futur et pour le futur de tous, de ceux qui n’acceptent pas d’être cantonnés à la survie et forcés au silence, de ceux qui veulent être libre.

Il nous a été dit que nous saurions seulement dire « non », que nous n’avons rien à proposer. Rien de plus faux : les occupations et les assemblées sont en train de construire une nouvelle université, une université faite de connaissance, mais aussi de mise en commun, de savoir, d’information et de conscience. Étudier est pour nous fondamental. Voilà pourquoi nous tenons pour indispensable de nous mobiliser. Pour faire vivre l’université publique : l’occuper ! pratiquer ce dissensus qui permet précisément de continuer à étudier et à (re)chercher. À l’université et dans les écoles, beaucoup de choses doivent changer. Mais ce changement ne passera pas par des restrictions financières. Changer l’université signifie au contraire augmenter les ressources, soutenir la recherche, veiller à la qualité du processus de formation, garantir la mobilité (de l’étude à la recherche, de la recherche à l’enseignement). À l’inverse, restreindre le financement n’a qu’un but : transformer les universités en fondations privées, détruire l’université publique.

Le dessein est clair, ainsi que les moyens : la loi 133 a été approuvée en août et, face au désaccord de dizaines de milliers d’étudiants, on menace de faire intervenir la police. Ce gouvernement veut détruire la démocratie, par la peur, la terreur. Nous, depuis l’université “La Sapienza” en mobilisation et les facultés occupées, nous disons aujourd’hui que nous n’avons pas peur. Nous ne reviendrons pas sur nos pas. Notre objectif est de faire reculer le gouvernement, d’obtenir par la lutte l’abrogation de la loi 133 et du décret Gelmini ! Nous irons jusqu’au bout, nous ne voulons pas perdre. Nous ne voulons pas baisser la tête face à tant d’arrogance. Voilà pourquoi nous invitons toutes les facultés mobilisées du pays à emboîter le pas, à prendre part au mouvement : puisqu’ils veulent frapper les occupations, eh bien que mille autres écoles et facultés soient occupées !

Après la grève et les manifestations du 17 octobre à l’appel des syndicats de base, nous savons que l’heure de descendre dans les rues de nos villes pour donner une réponse unitaire et coordonnée est arrivée. Nous proposons donc deux journées de mobilisation nationales : vendredi 7 novembre, avec des manifestations locales dans toutes les villes, puis, vendredi 14 novembre, à Rome, en ce jour que les syndicats confédéraux ont décrété journée des universités en grève, pour une grande manifestation du monde de la formation, de l’université et de l’école. Cette journée est à construire dès maintenant ; les protagonistes essentiels doivent en être les étudiants, les chercheurs et les professeurs mobilisés. Nous participerons, avec nos formes et nos contenus, à la grève générale de l’école du jeudi 30 octobre.

Ce qui arrive aujourd’hui, c’est une mobilisation extraordinaire, puissante, riche. Une nouvelle vague, une vague anomale qui n’entend pas s’arrêter et au contraire veut vaincre. Faisons croître cette vague, luttons et développons le désir de lutter ! On nous veut idiots, résignés, nous sommes intelligents et en mouvement et notre vague ira loin !

Des facultés occupées de “La sapienza” de Rome, par l’université en mobilisation.