Comme d’habitude, les forces de l’ordre ont quadrillé l’accès aux artères commerçantes du centre historique : les rues d’Orléans, de Rohan et Jean Jaurès sont thrombosées de CRS, de gendarmes mobiles et de camions de police. Arrivé.es place de Bretagne, quelques manifestant.es tentent de mener le cortège vers le centre ville, en l’absence de barrage policier, mais sont peu suivis : le gros de la manifestation a déjà suivi la tête de cortège.

Le trajet déclaré est désespérément court. Après avoir dépassé le boulevard de la liberté, le cortège principal s’éloigne du centre ville et s’arrête place Charles de Gaulle, après seulement 1200m de manifestation ! Mais le cortège de milliers de personnes est tellement étendu, que des centaines de personnes sont arrêtées au carrefour précédent. Elles ne tardent pas à faire redémarrer un cortège vers la rue Maréchal Joffre pour continuer […] la colère monte d’un cran et des centaines de manifestant.es tentent de remonter vers la mairie. Ils sont rapidement refoulés par la police, à grand renforts de gaz lacrymogène, en plein milieu des passants venus faire leurs courses de Noël.

Logiquement, des projectiles fusent vers les forces de l’ordre. Progressivement, une ambiance insurrectionnelle s’installe. Des barricades commencent à être érigées avec des poubelles enflammées et des barrières de chantier. Les panneaux publicitaires sont arrachés, les vitres des abribus brisées. La police réplique par grenades lacrymogènes. De nombreux tirs de LBD sont entendus. Plusieurs manifestant.es sont touché.es, une personne sera évacuée à l’hôpital.

La contestation se poursuit pendant plusieurs heures dans une énergie collective et solidaire. L’asphalte est dépavé. Des projectiles divers (peinture, bouteilles…) sont lancés sur la police qui concentre toute la rage actuelle. Plusieurs feux d’artifice sont également envoyés en leur direction dans l’exaltation de la foule. Quelques fleurs égayent les barricades. Des habitants, ébahis, observent la scène depuis leurs appartements avant de rapidement se réfugier à l’intérieur devant l’irrespirabilité de l’air empli de gaz. Les caméras de la place de la république sont mises hors service unes à unes. […]

Un conteneur de chantier sur roues est incendié et lancé sur une ligne de CRS. Atmosphère surréaliste alors qu’à quelques dizaines de mètres derrière les cordons de police, des gens continuent tranquillement leurs achats, détachés de l’actualité et dans un esprit consumériste étrange.

A l’arrivée du canon à eau, probablement amené en catastrophe pour aider une police dépassée, les manifestant.es refluent sans panique vers la rue Marchal Joffre. Tout aussi déterminé et collectif, les acclamations résonnent énergiquement dans la rue : “on part ensemble, on reste ensemble”.

Après un rapide retour à République toujours misérablement noyée dans l’eau et le gaz par la police, quelques dizaines de personnes s’engagent dans les rues au sud de la place. Une cinquantaine de personnes s’avancent dans la rue Vasselot en chantant joyeusement contre l’Etat policier.

La CDI (Compagnie Départementale d’Intervention), se colle rapidement derrière le petit cortège. Soudainement, plusieurs camions de cette même compagnie pilent à la sortie de la rue, devant les manifestants et plusieurs policiers se ruent sur les manifestant.es piégé.es dans la rue. Panique totale des commerçants et leurs clients qui se réfugient à l’intérieur des boutiques dans l’affolement. Certains manifestant.es réussissent à s’échapper de la ruelle, d’autres sont coincés dans une entrée d’immeuble. Ils en sortiront après un rapide contrôle de la CDI.
Si cet épisode sonne la fin de la manifestation pour une partie des manifestant.es, de nombreux autres gardent leur détermination et repartent vers la Place de la République.

Il y règne une ambiance apocalyptique. Les passants qui n’ont pas vu la place depuis la fin de matinée marchent d’un air abasourdis au milieu des pavés et autres objets jonchant le sol. D’autre trébuchent dans les barrières, dans des sons métalliques aux quatre coins du lieu.

La nuit commence à tomber et, moins en moins nombreux.se, les manifestant.es quittent progressivement le secteur. Quelques dizaines d’irréductibles restent sur place mais la police, devenant en surnombre, reprends le terrain. Un officiel ordonne dans son haut parleur de quitter les lieux à plusieurs reprises, d’un air las et agacé. […]

Une dizaine de personnes auraient été arrêtées, la plupart en toute fin de manifestation. Bien que le cortège n’ait pas pu se rendre dans les artères les plus commerçantes, c’était malgré tout un rapport de force réussi, à la hauteur de la gravité de la situation politique actuelle. Bravo et soutien aux Rennais.es !

Et à Nantes ? Malgré des banderoles de compétition, une affluence massive et un gros cortège de tête, le dispositif policier considérable, surdimensionné, met un frein a une offensivité d’ampleur. Mais ce n’est que partie remise ! D’autres manifestations auront lieu prochainement et les nantais.ses restent très mobilisés.

Le reportage complet : https://www.nantes-revoltee.com/loi-securite-globale-retour-sur-la-manifestation-rennaise/