[nantes] manifestation en hommage à djamal : la police agresse des manifestants
Catégorie : Local
Thèmes : RépressionViolence policières
Lieux : Nantes
Ce drame, provoqué par le système capitaliste et la guerre aux pauvres a une teneur politique. La manif a revêtu la forme d’une marche quasi-silencieuse en hommage à Djamal, sa famille ouvrant le cortège. Les manifestant-e-s, militant-e-s ou non, proches ou non de la famille, ont respecté ce choix. 200 personnes ont donc défilé sans slogan ni drapeau, avec une tristesse et une rage digne et contenue.
Devant le monument aux 50 Otages a lieu un moment de recueillement et de prise de parole des proches de Djamal.
C’est ce moment que choisissent les homophobes de la « manif pour tous » opposée au mariage des homosexuels pour venir défiler bruyamment en vélo, avec leurs drapeaux roses et bleus, leurs ballons, et leur sonnettes insupportables.
Quelques manifestant-e-s viennent leur demander de respecter l’hommage et de déguerpir en silence : les fachos répondent par des propos insultants et par un redoublement de leurs sonnettes. Certains manifestants homophobes se font menaçants, veulent en venir aux mains.
Deux cars de police arrivent en trombe, des flics descendent, visiblement survoltés : il s’agit de la sinistre Compagnie Départementale d’Intervention, coutumière des violences policières à Nantes.
La scène est alors indécente, surréaliste.
Tout va très vite. D’entrée, ils se casquent et bousculent brutalement les manifestant-e-s de la manif en hommage à Djamal (pourtant familiale, calme), puis sortent une gazeuse qu’ils braquent à quelques centimètres des yeux de certains. Un flic pousse une camarade à terre violemment alors qu’une homophobe la nargue bien à l’abri derrière les casqués.
Les esprits s’échauffent, on s’indigne de la brutalité des flics. La réponse est immédiate : un porc gaze copieusement les manifestant-e-s alors qu’un autre frappe un coup de matraque de toute sa force en plein dans le visage d’un camarade qui se met à saigner abondamment. Plusieurs personnes sont sonnées par le gaz ou les coups.
Évidemment, les journalistes, vautours avides de sensationnalisme émotionnel, présents en nombre Place Royale au début du rassemblement, sont absent quand il s’agit de filmer des violences policières.
Le défilé des homophobe se poursuit: dès que leur cortège a fini de passer devant nous, les flics remontent dans leur fourgons et repartent comme si de rien n’était.
Non seulement la police nantaise a couvert les fachos qui dérangeaient et provoquaient l’hommage, mais elle a une nouvelle fois agressé gratuitement et violemment des manifestant-e-s.
Jusqu’à quand ?
Ni oubli, ni pardon.
Un commentaire en provenance d’un-e pro-vie posant de fausses questions très orientées a été masqué. Inutile de venir faire les victimes ici, twitter et autres réseaux sociaux regorgent de messages où ce mouvement se plaint d’avoir été agressé et gazé par des extrémistes. On ne savait pas que c’était le nom qu’ils donnaient aux flics…
Est-ce qu’on pourrait avoir le lien vers le commentaire quand vous le cachez ?
Je ne sais pas comment faire pour aller les voir sinon.
*
A Djamal Chab,
il y en a parmi nous, les exclus, qui comme Djamal Chab
nom pus s’empêché(e)s de penser de passer à l’acte
cette acte ultime de refus de l’injustice la plus inacceptable
de ce voir condamné à tous les renoncements, d’une vie
de cette condition humaine, qui nous affliges au quotidien.
N’oublions pas que ce sont les femmes, les enfants, les plus
durement frappé(e)s.
frl atv
*
J’y étais et je ne suis pas d’accord avec cette analyse. Nous étions rassemblés pour soutenir la famille de Djamal, dans le recueillement. Les crétins anti-mariage gay ont débarqué depuis la rue Paul Bellamy en beuglant leurs insanités. Sans aucune dignité ni respect du deuil, ils sont la bêtise en mouvement d’accord. Mais nos camarades n’auraient pas dû réagir à leur provocation, ce n’était pas le le lieu. Après la police fidèle à sa longue tradition de connerie a voulu s’imposer virilement jouant du gourdin et de la gazeuse. Du coup pour résumer la situation vous avez trois acteurs dans la surenchère de violence crasse et un quatrième, les proches de Djamal, derrière, qui pleurent.
