Disparition d’un antisioniste conséquent
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Catégorie : Global
Thèmes : AntifascismeRacismeRépressionResistances
Né en Algérie pendant la colonisation française, il a vécu de plain pied les méandres du paradigme colonial qu’il su, si bien, transférer au projet colonial sioniste en Palestine.
Élevé dans une famille juive traditionnelle, il s’est ensuite dit athée. Cela ne l’a pas empêché d’étudier très profondément les textes non seulement de la religion juive qu’il était capable de citer longuement, mais également les textes des autres religions. Il se définissait comme juif et estimait que le peuple juif existe dans la mesure où certains s’y rattachent tout à fait subjectivement. Il a constamment défendu une position de juif antisioniste.
Particulièrement érudit sur l’histoire du sionisme, il était coauteur avec Nabil El Haggar d’un ouvrage sur le sionisme, non encore publié, intitulé « Palestine-Israël », dans lequel il développe une critique de fond du sionisme.
C’était un infatigable débatteur et pédagogue, en politique comme dans sa vie professionnelle, puisqu’il était professeur de mathématiques à l’université de LiIle.
Il a écrit un nombre impressionnant de textes mettant en regard l’islamophobie et l’antisémitisme et dénonçant le philosémitisme d’État en France.
Depuis la création de l’IJAN il a soutenu et participé aux débats et y a apporté ses contributions….
Rudolf était, principalement à Lille, de tous les combats pour la Justice, l’égalité et la liberté. Outre les sujets déjà cités, il s’est dévoué pour les Sans Papiers, les droits des immigrés ?et il s’est mobilisé aux côtés des collectifs racialisés, discriminés et, bien sûr, dans les différentes campagnes BDS.
Il va beaucoup nous manquer. Ses textes et ses paroles nous accompagnent.
http://www.ujfp.org/spip.php?article5278
http://www.ujfp.org/spip.php?article5281
http://www.ujfp.org/spip.php?article5280
http://www.palestine-solidarite.org/actualite.ziad_medoukh.121216.htm
http://www.neoprofs.org/t107481-deces-de-rudolf-bkouche
https://www.ensemble-fdg.org/content/combattre-le-philosemitisme-impasse-de-lantiracisme
Commentaire de Rudolf Bkouche
Première impression à la lecture de ce texte. L’auteur n’a pas compris que le philosémitisme, qu’il soit d’Etat ou pas, est une forme d’antisémitisme. La mise à l’écart d’un peuple, que ce soit en positif ou en négatif, est une forme de racisme.
Ce que dénonce Houria Bouteldja, c’est le philosémitisme d’Etat, c’est-à-dire une forme de discrimination raciale. Même si ne partage pas tout ce qu’elle dit, sur ce point elle pose une question importante qu’on ne peut mettre de côté sous prétexte d’antiracisme.
A côté de la mauvaise conscience européenne liée aux agissements antijuifs européens, lesquels ne se réduisent pas au nazisme, que ce soit l’antijudaïsme chrétien ou l’antisémitisme racial, il faut poser la question du philosémitisme d’Etat dans sa globalité.
Si on veut éviter tout amalgame, il faut d’abord prendre en compte que le philo-truc comme l’anti-truc est une forme de discrimination, de mise à part d’un groupe humain au nom d’une essence, que ce soit pour le rejeter ou pour l’admirer. C’est cet essentialisme qui fonde ce qu’on appelle le racisme et qui ne se borne pas seulement à la race.
A côté de ce point de vue général, il faut regarder les enjeux de ce philosémitisme d’Etat, lequel ne relève pas du seul sentiment.
La judéophilie ou le philosémitisme est une façon que je dirai perverse de reconnaître une culpabilté, perverse au sens ou cette reconnaissance devient vite ce que l’on pourrait appeler une autoamnistie. Si je reconnais ma culpabilité je deviens un peu moins coupable. Et une façon d’être moins coupable c’est la philie envers les Juifs, et parmi cette philie, le soutien à Israël.
“Quel Européen pourrait, après la Shoah, contester à Israël son droit à l’existence ?”
écrivait Habermas dans un article du Monde. Reconnaître la culpabilité envers les Juifs permet d’oublier les Palestiniens.
Mais le philosémitisme d’Etat a un autre avantage. La préférence affichée envers les Juifs fabrique du ressentiment chez ceux qui subissent le racisme et cela n’est pas un simple hasard. Les Juifs, parce qu’ils ont été victimes deviennent des victimes privilégies. Si ce ressentiment se traduit pas des déclarations antijuives, voire par des actes antijuifs, cela permettra de dénoncer l’antisémitisme du pauvre, ce qui ne pourra que légitimer l’oppression contre ces nouveaux antisémites. C’est en ce sens que les Juifs deviennent des boucliers idéologiques. La question est d’autant plus important que des Juifs considérés comme représentatif de l’ensemble des Juifs de France sont prêts à accepter ce philosémitisme d’Etat dans la mesure où ce philosémtisme conduit au soutien à Israël.
Ainsi le philosémitisme d’Etat joue un double rôle, envers les Juifs qu’il caresse dans le sens du poil et envers les “nouveaux antijuifs”. Et cela d’autant que l’antisémitisme des banlieues est souvent la copie du vieil antisémitisme européen dont il reprend nombre de poncifs.
S’il faut condamner l’antisémitisme comme toute forme de racisme, il faut condamner tout autant le philosémitisme d’Etat.
