LA MER INVITÉE À DOUARNENEZ

Au départ, il y a un lieu hors-norme, la Parole errante, à Montreuil, qui s’est fabriqué à la croisée du travail du dramaturge Armand Gatti et de son équipe, entrelacée à celle d’innombrables initiatives, rencontres et créations accueillies dans cette ancienne usine depuis plus de dix années. Au-delà de tout critère de rentabilité ou de reconnaissance, tout comme des frontières habituellement admises de « l’art », du « social » ou de la « politique ».

Or depuis maintenant trois ans, le propriétaire des locaux, le Conseil départemental de Seine-St-Denis, cherche à remettre la main sur les lieux et faire de cet espace une institution culturelle de plus. Ses usagers et les collectifs qui l’occupent quotidiennement ou régulièrement ont donc créé le collectif la Parole demain,à la fois pour continuer à faire fonctionner le lieu mais aussi pour imposer des suites qui repartent de l’existant et renforcent son autonomie.

Après la création d’un Centre Social Autogéré il y a deux ans, le projet d’une Maison des écritures et des revuesa pris forme cette année. Les Cahiers Armand Gatti, la revue en ligne L’insatiable et les éditions Libertalia, qui se cotoyaient déjà dans la « Maison de l’arbre », ont été rejoints par les éditions Niet, ainsi que les revues Zet Jef Klak, qui reviennent ainsi dans le lieu où elles sont nées.

C’est à cette toute jeune MER en devenir que le Local a offert une carte blanche pendant le festival de Douarnenez.

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LUNDI 20 / RENCONTRE REVUE JEF KLAK / 19H

Lecture de textes et écoute d’extraits du disque de créations sonores, à paraître dans le prochain numéro de la revue Jef Klak : Course à pied

« Plus j’y pense, plus la cavale recommence à me courir dans le cigarre », Albertine Sarrazin, La Cavale, 1965

Courir, à pied. Pour échapper à la guerre ou garder la forme. Se sauver pour se sauver.

Jef Klak est parti·e de la polysémie du verbe se sauver, faisant dialoguer la fuite et le soin de soi. Parce que s’arracher à pied, c’est engager les corps. Corps naufragés, agressés, traqués, pesés,comparés, empêchés, expulsés, exposés à la mort. Face aux contraintes et aux injonctions, quelles échappatoires ? Jef Klak s’est intéressé·e aux évasions, aux esquives, à la mort qui passe à ça, mais qui passe.

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MARDI 21 / FOND ARMAND GATTI / 20H

Projection du film « Hervé ou la solitude en quatre nationalités »,réalisé par Stéphane Gatti d’après un texte d’Armand Gatti – soirée présentée par le Fond documentaire Armand Gatti et Stephane.

Pendant trois ans de suite, de 1970 à 1973, Gatti est invité par l’IAD(l’Institut des arts de diffusion) à Bruxelles pour partager laquestion de l’écriture théâtrale avec des étudiants et des étudiantes belges. Il a quitté la scène théâtrale française suite à l’interdiction de la pièce La Passion du général Franco par le gouvernement du général De Gaulle en 1968. Avec ces étudiants et ces étudiantes, il va jusqu’au bout de sa démarche de rupture avec les institutions théâtrales. La première année, il travaille dans l’école de l’IAD. La deuxième année, il s’installe dans une usine désaffectée à Schaerbeek. La dernière année, il part avec ces étudiants et ces étudiantes à 50 km de Bruxelles dans le Brabantwallon. Là il commence à écrire ce que l’on nommera des pièces enquêtes.

Nous sommes à l’époque du plan Mansholt qui préconise la réduction du nombre d’agriculteurs en Europe. Le 15 Février 1971 en réponse àce plan, des agriculteurs venus de toute l’Europe font irruption dans la salle du conseil des ministres européens avec des vaches et mettent à mal la ville de Bruxelles.Pendant neuf mois, les élèves de l’IAD parcourent le Brabant et rencontrent des agriculteurs. Gatti vient d’apprendre la suicide d’un agriculteur breton Hervé qu’il avait rencontré dans la région de Douarnenez. Trois étudiants Yannis le grec, Lupi du Borinage, Félix le congolais accompagnés par le scénographe Jean Baptiste vont confronter l’histoire de cet agriculteur breton mort de solitude à celle des agriculteurs du Brabant puis à l’histoire d’agriculteurs de leur propre pays.

Le film : Dans la cours d’une ferme qui s’improvise en décor, un Congolais, un Belge, un Grec et un Français munis d’une pelle vont »creuser » la question de l’identité paysanne dans un rapport frontal avec la caméra. Le vécu de chacun des quatre, leur culture,entremêlés à l’histoire d’Hervé, le paysan breton célibataire,construisent la progression de la pièce écrite par Gatti. Hervé est un peu de chacun d’eux. Et quand l’un est Hervé, les autres sont le contexte qui « le forme, le déforme, le transforme ». Les récits s’enchaînent avec fluidité, ponctués d’irruptions musicales – chants et guitare – et la caméra à l’épaule les enserrent dans un cadre rapproché. Cette enquête autour du paysan solitaire, c’est avant tout la recherche de l’identité prolétaire (on passe de la chaîne à la ferme), des individus coupés les uns des autres, isolés. Ces quatre hommes affrontant la solitude, c’est la terre et le travail qui les réunit. L’histoire d’Hervé est celle de nous tous : assumer seul tous les combats, quelle qu’en soit leur nature. (Stéphane Gérard,CNC-Images de la culture)

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JEUDI 23 / LUTTER CONTRE L’EXTRACTIVISME / REVUE Z / 19H

La revue Z invite le collectif breton Vigil’oust ! et les Amérindien.nes de la Jeunesse Autochtone de Guyane à partager récits et tactiques de résistances à l’industrie minière.

