Segur : un accord indigne et de trahison …
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Catégorie : Global
Thèmes : Luttes salariales
A ce niveau, cet accord est surtout une INSULTE À NOTRE DIGNITÉ !
Les syndicats CFDT, UNSA et FO sont les complices de ce doigt d’honneur aux soignant.e.s. Mais ce doigt d’honneur-là ne sera pas critiqué par la presse aux ordres, contrairement à celui de l’infirmière Farida ….
CFDT, UNSA, sans surprise ; on sait qu’ils se couchent devant la direction, même quand elle ne leur demande pas. Mais attardons nous sur le cas de FO, qui se veut plus revendicatif. FO Santé ose déclarer dans son tract « Négociations Ségur VICTOIRE ».
Heureusement que le ridicule ne tue pas … Voyons de quelle victoire il s’agit :
Déjà on l’a vu la revalorisation ne suffira même pas à rattraper le blocage des salaires depuis 10 ans.
En plus pourquoi attendre 2021 pour mettre en place la revalorisation ? Pour Air France, l’Etat n’a pas attendu pour débloquer directement 3 milliards. Est-ce que la santé est moins importante que les avions ? Est-ce pour être sûr que les soignants continueront de se sacrifier si jamais il y avait une seconde vague à l’automne, en agitant cette carotte sous leur nez ?
Par ailleurs, cette revalorisation n’est pas claire et nette. L’accord ne prévoit pas une augmentation du point d’indice ni du traitement mais un « complément de traitement indiciaire à hauteur (sic) de 49 points représentant 183 euros nets par mois ». En gros c’est comme une prime : un complément ça peut être annulé du jour au lendemain, sans préavis, car ce n’est pas intégré définitivement dans le salaire. Avec la crise qui s’annonce, autant dire que cette revalorisation risque de faire long feu …
Et que veut dire « à hauteur » : que ce sera un maximum qui pourra être atteint mais sans garantie ? Car l’esprit de ce texte est de renvoyer au niveau local les négociations sur les indemnités et les primes, bonus etc. Application sur la base d’accords locaux signés avec les organisations syndicales. Lécheurs de cul de la Direction, l’avenir vous sourit !
Enfin, cet « accord » prévoit de « simplifier » les fiches de paie en fusionnant toutes les indemnités : « Les parties au présent accord conviennent qu’une rénovation du régime indemnitaire des personnels de la fonction publique hospitalière sera entreprise [sur le] principe suivant : le nouveau régime indemnitaire a vocation à fusionner l’ensemble des régimes indemnitaires existants. ».
Concrètement cela veut dire qu’à terme le complément indemnitaire de 183 euros risque d’absorber toutes les indemnités actuelles, comme par exemple l’indemnité de sujétion pour un Aide-soignant de Classe 3, qui est de 165 euros par mois et qui avait été acquis par une lutte en 1991. Belle victoire du SÉGUR en effet que de supprimer les victoires de nos précédentes luttes !
Le texte prévoit également que les syndicats conviennent de la mise en place de la gestion des emplois et des compétences, avec des plannings autogérés par les soignants eux-mêmes. Mais le texte ne dit rien – ou peu – sur les moyens matériels pourtant nécessaires pour exercer nos fonctions dans des conditions DIGNES.
Au contraire, le texte prévoit même de continuer les fermetures de lits en « développant les hospitalisations programmées et ambulatoires » ! (cf. Bichat Beaujon 35% de lits en moins …) En absence de moyens matériels supplémentaires et massifs, en absence de nouveaux lits, en absence de nouvelles embauches fermes et massives, ce sera surtout l’autogestion de la misère et de notre propre exploitation.
Souvenons de ce qui s’est passé l’été dernier : alors que le personnel réclamait des MOYENS en pleine canicule (climatiseurs, aérations en bon fonctionnement, postes de soins réfrigérés, …), FO Cochin réclamait une PRIME-Canicule. Or les primes n’empêchent pas la dégradation des conditions de travail.
Le texte ouvre aussi la boîte de pandore de la remise en cause des « 35 heures » (même si on sait bien que ça n’a jamais été les réelles 35 heures) : « Il sera procédé après concertation , à des modifications réglementaires , notamment le décret N° 2002-9 du 4 janvier 2002 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière , pour mettre en oeuvre les dispositions visant à améliorer l’organisation du travail sans remettre en cause le cadre légal . »
Le rappel au cadre légal ne doit pas faire illusion : le cadre légal ce ne sont pas les « 35 heures hebdomadaire » mais bien « l’annualisation du temps de travail »- prévu dans la loi dite des 35 heures. Avec l’accord SÉGUR, « dans le cadre des accords locaux », la Direction pourra toucher à vos 35 heures, à vos RTT, à planifier des 12 heures partout » sur la base du volontariat » … et mon cul sur la commode …Regardez Cornill ( pneumologie Cochin ) au nom du COVID, ils étaient tous passés en 12 heures sans qu’aucune organisation syndicale ne dise rien …. Il faut dire que les permanents syndicaux étaient exemptés du « volontariat » ( imposé de fait ) : les 12 heures c’est bien mais pour les travailleurs, par pour leurs « représentants » …
Il faut souligner la ruse introduite par cet accord : sous couvert d’autonomie d’organisation, la remise en cause du mode d’organisation du travail se faisant au niveau local, structure par structure, chacun partira éventuellement en lutte dans son coin, pour essayer de contrer sa direction, mais sans qu’il y ait un mouvement généralisé. C’est la bonne vieille stratégie du « diviser pour mieux régner ». On sait que la lutte dans une structure isolée aura moins de poids, et donc moins de chance de réussir, qu’une grève générale de l’ensemble du secteur hospitalier. Or le soutien populaire aux hospitaliers suite à la crise COVID nous mettait dans un rapport de force favorable vis-à-vis de l’Etat et des Directions hospitalières. Les syndicats, en acceptant de participer aux négociations SÉGUR, nous ont désarmé et ont saboté notre rapport de force favorable.
