Sans Papiers : s’organiser contre l’expulsion

Les mesures d’expulsions que peut prendre l’état français concernent les personnes sans-papiers. Vous êtes « sans papiers » si vous n’avez pas une situation administrative vous permettant de rester en France. Si vous êtes en cours de traitement d’une demande, ou si vous avez une attestation de demande d’asile ou un récipissé (par exemple dans le cas d’une demande de titre de séjour) vous n’êtes pas considéré-e comme sans papiers. Votre situation est précaire (le droit au séjour est suspendu à une décision de la préfecture, de l’OFPRA ou d’un tribunal suite à un recours) mais vous n’êtes pas expulsable. Enfin il existe une série de situation où vous n’êtes pas « régularisable » mais pas non plus expulsable (par exemple certains membres d’une famille établie en France, mais attention ce n’est pas systématique). Le mieux c’est de se rapprocher d’une association de défense des droits des étrangers pour bien comprendre dans quelle situation vous vous trouvez.


Quelques conseils


– Attention aux contrôleurs dans les transports en commun. Avoir un billet peut limiter les contrôles de papiers. Si vous fraudez, sachez qu’avoir sur soi l’argent pour payer l’amende peut permettre d’éviter un contrôle de papiers.

– De manière générale, méfiez-vous toujours des convocations à la préfecture.

– Si vous êtes malade : ayez sur vous une ordonnance indiquant la liste des traitements dont vous avez besoin et gardez-en une copie chez vous. En cas de contrôle d’identité, vous pouvez la montrer aux policiers en leur expliquant que vous êtes malade.

– Si vous avez des enfants scolarisés : ayez sur vous les certificats de scolarité de vos enfants, et n’hésitez pas à les montrer à la police en cas de contrôle.

– Si vous ne donnez pas votre identité : évitez d’avoir un passeport sur vous. Ne gardez pas votre passeport sur votre lieu de vie (il arrive que la police vienne le chercher au domicile). Prévenez votre entourage de ne jamais l’apporter au commissariat, même si les policiers insistent.

Adresses et numéros utiles

Rennes (Centre de Rétention)
CIMADE 06.30.27.82.55 – 02.99.65.66.28 – der.rennes@lacimade.org
Tél cabines : Bâtiment 1 et 2 : 02 99 35 64 60 – Bâtiment 3 et 4 : 02 99 35 28 97 Bâtiment 5 : 02 99 35 13 93 – Bâtiments 6 et 7 : 02 99 35 64 59
Nantes
GASPROM (24 rue Fouré) : Permanences lundi et vendredi de 17h à 19h.
CIMADE (33 rue Fouré) : Permanences lundi de 18h à 20h et le jeudi de 14h à 19h.
Téléphone 02 51 82 75 66 le lundi de 10h à 12h,
LDH : lundi de 14 à 19h salle commission 1 à la Manu
MRAP : lundi de 17h à 20h30, salle B de la manu

L’arrestation

Evitez de sortir avec votre passeport. Ne montrez pas votre carte A.M.E. pour justifier votre identité car cela constitue un indice que vous êtes sans papiers

Vous pouvez être arrêté-e :
– dans la rue (contrôle d’identité, rafle…)

– au travail (contrôles et arrestations des policiers accompagnés par l’inspection du travail)

– à la Préfecture. Il faut être très prudent lorsque l’on y va, et ne pas y aller seul-e. Lorsque l’on fait l’objet d’une OQTF de moins d’un an, mieux vaut ne pas se présenter.

– à domicile. N’ouvrez jamais la porte aux policiers et laissez plutôt votre passeport chez un-e ami-e.

– lors d’un contrôle routier, à la mairie le jour du mariage, dans une administration …

La retenue pour vérification du droit au séjour


Lorsqu’une personne est contrôlée, la vérification d’identité peut durer jusqu’à 4 heures sans qu’il y ait placement en retenue. Il peut donc arriver que vous soyez emmené-e au commissariat puis relâché-e dans un délai de 4 heures, même si vous n’avez pas de papiers.
En retenue, vous avez le droit de refuser de répondre aux questions des policiers et il vaut mieux ne pas signer le procès-verbal (vous en avez le droit). La retenue pour vérification du droit au séjour ne peut pas excéder 16 heures.

