Côte d’ivoire : le sanglot de l’homme blanc doit être mouché
Catégorie : Global
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Qui a dit qu’on n’apprend rien sur les médias bourgeois ? Pas moi. Pas plus tard qu’hier, vers 13 h, je suis resté à écouter le journal de Monsieur Abitboul sur France Inter, et j’ai appris 3 trucs d’un coup ! en moins d’un quart d’heure !
J’en serais tombé de ma chaise si j’avais été assis. Heureusement, j’étais debout. Je me suis donc juste écroulé.
Le thème principal était la Côte d’Ivoire. Le fil du quotidien rompu était, ce dimanche 7 novembre 2004 les « 9-morts-français- oh-mon-dieu-c’est-horriiiiible ». Les 3 trucs ? Je les donne dans l’ordre.
Le premier concerne la naïveté politique de l’occupant : c’est dingue comme un expatrié français peut être naïf sur le plan de la politique ! Ca donnerait presqu’envie de courir nu dans les champs, les mollets piqués par les chardons, et d’aller boire un peu de l’ami Ricoré. La France, notamment par la Cellule Africaine de l’Elysée dirigée jusqu’à sa mort par Jacques Foccart, a fait main basse sur la Côte d’Ivoire, qui recèle de moult denrées fort lucratives, notamment le cacao et le café. En installant Félix Houphouët-boigny au pouvoir, ce qui ne s’appelait pas encore la Coopération Française s’octroyait la splendide vache à lait ivoirienne. Il fallut bien sûr moyenner quelques concessions – une nouvelle capitale, Yamoussoukro le village de naissance du petit Félix, (à demi construite par Bouygues, tiens tiens) une basilique Notre-Dame copie exacte du St Pierre de Rome, un service portuaire presqu’entièrement dévolu à l’ami des africains Vincent Bolloré et un budget commun président-pays, ce qui est pratique pour le président, moins pour le pays.
Et pendant ce temps, chacun Houphouët son chat.
Puis le vieux crocodile meurt en 1993 (après 5 réelections) et part se faire tisonner dans l’enfer des dictateurs. Passe Konan Bédié, héritier naturel de Félix, de ses alliés (chiraquiens pour la plupart) et de ses méthodes (plus de 96% de vote en 1995). Mais noël 1999 arrive et un coup d’état militaire déboulonne le président.
Vient alors un temps de géopolitique françafricaine : qui la France doit-elle soutenir aux prochaines élections pour s’assurer les dividendes ivoiriens ? Gueï le putschiste n’est pas très présentable, et n’a pas la finesse de demander aux coloniaux français une propagande de pub. Au Togo, Eyadema l’a pourtant bien fait : J-P Dorent, S. Bigata et le délicat Stéphane Fouks et d’autres nervis de l’agence française de comm Euro RSCG Corporate (et même d’anciens de France 2 comme Jean-Luc Mano) sont bien venus, fin mai 1998, mettre la touche finale à une campagne de séduction visant à rendre un peu moins despotique la réélection du président à vie. Relayée par Reporters Sans Frontières, (qui n’ont pas des peaux de saucisson mais des boudins entiers devant les yeux), la propagande fonctionne à merveille et dès lors Eyadema peut chaque Noël venir déjeuner chez les Chirac sans aucun ressentiment, entre deux tabassages d’opposants et au frais du contribuable. Gueï, donc, il est un peu trop lippu, un peu trop costaud, un peu trop en treillis. Gbagbo, opposant naturel, est un peu plus charmant, et la France coloniale de gauche le soutient. Passons sur la notion d’ « ivoirité » créée de toute pièce pour virer le principal opposant Ouattara (pourtant soutenu par Sarko à l’époque, et par Bouygues), voici la France gouvernementale bien embêtée : elle doit choisir son (chocolat) poulain. Allassane Ouattara est-il un peu trop musulman ? De fait, les élections se font sans lui et la France appuie (= finance et équipe) Gbagbo. Mais faisons vite : en finançant des champions économiques, les pouvoirs français créent la dissonance dans des pays qui sont surtout des groupements d’ethnies enserrés dans des frontières dessinées en buvant du Yabon banania et en chicotant le porteur. Et comme depuis 50 ans nos sous partent pour payer des gardes rapprochées de ces champions (d’anciens gendarmes du GIGN comme Barril, des mercenaires purs comme Denard etc…) et non pour faire avancer le système éducatif, nombre d’Africains n’ont pas les moyens de savoir exactement ce qui se passe. Bilan, il suffit d’appuyer sur le bon levier et avec un peu de chance, on peut se payer un petit Rwanda par exemple.
