C’est au milieu de la matinée d’un mardi 12 juin 2009 que Madame arpentera les chemins grillagés et emmurés de ce futur lieu d’enfermement, certainement accompagnée d’un sentiment froid de satisfaction face à cet énième édifice carcéral. Ce nouveau centre pénitentiaire s’est érigé dans le cadre des politiques publiques de restructuration du milieu judiciaire. Il répond, en théorie, à l’éthique d’un gouvernement qui s’est juré de désemplir les prisons afin d’« améliorer » les conditions de séquestration des détenus et les conditions de travail de leurs matons.

Or, ce centre pénitentiaire, qui contient un centre de détention et une maison d’arrêt, est déjà surchargé ; et les promesses qu’avait faites l’ancien garde des Sceaux Pascal Clément à propos de ce centre, qui devait comporter « une majorité de cellules pour une personne, avec un lit et une armoire, un plan de travail, un sanitaire avec douche… », semblent bel et bien être tombées à l’eau. Ou bien n’étaient que purs mensonges, à en croire le juge d’application des peines qui, ayant déjà visité la prison de Vivonne, a souligné que les cellules comportaient toutes trois lits. Mais pointer de tels mensonges à propos de l’« agréable enfermement » défendu par l’Élysée est pour nous très insuffisant.

D’abord parce que, dans le discours des gardiens de prison en grève, la revendication à propos de cet « agréable enfermement » porte sur davantage d’effectifs pour davantage de sécurité, donc plus de bras pour plus de bâtons. et, donc, vraiment rien de très agréable à en attendre ! Ensuite et surtout parce que, de toute façon, qu’est-ce que la vie sans le souffle de la liberté ?

C’est l’enfermement tout court qui apparaît à dénoncer (et à inscrire dans un changement social global) dès que l’on se penche sur les véritables rouages du mécanisme sécuritaire. Les délits et les crimes commis sont, dans leur quasi-totalité, les simples conséquences de l’organisation de cette société, qui est de classe. En effet, la détermination de l’individu ne dépend pour ainsi dire pas de lui mais de son environnement.

Ainsi, du trafic au meurtre, de l’appât du gain à la fragilité psychologique, la racine du problème n’est pas inhérente à l’individu par une quelconque déviance génétique mais bien par cet environnement, forcément coercitif, qui l’a moulé, noyé sous le stress, les harcèlements, la misère sinon laissé le ventre vide. Il n’y a pas là une tentative de justification ou d’angélisation, mais bien une description de la réalité sur l’origine sociale des personnes incarcérées, qui constituent aux yeux des dirigeants une frange des nouvelles classes dangereuses d’antan, la substance politique enfin énoncée.

Mais derrière tout ce tapage à propos du milieu carcéral demeure le discours du « tout-sécuritaire ». A chaque fait divers, une loi de contrôle et de flicage. Par des manipulations de chiffres, des amalgames douteux, les médias comme ampli hertzien, l’Etat instaure la crainte, la peur, le flou pour mieux guider son entreprise de répression massive dans un processus de barbarie douce, accompagné d’un son de basse fréquence invoquant l’ordre et la soumission, à coups de campagnes médiatiques, d’investigations antiterroristes, d’autoritarisme et d’hypercontrôle urbain.

A l’heure actuelle, des milliers de militants politiques et syndicaux sont sous le joug des forces répressives de l’Etat et de leurs homologues « justiciers », des gardes à vue abusives aux détentions provisoires injustifiées, des harcèlements aux comparutions immédiates, des passages à tabac aux peines de prison ferme. Rien ne va plus en ces territoires qui ne sont, finalement, pas si pacifiés que cela – comme le montre parfaitement la lutte que livrent aujourd’hui avec acharnement des salariés, des chômeurs et des étudiants, souvent déjà accablés de lourdes peines, contre le gouvernement et les patrons !

Les plus grands bénéficiaires de la prétendue « insécurité » ne sont autre que les fabricants de technologies de contrôle qui, comme Siemens, nous fliquent un peu plus chaque jour ; ou encore les multinationales qui, comme le groupe immobilier Bouygues, font de l’enfermement et de l’anéantissement de l’être humain leur fonds de commerce ; et, finalement, les capitalistes qui orchestrent notre peur pour que nous ne préparions pas notre révolte.

Ainsi, une fois de plus, le Capital et l’Etat vont main dans la main et s’entraident pour mieux dominer, écraser et faire disparaître les insoumis. Le tout est désormais de ne pas se faire avoir…

REFUSONS LA SOUMISSION EXIGEE DU POUVOIR ET DE SA JUSTICE DE CLASSE !

CONTRE LA MACHINE SECURITAIRE, RESISTANCE !

Quelques chiffres qui se cachent bien :

30% des détenus qui croupissent en prison sont des gens qui n’ont pas encore été jugés et qui sont donc innocents, aux yeux mêmes de la loi. 20% des détenus souffrent de troubles psychiatriques… qui bien évidemment ne peuvent être décemment traités par l’enfermement carcéral, mais qu’être aggravés par un tel environnement. un tiers des détenus souffrent de toxicomanie et ont donc besoin d’écoute et de soins, non de désespérance. 20% des détenus sont des personnes qui n’ont pas bénéficié d’une scolarité obligatoire complète, et sont donc des personnes que le système n’a fait qu’exclure de fait.

Qu’en est-il du véritable ennemi intérieur ?

Comité interlutte 86 ; mail : interlutte86 at gmail.com