Halloween chez les fachos : quand le n°2 du RN enterre son meeting dans la campagne nantaise
Publié le , Mis à jour le
Catégorie : Local
Thèmes : Antifascisme
Lieux : NantesVertou
Ce samedi 26 octobre, à l’appel de l’AG Antifa de Nantes et relayé par l’AG Antifa de Rennes, nous étions 200 à nous rassembler à la Mairie de Vertou contre le meeting du RN avec (en guest-star) Sébastien Chenu, n°2 du parti.
L’importance de cette réunion, située dans une salle municipale d’une capacité de 80 personnes (dans une bourgade de la campagne de Nantes) à Vertou (Les Reigniers), ne va pas de soit mais alors (part d’une question politique : )faut-il s’opposer à chaque évènement d’extrême-droite quand bien même il serait limité en nombre et hors de nos zones d’intervention habituelles ?
Pour nous, la réponse est claire.
Après son échec lors des législatives, le RN cherche à se construire et à recruter des cadres conformes aux “critères républicains” dans des endroits où se trouve le coeur de cible de son électorat. Ce genre d’évènement, réservé aux adhérents, est l’occasion de passer un rappel les troupes, organiser le programme et repérer les futures têtes locales du parti avant les prochaines élections.
C’est donc pour toutes ces raisons qu’il nous semble indispensable de désorganiser le RN en empêchant ses meetings et tout ce qui leur permet de se structurer comme un grand parti républicain. C’est s’opposer directement au projet Périclès du milliardaire Pierre-Édouard Stérin, qui vise à former 1000 candidats viables aux municipales de 2026.
Après l’échec de la stratégie de diabolisation du Rassemblement National et l’inefficacité totale des rassemblements citoyennistes pour dénoncer l’extrême-droite, nous affirmons qu’il est plus que jamais indispensable de bloquer matériellement la tenue de ces évènements. Nous pensons qu’il faut se préparer et assumer un niveau de conflictualité suffisant avec l’extrême-droite et ceux qui les protègent sur de petits rassemblements, hors des métropoles, pour mettre en crise les mairies (qui louent leurs salles) et les préfectures qui les autorisent. Placer ce niveau de pression autour des “petits meetings” va donc évidemment de paire avec le fait de rendre ingérable l’organisation de rassemblements fascistes d’ampleur dans les grandes agglomérations.
VERTOU EST POSSIBLE
D’ailleurs, ce samedi, le dispositif était digne d’une manifestation de centre-ville: deux arrêtés d’interdiction, plusieurs compagnies de Gendarmes Mobiles, des CRS, un hélicoptère, un drone, et même des flics en motocross *. Cela ne nous a pas empêché de nous réunir à proximité de la mairie avec banderoles et mégaphones.
Lorsque nous arrivons sur place, le décor est plutôt morbide : une compagnie de CRS se tient entre nous, la mairie et un cortège funéraire sortant de l’église voisine. Seule la présence d’un militant égaré de l’UNI, pris rapidement en charge pour son addiction au téléphone portable, égayera un peu l’ambiance.
Dès les premiers pas du cortège, l’accueil est glacial : les keufs nous chargent brutalement la manif, (le gaz lacrymogènes embaume la place), mais nous nous défendons farouchement. Malgré plusieurs blessés et deux arrêtés, le cortège est toujours vivant et prêt à repartir.
Après un long débat près du cimetière, les perspectives ressuscitent : avec les affrontements et la fébrilité évidente des policiers obligés de gazer à tout va au milieu de la cérémonie mortuaire qu’ils étaient censés “protéger”, le dispositif s’est repositionné à la hâte pour quadriller le centre-ville, ouvrant des brèches aux camarades.
La lumière est à l’ouest du village : (notre horde régénérée) nous traversons (en trombe) un pont mal protégé afin de se (et se) dirige directement vers le meeting, laissant un dispositif trop lourd dans Vertou. Direction la salle des Reigners !
