FBI vs Indymedia: Du traitement médiatique de la violence

L’affaire, qui a opposé les autorités (FBI, états suisses italiens et d’autres?) au réseau de média indépendant Indymedia, est traversé par une question: comment traite-on de la violence dans les médias?

La collaboration internationale de la police était possible grace aux accords concernant le “terrorisme internationale”. Cette expression permet de diaboliser et du même coup de ne pas avoir à débattre. Il en va de même avec la question de la violence…

Les médias commerciaux se réclament tous ou presque d’une posture “neutre” ou “objective”. Mais ce postulat invisibilise le coté conservateur de ces mêmes média, leurs questionnements restent en effet dans le cadre formaté du système. Leur postulat est “l’état est légitime puisque démocratique” (grace au petit papier qu’on met dans une boite tous les 36 du mois).
Un des exemples les plus significatifs de cette pensée unique est le journal “libération”. A ses débuts ce journal se voulait rebelle, porteur d’une autre” manière de faire un media: informations engagées, remise en question du “système”, interactivité, fonctionnement autogéré ou presque. Aujourd’hui ce quotidien a rejoint le troupeau et participe activement au consensus médiatique.

Dans le “mouvement altermondialiste/anti-mondialisation” la séparation violent/non-violent est également mise en avant. Une partie du mouvement -les “citoyen-ne-s” considèrent qu’il faut négocier avec les autorités, allant jusqu’à dénoncer les “casseurs” (comme l’a fait ATTAC à Genes lors du G8 ou à Strasbourg lors du camp No Border). En collaborant ainsi, illes renforcent la légitimité pseudo-démocratique de l’état et par la même la légitimité de sa violence.
Une autre partie du mouvement refuse cette stigmatisation et la diabolisation créée derrière les mythes des casseurs/violents/black blocs. Pour celleux-ci l’offensive porter au système peut être exprimée de plusieurs manières c’est la “diversité des stratégies”. Face à la repression la solidarité n’est pas qu’un slogan**.

Max Weber définissait ainsi l’état: c’est le seul détenteur de la violence légitime; et les médias ont accepté cette définition. La violence physique tout comme la violence symbolique de l’état/du système n’est jamais ou presque remis en question dans les médias commerciaux/subventionnés…

Mais qu’est-ce que la violence?

– arracher un champ d’OGM, c’est violent ou pas?
– avoir le “choix” entre le pen et chirac, c’est violent ou pas?
– occuper un local ASSEDIC, c’est violent ou pas?
– chanter “…ou alors ça va péter, ça va PETER” ,comme le font ces mêmes citoyen-ne-s, c’est violent ou pas?
– se sentir complétement impuissant en manif’, c’est violent ou pas?
– travailler à l’usine pendant 20 ans et se faire virer, c’est violent ou pas?
– travailler à l’usine, c’est violent ou pas?
– travailler, c’est violent ou pas?
– dormir dans la rue, c’est violent ou pas?
– se faire expulser de chez soi, c’est violent ou pas?
– regarder le journal télévisé, c’est violent ou pas?
– l’opulence inaccesible des vitrines de magasins, c’est violent ou pas?

Et dans le cas de l'”affaire” qui nous intéresse plus particulièrement:

– décider entre puissants (c’est ça le G8 non?) de l’avenir du monde, c’est violent ou pas?
– s’attaquer aux vitrines de banques pour dénoncer en actes leurs pratiques meurtières, c’est violent ou pas?
– envoyer plus de 200 personnes en prison comme l’on fait ces deux policiers, c’est violent?
– utiliser le web comme outil public de délation et de fichage comme l’a fait la police genevoise, c’est violent ou pas?
– retourner cette pratique contre leurs principaux instigateurs à savoir ces deux policiers (en postant sur le web leur photos), c’est violent ou pas?
– saisir illégalement (mais comme on le voit dans cette affaire, la loi n’est pas un obstacle quand on est au pouvoir) un des serveurs du principal réseau de médias indépendant et priver ainsi des milliers de personnes de moyens d’expression/information, c’est violent ou pas?

Est-ce que c’est la violence de l’état qui est légitime?* Ou est-ce que là c’est la légitimité de l’état qui repose sur la violence?

La question est peut-etre là. Indymedia est attaqué car c’est un des rares média où il est encore possible de se poser ce type de questions, de remettre en question la légitimité de l’état, se poser collectivement la question de la violence du système…

Les médias suisses, par exemple ont formellement dénoncer l’article qui était sur le site d’Indymedia Nantes. Au contraire aucun d’eux n’a dénoncé les pratiques similaires de la police.
Les personnes incarcérées depuis des mois à cause de ces policiers doivent la sentir en permanence la violence du système, en tout cas bien plus que ces deux pauvres policiers…

Qui pour contester la légitmité de ces enfermements? Qui pour dire que nous ne voulons ni du G8, ni de sa police, ni de ses prisons?

Comme on l’a vu ce n’est pas à travers les média commerciaux que nous pourront porter ces questions.

A nous de construire nos propres médias; de diffuser nos reflexions, nos pratiques et notre rage.

Avec cette histoire l’étau se reserre. Refuser les regles du jeu médiatique devient du terrorisme. Exprimer un point de vue divergent devient une violence faite aux puissants.

Alors oui, nous sommes tou-te-s des terroristes!

orwell:”Ce n’est pas entre violence et non-violence que passe la grande différence, mais entre avoir ou ne pas avoir le goût du pouvoir.”

*voir http://infos.samizdat.net/blog/page.php?p=1431
** http://infokiosques.net/anticapitalisme