Chiffre exceptionnel au beau milieu de l’été et surtout dans le cadre d’une manifestation contre les violences policières, au moins 3 à 4000 personnes se sont élancées de la croisée des trams, direction la Préfecture.

Sachant que toutes les caméras seraient tournées vers elle, la Préfecture a adapté sa stratégie : des forces de l’ordre au contact dès le début, mais uniquement des Gendarmes Mobiles. L’objectif est clair : provoquer le cortège, mais ne pas l’agresser, pour montrer que les forces de l’ordre sont les gentils. Et en début de manifestation, sur le cours des 50 Otages, ça marche. Aucune réponse de la part des gendarmes, malgré les insultes et les jets de peinture pour exprimer la colère du cortège. Rappelons qu’après le meurtre de Malik Oussekine par la police en 1986, aucun policier ni aucun gendarme n’encadraient les manifestations qui ont suivi, par respect et pour ne pas faire monter la tension. La section des voltigeurs, responsable du meurtre, a été supprimée immédiatement et un ministre a démissionné. Autre époque, autres méthodes.

Une fois le cortège arrivé à la Préfecture, le ton change.
Des manifestant·e·s tentent d’accrocher des banderoles sur les remparts, la réponse est immédiate : lance à eau directement dans les têtes, et gazage massif de tout le cortège. Celui-ci ne se désolidarise pourtant pas de sa tête et reste compact, continuant sa route sur le trajet habituel, le seul n’ayant pas été interdit par arrêté préfectoral.
Les forces de l’ordre, qui ne devaient pas s’attendre à une telle solidarité, changent alors de stratégie : les manifestant·e·s seront harcelé·e·s et agressé·e·s tout le reste de l’après-midi, principalement par la BAC et la CDI. L’hélicoptère de la Gendarmerie vole bas, et le camion anti-émeute flambant neuf avec canon à eau des CRS est omniprésent. La répression, ça coûte cher.

Au-delà des malaises et crises de panique à cause des gaz et des charges, on note de nombreux·ses blessé·e·s, principalement entre Bouffay et le carré Feydeau, et du côté de la FNAC. Des tirs de LBD dans la tête – notamment un homme touché à la tempe, à quelques centimètres de l’œil, fortement désorienté mais qui n’a pas voulu aller à l’hôpital -, des blessures au torse, au dos et aux membres inférieurs par des éclats de grenades lacrymogènes et désencerclantes, mais aussi des coups de matraque télescopique, de pieds et de poings, notamment au visage. Un homme est également brûlé au pied en marchant sur un palet de grenade lacrymogène.

A Bouffay, vers 17h, une scène ahurissante. Alors que les forces de l’ordre gazent aussi bien les terrasses des cafés de la place Bouffay sans raison, entraînant une intervention de notre part, que les secours qui s’occupaient d’un homme en arrêt cardiaque (*), brûlant même une partie de la couverture qu’il avait sur lui, la BAC interpelle violemment un autre homme en l’étranglant au sol, donnant lieu à la fameuse photo de bsaz. L’homme, menotté et le regard dans le vide, la bouche grande ouverte, a ensuite été pris de convulsion, puis a été pris en charge par les pompiers, inconscient (**). Un agent de la BAC en a évidemment profité pour lui fouiller les poches en plein brancardage.
Au total, une quarante de personnes auront été interpellées, dont la plupart préventivement, avant le début de la manifestation.

La police nantaise s’est ainsi illustrée en entrant parfaitement dans le thème de cette manifestation contre les violences policières.

N’hésitez pas à nous envoyer vos témoignages en commentaire ou en messages privés.
* D’après un.e medic qui nous a contacté.e.s en mp et qui l’a massé, l’homme a fait trois arrêts cardiaques avant d’être pris en charge par les pompiers. Il va mieux et se repose. Si vous avez été témoin direct de la scène, de plus amples informations sont les bienvenues.
** Après avoir passé 6h à l’hôpital puis la nuit en garde à vue, il va mieux mais est poursuivi pour violences.

Nous avons décidé de ne plus partager de photos des blessures, pour éviter de tomber dans le sensationnalisme, et que nos compte-rendus soient visibles par tou·te·s. Néanmoins, par soucis d’information et de prévention, nous sommes en train de créer une base de données évolutive des armes des force de l’ordre et des différentes blessures que celles-ci peuvent engendrer. Nous n’hésiterons pas à partager ce dossier lors de chaque compte-rendu futur.

Nous avons également noté en début de manifestation différentes insultes à l’endroit des forces de l’ordre, les traitant ainsi « d’enc*lés » et de « p*tes à Macron ».
Il est important de préciser que ni le travail du sexe, ni la sodomie ne sont des pratiques honteuses, et que celles-ci n’ont rien à voir avec les actes criminels des forces de l’ordre. Ce genre d’insulte est inacceptable.