INSIPIDITéS : NOUS NE FERONS PAS LA GUERRE.
(Texte librement inspiré de l’article
« Communisation – Disquisition On Spice »
publié le 30 décembre 2011
sur http://insipidities.blogspot.fr).

Depuis quelques années, est survenue dans certains réseaux militants, une sorte de buzz baptisé communisation. Un flot de textes, exploreraient ce concept. Mais qu’est-ce donc ? Tentons de cerner ce concept, pour qu’au moins notre lecture de pas mal de ces textes parlant la communisation puissent servir à d’autres. Une sorte de leçon de rattrapage style « la communisation pour les nulLEs ».

1- QU’EST-CE QUE LA COMMUNISATION ?
« La communisation, pour simplifier, est LE concept de l’abolition du capital, des classes, et du prolétariat par lui-même DANS une révolution communiste, SANS TRANSITION « socialiste », ni autogestion. La communisation se conçoit donc à la fois COMME RUPTURE ET TRANSITION à partir de mesures DIRECTEMENT communisatrices, c’est-à-dire ouvrant la voie au communisme. »
(cf. http://fr.wikipedia.org/wiki/Communisation ).

D’emblée, étant « LE » concept, la communisation présente l’avantage de simplifier les choix: formidable, selon la communisation, il n’existe qu’UNE SEULE voie d’abolition de l’économie de marché, des hiérarchies et des personnes ne vivant pas de rente ou de spéculation: c’EST la communisation. Donc, une « seule solution, la communisation ».

Cette abolition devant se produire DANS une révolution communiste, ce concept possède la vertu d’inciter à la patience. D’ailleurs, nous le verrons plus loin, le 1er pilier de la communisation constate que « toute organisation de classe […] est aujourd’hui confrontée à son échec ». CertainEs mauvaises âmes s’en réjouiront, vu de la teneur passée (au minimum 80 millions de morts) et de l’état actuel des divers mouvements s’étant revendiqués ou se disant d’une révolution communiste. Mais c’est pas tout, la communisation apporte en plus un autre motif de réjouissance pour ceLLeux qui, révolutionnaires et / ou communistes à plein temps, ont pour essentielle occupation de disserter sur les origines du capital, sur les diverses révoltes qu’ilLEs observent à travers l’Internet, ou sur la téléologie quant à ce que sera le monde lors de la révolution communiste. Joie, ilLEs leur reste ainsi, avec la communisation, bien de beaux jours devant eLLeux. Quant à nous, assoifféEs de lire leurs fines analyses et éclairantes prospectives, nous voilà loin de mourir asséchéEs à défaut de déguster leurEs œuvres hydratantes.
Merci à toi, communisation !

Etant à la fois « rupture et transition », la communisation s’impose d’emblée comme un concept digne du couteau Suisse ou du Canada Dry ® (boisson non éthylique, pétillante et sucrée qui « ressemble … sent … et… a le goût de l’alcool »). Mais attention, la communisation n’en est pas moins antinomique au « changement dans la continuité », célèbre slogan de campagne en 1974 du candidat Valéry Giscard d’Estaing.

Pour résumer, imaginons donc la communisation comme à la fois un unique chemin, qui est en même temps à l’intérieur (dans), en disjonction (rupture) et vers (transition) le communisme. Ainsi définie, la communisation nous apparaît en quelque sorte, comme l’alpha et l’oméga de l’abolition de l’économie de marché, des hiérarchies et des personnes ne vivant pas de rente ou de spéculation. Pour faire encore plus simple, la communisation c’est à la fois la rampe d’accès, l’autoroute vers le but et la maison à la fin du voyage.

2- QUE FAIT LA COMMUNISATION ?
Continuons d’avancer.

Le concept de communisation ne peut pas juste être un concept abstrait, puisqu’il EST dans une révolution communiste. En effet, gardons en mémoire, que : « Le COMMUNISTE, quant a lui, NE SE DEMANDE PAS SI SON ACTION EST indispensable ou INUTILE. Il ne peut plus vivre dans la société actuelle, comprend qu’une solution individuelle ne serait qu’illusion. » (cf. http://vosstanie.blogspot.fr/ ). Des esprit chagrins trouveront ceci peut être un peu audacieux.

