Les dernières élections municipales ont porté sur le devant de la scène l’épuisement des partis bourgeois de gouvernement. Dans nos quartiers populaires, plus de 50% de la population déserte la farce électorale. A peine deux ans après l’élection présidentielle, le PS est laminé et comme à bout de souffle. Dans plusieurs villes, le FN récolte les fruits du terrain bien labouré par le PS et l’UMP, en développant ses capacités d’organisation.

Du côté de la « gauche radicale », on s’agite aussi. Dans cette aile gauche de la politique bourgeoise, on voit revendiquer de plus en plus ouvertement un programme nationaliste, axé contre la concurrence étrangère, l’Union européenne et l’euro. Témoin de ce retour en force, dans l’orbite du Front de Gauche, le journal Fakir : l’ami des douaniers, qui proclame « la solidarité internationale, ça n’existe pas »… En décembre, il titrait même : « Quand Marine Le Pen cause comme nous »… Car voici le projet assumé par les portes-drapeaux de la France : faire sauter les « tabous » qui retiennent la gauche… de parler comme le FN.

Non, LE FN NE CAUSE PAS comme nous !

Rien de nouveau sous le soleil ? Cette version hard du nationalisme revendique le programme du « produire français » et de la défense de l’économie nationale, porté des années durant par le P »c »F. Elle s’appuie sur cette idée, savamment entretenue par les politiciens bourgeois, que l’origine de la crise trouve son origine dans la politique. Comme si les patrons et les gouvernements, devenus suicidaires, avaient organisé le chômage, la concurrence de plus en plus aiguë entre groupes et pays impérialistes, la destruction d’emplois prolétaires. Résultat d’une décision, la crise pourrait être jugulée par d’autres décisions, une fois l’État repris en main par l’équipe du Front de gauche… et de ses conseillers.
Les partisans de ce capitalisme du juste milieu ne promettent pas de bouleversements. Leur projet exprime par excellence les intérêts de la petite-bourgeoisie, à la recherche d’une gestion intermédiaire : le capitalisme régulé, sans crise, qui redistribue davantage des miettes de l’exploitation aux exploités – le renforcement de l’Etat bourgeois contre les dérives de « l’argent-roi » et la « dictature des marchés » – la défense de la nation pour nous protéger.
Comme Le Pen, ils grondent contre les gouvernements au service de la finance et de la mondialisation. Comme Le Pen, ils en appellent au secours de l’Etat et voudraient bien occuper la place. Il était donc inévitable qu’au bout de cette voie, l’évidence s’impose, et qu’ils disent : « Il faut plus de nationalisme et plus d’État, et tant pis si l’on parle comme dans le camp d’en face » !

Étatistes de toutes les couleurs : vous avez tout faux.

Soyons clairs. La crise n’est pas le fait d’une décision, ou d’une mauvaise gestion, mais le produit nécessaire des contradictions à travers lesquelles le capitalisme se développe. Voilà 40 ans qu’aucun moyen ne marche pour relancer sérieusement sa croissance. Symptôme que le mal est plus profond et frappe le cœur de son système, la production de profit à des taux qui garantissent l’extension du capital.

Les défenseurs de « l’économie réelle » distinguent le bon et le mauvais capital : l’industrie et l’emploi français, contre la finance débridée, la spéculation. Ils « ignorent » qu’une telle distinction n’a plus aucun sens dans les groupes capitalistes dont la survie est étroitement reliée à la circulation accélérée des capitaux. Prenons l’exemple des dernières manœuvres à PSA. 3 milliards € sont rentrés dans le capital, principalement par le groupe chinois Dongfeng. Sa filiale financière PSA Finance est adossée à la banque espagnole Santander. La banque de PSA est bien sûr indispensable pour soutenir les ventes de voitures, par l’intermédiaire du crédit. Pour PSA, comme pour ses concurrents, la production elle-même est un acte de spéculation sur l’avenir : il faut que les voitures produites trouvent preneurs, en quantité, dans les conditions qui rentabilisent les investissements. Les alliances entre groupes se multiplient donc : alliance de PSA avec avec General Motors, qui détient lui-même Opel, maintenant avec les capitalistes chinois…
Ces monopoles s’entendent et se concurrencent au niveau mondial. Les capitaux, eux, se déplacent et la production s’organise au-delà des frontières nationales. A ce jeu, nous n’avons aucun intérêt à défendre le capital français contre le capital étranger, en espérant récolter les miettes du festin. Des mesures de protection commerciale garantiraient sans doute l’emploi dans certaines entreprises. Mais à l’inverse, la guerre commerciale ainsi ouverte en ferait fuir d’autres. Elle réduirait également les ventes à l’étranger, décuplant le chômage, et augmenterait le prix des biens importés.

La solution n’est pas + d’Etat, mais + d’organisation de notre classe !

Le protectionnisme excite la défense de la nation et de l’Etat bourgeois. Ces mesures, de même que la sortie de l’euro, laisseraient intacte la racine de la crise capitaliste : les conditions dans lesquelles notre travail vivant, le travail prolétaire, est approprié et transformé en profit par la classe bourgeoise. A l’heure actuelle, ces conditions se sont tellement dégradées que les réformes promises par l’État, pour « redresser l’économie », ne comportent plus aucune amélioration pour nous. Le projet du « plus d’État, plus de Nation » nous détourne de l’essentiel. Car nous sommes au cœur de l’exploitation, nous la connaissons pour la subir tous les jours avec son cortège de galères, et nous en avons gros sur le cœur ! Pour défendre nos conditions de vie, d’emploi, inutile de céder notre grande force collective : notre nombre, porté par notre organisation, et la volonté d’en finir avec la capitalisme pourrissant.

Nul doute que le Front de Gauche va claironner de plus belle, après la nomination de Valls, avec « l’espoir » d’un gouvernement « vraiment de gauche ». Pour nous orienter dans nos résistances quotidiennes et passer à la contre-attaque, notre rage et notre courage seuls ne suffisent pas. Il faut encore connaître notre ennemi et nous démarquer de ses serviteurs. « La vraie parole de la lutte » n’est ni dans l’Etat, quartier-général de nos ennemis, ni dans la nation, qui nous isole de la classe ouvrière mondiale. C’est la lutte pour le pouvoir ouvrier, en marche vers la société communiste.

Car le communisme n’est pas seulement notre idéal de libération. C’est D’ABORD « le mouvement réel qui abolit l’état actuel », et pousse vers la porte de sortie les capitalistes et les divisions nationales.

 

Militant VP