Paris, « affaire paco »: entre résignation et indifférence…
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Je ne connais pas Paco, et je n’habite pas Paris. Ce sont des gens proches qui m’ont raconté cette histoire et m’ont fait parvenir les différents témoignages déjà parus sur le sujet. Ce qui motive l’écriture de ce texte, aujourd’hui, c’est moins l’empathie que je ressens vis à vis des personnes ayant subis ces violences que l’exaspération face à l’indifférence générale dans laquelle “l’affaire” semble se dérouler.
Quelques textes ont déjà été rendus publiques, mentionnant des choses que je trouve importantes, que je ne répéterai donc pas ici. Je ne m’étendrai pas sur la question “judiciaire”, même si mon idée peut se résumer à ceci. Dans une perspective émancipatrice où chaque individu ressortirait renforcé d’évènements de ce type, tant la personne qui a fait subir la violence que celle qui l’a subi, ET les personnes qui les entourent, je n’entrevois que deux possibilités. Soit la personne qui a exercé les violences est une personne malgré tout estimable, et alors un travail peut être engagé avec les personnes qui souhaitent le faire. Soit c’est un individu hors de tout raisonnement, qui ne veut pas reconnaître les douleurs produites, et alors notre seule possibilité est de nous en protéger. Pas par la taule, ni par l‘expédition punitive, même si l’une comme l’autre peuvent présenter un caractère brutalement jouissif. A nous d’inventer comment nous protéger de quelqu’un avec qui toute discussion paraît inefficace, sans nous souiller en reproduisant les logiques que nous vomissons: celle de la punition, de la vengeance, de l’illusion qu’une compensation matérielle peut exister.
Ce que je voudrai apporter, c’est une réflexion plus globale sur les rapports de domination qui sont présents dans toutes nos relations, et les contextes qui les produisent.
On a tendance à croire que nos microcosmes échappent aux rapports de domination. Comme si, quelque part, ce monde que nous fuyons ou cherchons à abattre ne nous avait pas tout autant mutilé que le reste des individus “normaux”. Quelles que soient les étiquettes que chacun reçoit ou s’attribue (punk, gauchiste, féministe, trans, PD ou gouine, anarchiste, communiste, artiste, bobo préfèrant boire des bières pas chères dans des squats plutôt que dans des boites branchouilles, bref…), de Paris à Turin en passant par Bruxelles, la Zad, le ValSusa et bien d’autres lieux encore, ces regroupements constituent une nébuleuse où se mêlent sociabilité plus ou moins alcoolisée et idées à vélléité subversive. On y échange des rêves et des idéaux. Et beaucoup de merdes aussi.
Derrière les écrans de fumée de toutes ces belles idées anti-autoritaires, se cachent trop souvent la facilité et le confort des habitudes et des normes desquelles nous prétendons nous extirper. Souvent, les violences de genre sont minimisées, les blagues sexistes acceptées au nom du sens de l’humour sans lequel on passe pour un.e coincé.e, et les violences inter-personnelles tolérées, au nom de l’intimité, de l’amour, de l’intensité des sentiments qu’on ne peut pas maîtriser. Sans vouloir paraître idéologique, chercher la révolution sociale sans risquer la rupture individuelle me semble une erreur dont l’humanité n’a pas fini de faire les frais. Nos comportements sont empreints de la violence qui façonne le monde que nous voulons détruire. Créer de nouvelles façons de vivre nos rapports ne se fera pas d’un claquement de doigt. Cela nécessite du courage, de la solidarité et une volonté de fer. Et ça commence par faire face à ce type d’évènement. Ne pas rester silencieux lorsqu’on est témoin d’une humiliation, d’une intimidation, qu’elle soit ponctuelle ou diffuse. Aller voir les gens, demander des mots clairs, ne pas se contenter d’un simple “bof, ça doit aller, sinon il/elle aurait dit quelque chose” qui ne sert qu’à rassurer notre conscience. Ce que nous risquons, c’est de briser le consensus, certes. De mettre à mal des amitiés, en obligeant les personnes à se prononcer, à discuter, à émettre des avis, et peut-être qu’ainsi, effectivement, des ruptures auront lieu. Mais refuser de mettre à mal le silence collectif, c’est confirmer l’isolement des quelques un.es qui auront tenté de briser la résignation. C’est acter l’oppression. C’est se faire complice des circonstances qui rendent favorables sa reproduction. Et c’est gâcher une occasion de faire un pas concret vers ce monde nouveau que nous portons dans nos coeurs, individuellement et collectivement.
