La commun.e expulsée / on occupe la rue chaque jour
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Catégorie : Local
Thèmes : Logement/squat
Des nouvelles : Hier soir, suite à une assemblée populaire on acte de nous retrouver chaque jour dès 12h30 et 18h30 devant le squat la Commun.e de Rezé pour un repas partagé.
Le temps de la rencontre, de l’échange entre nous et de l’inventivité dans la lutte. Beaucoup de questions hier soir et une seule certitude ; créer des soutiens et actions intercollectives est la seule condition de changer le cours des choses.
Soyons nombreux chaque jour devant la Commun.e à continuer à montrer par nos pratiques nos façons d’être, de vivre et de penser la cité ensemble. Bref, prensons le risque de juste vivre en accord avec nos sens humains; nos humanités.
La cohérence et convergence de nos énergies inventives et collectives pour occuper la place publique est le levier de notre lutte politique en recherche de formes esthétiques aussi en raccord avec nos émotions et nos sens profonds.
Dès 12h30 et 18h30, on se retrouve chaque jour devant le squat de la Commun.e et on invente la lutte à chaque instant en mouvement et en accroissement avec tous et toutes…
Mag pour le collectif la Commun.e de Rezé
COMMUNIQUÉ OFFICIEL
La Commun?e
Rezé, le 14 octobre 2020
Droit de réponse au communiqué de presse du Préfet de Loire-Atlantique en date du 12 octobre 2020 – Communiqué de presse n° 1
« Ce matin, à 9h30, une maison occupée illégalement par des squatteurs sans droit ni titre depuis le 15 septembre
2019, située rue de la commune à Rezé, a été évacuée en application d’une décision judiciaire prononçant
l’expulsion. »
Voilà ce qu’écrit le Préfet de Loire-Atlantique dans son communiqué de presse.
La réalité est tout autre, voilà ce qui est expulsé et éradiqué :
Une maison oui, mais aussi un appartement, un café autogéré (le café des alytes), sa cuisine
fraîchement rénovée, une salle de concert, des ateliers de couture et de métallurgie, le seul atelier
d’autoréparation vélo de la ville de Rezé, une ressourcerie gratuite, une grande cour, un grand jardin
(des arbres fruitiers, des puits), un bar d’été, lieu historique des bals rezéens d’après-guerre, l’épicentre
du Carnaval de Pont-Rousseau qui a illuminé le mois de février 2020 …
Une dizaine d’habitant-e-s à la Commune, oui, mais aussi des centaines de voisins, du quartier et
d’ailleurs, des associations, des milliers de visiteurs qui s’y croisent depuis son ouverture en
septembre 2019, de nombreux artistes programmés, des réfugiés tchadiens et nigérians, des
cartographes confirmés ou débutants en train de créer la carte de Pont-Rousseau, des gens qui
débattent de questions urbaines et sociales, qui échangent, se rencontrent, créent dans ce lieu
remarquable, atypique, transversal, l’épopée carnavaleuse qui repart pour le printemps 2021 …
C’est donc tout cela, toute cette dynamique sociale qui a été expulsée lundi matin.
Le Préfet ajoute en fin de communiqué.
« L’évacuation de ce bâtiment s’est déroulée dans le calme. »
Cette expulsion s’inscrit dans un contexte urbain conflictuel que fait semblant d’ignorer le Préfet :
des revendications habitantes contre des aménagements spéculatifs, la destruction d’un quartier ancien
vivant, une nouvelle équipe municipale citoyenne qui entre dans ces débats, des recours juridiques
contre des promoteurs décevants, le squatt de la Commune qui est devenu un lieu incontournable de
cette controverse et de cette réinvention.
Loin du « calme » préfectoral, le squatt de la Commune dans sa diversité explore l’idée du
commun au service des tou-te-s.
Habitant-e-s et voisin-e-s, nous occupons la rue toute la journée devant le 53 jusqu’à obtenir une solution constructive à cette aberration urbaine.
Aidez-nous à créer rapidement les conditions de la ré-ouverture du lieu.
Votre soutien est attendu tous les jours devant le 53.