Comment ne JAMAIS se questionner sur l’utilité de ses actes ? Comment faire, chaque jour, s’il ne RESTE PLUS RIEN À FAIRE (à part vivre sur une île déserte ou se suicider ?), en bonNE communiste ? Face à pareille impasse, la communisation semble apporter LA réponse.

Nous libérant du poids excessif donné au sens des mots par le capitalisme (dont l’Académie et son dictionnaire ne sont que des sous filiales), la communisation permet de simplement accepter qu’il n’existe AUCUN LIEN entre le refus à priori de toute auto-analyse ou quête personnelle d’issues à ses soucis quotidiens et l’impossibilité de vivre en ce bas monde. Telle est la force de la communisation: la communisation rend possible le communisme. Mieux, la communisation EST le communisme.

3- COMMENT DEVENIR COMMUNISATEURE ?
Nous avons vu ce qu’est la communisation. Maintenant, demandons nous comment faire partie du courant communisateur ?

C’est tout simple, le « courant communisateur existe […] de CERTAINES pratiques dans les luttes actuelles […] partageant aujourd’hui (chacun à leur façon), tant théoriquement que pratiquement » CERTAINES constatations, convictions, certitudes et critiques. (cf. http://meeting.communisation.net/ ).

NDLR : à ce stade, il convient de noter que bien qu’il produise des textes, des assemblées, des pratiques, le courant communisateur ne peut ni ne doit être vu comme un source de production ou de valeur. Qu’on le comprenne bien, la communisation est HORS de toute production ou valeur.

Pour être de la communisation, il convient d’adhérer à:

– la CONSTATATION que toute organisation de classe permanente, préalable aux luttes ou persistant au-delà, est aujourd’hui confrontée à son échec.

– la CONVICTION que la seule perspective révolutionnaire actuelle est celle de la destruction du capitalisme et indissociablement de toutes les classes,

– la CERTITUDE que la lutte de classes entre le prolétariat et la classe capitaliste est partout dans le monde l’unique dynamique de cette destruction.
– la CRITIQUE de toute perspective révolutionnaire incluant une période de transition vers le communisme.

– la CONVICTION que la destruction du capitalisme n’ouvre pas la voie au communisme mais ne peut qu’être immédiatement la communisation de tous les rapports entre les individus. (cf. http://meeting.communisation.net/ ).

4_ LES CINQ PILIERS DU COURANT (Communisateur):
Revenons un par un sur ces sages préceptes.

Primo, la communisation constate que TOUTE ORGANISATION DE CLASSE EST aujourd’hui confrontée à son ÉCHEC. Oui, la communisation permet de constater que depuis des siècles, aucunes des classes dominantes (religieux, militaires, riches, académies, exploiteurs, mâles et hétérosexuels notamment), n’ont jamais réussi à se maintenir de façon organisée, ni à préserver voire faire fructifier leurs acquis et privilèges.

Secundo, la communisation convainc que la seule perspective révolutionnaire actuelle est celle de la destruction du capitalisme. En effet, il faudrait être aveugle ou d’une mauvaise foi criante pour ne pas se convaincre que la DISPARITION DE L’ÉCONOMIE mondiale de marché RÉSOUDRA, DE FACTO, TOUTES les hiérarchies et les injustices. Ainsi, les problèmes des personnes dites « femmes », ou « non-hétérosexuelles » ou encore ayant des croyances religieuses ou telle ou telle complexion, disparaîtront immédiatement, dès que l’argent aura été éradiqué par la communisation. Soucieux de respecter le plus strict MATÉRIALISME HISTORIQUE, le courant communisateur se réfère d’ailleurs souvent à cet égard aux enseignements du passé. Ceux-ci corroborent indéniablement qu’avant les premiers échanges économiques et spéculations financières, il n’y a jamais eu aucune hiérarchie ou injustice. Au quotidien, ceci permet au courant communisateur d’éclairantes simplifications textuelles de la perspective révolutionnaire telles que : « Puisqu’aucun de nous n’est politiquement correct (PC), « man » signifie ici homme + femme, et « mankind » signifie humanité. » (cf. infra ; Trop loin 2009). Autre exemple similaire dans une somptueuse introduction à un article sur les rapports genres, la communisation permet d’indiquer que le texte n’a pas été féminisé … que ceux qui estiment ça utile le fassent eux même [TC 2009].

