La première personne passe pour violences sur personnel dépositaire de l’autorité publique, refus de signalétique et refus d’ADN. Elle demande un délai et son avocat plaide notamment sur le fait que les flics ont été anonymisés dans la procédure. Les parties civiles apparaîssent en effet sous leur matricule et plus sous leur nom.

Rendu : Le procès a été reporté au 1/02/2019. La personne écope d’un contrôle judiciaire qui lui interdit de se rendre en Loire-Atlantique jusqu’à cette date et obtient la restitution de son sac à dos (que les flics avaient mis sous scellé)

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La deuxième personne passe pour violence sur PDAP sans ITT et rebellion. Les parties civiles portent les matricules RIO 1024794, RIO 1024594 et RIO 1150492 et sont des flics de la BAC. La personne demande un délais. L’avocate demande un supplément d’infos au tritre que les témoignages des flics sont contradictoires. L’un dit avoir vu la personne accusée jeter une bouteille, un autre dit qu’elle a jeté un objet en métal, un policier reconnaît avoir mis cet objet lui-même dans le sac du prévenu au moment de son interpellation, description incomplète de la personne accusée… l’avocate demande un supplément d’enquête : prise d’empreintes sur l’objet en question et exploitation de la vidéo surveillance.

La procureure profite de son réquisitoire pour répondre à la plaidoirie de l’affaire précédente en faisant ce qu’elle appelle une « petite explication de texte sur la procédure anonyme » amenée par la loi sur la sécurité publique du 28/02/2017. Elle argue que l’utilisation de cette procédure est totalement justifiée au regard du nombre de « photos, commentaires et appels à la haine » visant les flics sur les réseaux sociaux. Annie Hupée, l’avocate des flics dira la même chose dans les procès suivants.
 
La procureure se prononce contre le supplément d’information : les vidéos elle veut bien filer celles de l’hélico mais elle n’est pas sûre qu’elles « permettent au tribunal d’en conclure quoi que ça soit ». Elle dit que concernant la « vidéo embarquée » (les caméras-piéton) elle n’a aucun éléments à fournir. On peut se demander à quoi servent les caméras-piéton si le parquet n’a pas accès aux images. On peut parier que si les vidéos avaient été à charge pour l’accusé il n’y aurait pas de difficulté à les fournir et les exploiter ! Elle pense aussi que ça ne servira à rien de prendre les empreintes parce que l’objet est métalique et que les chances que ça aboutisse sur les objet métalliques sont presque nulles (ce qui est absolument faux!). Elle ajoute que « le prévenu était présent à la manif, qu’il a reçu un tir de flash-ball et que ça ne l’a amené à quitter la manifestation mais plutôt à plus s’équiper »

Elle demande un contrôle judiciaire jusqu’à la date du procès, lui interdisant de se rendre dans l’agglomération Nantaise avec un pointage au commissariat proche de son domicile les samedis de manif.

L’avocate de la personne accusée insiste sur le supplément d’information, et dit qu’elle n’a pas d’opposition au contrôle judiciaire.

Rendu : procès reporté au 8/02/2019, contrôle judiciaire interdisant de se rendre à Nantes et ouverture d’un supplément d’information pour la prise d’enpreintes et les vidéos.

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La troisième personne passe pour violences PDAP sans ITT et rébellion. Les deux parties civiles sont sans surprise des flics de la BAC. L’une est complètement anonymisée. C’est celle qui se plaint de rébellion : RIO 1142415.  L’autre, qui se plaint des violences, ne l’est qu’à moitié, les PV alternent entre son nom et son matricule. Il s’agit de Jean-Michel Luccini alias RIO1120679.

La juge parle vite fait des PV des flics. L’accusé reconnaît les violences sur PDAP et la rébellion. On comprend que la personne s’est faite chopper à 19h40 à la gare de Nantes, alors que la BAC y faisait des contrôles. Lorsqu’elle parle du flic qui se plaint de violences, elle alterne entre le nom et le matricule. Jean-Michel Luccini doit être bien dégoûté que son nom fuite dès le premier procès !

L’avocat de la défense force ensuite l’accusé à se positionner :
« Qu’est-ce que vous envisagez pour la suite ? Continuer les manifestations ?
– Me tenir à l’écart »
Sympa l’avocat qui arrive à convaincre la personne qu’elle prendra moins si elle dit à la justice qu’elle se tiendra à l’écart…

Annie Hupé, l’avocate des flics explique l’anonymisation des flics parties civiles. Elle raconte donc au tribunal que c’est la première fois à Nantes que cette procédure est utilisée et qu’il ne s’agit absolument pas d’ennuyer le tribunal ni ses confrères. Elle prétend qu’il s’agit pour les flics de se protéger des représailles dans un contexte où les manifs sont de plus en plus violentes. Elle affirme que les flics de la BAC font l’objet de menaces de plus en plus violentes visant aussi les enfants et compagnes de BACeux. Elle précise qu’il s’agit de menaces écrites et remet aux juges un dossier constitué de pages de commentaires issues de réseaux sociaux et sites internet.

