Toutes voiles dehors !

Les combattantes de la liberté

En se « dévoilant », les Iraniennes ne revendiquent pas seulement le droit de circuler dans les rues et de paraître en public sans ce morceau de tissu. Mais elles exigent aussi la séparation de l’État et de la religion. Ce en quoi leur mouvement est révolutionnaire. Et encore, le droit d’être considérées comme l’égale de l’homme. En ôtant ce morceau de tissu de leur tête qui les mutile, c’est bel et bien d’un mouvement puissant et politique qu’il s’agit.

Malgré les risques qu’elles prennent, elles sont de plus en plus nombreuses à descendre dans la rue pour manifester contre la dictature et contre les inégalités.

En Iran, le témoignage d’une femme vaut pour moitié celui d’un homme, l’âge minimum du mariage est fixé à 13 ans pour les femmes, le marché du travail ne compte que 17% de femmes, la sortie du pays pour une femme ne peut se faire qu’avec la compagnie de son mari.

Ce mouvement d’émancipation s’est révélé au grand jour le mercredi 27 décembre 2017, lorsque Vida Movahed, perchée sur une armoire électrique, a ôté son hijab pour le brandir au bout d’un bâton. Le lieu choisi pour faire ce geste de protestation n’était pas innocent puisque c’est à un angle de la rue Enghelab (qui veut dire révolution en persan). Ce geste a été perçu comme un défi au régime. Ce qui a valu à Vida un mois de prison. Dès le lendemain de son emprisonnement, s’est développé un mouvement de solidarité. C’est ainsi que 30 femmes ont suivi son exemple et ont « perturbé l’ordre public » [sic], à Téhéran. Elles ont été arrêtées et emprisonnées.

Le 29 janvier 2018, c’est Narges Hosseini qui est également montée sur une armoire électrique. Elle y est restée plusieurs minutes, tendant son foulard au bout d’une perche, avant d’être délogée manu militari. Les juges ont bien l’intention de la maintenir en prison, car ils ont exigé pour sa libération le versement d’une caution de 5 milliards de rials (90000 €), en sachant que sa famille n’a pas les moyens de payer cette somme. Le même jour, trois autres femmes ont mené une action similaire, dans plusieurs villes d’Iran.

Non, ces femmes ne sont pas des pestiférées, elles ne portent pas atteinte à l’ordre public en allant le visage découvert. Malgré les risques, elles seront plusieurs dizaines de milliers à descendre dans la rue pour manifester aux côtés des différentes catégories sociales, les plus conscientes pour protester contre le chômage, contre la misère et contre les atteintes aux libertés les plus élémentaires. Mais surtout contre la dictature qui est en train de s’installer. Le pouvoir est sur le qui-vive, car ce mouvement remet en cause le système politique religieux castrateur et patriarcal.

Il convient donc de soutenir la lutte des femmes iraniennes et de dénoncer les violences qu’elles subissent quotidiennement par les sectateurs d’un système politique despotique.

Tous les voiles doivent impérativement être affalés afin que les femmes soient libres de leur corps. Par leur lutte, elles démontrent que la libération du peuple passe par la libération des femmes. Souhaitons que cette libération et cette émancipation des femmes iraniennes marquent le début d’un changement profond pour que le peuple iranien se débarrasse des mollahs afin de bâtir une société au sein de laquelle les inégalités, la soumission, l’exploitation, et le patriarcat seront à jamais bannis.

JUSTHOM

Casse-rôles, n° 4 • p. 3 • Mai 2018

 

Casse-rôles [journal féministe libertaire]

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