Coupable des forêts arrachées qui libèrent les virus, coupable d’un pays aux hôpitaux décharnés où l’on meurt faute de soin, coupable des marchés fous où le prix des produits de première nécessité s’envole, coupable de couvrir toujours plus une police zélée d’abrutissement qui abat sa répression, coupable de la crise économique qui vient et qui tuera d’une autre manière. Pour nos morts, pour les soignants épuisés, pour l’avenir : nous n’oublierons rien et nous lutterons jusqu’au bout. C’est un devoir, une nécessité.

  • Et, identifions qu’il y a des kairos. Des moments clefs où l’action peut faire basculer l’avenir. Le déconfinement en sera certainement un. Comment réagir à des mois d’enfermement ignoble, à d’incroyables erreurs d’appréciations, au mépris d’une caste politique népotique ? Si ce n’est par la colère, par le rejet, l’expulsion, le soulèvement général ? Allons les chercher, ils sont affaiblis.

La question se pose désormais, il est un devoir pour nous d’y répondre : comment gagner ? Il faut d’abord définir ce contre quoi nous voulons gagner. Il s’agit d’un système que nous combattons. Un système politique qui permet à une élite économique de s’enrichir. Deux castes se soutiennent : l’une propulse l’autre au pouvoir via sa richesse, l’autre protège l’une et l’aide à prospérer via son pouvoir. Pendant ce temps, le reste s’appauvrit. L’art du pouvoir sous le capitalisme est donc celui de justifier le vol de la majorité pendant que la minorité s’enrichit. Les menteurs y excellent. Ils s’appuient pour piller sur un vaste appareil bien huilé d’institutions, de médias oligarchique et de lois. Mais quand les corps sont enfermés, que des vies sont arrachées, la machine s’enraye par le sang et l’ignominie apparaît.

–       Comment gagner ?

  • Victor Hugo avait décrit dans Les Misérables [1] des révolutionnaires de son temps. Pour Hugo, un révolutionnaire est un sauveur qui semble être un barbare. Un révolutionnaire est « terrible », sans pitié, il a « la massue au poing ». Pourquoi tant de rage ? Parce qu’il réclame le « Progrès ». Parce qu’il veut « forcer le genre humain au paradis et cela fusse par l’épouvante ». Soyons révolutionnaires, soyons terribles contre ceux qui ne nous ont rien épargné. Imposons une « édénisation » du monde. Revendiquons une société où l’on ne crève pas seul en silence dans un Ehpad pour les finances des actionnaires de Korian.

Voilà pour l’état d’esprit, quant aux actes. Il faudra être uni, de l’union toujours, pas deux manifestations à Paris, une et une seule, car nous luttons pour la même cause. Les lieux de pouvoirs doivent être nos cibles, car nous sommes les leurs. Il faudra les chercher. Peut-être même prendre un campement à leurs abords, beaucoup de révolutions ont débuté par l’occupation d’une place à proximité d’un lieu de pouvoir. Pourquoi ne pas installer une base place de l’Étoile ? Rajoutons qu’il est évident que les soignants qui ont tant souffert et sont les exemples parlants des dégâts du néolibéralisme doivent être nos symboles, notre avant-garde.

  • Prenons garde, conservons notre rage elle est notre bien le plus précieux… Ne nous laissons pas séduire par les compromissions, les demi-mesures, car nous luttons contre un spectre protéiforme qui sait faire le dos rond quand il est menacé pour mieux serrer ses griffes sur ceux qui lui ont laissé la vie sauve une fois la menace éteinte. Aussi, nos cortèges seront hétéronomes. Prenons note que lutter c’est aussi se changer soi, s’ouvrir aux luttes de ceux avec qui nous marcherons, débattre et avancer. Apprendre de chacun pour construire ensemble l’Après.

Préparez-vous, les éditorialistes des journaux dominants nous saliront, leurs plumes prêtes à baver des sophismes. À séparer, à diviser. Il faudra leur résister, nous montrer terribles, les faire trembler par la rhétorique et l’insurrection jusqu’à leur chute. Car « fusse par l’épouvante nous porterons le genre humain au Paradis ».

Notes

[1]    Les Misérables,  partie IV,  Livre I,  chapitre 5.     En ligne