La Commun?e et ses soutiens
53, rue de la Commune de 1871, Rezé
collectiflacommune@gmail.com
Depuis le 12 octobre, le portail d’entrée est fermé et gardé par des vigiles. Le matériel de travail ainsi que les effets personnels de nombreuses personnes qui utilisaient le lieu et l’habitaient sont toujours à l’intérieur.
Cette expulsion n’a pas tué la Commun·e. Bien au contraire. Les solidarités qui se sont construites petit à petit dans le squat de la Commun·e continuent de s’exprimer dans la rue et touchent aujourd’hui encore plus d’habitant·es du quartier ou d’ami·es de passage.
Nous occupons désormais la rue de la Commune. Cette occupation est nécessaire pour protéger nos affaires, accélérer la recherche d’une solution pour que les lieux rouvrent leurs portes aux habitant·es du quartier et continuer à faire du quartier un lieu de vie, d’échanges et d’entraide, au contraire des cités dortoirs que nous promettent les promoteurs.
Actuellement, une présence quotidienne est assurée durant la journée. Des boissons et des repas chauds sont servis matin, midi et soir grâce au soutien de nos ami·es et aux reliquats de notre société de surproduction. Nous distribuons gratuitement des bananes et des sourires à toute personne passant dans la rue. Un point info journalier a lieu aux environs de 18h30.
Nous tentons de maintenir les activités déjà prévues, si c’est possible. Nous accueillons avec plaisir toutes les nouvelles propositions, en particulier les performances d’art de rue, la musique (pas trop fort ni trop tard, pour ne pas déranger les voisin·es) et toutes les activités créatives.
N’hésitez pas à passer pour faire vivre la Commun·e !
https://lacommunereze.noblogs.org/la-commun·e-a-la-rue/
À l’attention des élu·e·s de Rezé, le 17/11/2020
Mesdames, Messieurs
Nous faisons un point d’étape suite aux derniers échanges avec vous.
Le collectif de la Commun·e a été expulsé du 53, rue de la Commune, avec le concours de la force publique en nombre, le lundi 12 octobre 2020 dans la matinée.
Ont été expulsé·e·s les personnes y ayant élu domicile mais aussi l’ensemble des activités collectives s’y déployant
(atelier vélo, processus carnaval, atelier de cartographie, activité cuisine, programmation, stages, résidences et répétitions, ateliers divers, freeshop/espace de gratuité, café associatif, etc.).
C’est donc une sorte de conciergerie de quartier, un centre social hybride, en fonctionnement depuis une année, qui a été expulsé, avec ses habitant·e·s assurant une grande part de la cohérence du lieu et ses usager·e·s.
Les biens et équipements présents dans le 53 appartiennent donc à la fois aux personnes et aux collectifs d’usagers. En ce sens, la procédure juridique et son interprétation par les propriétaires, limitant à deux personnes le droit de récupérer ces affaires sont erronées et nous avons demandé via notre avocat, Me Vallée, à pouvoir récupérer, en nombre, ces objets.
Seules deux personnes ont demandé à bénéficier du relogement proposé par le service des affaires sociales de la ville de Rezé.
Plus d’un mois après, nous n’avons pas de nouvelles de ces
deux demandes et confirmons via une pétition/lettre de soutien imminente la nécessité d’honorer cet engagement. Quoiqu’il en soit, l’ensemble des personnes expulsées est aujourd’hui logée dans des dispositifs de l’hospitalité habitante.
Pendant trois semaines (S42, 43 et 44), nous avons occupé le trottoir et la rue devant le 53, empêchant la dissolution de notre collectif et diverses voies de fait possibles, en l’occurrence l’entrée de gravats issus d’un chantier voisin par les propriétaires pour recouvrir une partie de la cour.
