Les occupant-e-s venaient de plusieurs milieux : des étudiant-e-s, des militant-e-s de gauche, des antifas, des GJ, des écolos. Mais parmi les GJ (Gilets Jaunes), nous avons repéré des individus que nous croisons souvent en manif, l’ancien flic antisémite Frédéric Jamet, accompagné de quelques amis qui ont fait mine de ne pas le connaître, et un GJ royaliste faisant partie du groupe conspi « GJ historiques ». Ils sont venus soutenir le mouvement et se sont rapidement rassemblés dans un café en plein milieu de la zone d’occupation.

Nous avons été plusieurs à alerter les personnes présentes ainsi que les organisateur-rice-s qui étaient d’accord avec nous pour virer ces GJ du rassemblement. Un attroupement d’une trentaine de personnes s’est créé devant le café où ils se réfugiaient. Frédéric Jamet s’est caché au fond du café pour ne pas montrer son visage, laissant ses potes alcoolisés le défendre et nier ses liens avec l’extrême droite antisémite. Pour info, ce type est un ancien flic, un antisémite notoire qui s’est affiché publiquement avec l’écrivain Hervé Ryssen, et un ancien d’Oeuvre Française, comme l’explique cet article de la Horde : https://lahorde.samizdat.net/…/paris-des-antisemites-sous-…/

Plusieurs fois, la foule à essayé de les déloger en criant « siamo tutti antifascisti » ou « Paris antifa », mais les GJ en question reprenaient ironiquement les slogans et refusaient de bouger. Ce n’est pas la première fois que ça arrive, et ces personnalités d’extrême droite qui infiltrent les manifs GJ et les rassemblements politiques ont toujours la même stratégie : ils n’assument jamais frontalement leur antisémitisme, ils vont jusqu’à se faire passer pour des antifa (voire les « vrais antifas »), ils appellent à l’unité contre le gouvernement et nous accusent de vouloir diviser les luttes. Ils invoquent également leur long passé chez les GJ, comme si être là depuis le premier acte suffisait à en faire des camarades respectables. Cela ne poserait pas problème si les personnes présentes n’étaient pas dupes. Malheureusement, ils trouvent toujours un large soutien parmi les GJ et cela s’est encore renouvelé à l’occupation cet après-midi. Dans l’attroupement qui s’est créé autour d’eux, de nombreuses personnes prenaient leur défense en invoquant des arguments tous plus absurdes les uns que les autres. Une femme criait « C’est pas Macron ! C’est pas Macron ! Notre seul ennemi c’est Macron ! ». On nous avançait également que leur antisémitisme n’était pas un problème tant qu’ils étaient des Gilets Jaunes. Que nous étions dans le même camp, que nous avions les mêmes ennemis. Or, non, c’est faux, les ennemis de nos ennemis ne sont pas nos amis.

Au milieu de tout cela, notre discours qui consistait à apporter les preuves de l’antisémitisme Frédéric Jamet était rendu complètement inaudible. Alors qu’il aurait suffit d’une foule forte, solidaire et déterminée pour virer ces quelques individus, ils ont pu compter sur une partie des gens présents pour les soutenir.

Ces personnalités d’extrême droite n’ont rien à faire dans nos manifs. Peu importe qu’ils détestent Macron, peu importe qu’ils détestent la police (ici, ce n’est visiblement même pas le cas puisqu’on a affaire à un ancien keuf…), nous ne pouvons pas militer ensemble. D’abord par principe, mais aussi parce qu’ils sont nuisibles pour nos luttes. Rappelons les insultes proférées par un certain « Mike Rambo », GJ bien connu sur les réseaux sociaux, contre des travailleuses du sexe et des personnes trans en tête de la manif du 9 mars 2020. Il avait voulu alors avec ses potes prendre la tête d’une manifestation féministe, tout en se prétendant antifa pour avoir la paix. Depuis, le mot circule dans les milieux féministes que des antifas ont agressé des meufs ce jour-là… Certes c’est faux, mais nous n’avons pas pu virer ces types à cause de la passivité des personnes présentes dans la manif.

Vouloir les virer de nos luttes est tout à fait légitime et n’enlèvera rien à notre force, bien au contraire. Encore faut-il avoir le courage de ne pas rester passif-ve-s face à ces hommes. Ou bien d’avoir le discernement de comprendre qu’ils ne sont pas nos alliés mais nos ennemis politiques. Ces hommes luttent contre ce qu’ils appellent « l’ordre sioniste mondial ». C’est une stratégie politique pour eux d’infiltrer les milieux Gilets Jaunes. En 2018 et début 2019 plusieurs antifa parisien-ne-s s’étaient rassemblé-e-s pour virer les Zouaves et Benedetti des manifs GJ. Le combat n’est pas fini, ces types sont de la même trempe. D’ailleurs, Frédéric Jamet est proche à la fois des Zouaves et de Benedetti. Il est donc de la plus haute importance de ne pas relâcher notre vigilance et de nous unir face à ces barbouzes.

Mais le problème est en réalité double. D’abord, il y a l’attitude ambiguë des personnes, militantes ou non, qui ne comprennent pas pourquoi la présence d’antisémites parmi nous pose problème. C’est celui que nous venons d’évoquer et qui peut se résoudre en discutant sur place, en essayant de gagner ces gens à notre discours. Parfois, iels sont à l’écoute. Beaucoup de GJ notamment se sont formé-e-s sur le terrain et continuent à chercher leurs marques politiquement. Le second problème qui nous a frappé aujourd’hui est lié à l’attitude de militants formés et qui se revendiquent explicitement de l’antifascisme. Nous avons été choqué-e-s de voir certains d’entre eux ricaner, balancer volontairement des phrases confusionnistes de loin pour exciter le conflit, puis faire comme si de rien n’était. Tout ce qu’il fallait, c’était se bouger pour défendre nos principes. On espère que la prochaine fois, certains se rappelleront qu’ils sont censés en avoir.

[Merci à CND pour l’image]