Bryan Guitton a de qui tenir, puisqu’il est le fils de Pascal Guitton, membre des Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires (JNR) version 2010 du bonehead (skinhead d’extrême droite) Serge Ayoub.

Le fiston s’est fait connaître sur le département de la Vendée il y a une petite dizaine d’années en passant par tout ce que l’extrême droite radicale peut compter de formations, ou presque.

  • Une folle jeunesse

Il est encore mineur mais déjà bonehead quand il traîne avec le Front Nationale de la Jeunesse (FNJ) de Vendée. À l’époque, c’est François-Xavier Gicquel qui chapeaute les jeunes frontistes.

Il y fréquente des Nantais du Renouveau Français (RF) que connaît Gicquel, et il colle des autocollants pour eux. Il fait d’ailleurs partie de la douzaine de fachos (dont des militants du RF et Tristan Arnaud) venus provoquer à La Roche-sur-Yon un jour de manifestation contre la réforme des retraites en 2011 (ils ont ensuite été escortés par la police jusqu’à leurs voitures, sous la pression d’une foule hostile à leur présence).

En février 2012, il lance tout seul les Nationalistes Autonomes Vendée. En effet, au début des années 2010, des militants d’extrême droite radicale  français (des Lorrains, par exemple) reprennent un concept apparu quelques années plus tôt en Allemagne, les “Nationalistes autonomes”, qui reprennent les codes vestimentaires et les visuels des antifascistes autonomes, allant même jusqu’à reprendre le fameux logo aux deux drapeaux… Sans succès, surtout en France, où le phénomène fait long feu.

Quoiqu’il en soit, Guitton lance un appel à manifester à La Roche-sur-Yon. Échec total : personne ne répond à son appel… En revanche, une cinquantaine d’antifascistes l’attendent de pied ferme dans les rues ce jour-là : il finit par pointer le bout de son nez, fait un petit salut nazi et puis s’en va se cacher sous une voiture !

En 2012 encore, suivant la voie paternelle, il adhère à Troisième Voie, le mouvement de Serge Ayoub, et au Mouvement Action Social (MAS), un groupuscule nationaliste révolutionnaire, pour échouer finalement à Génération Identitaire.

Une micro-section du mouvement identitaire se crée en Vendée, mais sans aucune activité, mis à part une page Facebook et quelques collages d’affiches et d’autocollants. On voit aussi Guitton lors des manifestations homophobes de la Manif Pour Tous en 2013, devant la préfecture vendéenne.

En Juin 2014 à La Roche-sur-Yon, un an après la mort de Clément Méric sous les coups de militants nationalistes, une manifestation en son hommage est perturbée par la venue de Guitton et de deux suiveurs, qui rapidement se planquent derrière le dispositif policier…

Début 2015, il découvre que les réseaux sociaux peuvent servir à recruter de jeunes de la région. C’est ainsi qu’il fait la connaissance de Benoît Samelin, un bonehead de bonne famille de l’île d’Yeu, qu’il rencontre le mardi 17 février à Challans.

Ce soir-là, après avoir bu comme des trous, ils partent gribouiller 18 croix gammées, 43 croix celtiques, des « Ici, c’est la France» (sic), des « France Aux Français » (FAF), sur des maisons et du mobilier urbain.

Une enquête les identifie rapidement, et révèle leurs échanges de SMS racistes qui montre la préméditation de leurs actes. Au tribunal des Sables d’Olonne, aucun soutien en présence, ni défense valable. Le procureur menace Bryan Guitton de suspendre son allocation adulte handicapé (pour troubles mentaux), suite à plusieurs antécédents de violences. Le procureur a, entre autres, qualifié les deux accusés  de « gens dangereux qui peuvent récidiver, animés par l’idéologie qu’ils ont en eux». Le juge prononce une peine de 18 mois de prison, dont 12 avec sursis, assortis d’une mise à l’épreuve de 3 ans, avec mandat de dépôt à Fontenay-le-Comte le jour même. Sur six mois, ils n’en font véritablement qu’un et demi, à l’isolement.

  •  De Génération identitaire aux royalistes

Suite à cette affaire, Génération Identitaire a tenté de nier tout lien avec Bryan Guitton. Mais la photo de sa carte de membre prouve le contraire :

L’appartenance de Bryan Guitton au mouvement Génération Identitaire a d’ailleurs été précisé au tribunal. Il a assumé et a même déclaré : «Je suis Charlie Martel», un slogan de GI. Il a aussi confirmé avoir collé, le même soir des tags racistes, des autocollants de ce mouvement. Des affiches et autocollants de Génération Identitaire (et de la Manif Pour Tous) ont d’ailleurs été retrouvés à son domicile lors d’une perquisition. Il part du tribunal entre deux gendarmes en criant un piteux « Marine Le Pen 2017 ! ».

