Ceci est une invitation à discuter depuis cette question : que peuvent devenir les liens tissés entre collectifs, personnes, organisations à la suite du mouvement contre la loi « travaille ! » ?

Cette discussion fait suite à celle du mercredi 28 septembre. On y a posé le problème suivant : une réinvention du mouvement est-elle possible, au moyen d’une manière renouvelée de poser nos ambiances dans les rues de Rennes ? Pour nous, c’était une simple tentative : décrisper nos imaginaires, les mettre en partage, afin que nos interventions politiques communes puissent en être porteuses. Des problèmes posés à la fin de l’échange nous ont conduits à en appeler une nouvelle.

1 – Désormais, la vague du mouvement s’est retirée. Elle était peuplée de personnes qui – emportées par son ampleur – ont tissé des liens, se sont organisées ensemble. A présent, c’est comme si ces liens avaient perdu leur milieu de vie – celui qui leur a permis d’advenir. Les poissons extraits des cours d’eau risquent la mort, certes. Mais il demeure certains êtres qui semblent voués à continuer leur chemin, au-delà des frontières de leur territoire hospitalier : les ancêtres des grenouilles durent bien quitter la mare pour s’aventurer sur la terre sèche. Le « collectif » (on se demande comment l’appeler) qui est né dans ce mouvement est évidemment un de ces êtres politiques qui ne sont pas nés pour rester cantonnés à ces parenthèses que sont les « mouvements sociaux », ou pour s’enkyster en attendant une hypothétique prochaine marrée. Ce qui l’anime ne peut se contenir dans un printemps, ça déborde – effectivement. Mais il faut admettre qu’on ne peut persévérer dans un nouveau milieu d’existence sans se transformer.

2 – Pourquoi cette métamorphose vaut-elle la peine, quand bien même elle nous semble incertaine, fragile ? Parce que des choses importantes se sont nouées durant ce mouvement. Par exemple, un savoir de la composition qui ne faisait qu’accroître notre détermination (l’émergence de l’AGI) ; ou encore, d’intelligentes articulations entre les situations à échelle locale et globale (l’occupation de la maison du peuple en résonnance avec différents lieux pris de force dans d’autres villes), des nœuds tentés entre des luttes dites « sociales » et d’autres dites « écologiques ». Nous pourrions, plus simplement, rester dans notre élan et nous laisser aller à la course de l’actualité militante. Mais si l’on ne se donne pas les moyens de réfléchir ensemble à ce qui traverse ces luttes et ces causes-là (ce qui fait qu’elles se sentent proches même lorsque des milliers de kilomètres les séparent), cela risque fort d’entraîner notre désarticulation. Où se situe le point de tension commun entre les racines qui poussent à la ZAD et les nomades forcés de calais ? Entre la loi travail et le réchauffement climatique ? Chacun-e a certainement sa petite idée. Peut-être que nous ne pourrons pas nous dispenser plus longtemps d’en discuter ensemble.

3 – Le jour où la première grenouille est sortie de l’eau, elle a compris que certains de ces organes pouvaient la sauver, à condition qu’ils jouent un rôle nouveau – adéquat au milieu qu’elle s’apprêtait à habiter (sont alors apparus les poumons des terriens). Comment le « collectif » du mouvement, qui est plus que la somme de ses participant-es, individus ou groupes de toutes formes, peut se donner les moyens de continuer à consister dans son nouveau milieu d’existence ? Comment les entités dont nous nous étions dotées pendant le mouvement, tel l’AGI, l’AG de Rennes 2, etc., peuvent muter pour devenir adéquates à ce nouveau contexte ? Quelles sont les formes d’échange, d’action, de décision commune, que nous voulons nous donner pour maintenir la force que nous avions ensemble au printemps ? Quels espaces, quels temps voulons-nous mettre en forme?

C’est de cela qu’il nous semble important de discuter lundi, en nous nourrissant des nombreux exemples que nous connaissons, d’expériences passées, autant que d’intuitions nouvelles….

…et des petites choses à grignoter que les unes et les autres pourront apporter à partager.

Rendez-vous lundi 17 octobre, à 18h30, à la MIR (Maison internationale de Rennes), 7 Quai chateaubriand, salle Atlantique, 1e étage.

(signé : deux rennettes)