Intersection après intersection, route après route, poubelles, palettes et autres matériels se joignent à notre joyeuse troupe. Les corbillards de la gendarmerie qui tentent de nous barrer la route sont repoussées à coup de barricades et de jets d’objets en tout genre. Mis en difficulté (par notre créativité,) les flics suivront à distance le cortège pendant près d’une heure et ne réussiront pas à nous stopper avant l’arrivée sur le hameau qui accueille le meeting.
Cette séquence de mouvement sauvage montre que nos tactiques issues des manifestations urbaines (points de fixations, lignes de parapluies, barricades, réquisition des installations privées comme publiques…) s’adaptent aussi bien aux départementales de campagne qu’aux marécages et vignes de muscadet.
C’est ainsi qu’en Vertou et contre tout, nous arrivons finalement aux portes de la bourgade et constatons que les fascistes et les flics se sont retranchés dans un véritable bunker: routes barrées, contrôles systématiques des voitures, des cyclistes et des passants qui arrivent dans le hameau. Les vieilles goules du DPS (le service d’ordre du RN) filtrent main dans la main avec les forces de l’ordre chaque personne qui s’approche.
Déterminés à ne pas se laisser enterrer ici, nous coupons à travers champs, franchissant clotûres et ruisseau en se jouant des gendarmes (médusés) pour arriver tout près du meeting. Seule une forêt trop dense et une ligne de policiers sauveront de la débandade Chenu et ses vampires réactionnaires : c’est à très exactement 87 mètres de l’objectif que notre cortège se fera péniblement nasser par tout ce que les fossoyeurs de la police et de la gendarmerie, probablement aussi nombreux que nous, réussiront à rameuter.
Quelques uns d’entre nous tenteront de s’enfuir, et se feront pour une partie interpeller et emmener au poste. Loin de se démonter, nous avons decidé de gérer ce moment avec les mêmes pratiques que celles développées dans les manifestations urbaines : refus de la négociation sur les sorties au compte-goutte, pas de contrôles des sacs et des identités, vestiaire collectif, le tout en chanson… Après deux heures d’attente, les nassés ont tous pu repartir joyeusement (escortés par le dispositif au complet) sans encombres et avec leurs affaires, sans subir d’amende ou de contrôles.
Fait notable : ni le cortège ni les guetteurs n’apercevront de la journée la moindre trace d’une seule bande de fafs organisés, de véritables fantômes pour l’occasion.
QUE TIRER DE CETTE ACTION ?
Tout d’abord, cette expérience nous montre qu’il s’en est fallu de peu pour planter le dernier clou sur le cercueil de ce meeting, (dont l’ambiance sentait d’avantage le formol que la fièvre patriotique).Malgré un dispositif très conséquent et agressif dès les premiers moments, il aurait suffit d’un tout petit peu plus de préparation et d’à peine plus d’une centaine de camarade pour enterrer définitivement la messe putride de Chenu.Même si cette manifestation a été une réussite sur de nombreux plans, une véritable victoire de ce type aurait frappé les esprits durablement et donné encore plus de forces à nos initiatives futures.
Alors que l’assemblée antifasciste nantaise tenue quelques jours plus tôt a regroupé avec succès près de 200 personnes, il faut donc questionner ce qui a pu décourager les camarades à bouger en grand nombre dans un endroit accessible en transport un samedi après-midi.
Plus que jamais, il est nécessaire que cette expérience permette de balayer quelques craintes (et légendes urbaines) concernants ces actions antifascistes qui ont eu lieu ailleurs que dans nos centre-villes ou sur nos terrains connus :
Ces appels ne sont en aucun cas des bourbiers où il s’agit de se sacrifier pour la cause ou “envoyer les gens au casse-pipe”, comme l’ont déjà prouvé les manifestations contre le meeting de Bardella a Bruz, ou celles à Saint Brévin. Malgré tous les efforts du maintien de l’ordre (et de ses croquemorts en uniforme) ce samedi, la victoire était à portée de main.