Tertio, la communisation rend certain que la lutte entre les prolétaires et les capitalistes est partout dans le monde l’unique dynamique de destruction des hiérarchies et injustices. Ainsi, la communisation permet de ne pas se focaliser inutilement sur de fausses luttes. Grâce à la communisation donc, plus besoin de se soucier des pseudo dynamiques, c’est-à-dire dénuées de fondement économique ! La communisation révèle ainsi la vacuité des mouvements sociaux hors du courant communisateur. Aux orties donc, avec la communisation, les luttes pour la liberté de s’habiller selon son propre goût (par exemple contre l’interdiction faite aux nones catholiques de porter la voilette), pour le respect des croyances (par exemple contre l’interdiction imposée par la science de croire que Noé a sauvé les poissons de la noyade), pour la cessation des injustices et méfaits basées sur des pures apparences physiques (par exemple contre l’interdiction imposée aux héritiers arbitrairement considérés mâles par les canons aristocratiques, d’épouser une bergère), pour le droit à une sexualité fondée sur le plaisir et le consentement (par exemple contre l’interdiction imposée par l’ordre médiatique de baiser avec une personne non hétérosexuée ou corporellement valide), pour la contraception (par exemple en faveur de la vasectomie, lâchement prohibée chez les jeunes, par la famille atomique), etc. La communisation nous certifie donc qu’il suffit de se confronter aux patrons et de croire en sa proximité avec les prolétaires, pour vraiment lutter. Quel gain de temps, la communisation !

Quarto, sur la critique de toute perspective révolutionnaire incluant une période de transition. A ce stade, il conviendra de considérer que – à la fois – la communisation EXISTE bel et bien déjà, mais n’est pas juste temporellement présente dans la perspective révolutionnaire. En effet, il serait iconoclaste -voire blasphématoire- pour unE bonNE communisateurE, de supposer qu’en l’état, dès à présent, une option de perspective révolutionnaire, mais n’étant – force est de le constater – que dans la fleur de l’âge et non encore aboutie, les évènements passés et futurs du courant communisateur serait … une période transition. La communisation, dans son concept même d’abolition, se conçoit donc à la fois comme rupture et transition, MAIS à partir de mesures directement communisatrices et SANS période de transition.

Quinto, sur la conviction que la destruction du capitalisme qui n’ouvre pas la voie au communisme mais ne peut qu’être immédiatement la communisation de tous les rapports entre les individus. Bon, la faut récapituler. Comme le courant communisateur est dans / sur la voie / en rupture d’avec / mais en transition vers / une révolution communiste, et bien … heu …

5- EN GUISE de CONCLUSION:
« La communisation n’est pas un programme qu’il faudrait appliquer, ni même quelque chose que l’on pourrait d’ores et déjà définir comme un but à atteindre, mais les voies qui y conduisent sont à explorer et cette exploration se doit d’être internationale. La diversité et les oppositions internes, pour ne pas dire les conflits, au sein de ce courant communisateur sont définitoires de son existence et elles doivent être reconnues. »
(cf. http://meeting.communisation.net/ ).

