Matin

Beaucoup de monde, dans la queue du tribunal. Les gendarmes ont mis en place un dispositif sécuritaire édifiant. Outre la queue désespérément longue, et n’avançant quasiment pas, après les portiques, celles et ceux qui désirent aller vers les salles du tribunal doivent passer un deuxième contrôle, où les sacs seront fouillés avec minutie. Devant la salle des barrières forment une fan-zone dans lequel les personnes solidaires sont parquées, et on a même le droit à des gendarmes-pipi qui viennent voir après chaque passage si un message délicat ne leur a pas été adressé. Quelqu’un se fera sortir du tribunal, pour avoir collé des autocollants. Une troisième fouille aura lieu pour celleux entrant dans la salle, avec confiscation des bouteilles et de briquets.
Dans la salle, après l’énoncé du verdict des cris fusent : « crève la justice, bordel ! » et c’est dans le brouhaha que les gendarmes sortent tout le monde sur le quai des Orfèvres. Des slogans fusent, une banderole est sortie, et quelques-un-e-s tentent poussivement de bloquer la circulation, sans être assez suivi-e-s pour avoir un réel impact.
Chacun-e se disperse, se donnant rendez-vous à 19h30 à Ménilmontant pour exprimer notre rage.

On apprendra que l’agence de production « 1+1 », qui réalise des campagnes de pub pour de nombreuses saloperies capitalistes et institutionnelles, dont le ministère de la justice, a reçu vers midi la visite d’une quinzaine de personnes, et a vu sa devanture taguée.*

Soir

Dès 19h30, des centaines de personnes se retrouvent sur la place Ménilmontant, on est bientôt 400. Quelques journalistes sont présents, mais il y a une volonté claire de refuser au maximum la prise d’image.

A 20 heures, une banderole « Liberté pour celleux du quai de Valmy, vive la révolte » est déployée, et une prise de parole énergique et énervée appelle à partir en manif. Le quartier est quadrillé par les CRS, mais on part en cortège. Au niveau de la rue Oberkampf, une petite partie de la manif sera bloquée par les flics et retournera à Ménilmontant. Avec un peu de détermination et beaucoup de chance, on a ensuite réussi à dépasser l’avenue de la République, laissant les flics loin derrière. On avance rapidement, Il y a de l’euphorie collective dans l’air, et des slogans sont gueulés tout au long de la manif. Des tags fleurissent, certain-e-s s’arment de pierres ou de bouteilles, d’autres déplacent les poubelles, de petits feux en surgissent, vite éteints par des citoyens vigilants. Les vitrines se fendent, plus on se rapproche du Marais, école de commerce, picard, banques, mais aussi magasins de fringues et de bijoux. Les flics rattrapent la queue du cortège, (bien dégarni après 40 min de manif au pas de course) au niveau de la rue des archives, mais sont encore une fois un peu lents, et aux cris de « dispersion » un dernier sprint permettra aux plus endurant-e-s de s’éparpiller autour de Beaubourg, sans que personne ne soit arrêté.

C’est peu de choses en comparaison des années de prison que la justice distribue chaque jour, mais ça réchauffe le cœur, ça défoule de la frustration de voir des gens décider de la liberté d’autres et ça permet de crier haut et fort notre aversion de la police, de la justice et du monde qui en a besoin !

* http://www.1plus1production.com 6 Rue Taylor, dans le 10ème. On apprendra que quelque semaines plus tôt leur serrure avait été soudée…