(Loin d’être un mouroir politique, ces actions ajoutent par dessus tout une pierre à l’expérience antifasciste en faisant vivre des actions et des blocages dans les zones éloignées des centres-villes. C’est une preuve supplémentaire que l’on peut casser la malédiction des manifestations syndicales déprimantes en se rendant là où nos ennemis sont les moins préparés à nous recevoir : zones commerciales, plateformes logistiques, aéroports, hub autoroutiers…)
DÉFAIRE LE SPECTRE DE LA RÉPRESSION
En premier lieu, il est important de revenir sur les craintes autour des interdictions de manif et leur conséquence potentielle, à savoir une amende de 4ème classe de 135 euros.
De manière générale, il faut rappeler qu’une contravention, quelle qu’elle soit, ne peut pas justifier un placement en GAV, ce qui rend extrêmement difficile pour les flics de contraindre les camarades à fournir leur identité pour leur coller une prune.
Mais par dessus tout, il faut diffuser largement le fait que seule une manifestation déclarée peut être interdite. Dans le cas présent, l’absence de toute déclaration préalable, qui est un choix politique et stratégique de nos assemblées de lutte, rend inapplicable les contraventions pour manifestation interdite et permet de les contester directement sur cette base.
Il n’y avait donc pour ainsi dire quasiment aucun risque de ramasser une amende forfaitaire de 135 euros en se rendant ce samedi à Vertou.
Et si à notre connaissance personne n’a été concerné par des amendes lors de la manif, nous nous tenons évidemment à disposition des camarades qui auraient éventuellement été verbalisé.es pour les aider dans ces démarches de contestation, via les canaux des assemblées antifascistes.
Les amateurs de rubriques nécrologiques passeront aussi leur chemin : passé le choc des arrestations et des blessures occasionnées par la violence et l’effet de surprise de la première charge, les camarades ont montré qu’il était possible de se réorganiser pour rester mobiles et tenir à distance les agents de la préfecture.En dépit de l’intensité des échanges avec ces derniers, personne ne s’est fait isoler ou tabasser dans les coins lors de la nasse ou sur la dispersion.Coté garde à vue, celles et ceux arrêtés pour avoir tenté de fuir la nasse sont sortis rapidement sous X. Quant aux deux camarades pris sur la première charge et déferrés en comparution immédiate le lundi, ils sont pourvuivis (tant bien que mal) pour “groupement en vue de commettre des violences et des dégradations”, avec des éléments extrêmements limités au dossier. Et malgré le déplacement du préfet en personne et de son directeur de cabinet, la faiblesse des charges contre eux (n’)a accouché (que) de placements sous contrôle judiciaire, avec une convocation pour un procès en janvier.
Pour résumer, nous pourrions dire qu’une fois encore, la combativité et la ruse déployées par les camarades n’implique aucunement qu’il y ait en bout de course une explosion des blessures et de la répression.
COMBATTRE LE FASCISME INSTITUTIONNEL
Enfin, contrairement à ce que se plaît à raconter la députée de gauche Marie Mesmeur lorsqu’elle se sert du travail de l’AG antifasciste de Rennes pour dénoncer l’UNI, il n’y a nul besoin de la présence de “groupuscules violents” aux “pratiques antirépublicaines” pour justifier une intervention contre le meeting.Qu’importe qu’il y ait ou non des bandes de fafs de rue au sein de ce rassemblement, car c’est bien par leur organisation légale et par le vote que l’extrême droite menace de prendre le pouvoir en France.
Et si les vieux fascistes qui composaient l’assistance de Chenu semblaient relativement inoffensifs, c’est bien la police tout à fait républicaine qui viendra appliquer leur programme à coup de matraques, d’emprisonnements et d’expulsions.
Pour toutes ces raisons, nous appelons tous.tes les camarades antifascistes à relayer et prendre part le plus massivement possible aux appels des assemblées antifascistes qui se multiplient aujourd’hui.
Ce weekend a montré que la solidarité entre les différentes villes mobilisées (Nantes, Brest, Rennes, Paris et d’autres…), sans qui la manifestation n’aurait pas été possible, est absolument indispensable si nous voulons agir sur les évènements et atteindre notre objectif : ruiner l’organisation politique, culturelle et économique des fascistes partout où nous pourrons les atteindre.Il faudra donc soutenir de toutes nos forces les initiatives appelées par les assemblées antifascistes émergeantes, et leur donner assez de puissance et de crédibilité pour les occasions futures.
