Ce sont finalement autour de 500 personnes, jeunes pour la quasi-totalité, qui se sont retrouvées pour défiler dans le centre ville, sous forte pression policière. En tête du défilé, une banderole détournait le slogan phare de la précédente campagne présidentielle : « le soulèvement c’est maintenant ». Plutôt que de s’enliser dans des affrontements devenus rituels, le cortège a serpenté sur les grandes artères pendant près de deux heures, subissant régulièrement des provocations policières, notamment rue Decré où une horde de la Compagnie d’Intervention surgissait pour couper la route des manifestants, ou lorsque la BAC menaçait le cortège en braquant ses armes, malgré le calme du défilé.
Cours des 50 Otages, un barrage de CRS inondait littéralement la rue par des salves de lacrymogènes, faisant refluer les manifestants vers la Place du Bouffay, où quelques échanges au mégaphones ont lieu. A chaque fois, malgré la répression, les manifestants sont parvenus à reconstituer le cortège.

Notons tout de même deux moments de tension cet après midi. Le premier lorsqu’un militant d’extrême droite, Nicolas Faure, proche du GUD et du média nationaliste Breizh Info, qui s’était illustré en septembre 2015 par l’attaque d’un rassemblement en soutien aux migrants, est repéré en train de photographier les manifestants. Il est sévèrement bousculé avant que la BAC ne charge pour le secourir. Un deuxième coup de chaud a lieu Cours des 50 Otages, alors que l’interpellation d’une personne provoque une charge des manifestants. Bilan de cette manifestation : les rues de Nantes ont été occupées une partie de l’après-midi, malgré un rapport de force défavorable. Il s’agira de reprendre et d’amplifier le mouvement dans les jours à venir, notamment le 1er mai.

Quelques remarques :

-Il est invraisemblable dans le contexte actuel, avec un duel entre la droite et l’extrême droite au second tour d’une élection présidentielle, que les rues soient aussi vides. En 2002, des centaines de milliers de personnes manifestaient contre Le Pen. En 2007, après l’élection de Sarkozy, des manifestations massives et offensives étaient organisées. En 2017, seules quelques centaines de personnes défilent à Nantes, à peine plus à Paris ou à Rennes. En 10 ans, avons nous changé d’époque pour que le fascisme s’installe dans un tel calme ?

– Où est la gauche ? Celle des syndicats, partis, associations, celle qui manifestait en masse lors des précédents scrutins, celle qui organisait des 1er mai massifs contre le FN et faisait bloc. Elle s’est visiblement évaporée. Les rares initiatives émanent de groupes de lycéens ou d’assemblées autonomes, qui défilent sans soutien et subissent une importante répression.

– Nous voici arrivés à l’ère de la révolte par procuration. La Société du Spectacle est en train d’atteindre son stade ultime. Si les rues sont (presque) vides, il n’en demeure pas moins que des millions de personnes sont insatisfaites de la situation politique, et refusent le duel entre la haine et la finance. A l’ère du numérique et des réseaux sociaux, la plupart des gens pensent défier l’extrême droite et le patronat par le « like » ou le partage d’articles sur internet. Disons le clairement : cela ne suffira pas.

Devant nous, il n’y a que deux alternatives : la révolte ou la barbarie.