De plus vous pouvez exiger de :
– prévenir votre famille ou un proche (et éventuellement votre consulat)
– prévenir votre employeur
– voir un médecin
– être assisté-e par un avocat

La décision d’expulsion (OQTF) est en général délivrée à la fin de la retenue.
Attention, si vous êtes libéré-e après la retenue, la décision d’expulsion reste valable. Seul le tribunal administratif peut l’annuler : contactez rapidement une association.

A la suite de la retenue, vous pouvez également être mis en garde à vue puis mis en examen si vous aviez déjà une OQTF avec mise en centre de rétention.


Les décisions d’expulsion


Les décisions que l’Administration (La Préfecture) peut prendre pour vous expulser :
– une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF)
– une Décision de Transfert « Dublin III ».
– un Arrêté d’Expulsion (souvent après une peine de prison)

Lorsque l’administration ou les policiers vous remettent des papiers, si vous ne lisez pas bien le français, essayez de vous faire aider par quelqu’un qui le lit et le comprend bien.

Il est important de savoir quel papier vous avez entre les mains car c’est à partir de ce moment, qu’on appelle la notification, que les délais pour faire les recours commencent. La date et l’heure de la notification sont écrites sur les papiers que l’on vous a remis. Attention le délai de recours se compte à la minute près et pour certaines décisions, le délai est très court (48 h).

La décision d’expulsion peut vous être remise :
– à la fin du contrôle d’identité ou de la retenue. Attention même si vous êtes libéré-e à la suite de la retenue, il est fort possible que les policiers vous donnent une décision d’expulsion.
– par courrier. C’est notamment le cas lorsque vous avez déposé un dossier de régularisation ou de renouvellement de titre de séjour et que vous avez un refus (vous recevrez alors une OQTF). Dans ce cas, le délai (15 ou 30 jours) court – à partir du retrait de la lettre recommandée envoyée avec accusé de réception. Par contre, si la lettre n’est pas retirée, la notification est réputée avoir été faite le jour du passage du facteur. Dans tous les cas, il est important d’aller chercher son recommandé.
– lors d’une convocation à la Préfecture.

1 – Les obligations de quitter le territoire français (OQTF)


L’OQTF peut être donnée avec ou sans délai de départ volontaire (DDV). L’OQTF peut être accompagnée d’une interdiction de retour sur le territoire français (IRTF). Vous devez faire un recours avec un avocat contre toutes ces décisions (avec l’aide possible d’une association).
L’OQTF est valable 1 an. Si vous vous faites arrêter au-delà, l’administration devra reprendre une nouvelle décision d’expulsion que vous pourrez de nouveau contester.


A- OQTF avec délai de départ volontaire (DDV)

Dans la théorie, l’OQTF donne un délai de 30 jours de départ volontaire, temps pendant lequel vous ne pouvez pas être expulsé-e. Vous êtes libre et censé-e quitter le territoire par vous-même. En revanche, si vous êtes arrêté-e au-delà du délai de départ volontaire, vous pouvez être placé-e en rétention et expulsé-e.
Le délai pour faire recours contre l’OQTF avec DDV est, soit de 15 jours (en particulier si vous êtes débouté-e de l’asile ou suite à une interpellation) ou soit de 30 jours.


B- OQTF « sans délai »

Les cas prévus par la loi pour que l’administration refuse le délai de départ volontaire sont très nombreux (exemple : le fait de ne pas avoir de pièce d’identité en cours de validité). Pour refuser ce délai, l’administration doit le motiver par écrit. L’OQTF sans délai permet un placement en rétention immédiat.
Le délai pour faire recours contre l’OQTF sans délai est de 48 h. Attention, le délai se compte à la minute près.


2 – La décision de transfert dans un autre pays de l’UE (règlement Dublin III)

Si vous demandez l’asile en France, la préfecture prend vos empreintes. Il existe un fichier européen appelé Eurodac qui centralise les empreintes des demandeurs d’asile et des personnes ayant franchi illégalement les frontières de l’Europe : c’est ainsi que la préfecture peut retrouver la trace de votre passage dans un autre pays européen. Dans ce cas elle va refuser votre demande d’asile et saisir ce pays pour qu’il « prenne en charge » votre demande, et donc pouvoir vous expulser vers ce pays.


