A l’issue des gardes à vue, une personne a été relâchée. Les quatre autres ont été mises en examen pour « tentative d’homicide volontaire », « violences volontaires en bande organisée sur personne dépositaire de l’autorité publique », « destruction de bien public en bande organisée et participation à un attroupement armé ». Un des mis en examen est également visé par le délit de refus de se soumettre au prélèvement génétique. Les quatre personnes sont actuellement en détention préventive. Si les accusations grandiloquentes qui leurs sont faites aujourd’hui (« tentative de meurtre ») et la menace inconséquente qui va avec (« prison à vie ») ne tiendront pas une seconde lors d’un procès, elles servent cependant à assurer une détention préventive sous la bénédiction de quelques sadiques en toge.

 

Les médias de la démocratie, aux ordres, ont bien joué le jeu, leur zèle n’égale que leur servilité sans faille à la normalité et à la violence extrême, elle, de la paix sociale. Une entière satisfaction donnée aux syndicats de flics, qui manifestaient ce jour là, semble être l’objectif secondaire du ministère de l’intérieur et du gouvernement. Un peu de sensationnel pour le citoyen moyen, un peu de vengeance pour les flics, de la dissuasion pour les révoltés. C’est derrière cet ignoble triptyque que la raison d’État s’est mise en œuvre contre quelques camarades, probablement choisis au hasard sur un trombinoscope foireux de la pseudo « ultra-gauche », catégorie inventée par l’Etat, qui a déjà donné lieu à des dizaines de procès, d’incarcérations et de barbouzeries en tout genre au cours de la dernière décennie et aujourd’hui encore (puisque l’affaire dite « machine à expulser » reste toujours à être jugée et que plusieurs camarades et compagnons sont encore mis en examen dans ce dossier d’ampleur). Probablement le même trombinoscope qui sert depuis peu à délivrer des interdictions et assignations diverses ces dernières semaines, sous couvert d’état d’urgence démocratique.

Aujourd’hui il nous parait nécessaire de réaffirmer trois positions importantes :

  • En tant que révolutionnaires, nous serons toujours du coté de ceux qui défient, profanent et attaquent l’ordre, et donc aussi ses forces, dans une perspective d’émancipation. Car la révolution ne se fera pas dans des salons avec des power-point, du folklore militant et des philosophes ennuyeux, mais dans la rue, avec la haine, le feu et l’espoir.
  • Ces camarades auraient pu être n’importe lesquels des milliers de manifestants qui ont redécoré les rues aux couleurs de la joie, ces derniers mois. Ils auraient pu être nous, ou vous, toi ou moi. Cette répression est donc une attaque contre tous les révolutionnaires, et a minima, contre tous ceux et toutes celles « qui détestent la police » et qui détestent le travail.
  • Par conséquent, la question de la « culpabilité » ou de « l’innocence » des camarades inculpés n’appartient qu’au pouvoir, et nous laissons ces considérations et ce vocabulaire de code pénal, qui ne sont et ne seront jamais les nôtres, à ceux d’en face (qu’ils soient flics, juges, avocats ou journalistes). Ce geste, quels qu’en soient les auteurs, s’inscrit dans une longue tradition de pratiques révolutionnaires, il faut donc le défendre en tant que tel . Il ne s’agit pas de rendre cette attaque légitime, justifiée, ou de la minimiser, mais bien d’attaquer tout principe de légitimité, toute somation à la justification, et toute modération dans l’attaque anti-autoritaire des rapports de domination, et des agents qui protègent leur règne.

Nous affirmons donc notre solidarité avec les inculpés, et surtout, avec le geste qu’ils sont accusés d’avoir commis, qui rappelons-le, est un acte du quotidien, un acte nécessaire pour quiconque tient à sa liberté, et pas un « événement effroyable et ultra-violent », ni un événement « exceptionnel » – le seul élément exceptionnel serait peut-être l’omniprésence de caméras, et pas seulement de l’Etat, ni même des journaflics, contrairement, par exemple, aux quartiers dits « sensibles » où tout cela se produit tranquillement, sans effusions ni médiatisation, avec régularité. Répétons à nouveau que les images sont une problématique contre laquelle il faut s’organiser concrètement. Sinon les révoltés vont continuer de tomber comme des abricots en été.

Dans une ville comme Paris, qui a goûté en 2015 à une violence aveugle, à cinq minutes à pied du Quai de Valmy, véritablement effroyable et sidérante, véritablement violente, véritablement terroriste, il est indécent de pleurer sur le sort d’une bagnole de flics, dont la fonction consiste justement à se faire taper sur la gueule par tout ce qui refuse l’ordre du monde avec un peu de conséquence. Ne laissons pas les camarades seuls dans le tourbillon mediatico-répressif qui voudrait faire d’eux des individus assoiffés de sang et des cannibales en rut, ou l’objet de débats stériles contre ou « en faveur » de la « violence ».

Non, face à l’État et ses laquais, ils sont nos camarades, et nous sommes les leurs.

Ni vérité ni justice, complicité et révolution.
La meilleure défense c’est l’attaque.
Liberté pour tous et toutes.

Le 24 mai 2016 à Paris,
Quelques anarchistes.

(lu et recopié sur non-fides)