On vous donne donc rendez vous sur les prochaines assemblées et évènements à venir, en remerciant toutes et tous les camarades qui ont fait le déplacement ce weekend !
1- UNE INGÉNIOSITÉ TOUT TERRAIN
Appelé par l’Assemblée Générale Antifasciste de Nantes quelques jours auparavant, le rassemblement annoncé sur la place Saint-Martin à Vertou et interdit par La mairie, avait un objectif clair : se rendre à La salle des Reigniers, située aux Pégers, depuis Le centre du bourg de Vertou.
À partir de la place, les forces de l’ordre empêchaient tout rassemblement devant la mairie, tout en coupant en deux le centre-ville, empêchant un accès au sud et donc à la salle du meeting. Cette stratégie de bunkerisation, bien souvent utilisée lors de l’interdiction des rassemblements, a très vite montré ses limites. En plus de ne pas empêcher tout rassemblement, puisque celui-ci s’est constitué aux abords immédiats de la place et en dehors du dispositif ; la police s’est concentrée en un seul point, laissant donc libre les autres routes menant vers les Pégers.
Après une tentative pour accéder sur le point de rendez-vous initial, ayant entraînée une charge policière qui a fait plusieurs blessures, les flics se concentrent encore davantage sur la place de La mairie et ses accès, pensant qu’il s’agissait de l’objectif tout désigné de la manifestation. S’en suit alors un long moment de réflexion et de discussion tactique, qui continue de faire stagner la situation.
Une fois la décision prise et avec une détermination impressionnante, le cortège se lance dans une stratégie d’évitement de la police, marchant pendant plus de deux heures en direction de la salle, alternant entre course et
marche rapide. Nous y voyons au moins deux réussites tactiques importantes pour le cortège. D’une part, il a été capable de retourner le terrain à son avantage en empruntant tous les itinéraires possibles, sillonnant Vertou, ses départementales et ses champs. Cela a participé à le rendre véritablement imprévisible et impossible à suivre, notamment pour les véhicules. Ces choix n’ont été rendus possibles que par une communication clair au sein de la manif.
D’autre part, il a su utiliser tous les objets à sa disposition pour barrer les accès routiers au meeting, comme ceux de la police. Cela a profondément limité La marge de manœuvre des flics, ne pouvant plus charger directement
le cortège pour le disperser ou l’interpeller. Nous pensons que la défense dans la rue passe inévitablement par une compréhension claire des mouvements des policiers et du terrain.
Il – SOLIDARITÉ EN 4X4
Pendant toute la journée, les meilleurs alliés auront été la solidarité et le jeu collectif. Un cortège soudé et vaillant, donnant lieu à une solidarité qui s’est exprimée de plusieurs manières et permettant une longue manifestation que toutes les mauvaises intentions du monde n’ont pas permis de désunir. Durant plus de trois heures, Le cortège s’est tenu dans un esprit collectif et fort.
Une fois nassés et contenus par le dispositif, les espoirs d’atteindre la salle s’échappent, mais la solidarité continue et les tentatives d’individualisation et de contrôle de la part des condés sont refusés collectivement par l’ensemble des camarades présents. Dépités et impuissants face à la volonté de rester ensemble et de ne pas céder aux chantages d’une sortie individuelle mais
rapide, Les condés se retrouvent à devoir raccompagner le cortège dans le bourg de Vertou, pour l’éloigner de la salle sans qu’ils ne puissent rien tenter, sans même pouvoir piquer la moindre paire de Nabaji.
RAPPEL POUR SE DÉFENDRE COLLECTIVEMENT :
Nous conseillons vivement de NE PAS SE RENDRE en manifestation avec ses papiers d’identité et son téléphone. Cela permet notamment d’élaborer ensemble des stratégies pour éviter le contrôle des identités, comme cela a été rendu possible samedi. Cette stratégie a permis d’éviter de potentielles amendes pour participation à une manifestation interdite, mais aussi le fichage généralisé des personnes présentes.