Les diverses « communisations » à savoir les propositions héritières du communisme de gauche ou de Mai 1968, se réfèrent à un « travailleur collectif » (au sens de Ievgueni Zamyatin). Ou encore, le courant communisateur se réfère à des théories communistes selon lesquelles le prolétariat s’affirme lui-même seulement pour se nier juste ensuite : une pareille trans substantivation peut survenir dans n’importe quel hypermarché Walmart, Tesco ou Carrefour.

cette salutaire abstraction, permet au courant communisateur des réelles avancées. Par exemple, citons quelques brillantes prises de position par l’un des grands penseurs de la communisation. Ainsi, sur la libération animale ou les rapports sociaux de genres un texte de 2009 intitulé « Lettre sur la libération animale », apportent de salutaires éclairages à la cruauté et l’aliénation capitaliste.

« Les animaux qui tuent usuellement ont bien plus de relations sociales que ceux qui leur servent de proie ». Le bon communisateur n’est donc pas réfractaire à la souffrance d’autres créatures vivantes, car la consommation carnivore, y compris le kebab et les hamburgers, favorisent les mesures directement communisatrices et sans période de transition (entre la vie et la mort).

« Il est inutile de demander plus de poèmes d’amour et moins d’hamburgers ». Le bon communisateur ne s’encombre pas de créativité: s’ilLE fait du théâtre, c’est exclusivement pour favoriser des mesures directement communisatrices et ce sans période de transition.

« La connaissance de la nature, les inquiétudes écologiques et les réactions aux abus faits aux animaux ne sont pas le signe d’une humanité qui deviendrait consciente de son impact sur le reste de la planète [ … mais que … ] le capital possède le monde et qu’aucun propriétaire ne peut s’offrir de ne pas prendre soins de ses possessions ». Le bon communisateur s’est convaincu que l’humanité ne deviendra jamais consciente de quoi que ce soit, sauf si elle favorise les mesures directement communisatrices et ce sans période de transition.

« Ce n’est pas une coïncidence si un sens accru des conditions des animaux soit survenu en même temps que la nourriture industrielle et l’élevage dans le style des camps de concentration ». Le bon communisateur croit que rien ne sert de comprendre l’humanité ou les animaux (concepts scientistes), ni se renseigner sur la longue histoire commune de ces deux groupes de créatures. En favorisant les mesures directement communisatrices (comme humanité vs animaux) le bon communisateur évite le piège de la période de transition.

« Les managers tentent de rendre les lieux de travail plus sûrs et moins destructeurs (= plus productifs) d’un capital précieux: le travail. L’exploitation animale duplique ce procédé. Elle tend à moins expérimenter sur les animaux afin de recevoir plus d’eux , douloureusement s’il le faut, sans douleur si possible ». Le bon communisateur ne se corrompt pas sur les lieux d’exploitation, ilLE en a conscience. IlLE préfère favoriser les mesures directement communisatrices et éviter toute période de transition.

Nous espérons que ce texte vous a été agréable et utile pour vous faire une idée sur la communisation.

Ievgueni Zamyatin.
Mai 2013.

La communisation apporte plus d’un motif de réjouissance. Pour ceLLeux qui, révolutionnaires et / ou communistes à plein temps, ont pour essentielle occupation de disserter sur les origines du capital, sur les diverses révoltes qu’ilLEs observent à travers l’Internet, ou sur la téléologie de ce que sera le monde lors de la révolution communiste, la communisation est fantastique. Joie, ilLEs leur reste ainsi, avec la communisation, bien de beaux jours devant eLLeux. Quant à nous, assoifféEs de lire leurs fines analyses et éclairantes prospectives, nous voilà loin de mourir asséchéEs à défaut de déguster leurEs œuvres hydratantes.

 

Merci à toi, COMMUNISATION !

 

 

« Les mauvaises habitudes sont toujours celles des autres.
Cette vérité les esprits intolérants ne la comprendront jamais.
C’est la prohibition qui donne toute sa saveur au fruit défendu.
Rien n’attire tant la réforme que les habitudes des autres.
Le fanatiques ne comprendront jamais ceci, même si c’était écrit en lettres d’or dans le ciel.
C’est la prohibition qui rend toute chose précieuse ».

Mark Twain – Prohibition.