Deux vigiles et un chien ont été présents en continu sur le site, en parfaite compagnie avec nous, occupant·e·s joyeux/ses et drôles de l’autre côté de la grille. Un micro-village a émergé sur le trottoir, recevant de nombreux visites de soutien, un habillage graphique et paysager a rendu cela visible. Cette période d’urgence, de revendication d’existence et de précarisation forcée a néanmoins stoppé nos activités et a réduit provisoirement notre capacité à imaginer et organiser la suite des ces aventures rezéennes/roussipontaines, cela d’autant que de nombreuses expulsions, menées par la préfecture ailleurs dans l’agglomération juste avant la trêve hivernale et un confinement sanitaire prévisible, ont sollicité de l’énergie et de la solidarité.
Une grande partie de ces aménagements ont été déplacés depuis deux semaines (S45 et 46) dans le jardin de la Butte aux Orties, propriété municipale que nous vous remercions d’avoir mis à disposition. Il reste encore des objets, un gros (une caravane) et des petits, que nous souhaitons évacuer rapidement de la rue de la Commune et assurer un retour à une circulation libre sur le
trottoir.
Nous souhaitons aussi remettre en état initial la façade de la maison du 53 (à droite de la grille). Nous proposons de faire cela assez rapidement et il nous semblerait pertinent d’y associer les services (ville ou pôle métropolitain) comme un travail mené en commun, au bénéfice de l’habitabilité de la rue de la Commune.
Depuis deux semaines donc, le collectif la Commun·e semble avoir pris dans l’urgence ses quartiers d’hiver à la Butte aux Orties, ancien lieu mixte de jardin et d’artisanat devenu terrain vague arasé dont les gravats et déchets issus de la démolition des bâtiments anciennement présents constituaient une énorme butte centrale à notre entrée dans les lieux. Ce terrain avait déjà fait l’objet d’une demande de transformation en jardin collectif, en lien avec le premier jardin collectif voisin, demande demeurée sans suite côté mairie. Un bel et vieux fruitier, des murs fragilisés par défaut d’entretien et même démolis à l’entrée lors de l’arasement de la parcelle, plus aucunes traces de buttes de culture pourtant visibles dans le récent rapport sur la qualité des sols que nous avons relu, une énorme construction fantasque (et illégale) de l’autre côté d’un affreux mur en parpaing mitoyen sur toute une longueur, c’est le 17, que la mairie a décidé de préempter. Nous voyons aussi très bien depuis ce coeur d’îlot, l’arrière de la proue de l’îlot Lamour-Les Forges, sa plénitude constructive et son caractère remarquable qui nous saute
aux yeux chaque jour un peu plus. Et les venelles que nous parcourons jusqu’au parking du Lidl, déjà rendu hostile, et maintenant transformé en forteresse inhabitable, nouvel usage excessif de la propriété privée d’un bien vacant.
Victimes la première nuit d’une destruction malveillante (chantier de cabanes mis à bas, jets de nos outils et de matériaux dans la parcelle du 17, texte de menace), nous avons peu à peu investi la Butte aux Orties, qui est, comme vous l’avez vu pour certain·e·s, à la fois déjà transfigurée et néanmoins encore en chantier. Ce n’est certes pas l’esthétique spéculative du groupe Launay ou de Bâti-Nantes, mais nous espérons que lors de vos visites (le lieu est grand ouvert), vous n’y verrez pas les formes d’un bidonville que l’on pourrait vous reprocher ou dont vous auriez honte en tant qu’élu·e·s, mais la continuation d’un travail collectif habitant, la capacité d’agir devant l’adversité et de se mettre à l’abri immédiatement, la possibilité de la persistance de l’habitabilité dans ce qui était quelques jours plus tôt un terrain vague fermé à clef, l’art du jardin populaire, une démonstration joyeuse que la vie est belle malgré tout :la Commun·e.
La Butte aux orties est une conciergerie en chantier, une permanence inachevée, une vigie urbaine de plein air, un living lab communal, certes encore dans le jus et amputé·e de tout confort moderne et notamment de viabilisation : eau, électricité et toilettes. Nous avons bien sûr envie de faire avec vous ces mises à jour, la dépense est ici infime, il s’agit d’autre chose, assurer une qualité d’accueil, de l’hygiène, pouvoir à nouveau cuisiner raisonnablement, mais aussi se déployer dans des processus artistiques variés et tenir nos réunions et assemblées dans des conditions décentes.