Dans la mesure du possible en cas de nasse, continuons de refuser les fouilles et Les contrôles. En cas de contrôle nous pouvons aussi donner un nom collectif.
ll- LE PARQUET À LA RESCOUSSE DE LA PRÉFECTURE
Face à un cortège déterminé et solidaire qui a mis en échec le dispositif policier, Les flics n’ont donc pu que procéder à des interpellations purement opportunistes.
Deux camarades sont arrêtés lors d’une charge de CRS au début, à proximité de l’église. Les huit autres, quant à eux se sont faits interpeller en plein milieu des vignes alors qu’ils avaient été coupés du gros de la troupe, peu de temps avant la nasse. Cela illustre d’ailleurs l’efficacité de former un cortège soudé et d’écouter les conseils donnés au mégaphone, pour éviter une dispersion tout azimut provoquant un isolement qui profite à la police.
Sur les dix camarades arrêtés, seuls les deux premiers ont été poursuivis et déferrés lundi, après 48h de garde à vue (la prolongation ayant permis leur déferrement, impossible un dimanche), dans le cadre d’une procédure de comparution immédiate (CI). Ils ont tous les deux fait usage de leur droit au silence durant les auditions par les gendarmes et demandé un délai pour préparer leur défense.
Alors que La presse d’extrême-droite, en pleine collaboration avec les flics, tente de monter l’affaire en épingle en évoquant la présence d’un fiché S parmi Les inculpés, la réalité judiciaire de ce dossier vide vient rattraper ce récit et celui de la préfecture.
Après avoir été poursuivis initialement pour : violences sur personne dépositaire de l’autorité publique d’après les journaux locaux puis peut-être pour rébellion puis finalement… non ; les camarades sont en réalité poursuivis pour : « groupement en vu de commettre des violences ou des dégradations », « dissimulation du visage sans motif légitime » et « refus de prélèvements signalétiques » et « refus de prélèvements biologiques ». L’appareil judiciaire décide donc de poursuivre leur simple présence sur place, en l’absence de tout autre élément matériel, ainsi que le port supposé de masques de protection FFP2 ou chirugical. Ces poursuites, reposant sur deux dossiers vides, traduisent deux éléments qui nous semblent importants : d’une part, le caractère purement opportuniste de leurs interpellations ; d’autre part, la volonté du parquet de poursuivre quoi qu’il en coûte afin de ne pas perdre la face et de pouvoir apporter une traduction judiciaire aux évènements de ce samedi de mobilisation, notamment au pied de nez mis à la préfecture par le cortège.
Suite à leur demande de délai pour préparer leur défense, qui est un droit qui ne peut pas être refusé en cas de CI et que nous conseillons impérativement de demander, le parquet a requis un placement sous Contrôle Judiciaire (CJ) en attente de leur procès. Le tribunal finit par s’aligner sur les demandes du procureur, particulièrement sévères pour des poursuites aussi faibles. Ils doivent pointer une fois par semaine au commissariat, répondre aux convocations des services socio-judiciaires, ils ont également l’interdiction de rentrer en contact, de participer à une manifestation et de se rendre dans des périmètres géographiques définis.
Cette décision est l’expression d’une dynamique judiciaire à l’œuvre depuis plusieurs années : les mesures de CJ interviennent comme une peine en soi, avant même Le jugement. L’utilisation élargie des contrôles judiciaires contre les acteurs du mouvement social constitue une offensive grave contre les droits de la défense. Nous entendons bien combattre ces décisions et nous pensons qu’il faut mener une bataille contre cette logique répressive, par exemple en déposant une mainlevée pour contester ces mesures quand cela est judicieux.
DU VIGNOBLE AUX TRIBUNAUX, DÉFENDONS-NOUS ENSEMBLE !
Le 14 octobre, nous apprenions que le RN et son mouvement de jeunesse local entendaient organiser une « réunion publique » près de Nantes en présence de Sébastien Chenu, numéro 2 du parti d’extrême droite. Prudent, le parti a jugé bon de se cacher à Vertou, ville bourgeoise au sud est de Nantes, dans un lieu
tenu secrêt et dans un cadre ouvert uniquement aux adhérentes du RN. Ce niveau de méfiance pour le premier parti fasciste de France n’a rien d’étonnant dans l’agglomération nantaise. Il est la conséquence d’une hostilité générale et d’une stratégie. Nous assumons tout mettre en œuvre pour éviter sa prise de puissance et son implantation, avant même que l’extrême droite ne puisse représenter un danger, en s’attaquant aux manifestations, aux espaces d’organisation, aux soirées militantes, aux lieux ou à n’importe quelle composante de ce mouvement.