En attendant que le pays saisi par la préfecture réponde (15 jours à 2 mois maximum), une attestation de demandeur d’asile (procédure Dublin) vous est remise et vous autorise au séjour comme tout autre demandeur d’asile.
Si le pays accepte, on vous notifie une décision vous refusant l’examen de votre demande d’asile par la France ainsi qu’une décision de transfert. Dès la notification de cette décision, vous risquez d’être assigné à résidence (obligation de pointer régulièrement au commissariat) ou mis en rétention.
Attention ! L’arrestation peut se faire à la préfecture au moment du rendez-vous où on vous remet ces papiers, ou au commissariat au moment du pointage.
Le délai de recours contre la décision de transfert est de 15 jours (48 heures si assignation à résidence ou placement en rétention). Vous devez dans tous les cas contacter d’urgence un avocat ou une association pour faire obstacle à l’expulsion.


Si vous avez réussi à rester en France 6 mois malgré la réponse positive de l’Etat saisi, la France redevient responsable de la demande d’asile. Mais le délai peut être porté à 18 mois en cas de « fuite » (par exemple, en cas de refus d’embarquement, ou de non réponse aux convocations de la Préfecture, ou ne non-respect de l’assignation à résidence)
La Préfecture peut également vous remettre un billet de train ou d’avion pour rejoindre le pays de destination par vos propres moyens. Vous pouvez « rater » le départ, mais dans ce cas, faites un courrier à la Préfecture et continuez à pointer au commissariat3 – Les arrêtés d’expulsion

Un arrêté d’expulsion peut être pris par le préfet contre un étranger, une étrangère, avec ou sans papiers dont la présence « menace gravement l’ordre public ». Il suit souvent une condamnation au pénal : c’est « la double peine ».

A la sortie de prison, il y a un grand risque que vous soyez directement transféré-e dans un centre de rétention. Contactez immédiatement votre avocat et vos proches, pour organiser votre défense.

Au centre de rétention

Faire un recours dans les 48h auprès du tribunal administratif contre la décision d’expulsion et les autres décisions qui l’accompagnent

Faire systématiquement appel de la décision du maintien en rétention du JLDNe pas rester isolé-e, essayer de s’organiser collectivement avec les autres retenu-e-s

Garder un lien avec votre entourage pour qu’il puisse s’organiser à l’extérieur
Se renseigner, auprès des retenu-e-s, au sujet des consuls afin de se préparer aux entretiens

Votre placement en rétention commence par une période de 2 jours au maximum avant de passer devant le Juge des

Libertés et de la Détention (JLD). C’est dès l’arrivée au centre qu’il faut s’occuper des recours au Tribunal Administratif à l’aide de l’association présente (la CIMADE à Rennes). Vous pouvez également demander à contacter directement un avocat pour contester l’OQTF et la mise en rétention.

Vous ne pouvez pas être expulsé-e dans les 48 h qui suivent la notification de la décision d’expulsion, c’est-à-dire pendant le délai de recours.

Attention : si la préfecture est en possession de votre passeport en cours de validité ou d’un laissez-passer, elle peut tenter de vous expulser durant les 2 premiers jours.


Il est possible de faire une demande d’asile : en l’attente de la réponse de l’OFPRA, l’État ne peut pas vous expulser. Cela peut permettre de ne pas être expulsé-e jusqu’au passage devant le JLD.

Quels sont vos droits ? Au centre de rétention, vous pouvez :

– téléphoner à qui vous voulez depuis les cabines du centre.

– voir en visite qui vous voulez.

– voir un médecin en permanence (pas toujours disponible)

– demander des informations sur votre dossier à l’association présente dans le centre.

– voir votre avocat à toute heure, mais dans les faits peu d’avocats se déplacent.

– demander l’asile : vous avez la possibilité de demander le statut de réfugié dans les 5 premiers jours (cela peut être un moyen d’échapper à une expulsion). Le centre est obligé de vous donner le formulaire. En attente de la réponse, l’État ne peut pas vous expulser. Sachez que si le passeport est exigé, il n’est pas du tout obligatoire de le donner.

Si vous n’êtes pas expulsé-e, vous sortirez au bout de 45 jours, parfois plus tôt. Vous ne serez pas régularisé-e pour autant et si le recours n’a pas marché, votre décision d’expulsion est toujours valable. A votre sortie du centre de rétention, les policiers vous donnent un papier qui vous protège pendant 7 jours contre une nouvelle arrestation pour « défaut de papiers » et un enfermement en rétention. Il est bien de l’avoir sur soi durant cette période.

Attention, si vous êtes condamné-e pendant votre rétention à une Interdiction du Territoire Français (ITF) (par exemple : pour refus de voir le consul, faits de violence, refus d’une expulsion…), l’administration peut vous maintenir encore 45 jours en rétention.