Aucune domiciliation, mais des activités, des permanences, un laboratoire urbain, du commun et de la sécurité que nous affectons produire par le fait même de cette urbanité que nous portons collectivement avec vous. Pour le conventionnement, selon notre avocat, diverses formes juridiques, dont le prêt à usage, sont disponibles.
Différents processus interrompus par l’expulsion, puis par la période d’intense chantier, sont à nouveau actifs ou envisagés. En voici quelques exemples : la sortie en janvier 2021 de la première carte habitée de Pont-Rousseau tirée en première édition à 1500 exemplaires, la distribution des 4 cartes postales annonçant la seconde édition du Carnaval sauvage de Pont-Rousseau (fixé au 20 mars, mais que nous pourrons si besoin déplacer vers l’été)
la création d’un chantier d’imaginaire urbain en lien avec les enquêtes urbaines et sociales et écologiques de nombreux acteurs/trices, incluant bien sûr ville et métropole, nous-mêmes (un document pour une coconstruction est en préparation), mais aussi l’association Vivre autour de Lamour-Les Forges, l’association du jardin Lamour-Les Forges, l’épicerie associative de Rezé, la Boucherie des Arts, l’association à la criée, le collectif de la rue de la Commune, le collectif de la place de l’Erdronnière, etc.
À venir, d’autres chantiers à durée plus limitée, viabilisation de la Butte aux Orties, nettoiement du trottoir du 53, protection des têtes de murs de schiste, ateliers chars (le premier char est déjà parmi nous, quasi prêt, c’est une famille hérisson), etc.
Dans ce contexte, et compte-tenu des potentialités très limitées du jardin de la Butte aux Orties pour l’organisation de toutes ces activités, nous souhaitons effectuer une visite avec vous de différents bâtiments vacants propriété de la ville à proximité, pouvant utilement, en l’absence manifeste de tout projet imminent, être mobilisés au service de l’intérêt général.
Nous pensons notamment aux RDC commerciaux vacants sur la rue Jean-Jaurès et à leurs ateliers de fond de cour, sachant que les étages en ont été volontairement dégradés par du personnel municipal lors du précédent confinement. Il faut donc visiter pour vérifier cela pour une mise à disposition éventuelle.
Nous ne sommes pas l’intérêt général, le Carnaval ou la Commun·e n’ont aucune prétention à le représenter, ou à intéresser tou·te·s les habitant·e·s à leurs activités, nous faisons partie de l’intérêt général en tant qu’il est une pluralité et ne peut être justement incarné par
personne, ni par aucune chimère.
En résumé, nous vous faisons une proposition globale articulant les autres propositions.
Créer un groupe de travail transversal et temporaire, pour faire connaissance, pour s’apprécier davantage, pour régler des problèmes complexes (au sens qu’ils concernent par exemple plusieurs services), permettant de croiser la diversité du collectif et votre diversité d’élu·e·s et aussi des technicien·ne·s de différents services (affaires sociales, urbanisme, culture, écologie, mobilités, etc) formant la capacité d’agir et d’orienter de la Ville. Il nous semble qu’au moins une dizaine de personnes de chaque entité serait nécessaire, utilisant diverses techniques de débat et d’animation pour rompre les face-à-face impuissants ou déceptifs. Ces quelques rencontres permettraient d’établir une qualité de relation permettant de gérer en parallèle à la fois les chantiers évoqués plus haut, dont les conventionnements pour des mises à disposition, en discussion et à venir, et un travail en imaginaire urbain pour tout le quartier.
[pour mémoire des paragraphes précédents, rappel des diverses discussions actuelles ou urgentes :
le relogement de 2 personnes expulsées le 12 octobre, l’accompagnement du squatt la Famille, la viabilisation avec conventionnement de la Butte aux Orties, la recherche de nouveaux lieux vacants à proximité du jardin, divers chantiers de nettoiement/protection,
la création d’un grand chantier d’imaginaire urbain pour tout le quartier]
Dans l’attente de discussions fructueuses à venir, nous vous offrons nos meilleurs sentiments.
Le Collectif de la Commu.n.e