Ce qui est proprement incroyable c’est que des syndicalistes aient signé ce texte qui est une reddition en rase campagne avant même d’avoir engagé toute lutte !!!
Mais en fait, ce texte correspond bien à leur conception du syndicalisme, un syndicalisme de service, d’accompagnement, de concertation et de discussion, qui apporte aux syndicalistes des avantages (permanents, décharges syndicales, locaux, heures de formation et restos…) en échange de leur docilité. (cf. l’article du Canard Enchaîné de cette semaine qui confirme notre analyse)
Que SUD ou la CGT n’aient pas signé l’accord ne doit pas nous leurrer : ils n’ont pas besoin de signer, puisque les autres le font à leur place. Cela leur permet de jouer le rôle des rebelles, mais dans le fond ils n’agissent pas tellement différemment des autres syndicats (. Au fait est ce que ces syndicats ont appelé à des assemblées de lutte pendant qu’ils négociaient ? Non ! cela montre bien qu’aucun d’entre eux ne voulait vraiment engager de bras de fer.).
Et surtout ils ne crachent pas sur les avantages que leur confère leur statut de syndicat « représentatif ». S’ils étaient réellement des structures de lutte, ils refuseraient les avantages octroyés par l’Etat pour assurer leurs mandats, de façon à être réellement libres et indépendants.
Cet accord est une INSULTE contre notre dignité.
L’objectif de l’accord n’est pas d’augmenter le salaire des soignants, mais de nous faire travailler encore plus, dans des conditions matérielles qui seront toujours aussi dégradées, avec les syndicats dans le rôle des gardes-chiourmes, qui s’assureront que les accords qu’ils auront « négocié » soient bien respectés par les soignants. Et les syndicats tireront des avantages sonnants et trébuchants de cette Collaboration. Sous couvert d’autonomie de gestion, l’accord va en fait surtout servir à augmenter la pression sur les personnels, en les obligeants à gérer eux même leur propre misère.
Macron nous a affirmé au début de l’épidémie « La santé n’a pas de prix. Le gouvernement mobilise tous les moyens financiers nécessaires, quoi qu’il en coûte ». Le SEGUR montre que encore une fois, MACRON A MENTI : finalement c’est bien la logique comptable qui prévaut sur les considérations sanitaires …
Aujourd’hui nous sommes à l’heure des choix. Ne pas dénoncer cet accord, c’est se rendre complice. S’il reste des syndicalistes sincères à FO ou ailleurs, s’ils ne déchirent pas leur carte, c’est qu’ils couvrent cette trahison.
Ce pseudo-accord est une usine à gaz dirigée contre nous, ceux qui se sont sacrifiés sans compter pendant la crise. Le Capitalisme porte en lui la guerre et la misère, et se fout bien de notre santé comme de nos conditions de vie. Seule une révolution sociale permettra d’en finir avec l’exploitation généralisée tant de la Planète que des Humains. Mais d’ici là exigeons :
Le retrait immédiat de cette fumisterie de plan Notat-Ségur ;
Respect par Macron de sa parole « la santé avant l’économie, quel qu’en soit le coût » et salaire unique pour tous les soignants, sur la base du traitement des directeurs d’ARS (après tout, nous n’avons pas été moins déméritant qu’eux pendant la crise COVID) ;
Création massive de lits supplémentaires ;
Embauches massives d’au moins 300 000 personnels en secteur hospitalier et EHPAD.
Pour défendre nos intérêts, n’attendons rien des syndicats officiels. Organisons nous nous-mêmes, refus de la représentation, pour l’action directe créons nos assemblées de lutte, pour libérer la parole et les initiatives et faire aboutir nos revendications.
Pour un véritable militantisme sans décharges syndicales, contre les permanents à vie !
Pour un système de santé universel, socialisé, solidaire.
Vive la sociale !
Des travailleurs du secteur santé de la CNT-AIT (Anarchosyndicaliste)
Cochin-Broca –Hôtel-Dieu, juillet-août 2020
Si vous souhaitez prolonger la discussion avec nous, vous pouvez nous contacter par mail : cntaitcochin(chez)gmail.com
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