Non content d’avoir servi de base arrière à ce que la presse internationale qualifie de « menace terroriste », et tout particulièrement aux commandos qui ont semé la mort à Paris le vendredi 13 novembre 2015, où 130 citoyens, « repus » et « satisfaits » de leur petite vie ordinaire d’esclaves soumis et dociles au service du capital, ont participé bien involontairement à une grande « sauterie » djihadiste…

Non content d’avoir militariser l’ensemble de la société à la suite de cet acte de guerre contre l’Etat national français, dont les armées d’assassins et de mercenaires participent à semer la mort et la désolation aux quatre coins de la planète (Syrie, Iraq, Afghanistan, Libye, Mali, Centrafrique, etc.) au nom de la liberté, de la démocratie, de la justice, des droits de l’homme (bourgeois) et du citoyen, mais en fait plus précisément et véridiquement dans l’intérêt immédiat et historique du profit capitaliste et de la dictature de la valeur…

Non content d’avoir imposé aux prolétaires, comme à tous les « idiots utiles » de France et de Navarre et d’ailleurs (en d’autres termes aux « reproducteurs de la paix sociale »), le rassemblement citoyen derrière la défense de « nos valeurs » ou du « vivre ensemble » (dont la signification exacte et véritable est la cohabitation « harmonieuse » entre d’un côté les propriétaires des moyens de production, et de l’autre les dépossédés et les damnés de la terre)…

Non content d’embrigader les exploités dans la défense de la démocratie dans toute sa « splendeur » et sa « plénitude » et son horreur meurtrière, démocratie qui n’est jamais rien d’autre que la négation idéologique et pratique, en acte, de l’antagonisme de classe et donc l’affirmation toujours plus terroriste de la dictature capitaliste…

Non content d’avoir mobilisé des foules d’esclaves salariés derrière le petit drapeau (torchon) national, en appelant ainsi à l’unité et à l’union sacrée en soutien à la nation et à « la patrie en danger » face au « danger islamiste », « danger » ainsi étiqueté aujourd’hui, alors que demain, le même scénario justifiera la lutte à outrance contre le « danger communiste » ou contre « l’anarchie », contre l’insurrection armée prolétarienne, contre la subversion totale qui bouleversera jusqu’à ses fondements l’entièreté de cette société d’exploitation et d’aliénation, de guerres et de morts, de sacrifices et de misère…

Non content d’avoir participé au développement de la dite « campagne antiterroriste » qui est censée obtenir le soutien inconditionnel et galvanisé « du peuple », c’est-à-dire des citoyens atomisés, apeurés, effrayés, tétanisés, terrorisés, moins par les attentats en soi que par la propagande « sécuritaire » qui se manifeste et se matérialise par la présence de patrouilles de centaines de flics et de militaires surarmés dans les rues et les quartiers, par le survol en permanence de la ville par des hélicoptères, par le défilé incessant de véhicules de police sirènes hurlantes, créant ainsi un climat social et sociétal toujours plus anxiogène…

Non content tout cela et bien d’autres choses encore, l’Etat national belge, son gouvernement, sa bourgeoisie, ses appareils centraux de répression, de propagande, de contrôle social, etc. n’ont certainement pas accueilli sans un soupçon de satisfaction, ou à tout le moins sans un certain soulagement, les attentats meurtriers qui ont frappé Bruxelles le 22 mars 2016, comme d’une certaine façon une réplique « nécessaire » et « inévitable » aux attentats de Paris. Il faut dire qu’en termes de politiques internationales meurtrières et assassines, la Belgique et son armée n’est historiquement pas plus en reste que la France ou d’autres puissances européennes…

Finalement, les attentats de Bruxelles ont sonné comme une justification de tout l’arsenal militaro-policier déployé depuis plusieurs mois en Belgique pour faire rentrer dans les rangs serrés de la paix sociale, non pas les djihadistes et leur « menace terroriste », qui à leur façon et à un certain niveau d’abstraction participent de la société du spectacle permanent et de l’ordre bourgeois, mais bien le « commun des mortels » de la population, c’est-à-dire les prolétaires toujours susceptibles à un moment donné de mettre en avant leurs propres intérêts de classe dans un climat d’attaques permanentes contre leurs conditions de travail et d’existence…