Je crois que ce que je ferais si j’habitais Paris, (en plus de me montrer disponible pour qui voudrait, ou aurait besoin de parler de ça), c’est que j’irai trouver quelques potes, à qui je proposerai d’aller voir Paco. Pour ne pas attendre de le croiser par hasard, dans un squat, une bibli, une AG ou une manif, ce qui nous laisse toujours désemparé.e, seul.e ou dans l’urgence d’autre chose. Pour prendre les devants, et lui signifier clairement qu’il n’est plus le bienvenu. L’informer que sa description tourne publiquement, et qu’il ne pourra donc pas se reconstruire une identité ailleurs, comme il semble l’avoir déjà fait. J’enverrai cette histoire à tous mes contacts, en les invitant à en parler largement, et à ouvrir ainsi un espace plus vaste pour se questionner collectivement sur les violences de ce genre qui pourrissent nos quotidiens. En espérant que cet espace, une fois ouvert, maintiendra la tension nécessaire à une remise en question permanente, à l’élaboration expérimentale de nos idées et de nos pratiques. Dans un cas comme celui-là, si l’on écarte la prison et le meurtre, il semblerait que nous n’ayons que le bannissement pour nous protéger. Personnellement, je ne trouve pas ça satisfaisant, entre autres parce que ça ne l’empêchera pas de recommencer à faire ce qu’il veut “hors” de nos réseaux. Mais que pourrions-nous imaginer de mieux?
Je salue avec respect le courage des personnes qui ont rendu leurs témoignages publiques. Je sais la force qu’il faut pour remuer la merde quand elle est si profonde.
K
Paco serait planqué à NDDL. Je trouve ça hyper grave que ce mec puisse se servir de ce lieu pour pouvoir se planquer et continuer ses saloperies, agression sexuelles et aussi le fait d’envoyer au casse pipe des petits jeunes, leur mettre du matos entre les mains et va s’y fait toi pécho bêtement… Oui je trouve ça hyper grave que les gens sur place soient tellement à l’ouest qu’ils puissent le laisser tranquille pourrir tout ce qui l’entoure… Donc en attendant la confirmation qu’il s’est fait tége de la bas, j’appel les gens à ne surtout pas aller à NDDL… Juste pour une question de sécurité minimum…
Non. Je suis quasi certain qu’il n’est pas à NDDL ? Mais peut-être que je me trompe. De toute les façons il n’est pas le bienvenu non plus là-bas. Il s’est déjà fait virer par les libertaires qui étaient sur place et je ne vois pas pourquoi cela ne serais plus le cas aujourd’hui.
Alors contre ce genre de prédateur la seule solution qui émerge, c’est le « bannir » ? On va pas allez très loin avec une telle solution.
C’est pourquoi il traîne ses guêtre dans le monde libertaire plutôt qu’ailleurs, se sentant ici en relative sécurité alors que dans un autre milieu il serait peut-être déjà en train de croupir au trou.
Pas idiot la bête !
bofitude a raison: plus personne doit aller à nddl. faut pas avoir peur de prendre le mal à la racine
Je disais ça pour faire réagir… Ce n’est pas à nous de fuir les lieux de luttes… Tous à NDDL
Au niveau du recours à la justice et au système répressif de l’Etat, je trouve chouette qu’on puisse ne pas écarter d’ambler c’est possibilité de réaction. Je trouve que c’est important de ne pas condamner les personnes victimes de violences sexuelles qui font ce choix là qui est pourtant difficile. Cependant, ça me gêne qu’on aille jusqu’à dire que c’est jouissif de foutre quelqu’un en taule. Même si ça peut arriver qu’on le fasse faute de trouver d’autres solutions collective, c’est triste de venir s’appuyer sur la répression de l’Etat. (en revanche je suis d’accord que l’expédition punitive puisse être « brutalement jouissif »)
Sur les possibilités que Paco soit à Notre-Dame-des-Landes, je vois pas trop ce que ça change, vu que Paco ou pas, il y a des agressions sexuelles sur la Zad. En se focalisant sur l’identité d’un violeur, on risque d’oublier que des agressions et des viols, il y en a beaucoup plus que l’on croit, et qu’ils sont perpétrés par des gens qu’on ne soupçonnerait absolument pas. Ce n’est pas propre à la Zad, ou au milieu militant, ça existe partout et les agresseurs sont souvent des proches des victimes.
