J’ai fait cette vidéo, entre l’envie de gerber, une excitation débile et l’envie d’y retourner.
https://www.youtube.com/watch?v=GGE8kvK10ik

Avant de faire le montage, j’écris ça :
« Retour dans ma tanière.
envie d’écrire comme une envie de pisser.
Je sens encore la fumée des pétards, des lachrymo,
la transpi.

14h, 26 mai 2016, place du Bouffay. Des lycéens, mais aussi des plus vieux, des clowns, des porteurs de banderoles, des encore plus vieux, avec des marmots, une dame, une poussette et deux enfants. Un vieillard qui peine à suivre, des nanas à la garçonne, des gens ordinaires, du monde aux fenêtres.
Bref.
Le Cortège (que ce mot est élogieux) se ballade tranquille, je suis contente d’être dans le groupe, dans la masse, de sentir que l’on marche dans le même sens.
Au bout d’une heure. Bloqués. Demi-tour, je ne sais plus où on est, j’ai marché sans faire gaffe. Je croise la première ligne, les courageux. Je décide de ne plus les quitter.

Le simple fait d’être obligé de faire demi tour échauffe. J’en tremble encore  » vous nous enleverez pas le droit de manifester ! » On part dans l’autre sens, avec une idée en tête « ne pas se laisser faire ». Le conflit démarre là et c’est normal, moi la première j’ai pas envie d’abdiquer. Fumée bleues blanc rouge applaudissement de la foule. On s’avance vers le pont et là explose une dizaine de grenade juste sous notre gueule et sous les fenêtres de la maternité.

Le reste j’ai filmé et j’hallucine encore.
https://www.youtube.com/watch?v=GGE8kvK10ik

Retour dans ma tanière.
J’ai acheté une bonne bière de clocharde dégueu pour me rappeler à quel point je l’aime la rue.
A tous ceux, frères bombardés sous mes yeux, on lâchera pas l’affaire;

A vrai dire je m’en branle de la manif. Chômeuse et hyper impliquée dans le monde associatif (marginale pour certains certes), j’ai beaucoup mieux à faire que de descendre dans la rue un jeudi.
Mais l’injustice qui y règne en toute impunité me rend dingue. Eteindre à la source les rares personnes qui osent ouvrir leur gueule ça fait flipper. Car c’est là, dans la rue et dans les mouvements collectifs, que naissent la contestation et la réflexion nécessaires à une société qui a tendance à se mouvoir dans un seul sens.

De retour dans ma tanière.
Mon jardin se demande pourquoi je rentrais si vénèr. Je le regarde de travers. Je le maudit presque, lui, qui pousse tranquille et se renouvelle éternellement. Je sais bien que tout n’est question de temps, et que ces petites révolutions n’ont presque pas d’impact à l’échelle de l’éternité. Mais là ça cogne, et ça fait mal. On est en train de tordre le coup à ceux qui prennent la parole. D’assassiner le désaccord. Traumatiser la déviance. Ca fait mal, et je sais même plus très bien pourquoi.