Pas de casseurs, pas de raisons de céder !

JOURNAL

« Celui qui dit la vérité, il doit être exécuté. »

 

N°80,          26 mai 2003


PAS DE CASSEURS, PAS DE RAISONS DE CÉDER !

Alain Juppé a dit qu’il ne fallait pas retirer les
projets de réforme.

          D’après
le dossier du Canard Enchaîné sur Raffarin, le vrai premier ministre
est Alain Juppé, comme en 1995. C’est pourquoi le fait que Juppé
ait pris la parole pour dire qu’il ne fallait pas céder aux manifestants
est très important. Cependant, même en acceptant momentanément,
pour le raisonnement, de faire semblant de ne pas savoir que le vrai chef c’est
la haute-bourgeoisie, il ne faut pas oublier que le chef, c’est en fait Chirac
lui-même, qui parlait encore il n’y a pas si longtemps de restaurer l’autorité
de l’État. Et le chef de L’État, c’est Chirac ! Il faudrait
s’en prendre un peu plus à lui, dans nos manifs. Ça lui ferait
certainement un peu peur de voir qu’on ne s’en prend pas seulement à
ses fusibles. Mais comme Chirac est lui-même un fusible, s’en prendre
à la bourgeoisisie en se remettant à parler de lutte de classe
et en chantant l’internationale dans les manifs, cela ferait encore plus peur !

          Alain
Juppé a raison, pour le moment, de penser que contrairement à
1995, il peut se permettre de ne pas céder. En effet :

          Les
gens se laissent berner très facilement pas les syndicats. Par exemple,
ils ont accepté
la date fixée par le traitre Bernard Thibault pour la grande manif parisienne.
Celle d’hier 25 mai 2003. Alors que cette date a été
volontairement choisie de façon à avoir le moins d’inconvénients
possibles pour la bourgeoisie. Cette grande manif parisienne a eu lieu bien
tard par rapport au début du mouvement. Elle a eu lieu un jour de fête
des mère, et dans certaines villes, c’était le jour des communions
pour les cathos, ce qui fait que celles et ceux qui tenaient à être
en famille ce jour-là ont eu tendance à ne pas aller à
la manif, même s’ils auraient aimé le faire. C’était un
dimanche, jour qui gêne le moins le patronat. Il aurait tout de même
mieux valu que la date choisie soit un jour de travail pour la plupart des gens.
Cela aurait eu bien plus d’impact en étant un vrai jour de grève
et en bloquant totalement Paris et la fRANCE un jour ouvrable. La date choisie
par la CGT a été choisie contre nous !

          Mais
il y a une raison encore plus importante qui fait qu’Alain Juppé, de
son point de vue, a bien raison de ne pas céder : il n’y a pas eu
de "casse" ni d’émeute lors de la manif du 25 mai, donc
il n’en a rien à foutre !

          En
mai 68, le pouvoir avait dû donner énormément de choses
parce qu’en plus d’y avoir une vraie grève générale totale
et illimitée, avec occupation des locaux, les manifs n’avaient jamais
hésité à tourner à l’émeute !

          En
1995, Alain Juppé avait dû céder parce qu’il y avait des
"casseurs" dans chaque manif !

          Le
coup du 11 septembre
semble avoir définitivement tué
les Black Bloc, ces jeunes émeutiers venus de la petite bourgeoisie d’extrême
gauche. En effet, comment faire mieux que Ben Laden ? et puis, l’un des
buts essentiels du terrorisme d’État est de traumatiser les gens afin
qu’ils se refusent à toute forme de violence sociale. Ce qui, bien sûr,
stérilise tout mouvement de contestation. Sur la violence révolutionnaire,
lire mon journal
N°55
ou au moins son post scriptum.

          Puisqu’il
n’y a plus de Black Bloc, nous avons absolument besoin, pour gagner, que les
jeunes banlieusards viennent dans nos manifs. Eux, ils n’auront pas d’état
d’âme ! Ce sont de bons émeutiers sans peur et sans reproche !
Et il faut faire passer nos manifs rue de la Paix et aux Champs Élysées !
C’est ce qui fera le plus peur à la bourgeoisie qui ordonnera alors au
gouvernement de céder sur toute la ligne. Sur les émeutes des
Black Bloc, vous pouvez lire ce
texte
et ma réponse
au sujet des émeutes de banlieues. Et il faut à tout prix lire
cet excellent témoignage
écrit par une personne ayant participé au Black Bloc de Gênes.

