Retour sur la répression dans le val de susa
Catégorie : Global
Thèmes : Ecologie
Lieux : Tours
No TAV. La répression continue.
Le 26 janvier 2012 à 5 heures du matin, la police a fait irruption dans les maisons de nombreux activistes et sympathisants du mouvement contre la ligne de train à haute vitesse, résidant dans 15 villes italiennes. La vague répressive s’est abattue sur plus de 50 personnes présentes le 3 juillet dernier dans le Val de Susa. A cette occasion, 60000 manifestants s’étaient réunis pour reprendre possession du campement de resistance connu sous le nom de la ”Libre République de la Maddalena”, qui avait été dégagée dans la violence par les forces de l’ordre le 27 juin.
Depuis, le mouvement a subi une forte criminalisation médiatique et judiciaire qui s’est soldé par la fouille de 52 maisons particulières et centres sociaux, la détention de 24 personnes tandis que 15 autres étaient condamnées à la résidence obligatoire et 2 à l’assignation à domicile.
La police a quasiment fouillé tous les centres sociaux de Turin grâce à l’article 41 du Code unifié des Lois de Sécurité publique (TULPS), qui permet une fouille spéciale quand il s’agit de chercher des armes et des explosifs. Au final, ils ont confisqué des béquilles, des vêtements et des casques de moto.
L’opération avait clairement pour but de séparer le mouvement entre les bons et les mauvais selon la fameuse devise « diviser pour mieux régner ». La stratégie du pouvoir a été d’arrêter les violents, les radicaux et de laisser les citoyens du Val de Susa faire leurs manifestations pacifiques. Mais, manque de chance pour le procureur Caselli, dans le mouvement No TAV, il n’existe pas de bons ou de mauvais; celui-ci ne se différencie pas entre les radicaux et les modérés. Les décisions qui sont prises dans la vallée ont l’appui de toutes les personnes présentes. Les manifestations de soutien qui ont eu lieu les jours suivants ont d’ailleurs été massives et hétérogènes. Ça alors! Il y a autant d’anarchistes en Italie! 10000 à Turin, 8000 à Bussolin.
Parmi les arrêtés, il est surprenant de trouver aussi Guido Fissore, conseiller municipal d’un petit village de la vallée et activiste notoire No TAV. A 67 ans, Guido s’est vu traîné hors de sa maison aux premières lueurs du jour, avec l’accusation d’agression sur personne dépositaire de l’autorité, parce que, selon les enquêtes du ministère public, il aurait frappé et blessé avec une béquille deux policiers antiémeutes. Il se trouve que le jour des affrontements, le conseiller avait un pied cassé et marchait avec des béquilles. Les mêmes ”armes” ont été trouvées au cours de la fouille de sa maison par les policiers.
Plusieurs témoins présents lors de la manifestation du 3 juillet ont publié successivement sur leurs blogs que Guido avait été bousculé par les policiers et qu’il avait heurté, en tombant, les boucliers de deux d’entre eux. Ce qui est moins clair, c’est comment un homme de près de 70 ans aurait réussi, avec un pied cassé, à blesser avec ses béquilles en aluminium deux agents protégés par des uniformes anti-émeutes.
Après deux jours de prison à Turin, Guido Fissore a pu retourner dans sa maison avec une assignation à domicile, mais cette mesure est apparue trop dure et a été transformée en « résidence obligatoire ». Le cas du conseiller municipal de Villar Forchiaro illustre clairement comment la justice réagit face à ces citoyens qui décident de se réveiller et de lever la tête contre n’importe quel pouvoir voulant détruire leur terre et leur avenir.
Quasiment tous les détenus ont été accusés de violence, rebellion ou outrage à l’autorité et de dégradation de biens publics. Cette dernière accusation est très curieuse si l’on considère que les manifestants ont pris des risques pour protéger la vallée alpine du désastre environnemental et économique causée par la construction de la ligne à haute vitesse.
Durant ces dernières années, le collectif No Tav est devenu un symbole d’autodétermination et de dignité, et c’est pour ça que les peines ont été aussi symboliques et exemplaires. Toutes les mesures préventives, comme les détentions et les assignations à domicile, ne sont pas obligatoires pour ces accusations. Le message est clair : Qui se rebelle en paiera les conséquences !
Ça ne semble pas être par hasard que les fouilles et les arrestations se soient produites maintenant, à un moment si particulier de l’histoire italienne. La crise économique et les malversations politiques ont fini par abattre le gouvernement Berlusconi, les grèves ont explosé dans toute la péninsule, et se sont étendues depuis la Sicile jusqu’au Nord. A Palerme, les mouvements populaires ont bloqué les autoroutes et le port pendant cinq jours laissant tout le pays sans essence et les supermarchés sans marchandises. Le risque que toutes ces étincelles se transforment en bûcher a provoqué la réaction de la machine répressive qui a commencé son travail par le collectif le plus résistant : Les NO TAV.
Pour autant, les mesures adoptées par le nouveau gouvernement technique mené par le premier ministre Monti, n’ont pas effrayé les habitants. Des marches de solidarité, auxquelles ont participés des milliers de personnes, ont été organisées dans des dizaines de villes italiennes. A Turin, 10000 manifestants ont défilé sous la neige, pendant qu’à Bussolene 8000 prirent la rue pour montrer leur soutien aux prisonniers, qui comptent parmi eux le coiffeur historique du Village, Mario Nucera.
Depuis jeudi dernier, la boutique de Mario est restée ouverte grâce à la solidarité des voisins, qui ont organisé des tours pour que le barbier ne reste pas sans salaire bien qu’étant incarcéré. Les messages de fraternité et de soutien collés sur la porte du salon de coiffure se comptent aussi par milliers.
L’opération policière a été si choquante et inattendue que même de nombreux maires ont exprimé leur soutien aux familles des détenus, montrant une fois de plus que le mouvement No Tav continue d’être un mouvement vraiment hétérogène, uni et populaire.
Avec les prisonniers du mouvement No Tav, soyons complices plutôt que solidaires!
Valentina le 7 février 2012
J’ai eu du mal à faire la différence entre “residencia obligatoria” et “arresto domiciliario”, si quelqu’un-e peut éclairer ma lanterne…
residenza obbligatoria – l’inculpé ne peut pas sortir de al ville (ou departement, selon le cas) ou il reside abituellement
arresti domicialiari – assignation à residence – l’inculpé ne peut pas sortir de chez soi (ou chez la/les personne/s chez laquelle il est assigné à residence) Une forme particulierement dure de “domiciliari” (à laquelle on le droit le No TAV sortis avant’hier) est celle pour laquelle l’inculpé ne peut voire personne, ni communiquer (par poste, mail ou telephone) sauf qu’avec las cohabitants