« Sur les possibilités que Paco soit à Notre-Dame-des-Landes, je vois pas trop ce que ça change, vu que Paco ou pas, il y a des agressions sexuelles sur la Zad. »
Non, mais quand je lis ça, j’hallucine… Cela s’appel une défaite annoncé… ou dans l’autre sens, on critique le systeme qui envoie des gosses à l’armée à 18 ans, se faire massacrer… La, on appel ces mêmes jeunes à aller au carton et se faire agresser… Et puis le ton de cette phrase, c’est genre, et ben tant pis, c’est comme ça, c’est le printemps… c’est une fatalité… Désolé de ne pas être d’accord… Je ne suis jamais allé sur la zad… et franchement j’ai de moins en moins envie d’y aller… un autre monde est possible ou les agresseurs sexuelles et autres dominateurs ont la liberté d’assouvir leurs penchants malseins… bref l’anarchie versus la loie du plus fort… a ce compte la vive l’aeroport,… Franchement c’est plus paco que j’ai envie de tapper… mais tout ceux qui le protegent, qui les protegent… je suis dégouté…
Je l’ai pas vécue pareil que toi, cette phrase. Surtout avec le reste du commentaire, qui rappelle notamment qu’il n’y a pas qu’un seul violeur / agresseur, et que se focaliser sur une seule personne, c’est zapper qu’il y en a d’autres.
Du coup, je trouvais pas qu c’était défaitiste comme argument, au contraire : un moyen de dire qu’il ne faut pas baisser les bras, et surtout pas renoncer d’aller dans des endroits (bon, j’extrapole ptêt un peu, là).
Mais c’est ce qui me parle dans le com. J’y vois aussi un début de réflexion sur le fait de quitter des lieux parce qu’ils ne sont « pas surs » pour nous, meufs. Justement, c’est le genre de truc qui me donne envie d’arriver à un endroit, remercier très fort les gentes qui se le coltinent tous les jours, et de leur prêter main forte sur leurs luttes, parce que de fait, illes ne baissent pas les bras, puisqu’illes y sont toujours…
Bon, peut-être que je projette trop mes sentiments perso sur ce qu’a voulu dire tyu, mais j’ai bien aimé le rappel au fait qu’il y a d’autres agresseurs, pas que ce mec, et que c’est pas une raison pour ne plus aller à la zad… comme tu le dis toi même un com plus haut :) bref, j’ai l’impression que vous dites la même chose.
Quand je vois le titre (« indifférence et résignation »), je me dis qu’il faut quand même faire la part des choses : peut-être que cette histoire n’a pas été suffisamment prise au sérieux ou quoi, mais, et c’est peut-être dur à dire/entendre, cela dépend malheureusement de comment ses victimes souhaitent que cela prenne de l’ampleur ou non, que l’info se répande, etc.
Bref, ça fait qques années que je traîne pas mal dans le « milieu » sur Paris-banlieue, et à chaque fois que Paco s’est pointé, il s’est fait dégager. Systématiquement.
Tant mieux si ça continue dans ce sens-là. Et faut que ça se sache dans d’autres villes, pour qu’il finisse par ne plus nuire à personne.
Ca ne l’empêche pas de traîner ses guêtres dans les manifs entouré de jeunes. Je l’ai vu il y a encore peu de temps de ça. Là personne ne vient le dégager. Bon, je sais pas si on pourrait se permettre de dégager quelqu’un d’une manif alors qu’il est sur la voie publique.
Mais maintenant qu’il est dans la posture de l’accusé, que les accusations sont multiples, il semble attendre que l’orage passe en se faisant plus discret. Puis il reviendra un jour comme si de rien n’était. Peut-être aussi qu’il se recyclera ailleurs, là ou on ne le connais pas encore pour poursuivre ce qu’il a toujours fait quitte à ce que ce soit aux antipodes du milieu libertaire.