A travers leur réunion, le RN cherchait à produire minimalement trois de ses objectifs politiques :
– la constitution d’une base électorale dans un bastion historique du mouvement social ;
– la formation de cadres locaux, indispensables à sa tentative de prise de pouvoir par les urnes ;
– la galvanisation d’un socle militant en Loire-Atlantique avec la venue du premier membre du RN ayant occupé un poste à responsabilité sous la Ve République (à savoir Vice-Président de l’Assemblée nationale entre 2022 et 2024).
Malgré la tenue de la réunion à Vertou, c’est-à-dire à plusieurs kilomètres du centre ville nantais, malgré le caractère fermé de cette réunion annoncée comme publique, nous avons décidé d’organiser une assemblée générale la plus large possible avec un objecbif clair : ce « meeting » ne doit pas se tenir.
Les expériences de la venue de Marine Le Pen à Nantes en 2017 qui a déclenché une émeute dans le centre ville de Nantes, de la prise d’assaut du meeting de Zemmour en 2022 ou encore de la lutte contre l’existence du moindre groupuscule de nazillons, sont inspirantes. A partir d’elles et de nos mots d’ordre clairs : tuer le fascisme dans l’œuf, le désorganiser et empêcher par tous les moyens son accession au pouvoir et son implantation locale, nous avons poursuivi la stratégie d’empêcher la tenue de ce meeting. L’Assemblée générale antifasciste du lundi 21 octobre a réuni environ 250 personnes sur le campus Tertre de l’université, étudiant.es et non étudiant.es. Au delà d’empêcher la venue du RN dans le coin, nous étions désireux.ses de nous opposer à la transformation de l’appareil d’État et aux politiques autoritaires et racistes qui marquent la séquence post-électorale. Période qui a vu s’imposer un gouvernement
réactionnaire.
Nous y avons décidé la tenue d’une manifestation au départ de la place de la mairie de Vertou. L’objectif étant de se rendre à la salle municipale des Reigniers, lieu de leur réunion trouvé en quelques minutes. Située à 4 km au sud du centre-ville de Vertou en traversant la Sèvre, cette salle se trouve dans un
tout petit village peu accessible en transports en commun.
Dans cet appel, nous avons souhaité affirmer notre capacité à réaliser par nous-mêmes nos objectifs, sans rien attendre de la gauche traditionnelle. Au regard de son incapacité à produire des appels ambitieux, et de sa politique centrée sur l’électoralisme, nous pensons que nous avons eu raison de croire au choix de
l’autonomie. L’appel antifasciste pour le 26 octobre a bien été relayé par de nombreuses organisations de la gauche nantaise.
Cette même gauche a pourtant très peu mobilisé le jour J. Seule l’autonomie peut nous permettre d’intervenir efficacement, que ce soit contre l’extrême droite ou contre les différentes politiques
réactionnaires de l’État. Le soutien apporté par les villes telles que Rennes, où une AG s’est tenue dans la foulée, Brest, Paris ou Angers en est une nouvelle fois la preuve.
Les autorités choisissent une stratégie de dissuasion en deux étapes. D’abord l’interdiction de la manifestation, ordonnée par le maire droitard et relayée par la Préfecture, puis un dispositif policier
colossal qui occupe la place de la mairie et cherche à empêcher tout rassemblement. Cependant, samedi 26 octobre à 15h, plus de 250 personnes se rassemblent à Vertou sur la place du Beau Verger, à côté de la place de la mairie.