Ce court séjour en prison lui fait perdre quelques kilos, et un peu de sa motivation. Fin 2016, des tags racistes et royalistes (croix celtique, “maréchal nous voilà”, “France aux français”, “Islam dehors”, “Vive le Roy”, “SS”, “soutien à casapound”, il y en a pour tous les goûts !) font leur apparition sur les murs de La Roche-sur-Yon[1]. Si on peut y retrouver le « style » de Guitton, rien ne prouve qu’il en soit responsable. Cependant, à la même époque, il a tenté de se rapprocher de la très éphémère Action Française Étudiante La Roche-sur-Yon, qui ne donne pas suite, les jeunes royalistes, et plus particulièrement leur « chef » Bertrand Scherrer, étudiant à l’ICES (une école à la réputation sulfureuse), considérant Bryan Guitton et ses potes comme des débiles.

Guitton se console en animant la page Facebook (fermée depuis) d’une “Action Nationaliste Vendée”, proposant photos de poseurs et de tags « Jeunesse Yonnaise Anti Racaille » (sic), de collages d’autocollants nationalistes, des commentaires appelant à soutenir la police et Marine Le Pen, le tout truffé d’innombrables fautes de français…

  • Bryan An Naoned

À Nantes, Guitton fréquente de temps en temps la « tribune Loire » au stade de la Beaujoire, où il y retrouve des nationalistes français et bretons supportant le FC Nantes. Le sport est sûrement le seul domaine où Bryan n’est pas sectaire, puisqu’il supporte aussi bien le PSG, l’OL que le FC Nantes.

Pas à une contradiction près quant à son engagement de nationaliste français, il se retrouve à tenir la banderole du groupuscule indépendantiste d’extrême droite breton Yaouankiz Breizh lors d’une manifestation pour la réunification de la Bretagne en septembre 2016.

Il fait aussi parti des provocateurs homophobes à la Gay Pride de 2016, encore avec le Renouveau Français :

C’est également du côté de Nantes qu’il est vu avec le groupe Defend Naoned, qui attaquait les manifestants pendant le mouvement contre la loi Travail en 2016. Pendant ce même mouvement de lutte, il est venu provoquer plusieurs fois (mais jamais loin de la police) le cortège anticapitaliste à La Roche-sur-Yon.

Plus très à l’aise dans la rue, il se rattrape sur Facebook où il se lâche complétement, prétendant attendre des migrants “pour les égorger” ou félicitant d’un « Sieg Heil ! » un pote à lui posant fièrement devant un drapeau du IIIe Reich[2], un fusil en main…

  •  L ‘extrême droite, bras armé du capitalisme

L’exemple récent du mouvement des Gilets Jaunes prouve une fois encore l’incapacité de l’extrême droite à intégrer un mouvement social. Elle avait pourtant trouvé une porte d’entrée dans les premières revendications fourre-tout : mais au fil du temps, l’extrême droite s’est retrouvée face à un mouvement portant de vraies attentes de justice sociale, défendues habituellement par des syndicats, des organisations ou partis de gauche, ce qui a le don de l’irriter. Cela devient impossible aux militants d’extrême droite de se mélanger, et ils préfèrent donc venir diviser en agressant physiquement des manifestants ciblés comme progressistes, et plus particulièrement les antifascistes qui leur mènent la vie dure depuis toujours.

C’est dans ce contexte qu’au début de l’année 2019, Bryan Guitton, à la tête d’un groupe, la Breizh Firm, composé d’une grosse quinzaine de fachos de la région (la plupart identifiés étant de la petite bourgeoisie nantaise cherchant le frisson), venus casqués, cagoulés et probablement armés pour « casser du gauchistes ». Au final, ils ont juste réussi à faire peur aux peu de personnes présentes ce soir-là dans les rues yonnaises, la police les laissant parader sans encombre.

Plus récemment, début mai, Bryan Guitton, Dylan Maurice et un autre individu se sont vantés du vol d’un drapeau du Parti Communiste Français sur la page Facebook Ouest Casual (qui sert aux fachos à se flatter entre eux). OR ce drapeau, ils l’ont arraché des mains d’une militante communiste de 64 ans, lors d’un défilé syndical à La Roche-sur-Yon : un “fait d’arme” pourtant suffisamment glorieux à leurs yeux pour qu’ils se sentent obligés de le revendiquer sur le Net…

À Nantes et Angers en 2017 déjà, des groupes d’extrême droite radicale s’étaient rendus responsables de graves faits de violence. Et demain, des morts ? Ce qui s’est une fois de plus produit à Nantes il y a deux jours montre que l’extrême droite se sent pousser des ailes, avec la banalisation de ses idées dans les médias, la classe politique et sur les réseaux sociaux. La montée de cette violence laisse à craindre à l’avenir d’autres agressions lâches envers de migrant.e.s, des immigré.e.s, des LGBT+, des minorités religieuses, des féministes, des antifascistes, des militant.e.s d’organisations solidaires-sociales et progressistes, que cela soit à La Roche sur Yon ou ailleurs.

– La méfiance est de mise, et l’organisation de l’auto-défense populaire aussi  !

West Side Story, en collaboration avec La Horde

http://lahorde.samizdat.net/2019/07/08/nantes-parcours-de-bryan-guitton-neonazi-implique-dans-lattaque-du-hopopop-cafe/