Rendez-vous à Cenves (69) le 28 et 29 octobre pour parler de la gestion par les normes en agriculture.

Sam. 28 Oct – Salle des fêtes – Cenves (69) Entrée libre / Buvette

Pour les agriculteurs et personnes mobilisées sur le sujet, il est possible (et recommandé) de demander des précisions à : hors.norme [att] riseup.net

  • 14H : Présentation des livres Le ménage des champs et Le paysan impossible

  • 16H – Témoignage de Stéphane Dinard, éleveur hors-norme

  • 17H – Conférence gesticulée sur les normes – Sainte ISO, protégez nous !

L’initiative repose principalement sur le texte diffusé par le collectif en août 2017.

L’initiative sera également l’occasion de soutenir Stéphane D.

 

Petite présentation :

Stéphane Dinard est éleveur de vaches, de cochons et de volailles en Dordogne. Il élève et tue ses animaux dans sa ferme. Il le fait sans se cacher, ouvertement. Parce qu’il se sait le mieux placé, lui qui élève ses animaux avec soin, pour les tuer avec la même attention, dans les meilleures conditions pour eux et sur leur lieu de vie. Il choisit de ne pas déplacer ses animaux avant de les tuer. Ceux-ci ne finissent pas dans les abattoirs collectifs ou municipaux, malheureusement souvent sous-équipés et sans moyens, et évidemment pas non plus dans les abattoirs industriels, ces usines où l’organisation à la chaîne du travail métamorphose les bêtes sur pied en minerai alimentaire et où les travailleurs se tuent à la tâche jusqu’à en oublier la mort. Aujourd’hui, Stéphane accompagne ses animaux jusqu’au bout. Il assume la relation qu’il entretient avec eux depuis leur naissance. Et leur mort ne disparaît pas derrière des cadences infernales ; mais retrouve sa place dans la vie de la ferme. Il choisit le respect des animaux et de ses conditions de travail plutôt que celui des normes. Stéphane Dinard échappe aux marchés de la transformation et de la distribution de l’alimentation de masse qui n’existent que par l’accaparement des cheptels. Il échappe à la traçabilité censée rassurer le consommateur par la magie des étiquettes. Il esquive des règles administratives. Lesquelles sont douloureuses voire impossible à suivre pour tout agriculteur attentif à ses activités et à ses animaux. Elles sont faites pour industrialiser les fermes ou les faire disparaître. Son échappée belle nous séduit et le goût de sa viande nous renforce. L’État n’est pas dupe de l’exemple qu’il impose. Il en a fait une affaire d’État en l’invitant à une commission parlementaire[1], du côté de la carotte, et en lui imposant une longue procédure judiciaire, du côté du bâton. Il était convoqué devant le procureur au tribunal de Périgueux à la fin août, on l’accuse d’abattre ses animaux sur leur lieu de vie et en dehors d’un abattoir agréé et de transformer la viande dans un atelier qui n’a pas reçu d’agrément. Pour l’instant il a obtenu un report et attend une nouvelle échéance. La loi requiert pour ce genre d’échappée une amende de 15 000 euros et six mois de prison ferme. Stéphane n’est pas un Robinson qui cultiverait un idéal autarcique. Son activité consiste à consacrer son temps, sa vie, au soin et à l’élevage d’animaux et à les tuer au moment propice pour nourrir ses semblables et à essayer d’en vivre. Sa terre n’est pas un territoire qui s’aménage à la guise des intérêts économiques. Il ne cherche pas à gagner plus d’argent que ce dont il a besoin pour que ça dure. Nous, collectif d’agriculteurs contre les normes, savons bien que l’atomisation générale empêche la plupart des éleveurs de vivre de cette manière. Mais nous savons aussi que la plupart le voudraient, et le font quand ils le peuvent, s’engouffrant dans les rares brèches que laisse ouvertes l’encadrement administratif du régime économique. Nous savons surtout que quiconque le fait risque de se livrer à l’autorité étatique et à l’exclusion sociale. C’est précisément cet isolement que nous voulons briser. Nous refusons de nous enfermer dans la clandestinité. Nous regrouper ouvertement est la seule manière de ne pas être condamnés à l’isolement que vivent tant d’agriculteurs. Nous avons entendu l’appel que Jérôme Laronze[2] avait si clairement exprimé, mais seul, dans le Journal de Saône-et-Loire : « l’hyper administration n’apporte rien aux agriculteurs, sinon de l’humiliation et des brimades. Cela ne rapporte qu’aux marchands et aux intermédiaires. Mon cas est anecdotique, mais il illustre l’ultra-réglementation qui conduit à une destruction des paysans. » Les normes, sanitaires ou environnementales, sont le miroir aux alouettes d’une prétendue qualité des denrées alimentaires qui permet de passer sous silence l’industrialisation forcée à laquelle elles participent activement.

À notre tour, nous émettons un appel pour rompre l’isolement.

Rendez-vous à Cenves (69) le 28 et 29 octobre pour parler de la gestion par les normes en agriculture et soutenir Stéphane.

Le collectif d’agriculteurs contre les normes, octobre 2017

 

[1] Cette commission s’est tenue en 2016. Elle était dédiée à faire évoluer les pratiques d’abattage industriel, en réaction aux vidéos de l’association L214. Ne changeant rien, bien entendu, à la logique industrielle de la production de viande, cette commission a surtout contribué à renforcer le contrôle des salariés des abattoirs et à rendre toujours plus inhumaines leurs conditions de travail. Pour la première fois, la justice a condamné pénalement un salarié d’abattoir pour son travail. Il a servi de fusible pour protéger la direction, exempter les services vétérinaires et valider le sous-équipement de l’abattoir. Les groupes industriels de la viande et L214, révélant ainsi son vrai visage, ont salué cette condamnation. Celle-ci permet aux industriels d’accentuer la pression et la souffrance subies – dans les normes – par les salariés, comme celles imposées – dans les normes – aux animaux. Et cela dans un système industriel qui n’a rien à voir avec l’élevage.

[2] Jérôme Laronze, éleveur en Saône-et-Loire, a été abattu par des gendarmes le 20 mai 2017 après avoir refusé de se plier aux innombrables contrôles sanitaires qu’il subissait.