C’est vrai qu’il y avait peut-être un 4ème acteur : les proches endeuillés qui se foutaient des fachos… Mais dans ces moments là (je parle pour moi) c’est les tripes qui causent, c’est sauvage, ce cortège festif a été un vrai catalyseur de la rage lancinante qui parcourait nos larmes. Et je pense que ce qui s’est passé est juste. On peut pas faire du journalisme là-dessus, comme si on commentait un match de foot…
Un petit texte que je viens d’écrire, d’après ce que j’ai vécu hier :
Je suis ceinture noir de Judo. A la base je bossais dans le théâtre quand j’habitais à Sidi Bel Abbès en Algérie, je faisais les décors. Mon père est un tailleur connu là-bas…
Il y a 5 ans je suis tombé amoureux de Nicole, et me suis arraché à mon pays pour venir vivre avec elle à Nantes, dans un petit quartier tranquille. Je me suis fais pas mal d’amis et me suis beaucoup impliqué auprès de la famille de l’un des otages enlevés au Niger. Je les aidais à faire des traductions en arabe.
Mais niveau taf je retrouve pas la même chose ici, alors je galère pour joindre les deux bouts… Du coup j’ai enchaîné les petits boulots en intérim, la plupart de nuit, pour gagner un peu de sous en plus d’assedics que je touche. Sauf que j’en aurais omis quelques unes d’après eux, ils m’ont alors demandé de rembourser une somme d’allocations perçue, tout en me privant de mes droits au chômage. Ça à fait boule de neige, la situation s’est enlisée, j’ai eus affaire à un mur. Je n’ai pas fais d’esclandre à l’agence, ma colère était froide, je les ai simplement prévenu que je le ferai et je l’ai fais.
Mercredi 13 Fevrier 2013 à 13h je me suis immolé devant mon agence Pôle Emploi à Nantes.
Je les avais prévenu, ils le savaient bien, ils m’ont cru. Si bien qu’ils y avaient posté deux ou trois gardes à l’entrée. J’y suis passé mardi, avec mon bidon d’essence mais c’était fermé. Je voulais rentrer dans l’agence, qu’ils me voient, qu’ils brûlent un peu avec moi, alors je suis revenu le lendemain.
Ce coup-ci c’est bon c’est ouvert, la patrouille est toujours là. Je me prépare dans une rue adjacente, dernière pensée à ceux que j’aime, ma femme, mes potes, ma famille… puis je fonce, je brûle, je cours, protégé par un bouclier de flamme, sur ceux qui m’ont bousillé. Ce coup-ci ils me remarquent, ils me voient, ils crient, ils ont peur ! Je retourne enfin la violence que j’ai si longtemps ingérée…
Dans la mémoire collective, cette façon de se suicider est un moyen de dire au monde qu’il s’écroule et qu’il faut témoigner quitte à en mourir. Ce geste est un cri politique et sacré radical: à la manière des moines tibétains face à l’occupant chinois ou encore de ce vendeur ambulant tunisien, déclenchant une nuée de révolutions au Moyen Orient.
Cet homme qui à crié à notre place la rage désespérée, brute et brûlante d’un peuple, il s’appelle Djamal Chaab, il a 42 ans. Deux jours plus tard, vendredi, trois personnes lui emboîtent le pas : un lycéen, un directeur de magasin Intersport, et un autre chômeur en fin de droits.
Le samedi aprem, à Nantes, se tient un rassemblement en son nom, en son acte. Je descend dans la rue et croise un cortège recueilli, parsemé de roses blanches, marchant doucement le long du cours des 50 otages, en silence, ouvert par les proches de Djamal, portraits du défunt en main.
Je m’imprègne doucement de ce silence lourd de rage et de tristesse contenues, de ce cri silencieux qui s’articule pas à pas. Je tourne la tête, quelques visages que je connais, mais chacun regarde en soi, chacun est seul, ou plutôt avec lui. Il n’y a plus de doute c’est bien une part de moi, de nous qui s’est immolée devant ce Pôle Emploi.
Je marche doucement sur le coté du cortège, avec quelques personnes sur la chaussée, dont une en fauteuil roulant. Une voiture de flics nous colle au cul pour passer, les gens devant moi se retournent, hésitant. Je leur dis à voix basse que nous n’avons cas les ignorer, ils acquiescent après leur avoir jeté un regard de dédain par dessus leur épaule. Un type avec un blouson en cuir qui marchait avec nous depuis un moment vient nous dire de laisser passer la voiture, on comprend que c’est un flic.
Il nous dit que c’est pour notre sécurité. On lui réponds qu’il n’ y a aucun danger, si ce n’est pour la personne en fauteuil car le trottoir, trop haut, l’empêche de quitter la chaussée étroite. Donc on refuse gentiment de s’écarter.
Alors il aboie :« Y a toujours des emmerdeurs ! »
On lui réponds de se taire, de dégager afin de laisser les gens se recueillir, au lieu de les insulter.