          Pour
que les jeunes banlieusards viennent à nos manifs, ils faut à
tout prix mettre leurs lycées et leurs collèges en grève.
Leurs lycées et leurs collèges sont souvent des écoles
professionnelles, puisqu’ils sont destinés à devenir des esclaves.
Il faut inviter ces personnes à venir dans nos manifs.

          Pour
les mettre en grève, il suffit, je suppose, de bien leur expliquer que
les projets sur les retraites et sur l’Éducation Nationale leur seront
encore plus néfastes à eux et à leurs enfants qu’aux autres
milieux de la société. Si ces projets se réalisent, ce
seront les banlieusards qui en subiront le plus les conséquences, il
faut bien expliquer cela aux jeunes de ces écoles.

                    Merci
pour votre attention,

                    Meilleures
salutations,

                    do

                    http://mai68.org

Post
scriptum sur le nombre des manifestants d’hier :

          C’est
très tardivement, en 1994, lors de la contestation contre les CIP, que
je me suis aperçu que les syndicats, comme la police, diminuaient parfois
eux-aussi le nombre de manifestants dans leurs rapports officiels.

          Nous
savons que les syndicats sont là pour empêcher les mouvements de
grève, ou en tout cas pour les saboter et les faire cesser le plus vite
possible. J’ai l’habitude de compter moi-même le nombre des manifestants.
Quand la manif fait quelques milliers ou même quelques dixaines de milliers
de personnes, c’est assez facile même pour un individu seul.

          En
1994, après d’importantes manifs, j’ai remarqué que l’UNEF-ID
se mettait à dire que, désormais, "le nombre des manifestants
était chaque fois plus petits, même si nous étions encore
nombreux". J’avais vu que c’était faux, que c’était un mensonge.
Le nombre de manifestants ne diminuait pas. Au contraire ! J’ai donc tout
de suite compris que si l’UNEF-ID (liée au PS, à l’époque)
nous faisait ce mensonge, c’était pour nous décourager afin de
pouvoir rapidement nous dire qu’il fallait cesser le mouvement. Pour contrer
cela, je me suis mis à dire et à faire dire le nombre réel
des manifestants, en disant pourquoi je ne faisais pas plus confiance au nombre
donné par les syndicats qu’à celui fourni par la police.

          En
1995, j’ai participé à une manif où, selon la police, il
y avait 10 000 manifestants et selon les syndicats (CGT, FO, CFDT) il y
avait 50 000 personnes. En réalité, il y avait 70 000
manifestants !

          Quelques
années plus tard, j’ai vu à une manif de profs où il y
avait eu 30 000 personnes. Mais les syndicats de profs ont essayé
de faire croire qu’il y avait eu seulement 6 à 8000 personnes. Et à
l’AG suivante, réunissant 500 profs, les gens ont voté à
l’unanimité, et contre les syndicats, pour la grève reconductible
dès le lendemain. Et ils l’ont même voté plusieurs fois
afin que les syndicats ne puissent pas tricher. Malgré cela, à
la fin de cette AG, les syndicats ont dit que cette décision n’était
pas valable, parce que l’AG n’était pas assez nombreuse, pas assez représentative.
Et ils ont, à 5 ou 6 personnes (donc 100 fois moins nombreux que
l’AG elle-même) annulé cette décision prise par l’AG !
Comme quoi nous avons un absolu besoin de comités
de grèves avec des non syndiqués
, et unis dans une
même coordination.
Sinon, les syndicats trahissent toujours !

          Quand
la police dit qu’il y a eu le 25 mai 300 000 manifestants à Paris,
elle ment ! Quand les syndicats disent qu’il y a eu 600 000 manifestants
à Paris, ils mentent aussi. Et pour les mêmes raisons ! D’ailleurs,
sur France-Info, au tout début, un journaliste disait que d’après
les syndicats, il y avait au moins un Million de manifestants et 250 000
selon la police. Le journaliste disait aussi que selon toute vraisemblance le
bon chiffre se situait entre les deux à 600 000. Il est amusant
de constater qu’après réflexion, les syndicats aient préféré
baisser leur chiffre à 600 000 ! Ils peuvent parler de succès,
mais si nous les croyons, nous ne sauront pas à quel point cette manif
a été un succès ! (à part qu’il n’y a pas eu
la chose principale qui pouvait nous faire gagner : une gigantesque émeute !)

          Le
bon chiffre est évidemment celui donné HIER par Indymédia :
un million de manifestants à Paris le 25 mai 2003 !

          Et
il ne faut pas revenir là-dessus. Sinon, c’est un petit peu décourageant !