Je ne pense pas qu’il faille entendre les déclarations de Houria Bouteldja comme des déclarations antijuives, par contre elle nous rappelle combien le philosémitisme d’Etat est dangereux et qu’il faut savoir le combattre.
http://la-feuille-de-chou.fr/archives/79477
Relatant une manifestation de soutien aux Palestiniens qui a eu lieu à Roubaix le 19 juillet, un journaliste de Nord Eclair, Bruno Renoul, s’est offusqué de voir une banderole présentant un drapeau israélien sur lequel l’étoile de David avait été remplacée par une croix gammée.
Ce journaliste explique que l’Etat d’Israël n’est pas un Etat totalitaire et qu’on ne saurait le comparer à l’Etat nazi. Et pour conforter son raisonnement, il ajoute que comparer l’Etat d’Israël au Troisième Reich est « injurieux pour les victimes du nazisme dont les Juifs ont été les cibles principales ».
Disons d’abord un premier contresens, l’Etat d’Israël serait donc l’Etat des Juifs, ce qui conduit à considérer toute critique de la politique de cet Etat comme une forme d’antisémitisme, argument malheureusement trop courant.
Mais ce qui importe, plus important qu’une équation lapidaire « sionisme = nazisme », c’est de chercher ce qui est commun à ces deux idéologies qui toutes deux s’appuient sur la notion d’Etat-Nation telle qu’elle a été théorisée par Herder au tournant des XVIIIe-XIXe siècle et qu’elle s’est développée en Europe.
La notion d’Etat-Nation peut conduire à un nationalisme extrême exclusif que l’on retrouve dans le fascisme italien, le nazisme allemand et aujourd’hui le sionisme israélien.
La question est moins d’identifier ces idéologies que de comprendre ce qu’elles ont de commun, ce commun se définissant, en ce qui concerne le nazisme et le sionisme, par la pureté ethnique, le terme « ethnique » restant suffisamment ambigu pour prêter à toutes les interprétations.
Le nazisme voulait un Etat purement aryen et pour cela voulait vider l’Allemagne de tous ses éléments non aryens dont les Juifs.
Le sionisme, quant à lui, veut construire un Etat juif, moins au sens religieux que dans un sens ethnique mal défini, et pour cela veut vider l’Etat d’Israël de tous ses éléments non juifs.
Cette volonté de pureté ethnique est l’un des points communs aux deux idéologies nazie et sioniste et je ne vois pas au nom de quoi il serait interdit de le dire.
Affirmer que l’on ne peut comparer le nazisme et le sionisme sous prétexte que les Juifs ont été victimes du nazisme s’appuie d’abord sur un premier contre-sens qui fait du sionisme, non une idéologie juive, ce qu’elle est effectivement puisque inventée par des Juifs, mais l’idéologie des Juifs, de tous les Juifs, ensuite sur une incompréhension du sionisme, idéologie européenne construite par des Juifs européens, qui ont cru trouver dans la construction d’un Etat juif la solution à l’antisémitisme européen.
Malheureusement, en voulant construire cet Etat dans un pays peuplé, la Palestine, ils ont transformé une idéologie qu’ils voulaient libératrice en mouvement de conquête et c’est cela qui fait du sionisme un nationalisme extrême au même titre que le nazisme.
C’est ce nationalisme extrême qui conduit aujourd’hui la politique israélienne à chercher à éradiquer la terre d’Israël de toute présence non juive, que ce soit sous la forme militaire brutale, telle l’agression contre Gaza ou, il y a
quelques années, la répression des Intifadas, que ce soit sous la forme de l’occupation ou que ce soit sous la forme de ce qu’on appelle les colonies, lesquelles ne sont qu’une façon d’abord de débarrasser la terre de ses habitants palestiniens ensuite de l’annexer pour en faire une terre israélienne.
J’ajouterai un point qui est loin d’être anecdotique sur les ressemblances entre le sionisme et le nazisme. Hitler a cru trouver dans un symbole venu d’Asie, la staviska, un symbole de la pureté aryenne ; une façon de confisquer un symbole qui n’a rien à voir avec le nazisme ; ainsi on trouve des croix gammées dans des pagodes bouddhistes.
La façon dont le sionisme utilise l’étoile de David, y compris pour le drapeau israélien, est plus pernicieuse. L’étoile de David est un vieux symbole juif qui n’a rien à voir avec le sionisme. En confisquant ce symbole à son profit, le sionisme se présente comme le représentant exclusif des Juifs et amène ainsi à considérer à tort l’étoile de David comme un symbole israélien.
On comprend alors que l’étoile de David puisse devenir un objet de répulsion comme la staviska a pu devenir un objet de répulsion. Ce qui est choquant, c’est alors moins la répulsion devant un objet détourné de sa signification première que l’usage qui en est fait par des idéologies meurtrières.
On pourrait dire la même chose du nom même de l’Etat qui s’appelle Israël. Le nom « Israël » représente une longue histoire et c’est cette histoire que le sionisme a voulu confisquer. Lorsque j’entends le slogan « Israël assassin », je suis choqué moins par le fait que l’on puisse crier un tel slogan mais par la façon dont une idéologie nationaliste extrême a conduit à ne voir Israël qu’à travers l’Etat d’Israël et son idéologie fondatrice, le sionisme.
Rudolf Bkouche membre de l’Union Juive Française pour la Paix
http://la-feuille-de-chou.fr/archives/70206
il y aurait donc des antisionistes inconséquent-e-s ?