Dans les Côtes-d’Armor et le Morbihan, trois permis d’exploration minière avaient été octroyés à la société Variscan par le ministère de l’économie en 2014 et 2015. Une surface totale de 920 km2 sur 73 communes, pour dénicher principalement zinc, germanium et tungstène – entre autres pépites déjà cartographiées sur la zone. À eux trois, ils incarnent le caractère indispensable des métaux dans une société qui veut produire toujours plus : le zinc est avant tout utilisé dans l’industrie pour protéger le fer contre la corrosion, le germanium pour fabriquer des fibres optiques, et le tungstène, s’il permet de produire des obus meurtriers, est aussi employé pour… les foreuses de l’industrie minière.

Tandis que Variscan noyait la population dans un jargon technique les rares fois où elle se présentait lors de réunions d’information, des collectifs et des associations se sont constitués pour lutter contre cette opacité et défendre leurs territoires. Car la phase de lancement des recherches est un moment clé : pour qu’une mine ne voit jamais le jour, mieux vaut que les miniers ne mettent jamais les pieds sur place, ne serait-ce que pour jeter un coup d’œil. Quitte à employer les grands moyens ? En mai 2016, la porte vitrée du siège de la société à Orléans a été soufflée de nuit par un explosif artisanal, victime de la colère d’un groupe breton nommé Ni Hon Unan (« Nous-mêmes »). « Diwall ta Variscan » (« prends garde à toi, Variscan »), avait-il inscrit sur un mur. Outre cette action coup de poing, bien d’autres stratégies ont été déployées : du sabotage administratif aux fest-noz anti-mines, ces multiples attaques ont finalement réussi à déstabiliser tous les projets bretons de l’entreprise. Aujourd’hui, les permis costarmoricains ont été abandonnés par celle-ci.

À 7000 kilomètres de là, en Guyane, des terres amazoniennes sont menacées par une méga-mine d’or à ciel ouvert, ironiquement nommé « Montagne d’Or ». C’est là que l’équipe de la revue Z, dans le prolongement de son livre Mauvaises Mines sorti ce printemps, a enquêté pour son prochain numéro, qui sort le 12 septembre en librairie. Si les permis d’exploration menacent le sol de l’hexagone, le projet Montagne d’or, c’est encore un autre délire.

De par sa taille, inédite sur sol français, alors que des mines de cette ampleur grèvent déjà toute l’Amérique du Sud. De par l’absurdité de son objectif : l’or, qui nécessite d’extraire et de traiter une tonne de roche pour en récolter un gramme, majoritairement utilisé par les banques et la bijouterie, deux secteurs dont l’humanité pourrait songer à se passer. De par, enfin, l’histoire qu’elle poursuit : celle du mythe de l’Eldorado, métaphore de la cupidité génocidaire de la civilisation blanche.

La Jeunesse Autochtone de Guyane (JAG), collectif amérindien né durant le mouvement social de 2017, est déterminée à ne pas laisser les industriels saccager leur territoire. Ils et elles sillonnent le pays pour faire entendre leur voix.

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VENDREDI 24 / RENCONTRE AVEC EMMANUEL MBOLELA /19H

Présentation du Livre Réfugié en présence de son Auteur Emmanuel Mbolela

Une odyssée africaine.

Persécuté pour des raisons politiques, Emmanuel Mbolela (né en 1973) a fui la République démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre) en 2002. Il a voyagé six ans durant lesquels il a affronté les mêmes difficultés que des milliers d’autres migrant-e-s : racket des douaniers, business des passeurs, embuscade dans le désert du Sahara, travail au noir à Tamanrasset pour financer la suite du voyage et enfin la nasse marocaine, où il est resté bloqué pendant quatre ans.

Là, et c’est l’un des deux apports principaux de son récit, il a fondé avec des compatriotes la première association de réfugié-e-s : l’Arcom, Association des réfugiés congolais au Maroc, refusant ainsi le statut de victime muette et impuissante dans lequel on le tenait. L’autre intérêt de ce livre est de montrer combien les femmes subissent encore plus de violence et d’exploitation que les hommes tout au long du parcours, mais aussi comment ce sont elles qui sont à l’initiative des actions de résistance et de protestation contre les conditions indignes imposées aux réfugié-e-s. Emmanuel Mbolela a fini par obtenir l’asile politique en Hollande en 2008. À partir de là, il a très vite rencontré des réseaux d’activistes pro-réfugiés en Allemagne (association AEI : Afrique Europe Interact), ce qui explique que son récit a été publié d’abord en allemand sous le titre Mein Weg vom Kongo nach Europa (Mandelbaum Verlag en 2014).

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En dehors de la carte blanche a la MER.

LE LOCAL ACCUEILLE AUSSI

SAMEDI 25 / SITUATION POLITIQUE ET SOCIALE AU VENEZUELA / 19H

Nous accueillerons un militant de La Libertaria, ferme autogérée et

espace contre-culturel au cœur des Andes.


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MERCREDI 22 / AVEC DISPAC’H TOURISTIFICATION , GENTRIFICATION ? / 19H

Dispac’h est un collectif de jeunes indépendantiste, anticapitaliste, féministe, écologiste, antifasciste et internationaliste. Discussion , infokiosque , information autour des luttes contre le tourisme de masse , la désertification et la gentrification des territoires.