Meurtre d’un jeune ouvrier en argentine
Catégorie : Global
Thèmes : Répression
Nous avons reçu sur notre site en espagnol, en provenance de camarades de différents endroits, des informations sur le meurtre d’un jeune ouvrier qui participait à la lutte des chemins de fer, meurtre perpétré par une bande armée appartenant aux syndicats, de mèche avec le gouvernement de Cristina Kirchner, lequel a adopté la tactique, soulignée par l’un des textes publiés ci-dessous, de donner en sous-traitance la répression aux bandes syndicales, ce qu’en Argentite on a appelé les « patotas sindicales ».
Aujourd’hui, alors que Kirchner, ancien président et « co-président » jusqu’à son récent décès, est élevé par toutes les forces politiques de la bourgeoisie à la catégorie de « grand homme d’État », ces faits nous donnent des enseignements particulièrement éclairants :
1º Le cynisme et l’hypocrisie sans limites des politiciens, ces démocrates qui n’hésitent pas à mettre en arrière-plan les « forces de l’ordre » officielles de l’État dans leur exercice de répression contre les luttes de la classe ouvrière en la sous-traitant aux bandes armées syndicales. Il convient de rappeler que ceci n’est pas du tout une nouveauté. Dans la Russie tsariste, la police « déléguait » les tâches répressives contre les ouvriers et les militants révolutionnaires aux Cent-Noir, des bandes criminelles qui regroupaient la lie de la société. Egalement, en janvier 1919, face à l’insurrection des ouvriers de Berlin, le Parti social-démocrate allemand, ne pouvant pas compter sur les soldats et même pas sur une partie de la police, organisa les Corps-francs, bandes armées chargées de mater les ouvriers. Beaucoup de futurs hiérarques hauts placés du régime nazi militèrent dans ce corps spécialisé… en sales besognes.
2º La collaboration des syndicats, aux côtés du parti au pouvoir, à la répression des luttes.
3º La nécessité de la solidarité avec les victimes de la répression capitaliste. Ce sont des camarades qui, au-delà de leur appartenance à telle ou telle organisation, ont été assassinés par les forces du capital au moment où ils étaient engagés dans une lutte pour les intérêts de notre classe.
Nous publions donc ci-dessous 3 documents sur ces événements :
•Le premier émane d’un camarade sympathisant du CCI qui est en processus de réflexion sur le trotskisme.
•Le deuxième d’un groupe anarchiste de Rosario (Argentine).
•Et le troisième est un document auquel fait référence ce groupe.
Au-delà des réflexions qu’on pourrait faire sur certaines visions politiques, le plus important, c’est de publier ces documents pour les informations qu’ils fournissent et l’engagement dans la lutte de classe qu’ils expriment.
I. Lettre d’un sympathisant du CCI
Mercredi 20 octobre à midi, l’embuscade criminelle menée par une bande syndicale a coûté la vie à Mariano Ferreyra, militant trotskiste du Parti Ouvrier.
Une autre camarade du PO, Elsa Rodríguez, ainsi que quelques autres camarades cheminots ont été hospitalisés dans un état grave.
Les balles assassines ont été tirées par les cosignataires de l’infâme négociation de sous-traitance qui unit les patrons amis du gouvernement des Kirchner et le syndicat de l’Union Ferroviaire.
Avec l’argent des subventions de l’Etat, les concessionnaires du chemin de fer payent des contrats à coups de millions à des « entreprises » qui leur appartiennent.
Le syndicat du dirigeant Pedraza est le négociateur de cette affaire.
« Il faudra trouver les responsables », a proclamé la Présidente Kirchner, lors d’une exposition au Parc Nord après un discours consacré « au manque de goût des grosses fraises », sept heures après ces assassinats.
Mais les témoignages et les vidéos accusent la patota ferroviaire sans la moindre ombre de doute possible.
Ces mêmes vidéos témoignent du fait que la police s’est retirée de la zone où la bande ferroviaire réalisa son embuscade.
« Il faudra enquêter », dit le gouvernement qui revendique comme sienne la Jeunesse Syndicale Péroniste, le bras armé syndical [du Péronisme] des années 1970.
Le gouvernement a répété qu’il « ne réprimait pas » ; n’est-on pas face à la sous-traitance de la répression par le biais des patotas, tel que c’est déjà arrivé à l’Hôpital Français et ce qui arrive encore au métro de Buenos-Aires sous la coupe du syndicat de l’UTA (Union des Traminots) ?
Mariano militait depuis l’âge de 14 ans ; il voulait sa place au sein de la classe ouvrière avec sa profession de tourneur mais, surtout, dans le cadre d’organisations de jeunesse, il s’est mis à lutter avec d’autres ouvriers sur des bases de classe dans la ville d’Avellaneda.
Mariano est l’un de ces meilleurs exemples humains de cette jeunesse qui se met debout dans le monde entier.
Mariano, c’est nous tous, les combattants conscients.
II. Texte du groupe anarchiste de Rosario (Argentine)
Assassins !
