L’appel à bloquer le pays le 17 novembre, pour protester contre les prix du carburant a été l’un des plus partagé et commenté, particulièrement dans les espaces traditionnellement assimilés à la gauche.
La fascination provoquée par le succès (sur les réseaux sociaux pour l’instant, il reste à concrétiser) d’un mouvement de colère qui rappelle dans les grandes lignes celui des bonnets rouges est assez révélateur du vide idéologique et de l’opportunisme désespéré d’une partie de la gauche.
Sans vouloir mettre tout le monde dans le même sac, ni nier la colère légitime de beaucoup de participant.es, voir les limites de l’appel et de ses mots d’ordres est nécessaire.
Quand on est prêt à agir main dans la main avec les syndicats patronaux du transport, des récupérateurs d’extrême droite et des groupes de soutiens à la police, sans se poser AUCUNE question, c’est qu’il y a un problème.

Mais il y aura du monde !

Il y avait aussi du monde aux marches pour le climat, et donc ? Assisterait on à une France coupée en deux ?
D’un côté les « bobos » du centre-ville, qui font des marches gentillettes et suivent bien proprement toutes les règles. Qui sont instruit, éduqués, se soucient de la planète et ont les moyens d’acheter du bio et d’aller travailler à bicyclette (à assistante électrique, bien sûr). Qui ont beau jeu de donner des leçon de morale à tout le monde.

De l’autre les péri-urbain.es, les campagnard.es, les déclassé.es, écrasé.es par les taxes qui ont un besoin indispensable de leur voiture parce qu’aucune alternative n’existe. Et qui n’ont pas que ça à foutre de parler d’écologie parce que leur première priorité c’est déjà de joindre les deux bouts.

Est-ce une bonne idée de se laisser enfermer dans cette fausse opposition caricaturale et stérile ?
Voilà pourquoi il faudrait parler d’écologie le 17 ?

Parce que c’est les prolos qui se bouffent les produit chimiques dans les usines et dans les champs, c’est les prolos qui doivent se contenter de la malbouffe, parce qu’il n’y a pas de justice en matière d’environnement et que c’est toujours les plus pauvres qui paieront le prix fort.
Et l’exemple du diesel est assez intéressant là dessus, oui ne nous leurrons pas le diesel est condamné à terme à disparaître et oui la fin du diesel se fait au détriment des travailleurs/euses des classes populaires qui se prennent l’augmentation des tarifs en pleine face. Quand tu dépends de la revente de ton ancien véhicule pour pouvoir en changer, la fin du diesel aura un impact important sur tes finances.
Quand on parle de voitures on parle de prolétariat, qui meure le plus sur les routes ? C’est pas le cadres sup avec sa grosse bagnole toutes options et ses gros airbags. Non c’est le/la prolo, qui habite loin de son lieu de travail, qui roule dans une caisse pourrie, qui travaille de nuit ou en 3/8.

Et donc, au nom de quoi les travailleurs/euses ne devraient pas s’emparer de la lutte écologiste ? Si en plus d’être les premier.es concerné.es iels sont aussi les plus durement touché ?
Faut-il laisser ce combat aux gen.tes du centre ville ? Les bobos pour l’instant iels marchent… et c’est tout.

L’appel du 17 novembre prochain pose problème sur de nombreux points, les tentatives de récupération par l’extrême droite et la droite extrême ont déjà été pointées (mais que dire de celle des sociaux-chauvins de la France Insoumise ?) mais au-delà de ça c’est même le fond des revendications qui ne va pas.
Le discours anti-taxes sert avant tout les intérêts de la droite, et les syndicats patronaux du transport routier très impliqués dans l’organisation n’ont pas pour but d’obtenir autre chose que des ristournes ou subventions.

Si vraiment le mouvement du 17 doit être un mouvement populaire, alors il ne doit pas se laisser manipuler par les patrons petits ou grands, qui sont là pour eux et pas pour le plus grand nombre. Et les camarades de gauche qui souhaitent s’y impliquer doivent trouver le moyen de se démarquer clairement. Des revendications écologistes assumées ne pourront que mettre des bâtons dans les roues des revendications patronales.

Il ne faut pas s’arrêter à la face visible des problèmes du quotidien (ici le prix du carburant) mais bien réclamer des solutions pour l’avenir.
Pour ne pas tomber dans le piège tendu par l’extrême droite, qui se réjouie de voir manifester ensembles flics, patron et prolos il n’y a qu’une solution : il faut prendre conscience de nos intérêts de classe !

La colère contre Macron est légitime, le ras-le-bol contre la vie chère est légitime. Le mouvement prend de l’ampleur, mais ce n’est certainement pas une raison pour mettre en veilleuse nos convictions et s’aligner sur les mots d’ordres d’autrui juste parce qu’il y aura du monde.. . Ce qui est particulièrement problématique et pas uniquement par rapport à notre sensibilité écologiste, quand on se revendique antifasciste ou même féministe certains discours portés par les organisateurs/trices du 17 novembre ne peuvent que nous interpeller.

Nos camarades syndicalistes ont déjà élevé la voix pour réclamer des augmentations de salaires, ce qui est stratégiquement beaucoup plus intéressant pour les travailleurs/euses (et moins pour les patrons) nous reprenons cette revendication à notre compte et en ajoutons une autre : nous voulons que les grandes questions écologiques soient tranchée par et pour le peuple.

Cela nous semble la seule façon de vraiment pouvoir parler du prix à la pompe sans servir le jeu de la droite, il s’agit d’assumer une vision écologiste qui corresponde à nos intérêts de classe.