Tout ça pour dire quoi ? Qu’en Côte d’Ivoire, il y a des expatriés qui gagnent des dizaines de milliers de francs par mois non imposables et les mettent à l’ombre de leurs résidences murées avec piscine, il y a des industriels du bois et des cultures (non non, je vous rassure, ce n’est pas souvent eux qui bêchent ou sarclent) ; il y a les professionnels de l’humanitaire, qui font du sanglot de l’homme blanc un marché lucratif, mais dont le bilan est, j’en témoigne, plutôt consternant. C’est ceux -là qui viennent larmoyer au micro d’Abitboul pour pleurer sur le fait que des Noirs (mon dieu, des noirs ! ) attaquent leurs villas. C’est ceux-là qui, plutôt que de partir et d’abandonner leurs rôles de sangsues de l’Afrique, avouent prendre leurs fusils et tirer sur ceux qui souhaitent piller des biens qui, au fiond, sont un petit peu ivoiriens, quand même. C’est là où je veux en venir. Même le président de l’Assemblée Ivoirienne a déclaré « la Côte d’Ivoire n’est pas un territoire d’Outre Mer de Jacques Chirac ». Alors qui, un petit peu renseigné, peut s’étonner de la tournure des événements ? Qui peut encore décemment se poser la question du pourquoi ? Les expatriés sont donc des candides politiques.
Bon j’ai été long, mais je leur dois bien ça, avec tout le chocolat que je bouffe et le café que je sirote. Me restent deux trucs, promis je fais vite.
Le deuxième concerne l’opération Licorne. On le savait un peu, mais on découvre avec un peu de sang que 4000 militaires même pas casques bleus sont depuis plus de 2 ans sur place. Pourquoi faire, dîtes-moi ? Ca ne vous rappelle rien ? Moi, ça me fait penser à l’opération militaire française « Turquoise » au Rwanda. Ca me fait penser aux casques Bleus de l’ex-Yougoslavie aussi. Ca me fait surtout penser à la présence tant critiquée des états-uniens en Afghanistan et en Irak. Nous avons des dirigeants qui font exactement dans le même registre que G.W.Bush, mais en plus caché.
Le troisième truc : la Corrèze avant le Zambèze, brailla R. Cartier. OK. Je ne vous apprendrai donc rien en vous disant qu’au niveau de la ville de Grenoble, une coopération décentralisée existe avec Ouagadougou. Marrant, ce mot : « coopération ». En général, il drape dans du velours le mot « colonialisme », un peu trop cru. Marrant, la colonisation décentralisée avec Ouagadougou, est tissée par le maire qui n’est autre que Simon Compaoré, baron du président Burkinabé, Blaise, celui qui a fait tuer Sankara en 87 sur les ordres de la Cellule Africaine, donc de l’Elysée, donc de Mitterrand, ,non pas Jean-Christophe le marchand d’armes, son oncle, un socialiste ouf je respire. Il y a une photo de Destot et Compaoré sur http://www.ville-grenoble.fr/grenoble/pdf/ndg/vu77.pdf je ne mens pas. Marrant, Blaise est le frère de François, qui lui, est accusé depuis 6 ans d’avoir fait taire quelques journalistes fin 1998, dont le fameux Norbert Zongo, en les carbonisant un petit peu dans leur voiture. Rien que du banal : François aurait un petit peu fait mourir son chauffeur des suites de tortures, Norbert Zongo enquêtait, et comme il ne fallait pas qu’il soit cru…eh bé ils l’ont cuit ! Destot, notre maire, n’en parle guère à ses administré-es : nous.
Alors tant que les grenoblois-es ne sont pas lassé-es de payer des impôts qui partent dans des mains pleines de sang au Burkina, tant que Michel Destot ne mourra pas de honte dans son socialisme mittérandien néo-colonial, alors je ne pourrai pas m’étonner de ne pas entendre France Inter soulever une seule fois la question du statut de la France et de sa triste armée, en Côte D’Ivoire.
Dehors, les blancs. La chienlit, en Afrique, c’est nous qui la plantons.
Richbool, Grenoble, France
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