Les 32 morts et plus de 300 blessés de Bruxelles, pour la plupart des « vacanciers » au départ de l’aéroport national à destination de plages somptueuses censées les éloigner pour un temps des contradictions et des tumultes de la présente société, ainsi que des travailleurs qui circulaient en métro au niveau d’une station située à deux pas du quartier général des divers dispositifs politiques transnationaux tels que la Commission européenne et son parlement, bref toutes ces victimes font participer pour une fois la population locale à la quotidienneté de ce que vivent journellement nos frères et sœurs de classe sous d’autres latitudes, et cela habituellement dans l’indifférence généralisé des populations européennes « repues » et « satisfaites ». Et pendant quelques heures, nous nous sommes sentis plus proches, Paris et Bruxelles sont devenus Damas, Alep, Bagdad, Kaboul, Kunduz ou Aden, écrasés par la quotidienneté des bombes, de la terreur, de l’angoisse, des larmes, du sang, des morts, ad nauseam…

Aujourd’hui en effet, ce ne sont plus simplement les « gens d’armes » de l’Etat, ses mercenaires ou ses dirigeants qui sont visés ou susceptibles de l’être mais bien et aussi ses « gens ordinaires », ses « citoyens lambda » (comme disent les medias), qui se croient à l’abri des contradictions meurtrières qui ensanglantent ce monde sans pitié pour l’espèce humaine. Aujourd’hui, il n’est plus question de se « faire une terrasse » ou d’aller tranquillement au concert (comme les bourgeois étaient encore les seuls à le faire au début du siècle dernier) et s’imaginer un seul instant échapper aux horreurs qui se passent tous les jours aux quatre coins de cette planète : guerres, bombardements, famines, malnutrition, maladies, tortures, pollution, destruction de l’écosystème, etc. Comme disait l’autre : « On fait soit partie du problème soit de sa solution, entre les deux il n’y a rien ! » Ou pour être plus dialectiques, disons que si nous sommes à la fois le problème et la solution, le passage de l’un à l’autre s’effectue par la négation violente et active de l’état des choses actuel, et donc par l’émergence consciente et volontaire de l’état des choses futur…

A contrario de ce qui s’est passé à New York et Washington en 2001, à Londres en 2005, à Paris (deux fois !) en 2015 ou à Bruxelles en 2016, où les prolétaires soumis à outrance à l’idéologie « citoyenniste » ont marché au pas selon le tempo donné par leur propre bourgeoisie, la façon dont d’importants secteurs du prolétariat en Espagne ont réagi après les attentats de Madrid le 11 mars 2004 doit interpeller notre classe en plein désarroi programmatique. Rappelons-nous les faits : après que des bombes aient explosées dans des trains de banlieue au petit matin faisant 200 morts, tous des travailleurs se rendant au chagrin, des milliers de prolétaires sont descendus dans les rues en affichant leur mépris pour « les terroristes » mais aussi et surtout en dénonçant la politique de leur propre gouvernement et l’implication de leur propre armée dans la guerre en Irak. « Ce sont vos guerres, ce sont nos morts ! », telle fut la consigne principale de ce mouvement qui retourna sa haine « des terroristes » vers sa propre bourgeoisie… avec pour conséquence pour le gouvernement espagnol de devoir retirer ses troupes d’Irak afin de désamorcer la contestation au niveau local.

De tout cela, nous pouvons et devons conclure et mettre en avant que la seule façon dont les prolétaires peuvent s’en sortir vivants de toute « cette haine », de toute « cette folie », c’est surtout de ne pas collaborer avec sa propre bourgeoisie, son propre gouvernement, ses propres mesures répressives antiterroristes.

Ce ne sont pas les militaires surarmés patrouillant dans les rues qui nous protégeront en aucune manière « des terroristes ». Nous ne pouvons et ne devons compter que sur nous-mêmes et nos propres capacités à renverser ce monde et ses contradictions internes (ô combien meurtrières !), à le révolutionner de fond en comble…