Peu après 16h, le cortège fait mouvement en direction de la place de la mairie pour aller vers le sud par le pont du Portillon. Deux importantes charges policières l’empêchent d’avancer. Après discussions, le cortège fait le choix de se rendre à la salle par un deuxième pont, le pont du Chêne, situé à l’ouest de la commune de Vertou. Durant environ 1h30, avec une détermination et une solidarité exemplaires, la manifestation a marché vers la salle, traversant sans encombres le pont et laissant derrière elle quelques barricades pour ralentir la police. Il suffisait pourtant aux forces de répression de le barrer pour nous empêcher de passer.
Redoublant d’inventivité, le cortège a su esquiver les barrages routiers des CRS et gendarmes, passant par les champs et traversant les ruisseaux.
Après un blocage minutieux de deux des 4 axes traversant le centre des Pégers (où se trouve la salle des Reigniers), et un contournement par un chemin à travers vignes, forêt et champs au nord de la salle, le cortège de 150 personnes se retrouve nassé (dispositif de privation de liberté collectif à ciel ouvert) à moins de 100 mètres de la salle si massivement protégée ; les charges et les gazs lacrymogènes n’ayant pas suffi à disperser. En refusant, toutes et tous ensemble, les fouilles et les sorties individuelles, et après plus de deux heures de bonne ambiance entre blagues et chorale, le cortège a été raccompagné par les flics pour se
disperser dans le centre de Vertou. Là, des individus isolés liés au RN guettaient la dispersion des manifestant.es antifascistes pour s’assurer de repartir sans encombres, révélant par là le fait que ce
sont les fascistes qui ont eu peur ce jour-là.
Nous assumons tout.
Oui, nous avons atteint les abords de la salle avec pour ambition d’empêcher toute venue du RN à Nantes, y compris dans sa campagne périphérique. Nous rejetons tout débat démocratique avec un parti fasciste, fondé par des anciens de l’OAS, d’Occident et de la Waffen-SS Division Charlemagne.
La communication victimaire du RN sur ce week-end illustre que l’appel de l’AG a visé juste en s’attaquant à un point sensible de l’organisation du parti. Ce même discours victimaire se conclut par une rhétorique habituelle : le RN aurait réussi à tenir son meeting contre vents et marées. Mais en réalité, le nombre de personnes présentes était bien moins important que la jauge de 80 personnes de la salle.
Si notre objectif était d’empêcher purement et simplement le meeting, et si, donc, nous ne l’avons pas atteint, il n’en demeure pas moins qu’il a été fortement perturbé. Le parti, qui essaie encore de se dire anti-système, est resté en communication constante avec la gendarmerie qui avait dressé un dispositif colossal pour protéger le lieu de la réunion. Ce que nous apprend cette longue journée, c’est que nous avons des capacités de mobilisation et d’organisation suffisantes pour créer un cortège déterminé pouvant marcher longtemps pour atteindre un parti d’extrême droite. Nous sommes capables de contourner en grande
partie un dispositif policier énorme possédant des moyens technologiques et armés que nous n’avons pas. Il ne nous aura donc manqué qu’un peu d’anticipation et de façonnement du terrain pour atteindre réellement la salle. Nous saurons nous rappeler de cette expérience.
Remarquons aussi que l’interdiction de manifester devient une norme pour la préfecture. Moyen efficace de dissuasion, de nombreuses personnes ne se sont pas rendues à Vertou pour cette raison. Nous invitons à braver ces interdictions et user de la force et de la solidarité collective pour faire face à la répression
policière et judiciaire qu’elles légitiment aux yeux des autorités.
Ce jour-là, 10 personnes ont été interpellées, huit sont sorties sans suite, deux autres sont poursuivies pour « groupement en vue de commettre des violences ou des dégradations », « refus de signalétique » et « visage dissimulé ». Subissant un Contrôle Judiciaire lourd, nous n’oublierons pas d’aller les soutenir à leur
procès.
Tous les maires de Loire-Atlantique, de Bretagne et du Grand Ouest doivent prendre conscience des conséquences de l’invitabion du RN ou de tout autre parti d’extrême droite dans sa commune, en
termes de conflictualité politique.
Plus largement, nous appelons l’ensemble de celles et ceux qui pensent que nous ne devons compter que sur notre autonomie, à participer ou à créer partout des assemblées antifascistes pour enfin reprendre l’initiative !