Comme si ce n’était pas suffisant pour eux de vivre de la sueur et du sang des travailleurs, un mort et des blessés graves est la conséquence des agissements d’une bande de nervis syndicaux, cette fois-ci celle de l’Union Ferroviaire, aidée aussi par des clubs de supporters de foot violents. Mariano Ferreyra a été tué d’une balle, Elsa Rodríguez, avec une balle dans la tête, se débat entre la vie et la mort, et il y a bien d’autres manifestants blessés.
Tous ces gens-là ont agi protégés par la Police Fédérale et le gouvernement du moment, qui sans doute vont nous raconter qu’ils vont mettre le paquet « pour retrouver le coupable », autrement dit quelque bouc-émissaire pour en sortir disculpés et propres et que tout puisse continuer comme avant. Cela a été toujours leur politique, c’est, en fait, la politique !
Mercredi 20 octobre 2010 à Buenos Aires, on a pu voir encore une fois ce que représente ce réseau assassin qu’ils appellent la bonne société ; ils sont bien de la même engeance ceux qui ont « la gâchette facile » dans les quartiers pauvres, ceux qui encouragent et alimentent la traite d’êtres humains, ceux qui tuent en nous faisant mourir de faim et en nous poussant au désespoir, comme ceux qui nous tuent à la tâche, rapidement ou à petit feu.
Ces événements ne sont pas extraordinaires, et ne sont pas la conséquence de la démence de quelque personnage syndical, politicard ou policier, mais sont la conséquence logique de ce système qui porte atteinte à la vie humaine : en assassinant Mariano, ou, voici quelques années, Carlos Fuentealba et tous les « sans nom » qui meurent jour après jour, comme ce maçon écrasé par un mur dans le sud de Rosario ce même mercredi.
Nous sommes de plus en plus poussés à choisir entre continuer à subir la loi de cette lie de la société ou lutter pour tout changer.
Grupo Anarquistas Rosario, Octobre 2010.
www.grupoanarquistasrosario.blogspot.com
III. Communiqué de la Correpi
MARIANO FERREYRA, ASSSASSINÉ PAR LA REPRESSION « SOUS-TRAITÉE » DU GOUVERNEMENT DES KIRCHNER
Les balles de la patota de l’Union Ferroviaire ont été dirigées contre les cheminots précaires (en sous-traitance, justement), mobilisés pour exiger leur intégration en CDI. La police s’est retirée de la zone de la manifestation pour que les troupes de choc de la bureaucratie syndicale puissent « travailler » en toute tranquillité et avec ses arrières bien protégées.
Plusieurs camarades ont été blessés. Mariano Ferreyra, étudiant de 23 ans et militant du Parti Ouvrier, a reçu une balle à l’abdomen et est décédé. Un autre projectile a atteint la nuque de Elsa Rodriguez, 56 ans, militante, elle aussi, du PO. Cette camarade se trouve très gravement blessée à l’Hôpital Argerich.
De la même manière que les patrons utilisent la sous-traitance au travail pour accroître l’exploitation, le gouvernement sous-traite la répression, pour la rendre plus efficace et à moindre coût politique que quand il envoie directement ses flics et ses gendarmes.
Depuis 2003, on a pu voir comment, de plus en plus couramment, le gouvernement péroniste des Kirchner délègue la répression aux bandes de la bureaucratie syndicale pour effrayer les travailleurs. Avec les enseignants, les étudiants, les travailleurs du métro, des hôpitaux français et Garrahan, voilà quelques exemples de cette méthode répressive qui permet au gouvernement de rester « les mains propres », parce que ce n’est pas l’appareil répressif officiel qui attaque les travailleurs ; cela sert aussi à discréditer les luttes grâce aux médias qui parlent d’une « lutte interne entre corporations syndicales ».
C’est ainsi, avec l’intervention coordonnée entre entreprises, bureaucratie syndicale et gouvernement, qu’ils veulent continuer à mettre sous leur discipline les travailleurs organisés.
Avec le meurtre de Mariano, il y a déjà eu sept morts à cause de la répression lors des marches et des manifestations sous le gouvernement des Kirchner. Mariano Ferreyra vient ajouter son nom à cette liste sanglante qui débuta à Jujuy, lors d’une mobilisation contre la torture, avec Luis Cuéllar, en 2003, qui continua avec Carlos Fuentealba (enseignant, Neuquén, 2007), Juan Carlos Erazo (ouvrier agricole, Mendoza, 2008), Facundo Vargas (Talar de Pacheco, 2010), Nicolás Carrasco y Sergio Cárdenas (Bariloche, 2010), ces trois derniers tués par la « gâchette facile » de la police.
Sans oublier qu’il y a un de nos jeunes tué par jour à cause d’une autre variante répressive, celle qui s’acharne de façon préventive sur la classe ouvrière non organisée, à travers les coups de pistolet et la torture….
CORREPI vous appelle à une mobilisation pour réprouver ce nouveau meurtre abominable, une manifestation est prévue depuis l’avenue Corrientes et Callao jusqu’à la Plaza de Mayo aujourd’hui à 17h.
CONTRE LA REPRESSIÓN, ORGANISONS-NOUS ET LUTTONS !
Courant Communiste International
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