On arrive devant la Préfecture, on passe le rond point pour se regrouper sous la colonne. On forme à présent un arc de cercle face à des amis, parents et sœurs de Djamal. Les larmes précèdent les mots, les mains viennent trouver les épaules voisines, des personnes s’enlacent et toutes les joues autour de moi rougissent et commencent à ruisseler, celles des gosses comme celles des vieilles, militants et moins militants. Une lame de fond monte de mon estomac à mon sternum, du sternum au larinx. Je choisis de ne pas résister et accueille la vague qui me submerge. Je lâche ce déferlement de rage, de tristesse, mes mâchoires se serrent. Mes yeux sont deux rivières. Sentiment d’unité profonde avec le groupe.
En quelques secondes la situation bascule, face à moi de l’autre côté du boulevard, des bruits de klaxons aigus nous parviennent, puis des couleurs bleus, roses, des sourires, mèches blondes dans le vent, des sonnettes, tout un cortège festif de vélos… puis un drapeau que je reconnais immédiatement, celui des anti-mariage gay !!
Les yeux embrumés, les joues toujours ruisselantes, je pouffe de rire, trouve la situation tellement décalée, tellement drôle…
En quelques secondes les visages endoloris se tournent vers les « trouble-deuils », ma surprise de départ devient colère, et nous sommes à présent un vingtaine à fondre sur eux, à leur demander de se barrer (et en silence!), que c’est pas le moment de venir déverser leur venin homophobe et religieux, mais là vraiment pas !
Du coup on récolte du « nous aussi on a le droit de manifester, c’est ça la démocratie ! » sur un ton gueulard, quelques sourires narquois, et même un « attendez, moi aussi je suis chômeur ! », le tout sur un redoublement de sonnettes et klaxons insupportables.
Là on se met à sévèrement les avoiner ces familles blanches et proprettes à vélo qui défilent fièrement, mèches au vent, oppresseurs du dimanche, et grands défenseurs d’une morale violente et archaïque, drapés dans leur bon droit démocratique d’être là, face à nous.
Les insultes partent, les bras fendent l’air, des ballons pètent et des drapeaux sont arrachés.
En quelques secondes, deux fourgons de CRS se déchargent de leur vermine, un petit bloc de 6 ou 7 clébards bien énervés, casqués, boucliers en mains, vient au contact afin de protéger le joyeux cortège… Je vois les flics taper dans le tas, une matraque ce lève, et éclate le visage d’une personne, ça gueule, ça pousse les boucliers de plus belle, une dame tombe violemment à terre, deux jets de lacrymo badigeonnent alors le groupe.
D’autres personnes recueillies, voyant la scène, débarquent en hurlant aux flics de se barrer..
De mon côté, j’ai le sentiment d’être invisible, je suis derrière les CRS, submergé par la marée fière de vélos qui défilent, arrachant un drapeau par-ci, décochant un coup de pied par là, hors de moi.
En me retournant, j’aperçois le portrait de Djamal jonchant le sol, visage souillé par une semelle de Ranger ! Là je deviens fou, je fonce dans leurs jambes pour récupérer sa photo, bouscule le flic et parviens à ramasser la photo que je viens coller à la visière du chien, en lui expliquant bien qu’il n’y est pas pour rien dans son suicide, que le monde qu’il défend est une machine à broyer des vies.
Leur chef à côté me dit de dégager, il me pousse, je colle mon visage rouge et humide au sien, en lui exprimant mes pensées.
Au bout de quelques secondes ils reculent sous les insultes et les crachats, s’évaporant en même temps que le joyeux cortège homophobe.
Les esprits sont secoués par les coups et les gaz , les larmes de source policière se mélangent à celles du deuil, une flaque de sang gît sur la dalle de béton.
Djamal Chaab est mort. Il a retourné cette violence contre lui. D’autres décideront peut-être qu’il vaudra mieux brûler les banques ou les commissariats. Parce que leur monde aussi est en fin de droits !!
Bonjour. C’est moi qui ai posé quelques questions sur cette manifestation. Visiblement, elles ne correspondaient pas à la ligne éditoriale de ce site. Néanmoins, pourrais-je savoir si elles contrevenaient à une quelconque charte ou autre? Ou la censure est-elle juste intuitive (mais pas infaillible, car je ne suis pas «pro-vie»)?
Pour venir régulièrement sur ce site, je peux te répondre, comme sur twitter, que :
– « modo » a donné un mail pour questionner sur la modération de ton commentaire
– il arrive que des modos aillent vite en modération de peur de voir un trollage s’installer (ça commence souvent avec des petites questions et ça déborde vite : vas voir d’autres publications…)
– il y a de fortes chances que nos commentaires respectifs disparaissent car, et ça c’est clairement annoncé quand tu publies (le premier petit texte, là, en haut, en bleu) : indy nantes n’est pas un forum. D’ailleurs, ils devraient ne pas appeler ça « commentaire », ça serait plus simple, mais bon, ils font ce qu’ils veulent.
Bref, ce n’est pas simple de juger de l’intension de quelqu’un sur internet et la guerre pro-choix / pro-vie est tellement virulente que je doute qu’elle ait sa place ici, qui n’est pas un site de débat.