Elle se transforme ensuite en spécialiste des manifs nantaises en affirmant que l’accusé a des velléités activistes. La preuve : « il allait à la gare, alors même qu’en 2016 des activistes y étaient entré·e·s et avaient tout saccagé ! »

Elle juge que les faits reprochés sont graves : Jean-Michel Luccini s’est fait saisir par les jambes, a été projeté contre une voiture et a fait une chute. On sent toute l’émotion dans la voix d’Annie Hupé quand elle essaie de maximiser les dommages et intérêts d’un de ses meilleurs clients.

Elle termine par son blabla habituel sur les BACeux très solicités et exposés à des risques de tous ordres alors qu’ils ne sont équipés que de casques légers et de minces gilets pare-balle (!!).

La proc parle d’une manif de 2600 personnes où il y a eu 15 interpellations. Elle dit que les forces de l’ordre et le parquet sont là pour défendre la liberté de manifester et avoue que certain·e·s d’entre-elleux soutiennent peut-être le mouvement dans leurs convictions personnelles. Elle dit qu’elle ne peut pas accepter les violences et les dégradations de biens « qui sont payées sur nos deniers ». Elle estime qu’en frappant un flic c’est la république qu’on frappe et livre ce qu’elle pense des faits reprochés.

Elle explique que c’est normal que Jean-Michel Luccini n’ait pas de certificat médical : « quand on passe son week-end à maintenir l’ordre, on ne va pas passer son jour de repos à répondre à la demande du parquet d’avoir un certificat. Parce que c’est notre seule journée de repos, on peut la passer en famille ! »

Elle dit que l’accusé a commis des violences avant son interpellation et suggère au tribunal de requalifier la rébellion en violences. Elle demande 4 mois de prison ferme et la révocation de 2 mois d’un sursis antérieur. Elle ne demande pas le maintien en détention en précisant « il devra défendre ses 6 mois devant un juge d’application des peines ! ». Elle demande aussi la peine complémentaire d’interdiction de manifs pendant 2 ans.

L’avocat fait une plaidoirie de dissociation d’avec les autres manifestant·e·s : il demande au tribunal de se pencher sur ce que n’est pas l’accusé et ce qu’il n’a pas fait. « Les craintes de représailles des policiers, ça ne le concerne pas. Il reconnaît ce qui lui est reproché et ne le minimise pas. Ce n’est pas un activiste, il ne fait pas partie de l’utra-gauche qui vient en manif depuis quelques années pour en découdre. Il n’était pas en tête de cortège avec un casque et une cagoule et ce n’est pas lui qui est retrouvé avec une arme dans son sac (en référence au premier accusé), ni de pavés. Oui, il a un masque à gaz, mais ce n’est pas pour en découdre, c’est pour les gaz ! Les masques ça ne veut pas dire qu’on va au contact des policiers pour les agresser. ». Il ajoute « Ce n’est pas lui qui est quelques minutes avant cours des 50 otages à dégrader un abri-bus ! »

Il parle ensuite rapidement de ce qui est reproché à l’accusé. Il pense que pour le masque à gaz on ne peut pas savoir s’il y avait des gaz puisque le dernier PV de la manif est fait à 19h10 et qu’il fait seulement état de contrôles d’identités menés par la BAC sur le parvis de la gare. Il explique que l’accusé a pris peur et a voulu échapper au contôle. Il demande à ce qu’il n’y ait pas de requalification de la rébellion en violences, en argumentant que c’est bien dans le cadre de l’interpellation que les faits ont eu lieu.

Il estime que l’accusé n’a pas de haine de la police ni de la société et qu’il ne mérite donc pas de peine ferme. Il ajoute « mon client n’est pas un gilet jaune qui déteste la police. Il n’ira plus en maifestation et il a sans doute raison… pour lui… pour lui ».

Il demande du sursis-TIG ou du sursis mis à l’épreuve avec une une interdiction de paraître dans le centre ville de Nantes pendant 6 mois. Il demande aussi que les dommages et intérêts soient revus à la baisse.

Rendu : 1 mois de prison ferme sans mandat de dépôt. 150€ d’amende pour Jean-Michel Luccini  alias RIO 1120679. Pas de dommages et intérêts pour RIO 1142415 au motif que le préjudice n’est pas caractérisé, pas d’interdiction de manif et pas de remboursement des frais d’avocat des parties civiles.